Hello !

Navrée, cette fic est en hiatus depuis bientôt... 2 ans et demi ? 3 ans ? Un sacré bout de temps. Néanmoins, j'ai récemment réécrit les derniers chapitres, et j'ai décidé d'apporter une conclusion à cette histoire.

Comme elle, quelques unes de mes fics étaient laissées à l'arrêt, mais j'ai pour projet de tout terminer et j'ai pris de l'avance sur pas mal d'entre elles :). Je publierai quand l'avance sera assez confortable à mon goût :3.

Pour faire un résumé des chapitres précédents ; Lavi est mort, et il a été ramené par Komui, le Capitaine du navire, qui a fait un pacte avec Adam. En apparence gratuit, ce pacte a créé un Akuma. Dorénavant, l'âme de Lavi veut tuer, et il a déjà fait une victime, ce cher Chaoji. Allen, un empathe, le suspecte depuis le début. Lenalee l'a surpris lorsqu'il a assassiné Chaoji, et elle hésite encore sur ce qu'elle doit faire...

Un joyeux cluedo où l'on connait l'assassin, qui, j'espère, vous plaira !


Au petit matin, Lenalee s'éveilla dans les bras de Road, toujours sous le choc de ce qu'elle avait vu. Elle était comme figée, incapable de réagir, ce qui ne lui ressemblait guère. Elle se laissait bercer malgré elle par la poitrine de son amante qui se soulevait lentement contre son crâne. Elle sentait ses mèches de cheveux emmêlées et dispersées à cause de probables frottement avec le corps plus petit dans la nuit. Prostrée, elle n'arrivait même pas à faire un geste pour les lisser un tant soit peu et chasser la sensation gênante. Cette torpeur était teintée de malaise, teintée d'incompréhension. Lenalee ne savait pas pourquoi elle demeurait inerte. La peur. Road avait en tout cas tenu sa promesse, elle ne l'avait pas lâché, l'avait bercé toute la nuit.

Ça l'aurait fait sourire si la situation n'était pas des plus graves.

Lavi. Le Lavi qu'ils avaient vu revenir d'entre les morts, qu'ils avaient appris à aimer de nouveau … Ils avaient eu raison de se méfier de lui à cause de la magie, depuis le début. Lavi avait tué quelqu'un. Lavi avait tué l'un des leurs.

Les larmes s'agglutinèrent petit à petit sous les paupières de Lenalee. Le geste qu'elle fit pour s'essuyer les yeux l'aida à sortir de sa léthargie. Regagnant son énergie, la flamme qui l'animait toujours, Lenalee se redressa précautionneusement sur le hamac, posant ses pieds par terre, gardant ses fesses au bord du lit, maintenant son équilibre afin de ne pas chuter, ou faire chuter Road. Une tête bouclée s'échoua dans sa nuque, aussi, la jeune femme réalisa que sa petite-amie était elle aussi réveillée.

« Comment tu te sens, chérie ? »

La voix de Road ne portait aucune teinte rieuse, comme elle en avait pourtant l'habitude. Sa propriétaire était simplement inquiète pour elle. Lenalee soupira doucement. Elle leva une main qui trouva bientôt la joue de son amante, qui s'y appuya gentiment juste après avoir embrassé sa paume.

« Je ne sais pas trop…. Je crois que je ne réalise pas encore très bien. Mais il va falloir le dire. »

De ça, Lenalee était sûre. Ne pas parler de ce dont elle avait été témoin ne lui serait même pas venu à l'esprit. Lavi était dangereux. Ça faisait mal, elle avait l'impression de le perdre une seconde fois, mais la sécurité des autres passait avant. Elle ne voulait pas briser le cœur de Komui. Elle ne voulait pas le faire plonger de nouveau. Elle n'aurait pourtant pas le choix.

Road embrassa sa nuque.

« Je vais t'accompagner, je serai avec toi.

—Non. »

Lenalee serra les poings, la colère l'étreignait malgré elle. La colère de cette injustice.

« Je veux le faire seule, » prononça-t-elle d'un ton distinct, déterminé. « Il s'agit de mon frère, et de mon ami d'enfance. Je ne veux personne d'autre avec moi lorsque j'expliquerai ce que j'ai vu. »

L'horreur des événements lui retournait encore l'estomac, et c'est ce qu'il fallut à son sang pour ne faire qu'un tour. Saisie par un regain d'énergie, la jeune femme se releva. Elle se débarrassa de sa chemise de nuit, une courte robe blanche à bretelles, s'emparant d'une chemise et d'une jupe qui traînait sous le hamac. Elle les enfila, chaussa ses bottes, des cuissardes qui remontaient jusqu'à ses genoux, sans prendre la peine de nouer ses cheveux en deux petites couettes comme elle en avait l'habitude. Road l'avait observé, silencieuse. Lenalee se mit en marche, jetant un dernier coup d'œil sur son amante, belle pensive.

Elle avait l'air d'une guerrière. Mais même les plus farouches pouvaient tomber au combat.

« Mets Allen et Kanda au courant. Je n'en ai pas pour longtemps. »

La jeune Portugaise hocha la tête. L'inquiétude se lisait toutefois sur ses traits.

« Lena, » souffla-t-elle, presque suppliante, « fais attention. Lavi t'a peut-être vu. S'il t'a vu, ça veut dire qu'il voudra te tuer. Quand un démon a une cible, il ne la lâche pas. L'éliminer devient une obsession compulsive. Évite-le, coûte que coûte.

—Ne t'en fais pas. »

La brunette partit, laissant l'autre jeune femme encore en tenue de nuit derrière elle.

