Bien le bonjour (ou bonsoir, pour les oiseaux de nuits) ! Le chapitre 6 vient d'être bouclé alors je me décide à vous livrer le chapitre 5 ! Je rentre en période de révision pour les examens de fin d'année et ça va être pas mal chargé pour moi le mois prochain mais si vous avez bien suivi j'ai encore un chapitre sous le coude si nécessaire !

En attendant, un merci tout particulier à FelicityCarrow pour ses reviews toujours aussi motivantes et évidemment à Juliette, qui est un soutien inébranlable !

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Londres, Square Grimmaurd, juin 1948

Sous les coups de cinq heures de l'après-midi, elle avait fini par descendre au salon. Ses parents et elle avaient décidé de retourner dans le Kent depuis quelques années maintenant. Son père battait le chaud et le froid avec son cousin Arcturus depuis des mois pour de vieilles querelles et aux dernières nouvelles ils ne se parlaient plus depuis des semaines. Son père partait au Ministère chaque matin et n'en revenait que tard le soir alors que sa mère passait son temps à sortir et recevoir pour tuer l'ennui. Quant à elle, elle se calquait sur le rythme de sa mère. Les journées se ressemblaient toutes depuis qu'elle avait quitté Poudlard. Alphard et Cygnus rentreraient pour les vacances d'été, l'un de l'école et l'autre de voyage, et elle accueillait avec joie leur retour pour égayer ses journées un peu mornes.

Elle enviait Lucretia qui vivait au Square Grimmaud, dans l'effervescence des soirées, et au rythme des allées et venues de chacun. Elle savait que sa mère préférait la tranquillité du Kent. Il fut une époque quand elle était enfant, où elle aurait exécré vivre à Londres entourée de tous les autres, sans intimité, sous leur constante surveillance. Dorénavant, elle comprenait que le Square Grimmaud n'était pas qu'une simple résidence. C'était avant tout l'épicentre de leur famille, le lieu où tout ce jouait. L'entêtement de leur père à ne pas se réconcilier avec leur cousin les poussaient pratiquement à vivre en autarcie loin des leurs.

Son grand-père Cygnus Black était en effet mort depuis quelques années, le vieux Sirius ne tarderait pas à partir lui aussi et Arcturus deviendrait le chef de famille. Pourtant, son père refusait de mettre son orgueil de côté et campait sur ses positions comme un vieil ours.

« Walburga, viens-tu avec moi au Chemin de Traverse ? lui demanda sa mère en revêtant sa cape sur ses épaules. Ton père m'a demandé de lui acheter quelques ingrédients. Nous pourrions en profiter pour te trouver une nouvelle robe. »

Walburga hocha la tête et ordonna à l'elfe de lui apporter sa propre cape et son chapeau. Au moins cette sortie lui changerait les idées. Sa mère l'attendait devant la cheminée avec un peu de Poudre de Cheminette dans les mains. Walburga entra dans la cheminée à sa suite et les flammes les enveloppèrent.

En arrivant au Chaudron Baveur, elles furent reconnues par le gérant qui leur témoigna un respect marqué et lui accordèrent un signe de tête poli en retour avant de sortir. Walburga respira enfin, loin des effluves de Bièraubeurre et les brouhahas entêtants. Elle détestait le Chaudron Baveur, toujours rempli d'étrangers et d'irréductibles ivrognes selon elle.

« Allons de suite chez Tissard et Brodette. Je tiens à ce que tu sois présentable pour la réception des Flint la semaine prochaine. Il y aura sans doute les Rosier, lui glissa sa mère d'un air entendu ».

Walburga leva les yeux au ciel face aux illusions que sa mère entretenaient depuis déjà quelques années. Son idylle avec Félix Rosier s'était arrêtée aussitôt qu'elle avait commencé. Elle s'était lassé de ce garçon plein de charme mais à l'humeur si prévisible. Elle n'avait jamais compris son dévouement envers ce parvenu de Jedusor, aussi talentueux soit-il. Le talent ne faisait pas tout, il n'était pas toujours suffisant. Il y avait des choses comme la pureté du sang par contre qui était immuable. Elle n'aurait pu supporter, ou n'en voyait du moins pas l'utilité, de devoir le suivre à son tour et se ranger derrière un homme qui avait surement la moitié de son hérédité.

Elle avait eu beau l'expliquer à ses parents bien sûr, ils n'en avaient retenu que ce qui les intéressaient. Les Rosier étaient l'une des familles les plus influentes de Grande-Bretagne mais également de France. Son père voyait cela comme une aubaine, tout comme sa mère, pour asseoir un peu plus sa position en société ou au Ministère. Comme s'ils en avaient besoin… C'était ridicule.

Sa mère la laissa fureter dans les rayons à sa guise, son attention s'étant vite portée sur une belle toilette avec des plumes d'Augurey. Elle insista même pour l'essayer et Walburga voyait dans les yeux de la vendeuse le doute s'installer. Elle comprit bien vite en voyant sa mère désormais vêtue de la robe de soirée, les plumes d'Augurey lui chatouillant le cou et le cintrage de la robe faisant ressortir les défauts de son corps, gâté par les années et la paresse d'une vie bourgeoise. Elle se rappelait de la taille gracile que sa mère possédait lorsqu'elle était plus jeune et ne put s'empêcher de craindre le pire pour elle-même.

« Walburga qu'en penses-tu, chérie ? lui demanda-t-elle en se regardant tour à tour dans les deux miroirs à sa disposition ».

Walburga s'approcha et lui lança un regard critique. Elle ne pouvait décemment pas laisser sa mère porter cette robe, dans cet état, chez les Flint.

« Après quelques retouches se sera parfait sans doute ? demanda-t-elle en direction de la couturière ».

La jeune femme détourna le regard de sa mère et lui retourna un sourire de circonstance.

« Bien évidemment, cela pourra être fait pour la semaine prochaine sans aucun soucis, leur répondit-elle avec entrain en agitant sa baguette ».

