La fiction est déjà complètement écrite ! Je voulais finir ce projet avant de vous le présenter, toujours avec l'aide de Taranis K pour la cohérence et les « punchlines ».
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Trois jours s'écoulent dans le bastion. Des heures d'exploration silencieuses et de vagues discussions avec la petite compagnie de survivants.
De tous, Kaya est la plus ouverte. Sa jeunesse lui confère une certaine naïveté, une innocence qu'elle compense par ses connaissances poussées en médecine. Elle soigne tous les maux des pensionnaires, garde un œil sur tous les stocks et ne laisse aucun détail lui échapper. Sa vivacité d'esprit t'impressionne, et sa douceur réconforte tes humeurs. Sa fragilité te touche, t'incite presque à la protéger.
L'adolescent duquel elle semble proche, Usopp, s'est réveillé quelques heures après son retour. Il te parle peu, t'observe de loin mais tu sais que son comportement n'a rien de menaçant. Il se questionne à ton sujet, se montre parfois curieux sans pour autant pousser le contact. Lui aussi fait preuve d'une certaine sensibilité, bien qu'il soit désillusionné. Lors de vos repas, toute sa personnalité s'exprime au travers d'histoires extravagantes et impossibles. Ses récits provoquent le rire et l'admiration de Kaya.
Au milieu de l'obscurité, le sourire de cette jeune fille apporte le soleil.
Paula se pare de brumes et de mystères. Elle fume beaucoup, écoute et surveille les deux enfants. Son rôle au sein de la compagnie s'associe à celui d'une mère, à la fois sévère et compréhensive. Elle t'interroge souvent, du regard ou de façon plus directe. Tu sais qu'elle surveille tes moindres faits et gestes. Et tu comprends que de grandes tragédies se dissimulent derrière ses traits de fumées.
Quant au dernier, Kaku, ce rouquin qui t'a débusqué dans un tunnel sombre, te regarde de loin. De tous, il est assurément le moins bavard. Kaya et Usopp couvrent le silence à grands coups de rires et d'histoires, Paula aime le son de sa voix, mais lui… Il se satisfait du vide.
Tu connais cette sensation.
Aujourd'hui, alors que tes pas te mènent jusqu'au couloir obscur de cette souricière, tu remarques diverses portes fermées. Intrigué, tu t'approches de la première. Une peluche recousue est épinglée sur le bois. La poussière couvre ses poils, symbole de son long passif. Tu l'observes un temps, puis te coule en direction d'une deuxième porte. Sur cette dernière, une longue cape noire est accrochée. Tes sourcils se froncent, un frisson remonte le long de ta colonne vertébrale tu redoutes la signification de ces mystérieux objets.
Ton corps souhaite reculer, retourner dans la lumière mais ton cœur désire une réponse, aussi cruelle soit-elle.
Alors tu te glisses jusqu'à une troisième porte et remarque un chapeau cloué à même la porte. Deux visages, l'un souriant et l'autre attristé, y sont accrochés. Une quatrième porte s'impose à toi, et cette fois il s'agit d'une tresse rose fichée dans le bois. Une cinquième, décorée d'un violon usé et rayé.
Tu tournes la tête, l'effroi te gagne tandis que tu aperçois une dizaine, puis une vingtaine de portes closes.
Dans ton dos, une voix haute et claire annonce la sentence :
— Des tombes.
Tu te retournes lentement, ton regard et celui de Kaku se croisent puis il baisse les yeux.
— C'est le meilleur moyen que nous avons trouvé pour ne pas oublier leur passage.
— Vous étiez… aussi nombreux ?
Le jeune homme hausse les épaules, puis s'appuie contre le mur. Son visage se ferme, il te parait soudainement vieux et fatigué, épuisé par les larmes et les pertes à répétition.
— Il y en avait d'autres avant nous. Nous… nous étions une petite vingtaine, à notre arrivée ici. C'était il y a cinq ans environ.
Quatre survivants. C'est tout ce qu'il reste. Les Hurleurs ont emporté beaucoup d'hommes et de femmes au cours de ces dernières années. Tu sais qu'ils ont tout pris, les corps, les sourires, les plaisanteries et la vie. Ils n'ont rien laissé.
Les ténèbres ne laissent jamais rien.
Tu accuses le choc tandis que Kaku se rapproche de toi, le pas lent.
— Charlos a pris Perona pour commencer, puis Ace et Bon-Clay. Sharlia est arrivée après, elle a emporté Shanks et Rebecca en une rafle, puis Shakky s'est sacrifiée pour l'empêcher de nous débusquer. Un peu plus tard, Enishida a disparue pendant une mission de ravitaillement. Paula, moi et quelques autres sommes partis sur ses traces… Deux d'entre nous sont revenus, car Rosward est apparu. Il a attrapé tous les autres.
Son regard te transperce, tout comme sa soudaine froideur. Il s'arrête face à toi, son souffle frappe ton visage et manque de le lacérer.
— Et il n'y a pas que les Hurleurs en dehors de ces murs.
Ta bouche s'ouvre, tu veux répliquer, mais aucun mot ne t'échappe. Tes paroles sont bloquées, coincées dans ta gorge asséchée. Lui te détaille puis s'écarte en soupirant.
— Je ne sais pas pourquoi tu veux remonter, mais sache que tu as peu de chances d'y arriver. En dehors des Hurleurs, les humains que tu croiseras sur ta route seront certainement hostiles. Les provisions se font rares, et la faim pousse le plus innocent des enfants à tuer.
Tu le sais. Tu t'es préparé à rencontrer monstres gigantesques et humains. Tu es prêt à verser le sang pour survivre, même si cela te pèse et te hante un temps. Tu sais ce qui t'attend au bout du chemin.
Tes regrets ne te consumeront pas longtemps.
— Et vous ? Pourquoi ne m'avez-vous pas tué ? Pourquoi m'as-tu sauvé ?
Il marque un temps d'arrêt, puis hausse les épaules avec un sourire désolé.
— Une faiblesse de cœur.
Kaku disparait dans les couloirs. Il te laisse seul. Seul avec les tombes et les fantômes du passé.
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