Road Kamelott se mordit la lèvre, sautant avec empressement du hamac, arrachant son pantalon d'homme du plancher, le faisant remonter le long de ses jambes sans attendre. Elle dormait vêtue d'une simple chemise ouverte qu'elle attacha sur sa poitrine nue. Elle avait un mauvais présentiment, et si la vie lui avait enseigné quelque chose, c'est que ce genre de sensation se confirmait toujours plus ou moins. En l'occurrence, Road avait peur. Elle n'était pas le genre de personne à fléchir facilement. En revanche, elle avait déjà étudié la magie. Elle avait même travaillé au côté d'un mage pendant son adolescence, lorsqu'elle cherchait encore quoi faire de sa vie et que la piraterie était loin d'être une évidence pour elle. Elle se travestissait pour écumer les bars, draguer les femmes et boire sans être jugée. Une existence insouciante, un peu irresponsable, mais qui lui plaisait rudement. Qu'y avait-il de mal à être soi-même, hein ?

En travaillant pour ce mage, Adam, son insouciance libertaire s'était envolée.

Road ignorait à qui Komui avait fait appel – mais ça ressemblait diablement à Adam. Un humanoïde qui avait les souvenirs, le cœur et la personnalité du défunt. Qui se voyait malgré lui devenir une machine à tuer, parce que l'âme se consumait. Le lien ténue entre de la mort à la vie réclamait à être renforcé. Il ne pouvait se renforcer que par de nouveau meurtre.

La créature devenait un Akuma. Un Akuma tuait sans relâche, d'instinct. La magie noire fonctionnait comme un poison qui consumait les restes de conscience humaine. L'Akuma souffrait de ses méfaits, et plus il souffrait, plus il faiblissait. Son lien à sa propre conscience s'amenuissait de pair, il devenait vulnérable à ses pulsions destructrices, et il y succombait. Aucun Akuma n'avait jamais réussi à se contrôler. Pour l'entourage, c'était encore plus destructeur. Bien souvent, ses proches étaient tués, victimes de celui qu'ils avaient voulu voire enfanter une deuxième fois, et ce dernier semait la pagaille, ne devenant qu'une loque dont la souffrance purulait au travers de sa haine comme une infection morbide.

C'était pour ça que l'ensorcèlement et la nécromancie étaient des pratiques que Road réprouvait du plus profond de son âme. Elle connaissait néanmoins des charmes basiques, Adam avait tenu à lui enseigner certains de ses secrets. Elle n'était pas suffisamment sorcière pour pouvoir contrer sa magie, elle savait à peine remettre en place un os brisé – ce qui était mieux que rien.

Toujours est-il que si ses soupçons se confirmaient, si Lavi avait bien été ressuscité par Adam…

Road fonça jusqu'au hamac d'Allen et Kanda, à l'autre bout de la pièce, les découvrant endormi l'un contre l'autre, entre tendresse et béatitude. Elle les aurait chambrés en temps habituel, non sans les avoir contempler d'un œil bienveillant pendant quelques minutes – fallait pas déconner, même Road était sensible à une vision si… touchante. En quelque sorte. Ou alors, elle se serait jetée entre eux, s'amusant de cette façon à les faire basculer, éclatant de rire suite à l'éclat colérique qui aurait suivi de la part de Kanda, tandis qu'Allen aurait tenté en vain de calmer son cher et pas si tendre, tout en la toisant avec agacement.

Cependant, l'heure était grave. C'est pour ça qu'elle secoua précipitamment les deux garçons qui sursautèrent, et leur expliqua d'une voix lourde de gravité que Lenalee était sûrement en danger.

Qu'ils étaient tous en danger.


La rage la tenait aux tripes lorsqu'elle pensait au sommeil laborieux et agité de cauchemars dont l'horreur de la veille l'avait gratifié. Lenalee débarqua en trombe dans la cabine de son frère. Komui était occupé à examiner la carte du globe, probablement à la recherche de leur prochaine destination.

Le parchemin jauni par le temps étalé devant lui, il avait la mine rigide, la concentration extrême figeant ses traits. Il s'était ressourcé, dernièrement, et complètement réinvesti dans sa tâche de Capitaine. Ils redevenaient actifs. Il calculait leur itinéraire, s'échinait à trouver comment éviter les raids des soldats de l'Empire, quelle contrée serait judicieuse à explorer, analysait les îles environnantes et ce qui était connu de leur situation géopolitique, s'il était dangereux de s'y arrêter, s'il y avait un village à piller dans le coin… Tout ce qui faisait la grandeur d'un clan de pirates et lui permettait de perdurer. Leur renaissance devait cependant être avortée. Rien qu'à y penser, elle avait la boule au ventre mais elle n'hésitait toujours pas. Pas une seule seconde. Elle craignait les réactions de Komui, car elle avait la certitude que ce qu'elle allait dire le briserait. C'était évident. Pourtant, il le fallait. Lavi était dangereux. Personne n'avait encore remarqué la disparition de Chaoji, hormis quelques matelots étonnés de ne l'avoir pas vu venir se rationner avec les autres le matin.

Road, Allen et Kanda, qu'elle avait mis dans la confidence, restaient non loin, aussi terrifiés qu'elle – sauf Kanda, peut-être, qui était surtout prêt à en découdre, et guettaient l'arrivée du rouquin. Lenalee espérait qu'il ne les interromprait pas. C'était vital. Elle craignait qu'il ne soit une menace pour elle ou pour son frère s'il les rejoignait.

Lavi, elle l'avait croisé tout à l'heure. Le sourire bienveillant qu'il lui avait envoyé ne lui avait jamais semblé aussi…. Glacial. Elle avait senti une sensation froide la saisir des pieds à la tête, et tout autour d'elle s'était mis à tourner, comme si elle était sur le point de s'évanouir ! Un malaise, voilà ce qui avait failli lui arriver. Et Lavi avait forcément dû le percevoir, car son aura avait changé. Comme s'il la sondait.

Le message entre eux paraissait établi : de la méfiance et de la suspicion. Chez Lenalee, la sueur d'une peur bleue.