Un mètre alla s'étendre autour d'Irma Black en prenant les mesures de long en large sous son regard enchanté, alors qu'elle continuait de se regarder en caressant les plumes d'Augurey.

« Il faudrait que cela soit prêt pour après-demain en réalité, contra Irma avec détachement. »

Les joues de la couturière s'empourprèrent alors qu'Irma et Walburga fronçaient désormais les sourcils avec réticence.

« Eh bien, je suis désolée, j'ai beaucoup de commande ces derniers temps, je ne sais pas si…

- L'argent n'est pas un problème voyons, l'interrompit Irma avec brusquerie. »

La vendeuse ne savait désormais plus ou se mettre. Elle bafouillait devant elles et trituraient ses mains d'une façon qui exaspéra Walburga.

« Oh Madame, je n'ai aucun doute là-dessus, c'est juste que j'ai énormément de commande à honorer, et j'aurais peur de ne pas pouvoir parvenir à faire votre…

- Très bien, si vous êtes si demandée pour vouspermettrede refuser, nous irons ailleurs, trancha Walburga en replaçant sa cape sur ses épaules, alors que sa mère sortait de la cabine. »

La robe d'Augurey avait été délaissé sur un tabouret dans la cabine et ne semblait plus si élégante maintenant.

« Je peux surement m'arranger, abdiqua la couturière en se frottant le front avec une mine soucieuse. »

Walburga et Irma se dressèrent devant elle avec une attitude orgueilleuse qui eut finit de mettre mal à l'aise la jeune couturière.

« Puis-je prendre votre nom et votre adresse Madame ? demanda-t-elle en se dirigeant vers son comptoir pour y prendre une plume qui trempait dans son pot d'encre.

- Mrs. Irma Black, répondit sa mère le menton haut en réajustant son énorme chapeau. »

Walburga vit les épaules de la couturière se crisper impercticiblement et tourner les pages de son cahier de commande avec frénésie, avant de se tourner vers elle.

« Je vous prie de m'excuser Mesdames, je viens d'être embauchée, votre commande sera prête pour demain sans faute ! »

Irma accueillit la nouvelle avec dédain, de toute évidence indifférente à l'effort fait par la jeune couturière qui allait sans doute passer une courte nuit.

« Bien, nous n'allons pas rester là toute la journée, notre elfe de Maison viendra chercher la commande, demain, en fin d'après-midi, trancha Irma en sortant une bourse de Gallions de son sac à main. »

Quant à Walburga, l'envie de regarder les robes pour elle-même lui passa bien vite. Elle préférait retourner dans une autre boutique plutôt que de devoir subir la même scène une nouvelle fois. La robe aux plumes d'Augurey était de toute manière la seule tenue assez sophistiquée qu'elle avait pu observer. Tout le reste était trop ordinaire ou désuet. Elle se promit de ne pas y remettre les pieds tant que leur service ne se saurait pas amélioré.

Lorsqu'elles ressortirent de la boutique, sa mère semblait un peu échevelée.

« C'était bien mieux du temps de Mrs. Bulstrode. Quand elle a décidé de vendre tu venais juste d'entrer à Poudlard je me souviens. Si elle voyait ce qu'est devenu son commerce aujourd'hui, la pauvre. Je te pries de croire que j'inspecterais à deux fois cette robe lorsqu'elle sera retouchée ! »

Elles continuèrent de se balader dans les rues, arpentant les allées et s'arrêtant parfois pour regarder les vitrines ou saluer quelqu'un qu'elles connaissaient. Walburga trouva finalement une robe pour la fête des Rosier et une autre qu'elle n'avait pas pu s'empêcher d'acheter. Elles se rendirent à l'apothicaire pour y trouver les fameux ingrédients que son père les avaient envoyé chercher initialement. Sa mère fut d'ailleurs soulagée que Walburga puisse vérifier leur qualité. Irma Crabbe n'avait jamais été très douée dans l'art de la fabrication des potions au contraire de sa fille et de son mari. Walburga se disait souvent que sa mère venait d'une époque où une fille issue de son rang n'avait aucun besoin d'être une excellente sorcière. Or, aujourd'hui elle notait que les hommes de sa génération appréciaient d'une femme qu'elle soit plus que correctement instruite et cette évolution dans les mœurs sorcières l'enchantaient fortement.

« Allons chercher quelques chocolats pour ton frère, s'exclama Irma. Et pourquoi pas une nouvelle chemise ? Je suis si heureuse qu'il revienne de son voyage ! »

Après leur sortie de Poudlard l'été dernier, Cygnus et Orion avait décidé de partir faire un grand tour d'Europe pendant plusieurs mois. Leurs pères respectifs les avaient hautement encouragés. A cette époque, Arcturus et Pollux Black étaient relativement en bons termes et avaient participé avec entrain à l'organisation du voyage en allongeant les pièces de Gallions par centaines selon les envies et les caprices de leurs fils. Walburga s'était sentie un peu jalouse de cette opportunité qui avait été offerte si facilement à Cygnus, lui qui était si désobéissant depuis enfant. Elle lui en avait voulu un peu aussi. Pendant qu'il s'amusait dans les plus grandes capitales sorcières d'Europe, elle et ses parents couraient les médicomages et les guérisseurs en tout genre avec Alphard. Lui aussi reviendrait bientôt et il voyagerait pour la dernière fois à bord du Poudlard Express. Dans moins d'une semaine il devrait se faire une place dans la société, comme leurs parents avant eux, comme Cygnus, comme elle. Elle mentirait si elle ne s'avouait pas inquiète.

Sa mère fit ses dernières courses et elles revinrent les bras chargés de sacs et de paquets en tout genre. Sans qu'elles n'aient rien eu besoin de demander, leur elfe de Maison les débarrassa de leurs charges avec empressement.

Elles trouvèrent leur père dans le petit salon, ses lunettes au bout du nez, installé dans le fauteuil qu'il se réservait et le menton crispé. Il leva à peine les yeux lorsqu'elles se présentèrent devant lui.

