Une nuit, Draco trouva Hermione assoupie dans la cuisine. Le fait lui parût suffisamment rare pour qu'il n'osa pas s'approcher davantage, par crainte de la déranger. Le sommeil donnait à son visage une étrange sérénité, comme s'il la délestait, pour quelques heures, des préoccupations de la guerre et des charges qu'elle y endossait.

En d'autres circonstances, songea-t-il, il aurait sans doute pris un malin plaisir à la réveiller et à la sommer de déguerpir. Mais en vérité, il n'existait pas d'autres circonstances où il aurait croisé Hermione Granger endormie dans une cuisine en pleine nuit.

Tout était différent, désormais.

Draco remonta dans sa chambre.


Les pas de Hermione s'arrêtèrent devant le seuil de la cuisine en y découvrant deux personnes enlacées dans les bras l'une de l'autre. Au vif contraste de leurs cheveux, blondeur contre noirceur, elle reconnut Draco et Pansy. Alors qu'elle s'apprêtait à partir pour préserver leur intimité, Hermione fut retenue par la vague impression que quelque chose n'allait pas dans cette embrassade.

Une tasse gisait au sol, en morceaux. Une chaise semblait avoir été jetée contre le mur.

Draco serrait contre lui le corps tremblant de la jeune femme, dont les poings martelaient sans force son torse, avant de s'accrocher à lui comme à l'une des dernières personnes qu'elle avait sur terre. Il semblait tenter de faire tenir debout une poupée brisée, qui menaçait de s'effondrer sous les secousses de ses propres sanglots.

Hermione se rendit compte qu'un sortilège insonorisait la pièce. La scène n'en était que plus tragique. Des cris et des pleurs muets déchiraient le visage de Pansy, tandis qu'une main consolatrice caressait ses cheveux.

Une attaque éclaire avait été menée au Manoir Parkinson, pour y délivrer des membres de l'Ordre déténus. L'opération avait été un succès. M. Parkinson, cependant, comptait parmi les ennemis abattus.

Draco leva les yeux vers Hermione. Elle baissa les siens, écarquillés et humides, puis partit.


Quelques jours après, une tasse de thé fumante attendait Draco dans la cuisine vide. Un sortilège la maintenait vraisemblablement chaude. Il sut immédiatement qui l'avait laissée ici, pour qui et pour quoi. Qui d'autre fréquentait les lieux si tard ?

Une fois assis devant l'offrande, il plaça une main hésitante sur le bord de la tasse et sentit contre sa paume la chaleur d'une attention.

En portant l'infusion à ses lèvres, il se demanda depuis combien de nuits Hermione lui préparait cette boisson.