Elle ouvrit donc la bouche, croisant les bras, fixant son frère :

« Nii-san, il faut qu'on parle.

—Je suis occupé, ma petite Lenalee, » sourit brièvement Komui en levant les yeux de sa carte, « reviens plus tard.

—Non ! » s'écria-t-elle, hors d'haleine comme si elle avait couru, comme si les mots s'étaient précipités hors de sa bouche comme sur la piste d'un marathon, alors qu'elle n'avait pas encore prononcé un mot. « C'est important ! C'est à propos de Lavi ! »

Instantanément, Komui parut se sentir concerné et redressa la tête.

« Que se passe-t-il ? »

La boule au ventre de Lenalee grossissait encore.

« Tu as vu Chaoji, ce matin ? »

Komui cligna des yeux, haussant les épaules, cherchant le lien entre ses premières paroles et cette question. Lenalee le coupa avant qu'il ne puisse parler.

« Non, bien sûr que tu ne l'as pas vu. Lavi l'a tué, j'étais là sur le pont, et j'ai tout vu. Il l'a étripé devant moi ! Je sais que c'est dur à entendre, mais… »

La terreur perçait sa voix.

« Tu es sérieuse, Lenalee ? »

Une exclamation brutale. La jeune fille se sentit glacée de la tête aux pieds.

Ce n'était pas Komui qui avait parlé. Derrière elle, Lavi était apparu. Terrifiée, la jeune fille eut un mouvement en direction de son frère, instinctif. Elle jeta un regard dehors, voyant ses amis qui lui lançaient un regard confus – ils n'avaient pas réussi à retenir Lavi.

Komui la regardait, regarda son amant ou l'imposteur en face de lui. Il paraissait dubitatif. Déchiré entre son âme-sœur, et son propre sang.

« Je ne comprends pas… Lavi, Lenalee, expliquez-vous tous les deux. »

Lenalee vainquit sa peur et continua à l'adresse du borgne :

« Je suis très sérieuse. Dis-lui ce que tu as fait. »

Elle pointait un doigt accusateur sur le jeune chirurgien, Lavi haussant les sourcils en fermant la porte derrière lui.

« Je suis bel et bien sorti sur le pont, oui, j'imagine que tu t'en souviens. » Il marqua un silence, Komui le toisant sans rien dire. « J'ai pris l'air, et j'ai vu Chaoji boire. Il s'est descendu trois chopes de rhum à lui tout seul, et il est allé s'accouder au garde-fou. Je voulais le prévenir que c'était dangereux, le bateau cahotait un peu trop, et il est tombé quand je m'approchais. Je venais justement te l'annoncer, je n'ai pas eu le courage de te le dire cette nuit, j'étais trop sonné. Lenalee, tu m'as vu, enfin. Tu me disais que tu étais malade, rappelle-toi ! Je ne comprends pas où tu es allée chercher cette histoire ! La mort de Chaoji a dû te choquer en plus de ça… Je n'y suis pour rien. »

Les sourcils froncés, les épaules haussées comme outré, le roux jouait la surprise. Le sang de la brunette n'avait fait qu'un tour. Il essayait de la faire passer pour folle ! Il osait !

« Je ne suis pas malade, Nii-san, il ment ! Il a tué Lavi, il est dangereux ! »

Comme dans un état second, Komui demeurait étrangement calme, anesthésié malgré l'annonce choquante qui aurait pourtant dû rudement l'ébranler. Il essuya ses lunettes avec sa veste comme si de rien était :

« La perte de Chaoji est tragique, mais je ne vois pas Lavi le tuer, ma Lena chérie… S'il nous voulait du mal, il nous aurait tuer depuis longtemps. Tu es sûre de ce que tu as vu ? Il y avait une épidémie, sur l'île où nous étions. Peut-être que tu as contracté une fièvre… S'il avait étripé Chaoji, on aurait trouvé du sang, il en aurait eu sur lui quand il est revenu à mes côtés, réfléchis. Tu as du mal comprendre...

—Il a nettoyé le pont et il s'est changé !

—Tu l'as vu faire ?

—Non, mais c'est logique, je l'ai vu tuer Chaoji ! Bon sang, j'étais là, et il l'a étripé avec son poignard comme on vide un lapin ! Nii-san, s'il te plaît ! Tu préfères croire un revenant plutôt que ta propre sœur ?! »

Komui eut le visage crispé.

« Lavi n'est pas un revenant, tu te rends compte d'à quel point tu es blessante ? Tu débarques ici en me tenant des propos d'une gravité extrême et insensés, et de plus j'apprends la mort d'un de nos camarades ! Qu'est-ce que je dois penser ?

—Ne la gronde pas, elle délire, » fit Lavi en s'approchant d'elle, « regarde-la. Pupilles dilatées, visage rouge, transpiration, panique et signe d'hystérie… Elle commence à tomber malade.

—JE NE SUIS PAS HYSTERIQUE ET JE NE SUIS PAS MALADE ! »

Mais, de même qu'elle s'écriait ces mots, la tête de Lenalee tourna. Elle se sentit proche de tomber, et dut manquer de le faire, car son frère la rattrapa par les hanches.

Lenalee hoqueta.

Elle se mit à haleter malgré elle, prise de court, elle était hébétée. Qu'est-ce que… ? Elle tanguait sur ses jambes.

Komui finit par l'asseoir sur la chaise qu'il occupait. Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait alors que tout autour d'elle devenait progressivement flou. Ça venait de nulle part alors qu'elle n'avait aucune raison d'être malade !

Certes, ils étaient passés sur une île infectée. Le sale variant d'une grosse grippe. Cependant, ils avaient pris des précautions, et ils avaient faits vérifier l'état de chacun de leur camarade par Sheryl et Lavi avant d'embarquer. Les symptômes de cette fièvre se développaient très vite, ça aurait été vite remarqué s'ils étaient malades.