Irma ne se formalisa pas de cet air mécontent. Il y avait longtemps qu'elle ne s'en offusquait plus, d'ailleurs. Pollux Black était un éternel insatisfait qui se plaignait même du beau temps. Une lettre frappée aux armoiries des Black était posée sur la table et Walburga devina bien vite que ça devait être sa lecture qui avait contrarié son père.

« Des nouvelles d'oncle Sirius ? demanda-t-elle malgré tout avec curiosité. »

Sa mère releva la tête elle aussi avec un intérêt mal dissimulé.

« Rien de grave, espérons-le, pria-t-elle en lorgnant le parchemin qu'elle rêvait de pouvoir survoler à son tour. »

Pollux marmonna dans sa barbe et sortit un cigare de sa poche qu'il alluma d'un claquement de doigt. Walburga plissa le nez, c'était une odeur qu'elle exécrait plus que tout.

« Suite à la mésalliance de cette petite sotte de Cedrella avec ce Weasley, mon oncle apprécierait que nous retournions vivre définitivement au Square Grimmaurd, lâcha-t-il d'une voix grave. »

Walburga échangea un regard étonné avec sa mère qui de son côté en avait pali. Irma détestait Londres. Parfois il lui arrivait de se plaindre de la solitude du Kent, bien qu'elle reçoivent régulièrement des amies. Mais elle ne tenait jamais plus d'une semaine au Square Grimmaurd avant de se morfondre. Walburga était convaincue que cette brouille entre Arcturus et son père l'arrangeait bien au fond.

« C'est ridicule, Cedrella est partie depuis plusieurs années déjà, pourquoi maintenant ? s'enquit-elle avec agacement.

- Entre cela, nos lois que Phineus essaye d'abroger sans relâche, la maladie d'Alphard et notre éloignement, lui et Arcturus estiment que nous devrions montrer un front uni. D'autant plus avec cette affaire de justice ridicule avec Regulus … Il est vrai que notre famille a connu des jours meilleurs, souffla-t-il avec lassitude ».

Sa mère renifla avec mépris. Des sorciers du parti progressiste au Ministère avait demandé une enquête sur les agissements de Regulus Black, le fils de Sirius et d'Hesper. Certains disaient qu'ils avaient des liens avec des fidèles de Grindelwald qui tentaient toujours de se reconstituer, malgré l'enfermement de leur mentor. Le plus humiliant était que ces odieuses accusations avaient été lancées par l'oncle renégat de leur père, Phineus Black. Pollux était persuadé que ce n'était qu'une énième tentative pour l'empêcher de s'opposer au mouvement d'abrogation des lois pro- Sang-Pur mené par Phineus. Pour autant, la Gazette du Sorcier se faisait une joie d'écrire des papiers sordides sur le dévouement supposé de la famille Black à la cause de Grindelwald.

Il fallait bien avouer que depuis l'arrestation du grand mage noir, les vautours n'avaient plus grand-chose à se mettre sous la dent pour attirer leurs lecteurs.

« Que comptez-vous faire alors ? s'enquit Irma avec défiance. Refuser, sans doute. Alphard a besoin de calme vous le savez, et je refuse de vivre une fois encore sous la surveillance et les ordres de votre tante.

- Vous n'aurez pas à la subir très longtemps encore dans le pire des cas, répondit Walburga, d'humeur piquante. »

Ses parents la dévisagèrent d'un regard outré pour l'une, furibond pour l'autre.

« Garde ce genre de réflexions pour toi, oiseau de mauvais augure, assena Pollux avec sévérité.

- Je ne prédis rien, j'avance des faits, se vexa-t-elle. Hesper est malade depuis plusieurs années et Lucretia ne cesse de me dire que son état empire chaque jour dans ses lettres. »

Son père darda sur elle un regard noir, lui ordonna silencieusement de se taire. Elle se renfrogna dans son siège alors que sa mère continuait de requérir des réponses de la part de son mari.

« Cessez de vous emporter ainsi Irma, s'exaspéra-t-il. Cela ne m'enchante pas particulièrement, mais il est vrai qu'il est sans doute temps d'oublier le passé et de me réconcilier avec mon cousin. C'est sans aucun doute la volonté de son vieux père, je ne suis pas idiot. La famille a toujours été importante pour lui. Du moins, l'imagede la famille ».

Son père porta le cigare à sa bouche, ses yeux fixant un point dans le vide, tout à sa réflexion.

« Vous m'exaspérez, vous et vos humeurs changeantes !, Ne put s'empêcher de répondre Irma. Ne jouez pas à ce jeu avec moi, je sais pertinemment que vous attendez ce jour avec impatience, celui où vous pourrez poser vos valises dans la Maison de votre famille. Mais je vous trouve particulièrement égoïste de ne penser ni à moi ni à vos enfants. »

Le regard de Pollux se porta sur Walburga qui écoutait la scène avec une indifférence feinte. Elle connaissait déjà la réponse que son père donnerait à Sirius Black, et elle ne s'en plaignait nullement.

« Au contraire, je refuse que nos enfants soient écartés des décisions concernant cette famille, rétorqua-t-il avec véhémence. Cygnus doit renforcer ses relations, s'imposer lui aussi comme un héritier. Walburga, ma fille, ceci s'applique aussi à toi et quant à Alphard, la société ne peut lui être que bénéfique. »

Walburga esquissa un sourire satisfait. Comme elle le disait souvent, elle détestait Londres étant enfant. Vivre entourée de tant de personnes n'étaient pas toujours plaisant. Mais elle se rendait bien compte de ce qu'elle perdait en restant isolée du reste de sa famille. Les Black était une grande famille de sorciers, reconnus par leurs semblables. Elle refusait de voir Lucretia évoluer dans la société et regarder ça de loin sans pouvoir y prendre parti, comme une héritière de second rang, ce qu'elle n'était pas comme l'avait justement noté son père.