Lenalee ne voulait pas y croire.

Elle fixa Lavi. Sans pouvoir se contrôler, commença à pleurer.

« C'est toi ! » Elle hurlait entre ses larmes. « C'est toi qui m'as fait ça ! »

Komui la soutenait pour éviter qu'elle ne lui saute à la gorge et Lavi le toisa, renforçant son aplomb et l'imitation factice de son choc avec ses traits écarquillés.

« Je te jure que je n'ai rien fait à Chaoji, chéri. Ni à Lenalee, je l'aime comme une sœur, jamais je ne la toucherai. Tu vois bien qu'elle délire, il faut la soigner. Je vais l'examiner.

—Je t'accompagne, je ne la laisse pas seule. »

Lavi ne refusa pas, ce qui empêchait naturellement Komui de douter de sa bonne foi.

Lenalee hurla de plus belle quand il entreprit de la soulever, aussi, Komui s'en chargea à sa place sur un soupir. Cela parut la calmer, la jeune fille se rendant compte qu'elle n'avait plus la force de réagir. Elle sentait ses membres ankylosés et ne comprenait toujours rien. Ça devenait venir de quelque chose.

La nourriture, elle n'en avait pas pris… L'eau ?

Bordel, c'est… !

Ses neurones tournaient comme une girouette d'une hypothèse à l'autre, la peur endormant sa réflexion sensée. La panique prenait le dessus, elle n'avait plus aucune crédibilité. Lavi les avait empoisonnés, c'était lui, il fallait qu'elle prévienne les autres, il le fallait !

Elle se sentait fatiguée et avait l'impression d'être sur le point de s'évanouir.

Elle essayait de parler, mais l'air dans sa gorge peinait à entrer, et elle n'arrivait plus à s'exprimer.

Sa panique s'accroissait à chaque seconde.

Lavi ouvrit la porte.

« Conduisons-la au cabinet. »

Dans le même temps, Allen, Road et Kanda s'étaient rapprochés de la cabine. Ils émirent des sons surpris et effrayés en voyant Lenalee dans cet état.

« Que s'est-il passé ?! » s'exclamèrent les trois compères d'une même voix forte et terrifiée.

Road attaqua la première, en dépit de son inquiétude palpable :

« Capitaine, Lenalee vous a dit ce qu'elle avait vu ?

—Lenalee est malade, » déclara fermement Komui, rigide, appuyé par le hochement de tête de Lavi, « tout ce qu'elle a pu dire est issu d'une fièvre délirante. On doit trouver ton père pour nous aider à l'examiner, Road. Kanda, préviens les autres qu'il faut organiser une minute de silence pour Chaoji, tombé par-dessus bord cette nuit. Comme si on avait besoin de ça…

—Malade ? Mais elle n'avait rien ce matin ! » s'étonna Allen. « Komui, s'il vous plaît, ce qu'elle a vu… C'est Lavi qui l'a tué, il n'est pas tombé. Comment vous pouvez ne pas la croire ?! »

Kanda observait Lavi avec une morgue palpable, quant à lui, et Road s'approcha de la jeune fille, saisissant sa main, criant presque :

« Je refuse qu'on la laisse seule avec ce monstre, vous m'entendez ?!

—Donc vous la croyez ? » asséna le Bookman, outré. « Je suis déçu. Je sais que vous ne m'avez jamais accepté depuis mon retour, mais là… C'est très méchant.

—Arrête de jouer la comédie, » gueula Kanda, « t'es pas Lavi ! Road sait ce que t'es ! Un Akuma ! »

Les sourcils froncés, Komui restait coi.

« Un Akuma ?

—Selon le mage avec lequel on fait affaire pour ramener un mort, » expliqua patiemment Road malgré l'inquiétude qui trouait sa voix, tenant toujours Lenalee qui gémissait faiblement dans l'étreinte de son frère, « ce qu'on ramène n'est pas exactement humain. C'est davantage une sorte d'humanoïde avec des souvenirs communs au défunt. Mais aussi doté d'une furieuse envie de tuer. Ce n'est pas Lavi qui est parmi nous. C'est un être assoiffé de sang, et si vous refusez de me croire, et de croire votre sœur, il nous tuera tous ! »

Elle avait peur. Venant d'une femme comme Road, c'était en soi assez révélateur de la dangerosité de la menace.

« Le mage avec qui j'ai fait affaire m'a certifié que c'était Lavi, et je sais que je peux avoir confiance ! Comment osez-vous proférer des accusations sur les délires d'une malade ? Il est évident qu'elle est fiévreuse, elle a probablement tout inventé. Il faudrait laisser à Lavi le bénéfice du doute !

—On ne vous a jamais dit de ne jamais croire les sorciers ?! » hurla la petite brune. « Vous avez fait affaire avec Adam, le Comte Millénaire, n'est-ce pas ? »

Komui écarquilla les yeux. Il manifesta ainsi pour la première fois une sorte de doute.

« Comment est-ce que tu le sais ?

—Alors c'est bien ce que je craignais. Je l'ai côtoyé quand j'étais plus jeune, j'étais une de ses assistantes. Et je sais bien comment il fonctionne… Sa nécromancie n'aide pas les gens, elle les maudit. Vous n'avez rien eu à payer, n'est-ce pas ? Parce qu'il a acheté l'âme de Lavi, la vôtre avec. Votre amour pour Lavi nourrit la haine de l'Akuma car il lui donne plus de force. Lenalee a dû être empoisonné, et il est forcément coupable ! »

Mais le pirate restait sourd aux avertissements, même venant d'une expérience concrète. Il trembla de la tête aux pieds, sa mâchoire se crispant, comme en lutte interne – et Road savait que c'était le cas.

Enfin, la lutte dut se conclure abruptement, car il gronda, les fusillant tous du regard derrière le verre de ses lunettes.

« Tu n'as aucune autorité pour me dire comment m'occuper de ma sœur, Road. Je veux la faire examiner par ton père en plus de Lavi, on déterminera les causes de cette maladie, et je la mettrais au lit. Maintenant laisse-moi passer. Encore une protestation et il y aura de sévères sanctions, croyez-moi. »

Elle se sentit pétrifiée par l'impuissance et ne put rien faire quand il la dépassa. Ni elle, ni Kanda ni Allen n'étaient habilités à empêcher leur Capitaine d'avancer dans ces circonstances. Komui n'était plus lui-même. Il avait toujours été un Capitaine à l'écoute de son équipage, proche d'eux, fantasque, mais aussi sérieux et efficace. Il n'était pas homme à se faire obéir par la crainte et les punitions.

Le sortilège d'Adam avait d'autres effets secondaires…

Mais l'important était Lenalee. Komui se trouvait déjà perdu. Elle, en revanche, était peut-être encore sauvable.

Road se tourna vers ses amis, paniquée :

« Qu'est-ce qu'elle a mangé ce matin et il y a combien de temps ?! Ses symptômes se sont déclarés d'un seul coup, Komui ne veut rien entendre, mais ça doit forcément être un empoisonnement !

—Elle a dit qu'elle était trop perturbée pour manger, mais elle a dû boire de l'eau dans un des tonneaux, juste avant d'aller voir son frère…, » réfléchit Allen, comprenant bien vite ce que cela impliquait, tout comme la jeune fille. « Mon dieu, il faut à tout prix prévenir les autres et les empêcher de boire !

—Je m'en occupe, » déclara Kanda. « Trouvez une solution de votre côté. »

Il partit au pas de course, Road et Allen se concertant l'un l'autre.

Le blandin était agité d'un sévère tremblement, autant de colère que de peur.

« Les réactions de Komui ne sont pas logiques... » bredouilla-t-il, « Je ne comprends pas comment il peut ne pas se remettre en question avec ce que tu as dit… Comment ça se fait qu'il est aussi borné ?!

—Ça fait partie du charme d'Adam, ce n'est pas de sa faute. Il est sous son contrôle, il fonctionne comme un automate et il ne verrait pas la vérité, quand bien même on la lui montrerait. Ça ne sert à rien d'argumenter. Il n'y a que Lenalee qui pourrait le faire revenir à lui comme il l'aime plus que tout au monde, mais elle est justement hors d'état de nuire… Devine donc pourquoi Lavi a fait ça. Je ne sais plus quoi faire, Allen. Les sortilèges d'Adam sont très puissants et irrévocables. Lavi n'aura qu'un seul but : nous faire du mal. Le seul moyen de l'arrêter serait de tuer Komui. Et ça ne sauverait pas Lenalee… »

Allen se sentit horrifié. Il l'avait senti, il l'avait toujours su ! S'il avait parlé au lieu de le garder pour lui, peut-être qu'ils auraient pu empêcher ça, peut-être que… Les larmes lui montèrent aux yeux malgré lui, car il aurait aimé avoir tort.

Et Lenalee… S'il l'avait empoisonné, qui sait si elle n'allait pas tout simplement mourir ?! Encore par sa faute !

Road saisit tendrement la main du jeune homme, le sortant de sa tourmente.

« Si mon père peut faire quelque chose pour la soigner, il le fera, essaie de ne pas t'en faire avant d'avoir un pronostic. »

Le maudit devinait qu'elle parlait autant pour elle que pour lui.

« Viens, allons aider Kanda à mettre les autres au courant, et nous irons rejoindre Lenalee. J'ai assisté Adam, si je ne sais pas comment l'arrêter, je connais des sorts pour guérir les malades. Sheryl me laissera faire. »

Le maudit acquiesça.

Derrière eux, Kanda avait déjà détruit quelques tonneaux de bières et d'eau, renverser les tables installées sur le pont, et expliquait la situation aux marins qui protestaient par de grands cris… Certains le traitaient de cinglé et le menaçaient de leurs épées.

Autant dire que ce n'était pas tellement la meilleure manière de communiquer. Il valait mieux en effet qu'ils l'aident avant que ça ne parte en bataille générale sur le rafiot.


Sur une table qui servait aux opérations, Lenalee était couchée, un oreiller derrière la tête. Autour d'elle, trois hommes. Ils l'observaient comme une curiosité, cette dernière demeurait inconsciente, le visage rouge, les yeux cernés.

« On dirait une poussée de fièvre, oui, ou un genre de réaction à un produit ingéré…, » constata Sheryl avec inquiétude, « Son amygdale est enflée et sa salive est plus épaisse qu'à la normale. Peut-être que la nourriture est infectée et qu'elle porte les germes du virus. Ce serait dangereux.

—J'entends du raffut en haut, informa Lavi, l'air inquiet, j'imagine que les autres risquent d'avoir les mêmes symptômes si c'est le cas. Il nous faudrait faire halte en direction de l'île la plus proche, nous ne pouvons pas rester sans vivres. Komui, qu'en penses-tu ? »

Le Chinois déglutit, soudainement ailleurs. Tout cogitait dans son crâne et quelque chose l'empêchait de réfléchir correctement. Comme si ses pensées étaient coincées dans une sorte de bulle et qu'un mur les arrêtait.

Il avait mal à la tête, il sentait qu'il devait prendre une décision, mais la quelle… ?! Que faire quand on était bloqué !

Komui se racla la gorge.

« Faites tout ce que vous voulez tant que vous trouvez comment soigner ma Lenalee. Sheryl, que faut-il faire ? »

Sur conseil de Sheryl, la jeune fille se fit enlever le drap qui la recouvrait sur le lit de camp de fortune de l'infirmerie. Komui lui caressait tendrement les cheveux. Son corps était agité de soubresaut et son front ruisselait de sueur.