« Avant que vous n'y trouviez quelque chose à redire, vous profiterez d'un repas organisé en l'honneur de Cygnus et Orion pour leur retour. Mon oncle tient à ce que l'on organise une grande fête pour cela, leur annonça Pollux ».

Il se leva de son fauteuil, signifiant ainsi la fin de la conversation et Walburga vit sa mère ravaler des paroles venimeuses. Elle s'enferma dans un mutisme qui sembla ravir son père pendant quelques jours qui suivirent. Seul le retour de Cygnus, puis d'Alphard quelques jours plus tard lui redonna la parole et le sourire. Le Kent lui sembla tout à coup plus chaleureux.

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Square Grimmaurd, Londres, juillet 1948

Ce fut Melania Black qui les accueillit en tant que maitresse de Maison ce soir-là. Walburga ne fut pas étonnée de voir sa grand-tante Hesper, percluse dans un fauteuil au centre de la pièce, dans une posture figée et douloureuse. Sa robe de soirée laissait apparaître la maigreur de son corps malade et la parure de diamant qui ornait son cou ne faisait qu'accentuer la raideur de ses épaules chétives. La maladie l'emporterait bientôt et Walburga était répugnée malgré elle qu'on la laisse se présenter dans un si piteux état aux yeux de tous.

Son oncle Sirius se tenait à côté d'elle, avachi sur sa canne et elle comprit bien vite ce qui avait poussé le vieil homme à écrire cette missive à son père.

Son père les conduit près d'eux avec ce flegme qui le caractérisait et ils les saluèrent sans faire aucun commentaires, dans la plus parfaite indifférence. Puis, Arcturus se présenta à eux, fit face à son père et lui serra la main après un instant de réticence. Walburga et le reste de sa famille les laissèrent seuls et partirent saluer leurs oncles et tantes, en terminant pas ses cousines.

Les invités se succédaient tous et elle reconnut nombre de ses anciens camarades de Poudlard. Cygnus avait déjà disparu dans la foule. Elle se décida alors à entraîner Alphard dans un coin de la grande salle en faisant fi des regards curieux que l'on jetait à son frère. Ses parents, son frère et elle avait eu la mauvaise surprise de le voir revenir plus souffrant que jamais. Il ne s'en était pas plaint une seule fois, mais nul ne pouvait ignorer son allure souffreteuse. Cette image lui avait sauté aux yeux lorsqu'elle l'avait vu se tenir aux côtés de Cygnus et Orion, pleins de vigueur, quelques instants plus tôt.

Elle ne lui proposa pas de s'asseoir, elle savait qu'il refuserait par excès d'orgueil et ordonna plutôt à un elfe de leur servir à boire.

« N'as-tu donc personne à aller saluer ? Je n'ai pas encore besoin que l'on me tienne la main, lui demanda-t-il avec aigreur en fuyant son regard ».

Ses yeux gris, semblable aux siens, lorgnaient l'assistance avec dureté. Il vida la coupe qu'il tenait entre ses mains avec une rapidité qui la déconcerta, car elle ne l'avait jamais vu boire auparavant. Elle préféra cependant se taire, bien qu'une remarque acerbe ne lui pende aux lèvres. Lui faire des remontrances ne servirait à rien pour l'heure.

« Fais un effort toi-même pour aller vers les autres cette fois-ci, rétorqua-t-elle avec rudesse, vexée par le ton employé par son frère contre elle. Père, ne supportera pas que tu te renfermes toute la soirée ».

Il ne put s'empêcher de ricaner avec moquerie devant elle, mais continua d'éviter son regard.

« Que veux-tu que cela me fasse, lui demanda-t-il avec un sourire en coin. Je me fiche de ce que vous pensez tous ».

Walburga ne s'en formalisa pas cette fois-ci. Elle connaissait trop bien cette nature orgueilleuse qu'il cachait sous des élans de rébellion qui n'allaient jamais plus loin que des mots lancés à la volée. Sa jeunesse, sa fierté et ce sentiment d'injustice qui l'étreignait lui donnaient des ailes et il essayait parfois de leur faire croire à une volonté d'indépendance qu'il n'avait que dans ses rêves.

Lucretia arriva près d'eux, ses longs cheveux blonds ramenés en un chignon de circonstance et une robe de couleur bleue qui marquait ses formes pulpeuses. Walburga avait toujours enviée les formes féminines et généreuse de sa cousine. Elle n'en était pas dénuée mais sa silhouette longiligne dénotait singulièrement à côté d'elle.

« Je suis contente de vous voir. Alphard cela fait si longtemps ! Comment se sont passés tes A.S.P.I.C.S ? »

Alphard lui décerna son premier sourire de la soirée, atténuant la fatigue qui marquait son visage le temps de quelques secondes.

« Je pense pouvoir te rassurer sur ce point avec suffisamment d'assurance. Le professeur Slughorm m'a déjà assuré que j'avais excellé en Potions et en Métamorphose.

- Ravie de l'entendre, se réjouit-elle. Tu te souviens de mon cousin Ewen MacMillan ? Il a quitté Poudlard il y a deux ans, te souviens-tu ? Il espérait t'apercevoir ce soir ! Puis-je t'amener à lui ?

Walburga sentit la contrariété poindre en voyant l'attitude décomplexée d'Alphard face à leur cousine, toujours aussi babillarde. Il lui adressait de francs sourires, lui qui semblait si morose depuis son retour à la maison. Et cela lui sembla injuste de voir avec quelle facilité il se détournait d'elle malgré tous ses efforts pour lui rendre la vie plus facile.

Lucretia glissa son bras sous celui de son cousin et Walburga se sentit jalouse lorsque le rire bruyant de Lucretia s'éleva parmi la foule alors qu'Alphard lui glissait des taquineries à l'oreille.