Elle était dans un sale état, la pauvre petite.

Ils le voyaient tous.

Sans le montrer, Lavi souriait, ressentant une sorte de satisfaction pour la tournure de la situation. Il allait récupérer deux âmes. Chaoji, bientôt Lenalee… C'était déjà ça pour son maître. Il se sentit presque heureux.

Et ils n'y voyaient que du feu.

Sheryl soupira.

« La meilleure chose à faire est de lui donner du repos. On va la garder, je vais lui donner des herbes, et je vais demander à Road si elle a une formule pour m'aider. Lavi, tu vas me superviser pendant la préparation. »

Le jeune chirurgien acquiesçait, et le Capitaine du navire tiqua.

« Road connait des charmes ?

—Oui, monsieur, » répondit humblement son père, « Elle a longtemps travaillé avec les mages. Elle n'est pas une sorcière, mais elle connaît les rudiments de la magie des guérisseurs. Elle est douée, j'en suis particulièrement fier. »

Komui fut satisfait de cette explication, et réalisa que Road le lui avait déjà dit elle-même tout à l'heure. Pour qui avait-elle travaillé ? Il ne se souvenait plus. Cette gamine impertinente allait donc leur servir à quelque chose… Qu'importe la manière, tant que Lenalee vivait. Oui, tant que Lenalee s'en sortait, il se fichait totalement du reste. Il s'avança en direction de la porte, embrassant la pièce du regard une dernière fois.

« Je remonte, occupez-vous d'elle. »

Ce fut à ce moment que Road arriva, ouvrant la porte à la volée, Komui affrontant son expression d'inquiétude non-feinte. Il l'arrêta avant qu'elle ne pénètre dans la pièce, et désigna le lit de camp d'un mouvement de menton.

« Tu aimes beaucoup Lenalee, non ? »

Road se mit à rougir. Komui en fut étonné, s'il ne fléchissait pas. Elle acquiesça.

« Alors mets de côté tes aprioris sur Lavi, et aide-les à la soigner. C'est un ordre. »

Les dents serrées, la jeune fille savait qu'elle était tenue de faire mine de lui obéir.

« Bien, Capitaine. »

Komui sortit et gravit alors les marches menant au pont.


« Komui, » le suppliait Allen, revenant à la charge dans une tentative désespérée, « il faut que vous nous écoutiez ! »

Il avait fait irruption il y a quelques minutes dans sa cabine où il s'était réfugié, alors que Komui déchirait des parchemins déjà lus dans la rage de ce qui arrivait à sa sœur, ainsi que de son incapacité à discerner clairement la situation. Il le gênait, mais pourtant, au fond de lui, Komui était sensible à sa détresse et la partageait.

« Deux rameurs sont déjà tombés malades à cause de la nourriture, » s'écriait Allen sur un visage aux traits tirés d'inquiétude, « Kanda et Link les ont portés jusqu'en bas. Il faut que Sheryl examine les réserves. Je suis sûr qu'il doit y avoir des traces d'empoisonnement chez eux aussi, ce n'est pas quelque chose de naturel !

—Allen, je t'en supplie, ne t'y mets pas avec cette histoire d'empoisonnement. Il n'est même pas sûr de ce qui est arrivé à Lenalee. »

Le maudit secoua la tête.

« Vous n'êtes plus vous-mêmes. Vous vous en rendez compte ?! Voir Lenalee ainsi vous laisse-t-il donc de marbre ?! »

Le jeune homme s'époumonait devant lui. Komui sentit cette fois que la colère prenait place dans son ventre.

« Ne joue pas à ça avec moi, je te préviens. Ma patience a des limites. Je reste le chef ici, tu me dois le respect. »

Allen le dévisagea froidement.

« Je vous respecte, Komui, je vous ai toujours respecté. Je vous suis sincèrement reconnaissant de m'avoir pris sur votre navire avec ma malédiction. Mais j'aime Lenalee, moi aussi, de tout mon cœur. J'aimais Lavi, quand il vivait. Il est mort, et je suis convaincu qu'on ne ramène pas les morts. Ce qui est avec nous n'est pas Lavi, je l'ai senti ! Je vous demande de me croire ! Mon don nous a-t-il déjà trompé ? »

Komui serra les dents.

Allen paraissait proche de pleurer. Il était en réalité bien plus déboussolé que toute expression faciale n'aurait pu le montrer. Dans son monde, tout s'effondrait.

Lui aussi, il avait espéré s'être trompé.

« Je ne veux pas que Lenalee soit perdue. Si on arrive à identifier le poison, il sera plus facile de fabriquer un antidote, vous le savez… si vous ne voulez pas m'écouter, laissez au moins Sheryl inspecter la nourriture, l'eau et la réserve d'herbes médicinales. S'il ne manque rien, s'il n'y a rien de suspect, vous aurez eu raison. Road, Kanda et moi on aura eu tort. Nous n'aurons qu'à prier pour elle. S'il y a un souci… »

Il laissa sa phrase en suspens, laissant son Capitaine la compléter pour lui. Ce dernier soupira.

« S'il y a plusieurs malades, » dit patiemment Komui, « ça ressemble plutôt à une épidémie, mon garçon. Sheryl va justement avoir beaucoup à faire. Ne paniquons pas.

—Hormis les vertiges et la fièvre, je tiens à vous informer que les autres ne délirent pas, » s'obstinait le jeune homme, « S'ils sont sains d'esprits, peut-être que Lenalee l'est aussi. Et qu'elle ne ment pas, par conséquent. Vérifiez, s'il vous plaît. »

Avec cette argumentation, Komui se sentit obligé d'accepter.

C'était pour sa sœur, il savait qu'il le fallait. Même si quelque chose en lui le faisait douter, il n'arrivait pas à se résoudre à se borner dans le refus.

Parce que Lenalee était sa seule famille.

Elle passait avant.

Elle passerait toujours avant.

« Si on trouve la moindre trace de poison, ça ne signifiera en aucun cas que Lavi est le coupable. Suis-je clair ?

—Non, mais encore une fois, vous connaissez ma particularité. Posez-lui la question et laissez-moi le toucher. S'il refuse que je le fasse, ce sera suspect, et si je capte quelque chose de négatif venant de lui, je le saurais. »

Contrarié, le Chinois était forcé d'admettre que son subalterne possédait un don qui était plutôt fiable. À bien des reprises, Allen les avait aider à débusquer des traîtres.

Il accepta donc cet arrangement et descendit chercher le médecin affairé avec les malades infectés à la cahute.


Sheryl inspectait rigoureusement les réserves et les tonneaux d'eaux depuis quelques minutes, sous l'œil attentif du Capitaine, de Reever et des matelots sur pied à leurs côtés. Il avait déjà vu que des ingrédients manquaient dans la réserve, des herbes qui, mises ensemble, pouvaient causer de sévères maux de ventres aux symptômes d'une grosse grippe, jusqu'à la mort elle-même.

Il n'y avait pas de traces précises pour le moment. Un assassin, même précautionneux, aurait pu oublier un peu de poudre qui passerait inaperçu à la plupart des gens, sauf celui qu'il recherchait... Il savait de quoi il parlait car pendant longtemps, il avait été chargé d'assassinats discrets pour différents seigneurs sur la terre ferme. En effet, Sheryl avait été un mercenaire redoutablement efficace dans sa première jeunesse.

Ayant travaillé avec les poisons, il s'y connaissait.

Que l'eau paraisse pure, ce n'était donc pas étonnant. À part de légères odeurs selon l'herbe en question, le poison se diluait et ses effluves aussi. Pour la nourriture, cela variait d'un aliment à l'autre.

Quoiqu'il en soit, Sheryl faisait attention à tout examiner. Si une quelconque preuve traînait, elle ne lui échapperait pas.

De son côté, Road avait essayé tous les charmes qu'elle connaissait sur Lenalee. Rien n'avait marché pour le moment. Les symptômes empiraient comme un crescendo diabolique.

Sheryl avait donné un pronostic que Lavi avait appuyé sans émotion… La mort.

La jeune fille était déjà condamnée. Cela paraissait irrévocable.

En ce moment-même, Road s'acharnait. Sheryl n'était pas dupe, il avait bien vu que son enfant s'était amourachée de la sœur du Capitaine. Il approuvait cet amour car il rendait sa fille heureuse. Il ne se voyait résolument pas lui interdire quelque chose qui contribuait à son bien-être ou la juger pour cela. Au contraire. Il était d'autant plus désolé de ce qui arrivait à Lenalee.

En bougeant un bac de légumes, il trouva enfin ce qu'il cherchait.

Une substance poudrée violette. Il comprit ce que c'était avant même de la sentir.

Ils étaient bel et bien face à un acte délibéré.

« De la mort aux rats, » s'exclama-t-il. « En cas d'ingestion à petite dose, il rend très malade, et à haute dose, ce poison est mortel. Quelqu'un a tenté de nous assassiner tous à petit feu, en plus d'empoisonner l'eau.

—Allen vous l'avait dit, » intervint Kanda d'une voix rauque, glissé derrière Komui, et c'était bien l'une des rares fois où il l'appelait par son prénom, « Lavi est derrière tout ça.

—J'aimerais que nous réunissions tout le monde sur le pont pour poser des questions avant de faire des suppositions à la vite, » cingla Komui d'une voix autoritaire, « Sheryl, tout est foutu, n'est-ce pas ? »

Le médecin parut désolé alors qu'il hochait la tête.

« Impossible de savoir ce qui a été épargné par la personne qui a déposé le poison, il est préférable de se débarrasser de nos réserves.

—Bon dieu ! » s'écria Komui, « on gâche des vivres et on va dépenser un pognon fou pour regagner seulement de quoi nourrir tout le monde pour une soirée ! »

Sa colère était compréhensive. Cependant, tous furent surpris de son exclamation violente, lui qui avait toujours un mot pour dédramatiser ou était sagement résigné d'habitude.

L'homme ne s'arrêta pas là.

« Le saligaud qui a osé faire ça sera exécuté ! Je ne tolérerai pas de traître sur ce bateau ! »

Kanda eut un ricanement sec, narquois, si bien que Komui lui adressa un regard froid.

« Je sais ce que tu en penses, mais ce n'est pas Lavi. »

Du moins, il n'avait aucune envie que ça soit Lavi. Il s'y refusait. Et le Capitaine quitta la cale sur un pas martelant de colère. Les murmures des matelots sur son humeur massacrante retentissaient derrière son vide. Sa silhouette devenait elle aussi macabre.

Comme engagés dans une course contre la montre, Kanda, Allen et Road savaient qu'il ne restait qu'un temps trop précieux pour convaincre Komui.

Un Komui résolument hermétique.


Au bout d'une demi-heure, tous furent réunis sur le pont principal

Le bateau voguait tranquillement accompagné d'un ciel bleu azur particulièrement dégagé, en contraste avec le vent de sédition qui tempêtait parmi l'équipage.

« De la mort aux rats a été dispersée dans nos réserves, » tonna Komui d'une voix forte, « tous les vivres sont bons à jeter. Cela signifie donc qu'il y a un traître parmi nous. Il recevra bien entendu une punition exemplaire. »

Le silence régnait à bord en maître absolument absolu.

Tous étaient tendus. La fureur de Komui était fulgurante, tandis que la crainte grignotait par morceaux plus que généreux les dernières bribes de raison des pirates. Tous se voyaient envahis de la peur d'avoir bu ou mangé quelque chose d'infecté.