« Walburga, tu te joins à nous, n'est-ce-pas ? demanda Lucretia en voyant qu'elle restait en arrière. »

Mais elle n'avait aucune envie de retrouver le cousin de Lucretia. Ewen MacMillan était aussi idiot qu'inconvenant et elle aurait bien mis en garde Alphard de se trouver en sa compagnie si elle ne se sentait pas trahie malgré elle par la bienveillance qu'il réservait à Lucretia et dont il la privait depuis des jours.

« Sans façon, rétorqua-t-elle sans chercher à atténuer le mépris dans sa voix. »

Lucretia leva les yeux au ciel et échangea un regard entendu avec Alphard avant de tourner les talons et de se diriger vers la table où des coupes avaient été déposées. Elle avait à peine refermé ses doigts autour du cristal que la coupe se remplie du liquide doré et pétillant si reconnaissable.

Plus loin elle reconnut Leonora en compagnie de Norma Flint, mariée depuis peu à l'ainé des Flint. Norma n'avait que quelques années de plus qu'elles mais le mariage semblait lui avoir donné un côté plus mature. Walburga la trouva moins gauche et plus affirmée dans ce nouveau rôle.

« Walburga, je m'étonnais de ne pas t'avoir encore aperçue. Ta famille a fait les choses en grand, cette salle est magnifique, la complimenta Norma cordialement.

- Je te remercie, même si tout le mérite revient à Melania.»

Norma lui offrit un sourire contrit.

« Oui, j'ai cru comprendre que ta tante n'allait pas fort ».

Walburga eut beau chercher elle ne décela aucune moquerie ou arrogance dans ces mots, mais elle ne put s'empêcher de se montrer méfiante. Elle lui répondit avec ce même air entendu avant de détourner la conversation vers sa vie de jeune mariée.

« Évidemment, le mariage a aussi son lot de responsabilités, mais je n'ai pas à me plaindre. Je dirais même que j'accueille avec plaisir ses nouvelles occupations. Mes journées se succèdent sans que je ne les voient passer. »

Leonora s'enquit de sa belle-famille, de ses relations avec elle et des dites responsabilités avec un intérêt accru qui laissa Walburga perplexe. Elles continuèrent à parler ainsi de banalités jusqu'à ce que Norma ne s'excuse auprès d'elles pour se diriger vers l'une des soeurs de son mari qu'elle venait d'apercevoir.

« Eh bien, elle semble moins empotée que l'année passée, nota Leonora avec dédain. Qui eut cru que le mariage pouvait être aussi salvateur sur un esprit simple et superficiel ? »

Walburga laissa un rire lui échapper en portant la coupe à ses lèvres. Elle n'aurait pas mieux dit.

« Elle déchantera bien vite lorsque sa lune de miel sera terminée et que Flint ne cachera plus ses conquêtes. On connait tous sa réputation. Ses journées lui paraîtrons alors interminable lorsqu'elle s'occupera d'une maison vide ».

Ses mots n'avaient pas vocation à être méprisant. Elle plaignait au contraire cette pauvre fille impressionnable et naïve sur la réalité de son mariage. Leonora sembla adhérer à sa vision des choses puisqu'elle opina du chef avec le même regard désenchanté.

« Lucretia me semble de plus en plus écervelée. Je l'entends piailler à tort et à travers depuis que je suis arrivée. »

Walburga ne pouvait la contredire, mais sa loyauté envers sa famille l'empêcher de corroborer à haute voix. Elle se contenta de garder le silence alors que son regard se portait sur sa cousine qui riait au bras de son frère et de son cousin Ewen. Elle se renfrogna instinctivement en entendant le faible rire d'Alphard raisonner jusqu'à elle.

« Walburga je dois te dire quelque chose, j'aimerais que tu l'apprennes de ma bouche plutôt que de celle de quelqu'un d'autre, lui dit Leonora en la regardant soudainement avec embarras et défiance. »

Walburga lui retourna un regard perplexe face à ce changement d'attitude. Leonora l'entraîna dans un coin plus isolé de la pièce.

« Je viens de me fiancer, lui dit-elle de but en blanc ».

Walburga la regarda d'un air éberlué. Elle ne s'était pas attendue à ce genre d'annonce mais après la surprise, elle ne comprenait maintenant pas bien pourquoi son amie prenait tant de précaution pour lui annoncer la nouvelle.

« Eh bien c'est une bonne nouvelle, s'exclama-t-elle. Pourquoi prends-tu cet air inquiet ? Ce sont tes parents qui te l'ont imposé ? Ou alors, il vient d'une famille, disons, moins traditionnelle ? »

Elle insista sur le mot, laissant comprendre à Leonora le sens qu'elle pouvait donnait à ce qualificatif. Cet air soucieux lui faisait craindre le pire. Peut-être Leonora s'était-elle entichée d'un jeune homme dont les convictions ne rejoignaient pas les siennes ? Pire encore, un garçon dont la lignée n'était pas aussi pure que la sienne ? A ce titre, elle comprendrait sans mal son embarras.

« Non, si je voulais te le dire en personne c'est parce qu'il s'agit de Félix Rosier ».

Walburga ne put empêcher un rire léger poindre dans sa gorge, son inquiétude passée.

« Par Salazar je m'attendais à tout autre chose ! Tu m'as presque fait peur un instant. Pourquoi cela devrait-il me déranger ? »

Leonora laissa de côté sa posture figée et s'approcha d'elle en passant une main sous son bras et l'entraîna faire quelques pas alors qu'un groupe de personne s'approchait.

« S'il te plait, je sais pertinemment que cela aurait pu être toi à ma place, lui chuchota-t-elle en lui glissant un regard entendu ».

Walburga voulait bien l'admettre. Félix Rosier aurait certainement fini par lui faire une demande si elle avait montré plus d'enthousiasme en sa présence. Mais comme elle l'avait souvent répété, si elle estimait son ancien camarade pour ce qu'il était, elle avait vite compris qu'il n'était pas ce qu'elle recherchait pour faire de lui son compagnon de vie. Elle n'avait pas d'idées romanesques sur le mariage comme nombre de jeunes filles de son âge. Elle savait pertinemment que le mariage était plus une alliance, dans son terme le plus pragmatique, qu'une histoire passionnée, ou passionnante, par ailleurs. Mais elle se mentirait à elle-même en pensant qu'un bon parti lui suffirait. Elle se savait exigeante et c'est pour cela qu'elle parvint à se réjouir pour son amie, car au fond elle savait qu'elle pouvait espérer mieux, même si elle ne savait pas exactement où ce mieuxla mènerait.

« Il a toujours été clair pour moi que Rosier, aussi charmant soit-il, ne serait jamais un choix pour moi. Même si tout semble dire le contraire, je pense que nous nous serions très mal accordés. Nous avons des caractères trop différents, lui expliqua-t-elle patiemment. »

C'est ce que Lucretia lui avait dit un jour et elle devait bien avouer qu'elle avait été assez clairvoyante sur cette affaire. Leonora laissa pour la première fois un sourire sincère percer sur ses lèvres teintées de rose et Walburga ne manqua pas de la féliciter comme il se devait. Elle réalisa par ailleurs qu'elle avait peut être sous-estimé l'admiration, si ce n'était même l'affection, que semblait ressentir Leonora à l'égard de son fiancé. Ses descriptions étaient bien trop tendres pour que cela ne se limite qu'à une simple attirance. Elle doutait sincèrement que Rosier partage son inclination mais à part cela, rien ne semblait s'opposer à ce que cette union soit prospère.

« Mon oncle nous invite à table nous devrions y aller, énonça Walburga en remarquant les convives se diriger vers la pièce adjacente. »

Son oncle et sa tante l'avait placé aux côtés de Lucretia, surement à la demande de cette dernière. Alphard ainsi que leurs parents respectifs encadraient Cygnus et Orion. Ces derniers semblaient au comble du bonheur d'être le centre d'attention de la soirée. Cygnus parlait et riait à tort et à travers en se laissant porter par l'alcool, ce qui semblait agacer de plus en plus leur père soit dit en passant. Orion, lui, le suivait avec plus de réserve mais il échangeait avec ses invités avec une complaisance qui ne trompait pas. Walburga se surprit à l'écouter raconter à l'assistance leur rencontre fortuite avec un Dragonniste roumain qui leur avait ouvert l'accès à la Réserve Nationale de Roumanie après qu'ils aient sympathisé. Cygnus compléta son récit avec une description très précise des dragons étudiés là-bas qui captiva son auditoire. Walburga crut voir Norma Flint manquer de tourner de l'œil lorsqu'il leur raconta comment un gardien de nuit un peu trop sûr de lui avait fini par perdre la moitié de son bras pendant la ponte d'une dragonne. Cygnus aurait surement pu leur épargner quelques détails avec un peu de recul. Elle-même se serait volontiers passé de cette histoire alors que les elfes leurs servaient l'entrée.

« Et Varsovie, avez-vous pu y séjourner quelques jours ? demanda Mr. Avery à quelques place de là. Cette ville est connue pour regorger de théoriciens de la magie, notamment en Défense contre les Forces du Mal. Elle m'avait fait forte impression lorsque je m'y suis rendue à la fin de mes études. C'était réellement un endroit singulier !

- Nous y sommes passés bien entendu, mais je crains que la ville que vous avez connu n'est plus rien d'unique aujourd'hui. Cette guerre chez les Moldus a laissé un vrai champs de ruine derrière elle, expliqua Orion en fronçant les sourcils.

- Et comme ceux-ci sont eux-mêmes limités par leurs moyens, ce qui prendrait une journée à reconstruire pour des sorciers se fera en des années pour des Moldus, corrobora Cygnus avec un sourire désabusé. »

Pour être honnête, cette guerre lui parlait peu. Elle n'en savait que ce que la Gazette avait pu en raconter ou son père et ses professeurs avaient pu lui expliquer. Elle avait passé la plupart de son temps dans le Kent, et le manoir était assez bien protégé pour qu'aucun Moldu ne l'approche, ni par la terre, ni par le ciel. D'autant plus, que la campagne avait été épargné en Angleterre. Et lorsqu'elle était à Square Grimmaurd, les même protections avaient fait leurs œuvres, les protégeant des attaques intempestives des Sang-de-Bourbe. C'est à peine s'ils pouvaient entendre le bruit des bombesà travers les fenêtres. Mais elle avait vu ces images désolantes, ces villes entières réduite en cendre, ces Moldu en guenilles qui marchaient en masse vers un point incertain. Qui d'autres que des barbares pouvaient ainsi s'entretuer avec autant de violence et de ferveur ?

« Nous avons d'ailleurs croisé peu de sorciers. La plupart ont certainement du préférer partir pour ne pas assister à ce carnage, siffla Cygnus avec mépris. A ce qu'on dit leur guerre a fait des millions de morts.

- Ils ont embrasé l'Europe pour y laisser des territoires décimés qui ne représentent que désolation. C'est incroyable quand on y pense, continua Orion avec une certaine acrimonie. »

Chacun y alla de son petit commentaire. Tout ceci ne lui inspirait que du dégoût. Grindelwald avait bien raison de se méfier des Moldus. Ils étaient violents par nature, pernicieux dans leurs chairs, capables du pire. Et pourtant certains continuaient de les défendre aveuglément, comme ce traître de Phineus Black, malgré leurs crimes d'une façon qu'elle ne pouvait comprendre.

« Mais cette guerre de Moldus était l'œuvre d'un fou, commenta Ewen Macmillan en regardant Orion avec incompréhension. Peut-on vraiment blâmer aussi facilement tousles moldus ? Dans ce cas pourquoi ne pas incriminer les centaines de sorciers qui ont approuvé Grindelwald en pensant qu'ils agissaient pour le plus grand bien ? ».