Ce genre de tension n'était jamais de bon augure, surtout alors que les premières morts étaient sur le point d'arriver : ceux contaminés n'y survivraient pas, Sheryl l'avait encore répété.

Maintenant, la panique se répandait, et elle était un poison largement aussi efficace que la plus dangereuse des décoctions.

Allen et Kanda se tenaient par la main, Tyki derrière eux, une pipe au bec.

Komui tempêta une dernière fois :

« Que le coupable se dénonce immédiatement ! Ma propre sœur a été infectée. Je ne laisserai pas passer cela. Mais ça vaut pour chacun d'entre vous. Chaque mort sera punie, faites-moi confiance. »

Allen prit alors la parole, brisant la tension qui unissait l'équipage.

« Je pense que nous savons tous qui est le coupable de cette tragédie et que vous ne voulez pas l'admettre. Demandez donc à Lavi s'il a fouillé dans les réserves récemment. »

Le borgne s'énerva, un rictus ironique au bec :

« Et pourquoi j'aurais essayé d'empoisonner la nourriture de tout le monde ? Je mange aussi, vous savez.

—Très peu, » rétorqua Kanda, suspicieux, sortant étrangement de son silence pour s'expliquer : « Je l'ai remarqué, ça. »

Des murmures se répandirent. Il continua :

« T'es pas souvent là, aux repas, et quand t'y es, tu picores à peine un peu, tu parles aux gens avant de te barrer pour que ça choque personne, mais quand on fait attention, c'est bizarre. Lenalee t'a vu tuer Chaoji, t'as essayé de t'en débarrasser et t'as pas dû vouloir t'arrêter en si bon chemin. La nourriture était la façon la plus facile de nous buter tous, surtout que toi t'en as visiblement pas besoin. Road a dit que c'était pas nécessaire de manger pour les Akumas. »

Lavi secoua la tête, s'obstinant, malgré la montée de murmures approbateurs qui soutenaient le raisonnement du brun.

« Je n'ai empoisonné personne et je n'ai pas tué Chaoji. Je ne suis pas un Akuma.

—Alors laisse-moi te toucher et redis-le, » commanda à son tour Allen avec colère, « Je saurais si tu mens ! Tu te souviens de ce que je peux faire, n'est-ce pas ? Redis-le ! »

Allen était furieux et il courut au-devant du rouquin, tentant de le saisir par le bras. Immédiatement, Lavi se dégagea d'un grand mouvement en arrière, les sourcils rabattus sur la racine de son nez, agressif.

« C'est totalement ridicule, Allen. T'as perdu la tête ou quoi ?! Je refuse de me prêter à ce genre de test, c'est très humiliant pour moi !

—C'est que tu es coupable, alors ! Le vrai Lavi n'aurait jamais refusé ça, et le vrai Lavi n'avait pas peur de mon don ! Komui, je vous l'avais dit, il ment ! »

Allen réussit enfin à attraper le rouquin et lui tirait rudement le bras, tandis que ce dernier se débattait de plus en plus furieusement. Il finit par avoir raison du plus petit et l'envoya valser sur le sol.

Sous le choc de la violence de la scène, car les deux amis ne s'étaient jamais battus auparavant, les pirates grondèrent.

Kanda intervint en attrapant Lavi par l'épaule et lui colla un coup de poing violent en plein visage. Le rouquin tenta de rendre le coup, le nez en sang, mais Allen, loin d'abandonner, lui sauta dessus à son tour.

Il s'acharna à le plaquer au sol, aidé par Kanda. Les autres les observaient se battre, perplexe, mais il était clair qu'ils étaient davantage du côté de Kanda et Allen que de celui de Lavi.

Depuis qu'il était revenu, tous avaient peur de lui. Au fond, ça ne les surprenait qu'à moitié. Cela fusse-t-il injuste ou non, la peur de l'inconnue l'emportait haut la main.

Tremblant de colère devant le spectacle, Komui cria :

« Ça suffit ! Nous sommes des pirates, pas des sauvages ! Lavi, » ordonna-t-il, « laisse Allen te toucher et répond à sa question. »

Lavi allait protester, s'essuyant le nez, mimant la souffrance, aussi, le Chinois se raffermit :

« C'est un ordre, tu n'as pas le choix. »

Le rouquin changea alors d'expression.

Son visage fut incroyablement triste, et en même temps défiguré par la colère. Comme si quelque chose venait de se briser.

Un masque qu'il arborait depuis de nombreuses semaines.

« Bien. Tu doutes de moi, à présent ? La magie doit avoir cessée. »

Le visage de Komui refléta l'incompréhension à l'état pur.

« Ce ne sera pas la peine. Je suis démasqué. Oui, j'ai tué Chaoji. Et c'est bien moi qui ai empoisonné la nourriture. Tous ceux qui ont bu ou manger quelque chose vont mourir. La prochaine île est à deux jours de navigation. Une tempête approche, et faible, vous ne tiendrez pas longtemps. »

Il eut un rire sec, s'exposant avec une gestuelle théâtrale, les bras tendus, le visage rieur.

« Quoiqu'il arrive, j'ai gagné. »

Un silence de plomb s'abattit sur la scène.

Dans le cœur de Komui, il y eut comme une horloge qui s'arrêtait. Et les autres, aussi, s'ils ne voulaient pas y croire, durent faire face à la réalité.

Oui, leur ami n'était plus.

Non… Il n'était même jamais revenu.

À suivre...


Étant donné que le prochain chapitre est écrit, je vous donne rendez-vous dans deux semaines pour avoir la fin :). Ça peut être un peu long, mais je veux laisser le temps à ceux qui auraient envie d'éventuellement découvrir la fic avant son final, ou de relire ^^.

Reviews ? N'hésitez surtout pas, je serai ravie d'avoir vos retours, ce chapitre m'avait posé grande difficulté à l'époque !

Merci d'avoir lu, et merci à tout ceux qui ont suivi jusque-là :) !