Walburga sentit Lucretia se tendre à côté d'elle alors qu'elle-même ne pouvait s'empêcher de durcir son regard vers lui. Elle remarqua la mère d'Ewen tirer discrètement sur sa manche et devenir aussi blanche que la nappe à ses côtés. Mais il fit semblant de ne pas le voir, toute son attention tournée vers Orion dans une attitude quelque peu défiante.

« Je trouve la comparaison avec Grindelwald hasardeuse, répondit Orion en lui retournant un regard ombrageux. »

Son ton était calme mais ferme, il refusait d'entrer dans ce débat, de donner du crédit à l'avis de Macmillan. Mais les muscles de sa mâchoires se crispaient impercticiblement.

« Ces moldus ont suivi aveuglément des ordres en mettant leur propre conscience de côté. Ont-ils vraiment une conscience, c'est à se le demander ? renchérit Mr. Selwyn en prenant à parti l'ensemble de la tablée. Ils se sont bêtement entre-tués. Cela ne fait que révéler leur vraie nature à mon humble avis. Grindelwald avait compris le besoin de les maîtriser en un certain sens. »

Plusieurs levèrent leurs verres ou acquiescèrent vivement à ses propos.

« C'est mal connaître les enjeux de cette guerre, mais aussi les moldus, que de penser cela il me semble, insista Ewen sans cacher son désaccord à présent. »

Mr et Mrs. Macmillan ne semblait plus savoir où se mettre alors que toutes les têtes se tournaient vers Ewen avec des mines réfractaires. Walburga vit Cygnus face à elle reposer son verre avec force sur la table. Lui non plus n'avait jamais beaucoup aimé Ewen mais elle lui lança malgré tout un regard d'avertissement alors qu'Alphard souffla de lassitude à côté d'elle, habitué aux sautes d'humeur de leur frère.

Cygnus ne put s'empêcher de débattre avec Ewen et Walburga observa le cou de son père devenir de plus en plus rouge sous sa barbe poivre et sel. Majeur ou non, Cygnus se prendrait encore une rouste lorsqu'ils rentreraient. Leur père détestait se donner en spectacle, et il craignait le caractère emporté de son fils qui avait parfois du mal à appréhender la limite entre liberté de parole et bienséance.

« Quitte à se faire remarquer, ne pouvait-il pas plutôt nous raconter ses rencontres avec de belles sorcières étrangères ? lui murmura Alphard avec lassitude. Cela aurait au moins eu le mérité d'être intéressant. »

Walburga cacha son rire derrière sa coupe d'hydromel.

« Que Merlin nous protège du jour où il choisira une sorcière aussi impertinente et agaçante que lui pour femme, je ne sais pas si je pourrais supporter plus de lamentations.

- Tu es bien trop conventionnelle, la taquina son frère désormais très alerte. Je ne parlais pas vraiment de ce genre de rencontre. »

Elle manqua de s'étouffer en entendant le ton plein de sous-entendu d'Alphard à son oreille. Ses yeux se tournèrent vers Cygnus qui parlait maintenant en agitant les bras. Elle n'avait jamais regardé son frère de la sorte jusqu'à lors. C'est comme si elle réalisait que Cygnus était maintenant un jeune homme, comme Alphard lui-même était devenu un jeune homme et comme Orion l'était lui aussi. Ils lui paraissaient toujours tous si jeune, de telle manière que cette image, où Cygnus courtiserait des femmes, n'arrivait pas à se former dans son esprit encore dupe. Elle n'avait aucun mal à imaginer le jour où ils prendraient tous épouse, mais cela paraissait si lointain encore qu'elle les imaginaient presque portant la barbe et l'uniforme. Pour autant, il n'était pas exclu qu'ils soient déjà expérimentés dans les choses de l'amour, et cela lui avait échappé jusqu'à aujourd'hui.

Walburga tourna un regard inquisiteur vers son frère et Alphard lui rendit un regard pétillant, celui qu'il avait dans ces bons jours, le premier qu'elle voyait depuis son retour de Poudlard. Elle le savoura pleinement, jusqu'à en oublier de les questions qu'elle souhaitait lui poser. Mais son jeune frère n'avait pas manqué son regard incrédule.

« Rassure-toi, rien de sérieux pour le moment. Aucune jeune sorcière, sotte et ignorante, ne viendra s'enchaîner à lui avant quelques temps encore.

- Pourquoi serait-elle nécessairement sotte et ignorante ? Ne put-elle s'empêcher de relever. »

Alphard et elle adorait taquiner Cygnus, tout comme Cygnus et Alphard adorait la taquiner. Alors elle n'était pas vraiment étonnée de sa remarque, juste curieuse.

- Car aucune personne saine d'esprit ne viendrait s'emprisonner à cet exalté de la baguette de son plein gré, lui confia Alphard avec un air mutin. Et si c'était le cas, quelques mois de mariages rythmés par leurs scènes de ménages devraient suffirent à lui faire plier bagage.

- Mettons toutes nos chances de notre côté pour nous installer avant lui et ne pas assister à ce désastreux spectacle dans ce cas, conclut-elle avec un amusement non feint ».

Elle observa Alphard se renfrogner et il lui jeta un regard désillusionné, bien qu'il tenta de le cacher derrière un sourire léger. Mais Walburga sentait qu'il s'était déjà renfermé, qu'il s'était retranché dans des pensées que lui seul connaissait et où elle n'avait jamais réussi à en avoir l'accès.

« A toi l'honneur, lui dit-il simplement avant de remplir son verre d'hydromel. »

Elle sentit la commissure de ses lèvres retomber aussi vite que l'euphorie de ce bref échange et regretta ses mots qui pourtant n'avait été en rien prononcé à mauvais escient mais qui l'avait éloigné du moment présent. Elle n'aimait pas ce défaitisme qui accablait son frère continuellement. Elle aurait voulu prendre une part de sa douleur pour l'en soulager parfois.

Elle fit cependant semblant de ne rien voir et son attention fut ramenée vers le sujet principal de la conversation initiale de la tablée alors qu'à côté d'elle Lucretia prenait la parole. Walburga faillit en lâcher ses couverts lorsqu'elle entendit la voix fluette de sa cousine percer parmi les voix plus graves et matures des hommes autour de la table. Elle aperçut nettement Leonora froncer le nez avec dédain et elle devinait déjà ce qu'elle pouvait penser : que Lucretia ne savait pas se tenir. Elle vit son propre père, Pollux, avoir un rictus en lançant un regard en biais à Arcturus Black qui était à la droite de son père au bout de la table en tant que qu'hôte et chef de famille.

« Grindelwald avait des pratiques moyenâgeuses, dit-elle avec ennui en levant les yeux au ciel. Il a assassiné de jeunes sorciers très honnêtes. »

L'un des fils de Mr. Avery, Galaad, se racla la gorge et lança un regard circonspect à Lucretia. Walburga remarqua les joues de Lucretia rosirent lorsqu'elle remarqua enfin qu'elle avait attiré l'attention de plus de personnes qu'elle ne le pensait. On entendait plus que le bruit des couteaux et des fourchettes en argent s'entrechoquer entre eux.

« Rien a été prouvé à ce propos Miss Black, contra Galaad Avery d'une voix lente et condescendante. Je ne suis pas juriste mais je pense pour ma part que Grindelwald avait à cœur le sort des futures générations de sorciers. Aujourd'hui il est regrettable d'observer tous nos droits nous être retirés alors même que nos familles ont œuvrés pour la communauté magique depuis des générations. Votre famille elle-même a fait beaucoup pour notre pays. »

Ces propos furent chaleureusement accueillis dans l'assemblée et Sirius Black hocha la tête vers lui avec reconnaissance. Walburga n'était pas surprise, son oncle et sa tante avait organisé un dîner avec leur famille et leurs amis les plus proches et ils aimaient s'entourer de personnes avisés. Les autres, n'étaient que des convives de circonstances, comme cet Ewen Macmillan qui ne devait sa place ici qu'en tant que cousin d'Orion et Lucretia.

Cette dernière préféra se taire et plongea le nez dans son assiette. Orion, Cygnus et elle lui lancèrent un regard agacé alors qu'Ewen passait une main réconfortante dans le dos de sa cousine. Walburga lui décocha un regard polaire par-dessus son verre. Elle vit ses yeux se faire incertain et il retira prestement sa main. Ce côté de la famille avait décidemment un réel problème avec les convenances. Et elle en fut certaine lorsqu'elle le vit s'apprêter à prendre de nouveau la parole. N'avait-il pas conscience d'embêter tout le monde avec ses questions ? N'allait-il donc pas se taire ?

« Conserver nos droits ne signifie pas que nous devons en retirer aux autres, n'est-ce pas ? Grindelwald avait une approche pour la moins particulièrede la justice vous ne pouvez pas le nier, cousin ? Par ailleurs, avons-nous encore besoin de ces privilèges ? Toutes ces différences que vous faîtes entre les sorciers ne peuvent conduire qu'à nous affaiblir. Votre sœur a raison sur ce point. Il faut permettre à la société d'évoluer, c'est ce que vous souhaitiez dire Lucretia, n'est-ce-pas ? »

Il semblait avoir tout de même décider de ne plus imposer ses idées à toute l'assemblée puisqu'il baissa d'un ton pour que seul ses deux cousins et leurs voisins de table ne l'entende. Son ton était un peu pressant mais sans animosité, pour autant son entêtement le rendait horripilant. Elle vit Lucretia relever la tête prête à renchérir et les mots lui vinrent tout naturellement, espérant couper court aux inepties que pourraient encore déblatérer sa cousine.

« Ces privilèges dont vous parlez ne sont que la résultante de traditions qui nous ont précédés et nous survivrons bien après notre mort. Grindelwald ou un autre qu'importe. Lucretia est issue d'une noble lignée, et sa descendance portera nécessairement cet héritage, elle le sait pertinemment.

- Je respecte votre point de vue, Walburga, même si je ne le partage pas, s'attrista Ewen en secouant la tête. Je considère au contraire que du fait de notre position nous devrions les aider à mieux s'intégrer à notre communauté pour préserver ses traditions qui vous tiennent à cœur.

Walburga se retint de lever une fois de plus les yeux au ciel. Cet idiot ne comprenait rien de toute évidence et le faire changer d'avis semblait impossible. Il n'était pas question de seulement quelques traditions mais d'une place qu'il leur était due par leur sang.

- Mais comme Walburga l'a généreusement expliqué, nous avons ce quelque choseque les Sang-Mêlés ou les Nés-Moldus n'auront jamais. Nous sommes différents, par essence, et vous devriez vous estimer chanceux d'avoir une descendance si noble plutôt que de lutter pour que l'on vous prive de ce qui vous revient dès la naissance, cousin, conclut Orion avec un sourire de convenance, sans chaleur.

Walburga releva les yeux vers Orion, ce dernier lui décerna un clin d'œil avec ce sourire énigmatique, plus chaleureux, avant de reporter ses orbes d'onyx sur sa sœur qui semblait alors à dix mille lieux de la soirée. Ewen s'était enfin tu, Cygnus se lança alors dans d'autres contes de ses aventures en Europe et Alphard demeurait enfermé dans sa mélancolie… Elle avait l'impression qu'il ne restait plus que Lucretia, Orion et elle. Un voile d'indécision entourait Lucretia alors que son frère la regardait impassiblement. Elle aurait été bien incapable d'imaginer ce qu'il pouvait penser de Lucretia à cet instant. Mais s'il pensait comme elle, il avouerait que Lucretia lui avait fait honte.

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Fin.

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En espérant vous avoir diverti un moment, je vous dit à bientôt !

Et si vous passez une mauvaise journée (à cause de Mr. Covid ou autre), faites comme Lupin, prenez du chocolat, et mangez, vous vous sentirez mieux !

A plus, Mondingus !