Hello !

Voici le tout dernier chapitre. En espérant que cela vous plaise !

Bonne lecture !


Lavi les toisait tous. Son regard était fou. On aurait dit qu'il avait abandonné toute trace de faux-semblants. C'était bel et bien le cas.

Cependant, le maudit vit de la peine dans ses yeux, cachée par la hargne. Tant de sentiments mêlés, de mal-être, qu'il en eut le ventre noué. Et pour le voir, il n'avait même pas besoin de le toucher.

Lavi, que t'avons-nous fait ?

Les larmes aux yeux, Allen fit un pas en arrière, remettant en place ses mèches qui retombaient devant ses yeux, et Kanda vint se placer devant lui, la main déjà posée sur la garde de son épée.

Komui, quant à lui, ne comprenait plus rien. Son cerveau lui paraissait fonctionner de plus en plus au ralenti. La vérité sous les yeux, elle lui crevait le cœur.

Il n'arrivait pas à y croire. Il pleurait, mais ne se rendait même pas compte de pourquoi il était dans un tel état. Ce n'était pas possible. Ça n'aurait pas dû être possible.

On lui avait assuré que Lavi serait lui-même. Que Lavi serait sain et sauf. Qu'il reverrait son amant, celui qu'il aimait…

Et ces paroles le tuaient, elles lui déchiraient l'âme.

Il y avait un moyen. Forcément, un moyen existait de…

« C'est de sa faute, » le coupa Lavi. Il montrait le Chinois du doigt. « Il m'a ramené alors que j'étais bien là où j'étais. Maintenant, mon corps épreuve le besoin de tuer et de se nourrir par le sang versé, je ne peux rien y faire. J'ai essayé de lutter, mais je n'ai pas pu ! Je voulais juste reposer en paix, et on m'impose un nouveau corps dont je ne suis pas maître. »

La cruelle conséquence de leur égoïsme leur faisait face.

« Y en a-t-il un qui a pensé à moi ? À ce que je ressens ? Non. Vous vous êtes réjouis de mon retour, ou vous m'avez voulu comme un monstre. Sauf que c'est vous qui m'avez créé comme tel. Je suis ce que vous avez fait de moi. Et je suis furieux. » La voix chargée, Lavi les fixait un à un. « Je veux tuer. Je veux détruire. »

D'une certaine façon, Allen comprit les sentiments de l'Akuma, si bien qu'il eut pitié de lui. Personne ne l'interrompait d'aucune façon. Tous écoutaient sa complainte en guise de repentir.

Ils acceptaient leur punition. Celle de ne pas avoir retenu leur chef. Celle de ne pas avoir su se montrer fort, persuasifs. De ne pas avoir su protéger Lavi de son vivant.

Et de ne pas avoir su l'accompagner une fois mort.

Le chef des pirates tomba au sol sur ses genoux, comme proche de l'évanouissement. C'était trop pour lui. Il se mettait lentement à comprendre ce qu'il avait fait.

Il avait joué avec la vie. Et cette dernière se vengeait de lui.

Komui eut envie de vomir. Il voulut même mourir en réalisant qu'il avait sans doute tuer sa propre sœur par ses imprudences, par sa vaine arrogance. Il n'avait pesé aucun risque. Il avait agi comme un imbécile.

Qu'est-ce que j'ai fait, Lavi ?

Pourquoi t'ai-je fait ça ?

Pourquoi n'ai-je pas pu être fort ?

Ignorant qu'il ne s'agissait pas réellement de force, Komui perdit conscience, dans son âme, une partie de lui se brisant. Son maigre reste de raison flagellait. Il ne voyait plus ce qui se passait. Il continuait à nier. À espérer que tout n'était qu'un rêve.

« Maintenant que vous savez la vérité, » reprit Lavi suite à leur long silence, « je n'ai plus aucune raison de me cacher. J'aurais essayé, je n'ai pas réussi. »

Les mots le signifiaient pourtant.

Le loup était dans la bergerie depuis bien longtemps.

« Alors tuez-moi, ou je m'en excuse, mais je vous tuerai. »

Sa figure était déformée par un rictus de folie noire.

Toujours, Allen réussit à distinguer cette peine. Cette lutte interne qui transparaissait par des soubresauts.

Il en était horrifié. Il n'avait jamais rien vu d'aussi inhumain, d'aussi sordide, d'aussi seul. Que ce mage eût-il donc fait à l'âme de son meilleur ami ? Quelles tortures Lavi subissait-il en enfer ? Y avait-il encore un être à l'intérieur, qui implorait leur aide ?

Le maudit l'ignorait. Oh, qu'il aurait aimé le savoir.

Mais quoiqu'il en soit, Lavi n'était plus à raisonner. Il agissait comme s'il n'y avait plus rien en lui. Il dégaina son épée, un poignard dans la main droite, la lame brandie furieusement.

Comme Komui se taisait, visiblement incapable de donner l'ordre et la décision qui s'imposait, allant jusqu'à s'écrouler sous le choc, Reever le donna à sa place.

« Tuez-le ! Ne le laissez pas s'approcher de Komui ! »

Comme un seul homme, les pirates se précipitèrent sur Lavi.

Komui n'eut pas la force de protester. Il regardait la scène avec une expression défaite.

Il y eut alors un combat à l'image des simagrées des derniers mois : ridicule, pénible, où chacun luttait pour combattre le cadavre d'un proche qu'ils n'avaient jamais voulu voir mourir et, une fois mort, qu'ils étaient prêts à laisser en paix. Komui, celui qui avait bafoué ça, qui leur avait apporté la déchéance, recevait sa punition.

En une scène cruelle qu'ils ne méritaient en aucun cas. Une exécution funeste.

Lors du combat, si Lavi, ou l'Akuma qui le possédait, se trouvait désavantagé, sa hargne égalait bien celle de dix hommes. Avec deux armes, il était habile. Lavi avait toujours été un bon combattant. L'Akuma, lui aussi, avait de la verve à revendre.

Link accourut dans sa direction, tombant un coup d'épée transversal pour le déstabiliser.

Lavi le contra habilement, et l'attrapa par sa queue de cheval pour avoir le dessus. Il le bloqua devant lui, étirant son cou d'une force surhumaine. Sur son visage, une expression d'extase sans nom naissait. D'un seul geste, il décapita Link et trancha la gorge de Reever qui s'était approché pour aider.

Johnny, un de leurs matelots courageux qui n'avait pourtant jamais été très bon au combat, tenta sa chance pour le prendre à revers, et fut éventré d'un seul coup d'épée.

Les morts s'empilèrent.

Et Lavi résistait. Comme s'il était invincible. Comme si sa rage de vaincre, sa haine d'être revenu, dépassait tout les maigres efforts qu'ils pouvaient mettre en place.

Puis, il y eut un face à face entre lui et Kanda.

Kanda avait toujours été le meilleur combattant, avant Lavi. Il mettait à terre à lui tout seul les plus dangereux soldats ennemis. Au vu de son visage rempli de dédain, il était certain que l'Asiatique refusait de voir perdurer le massacre.

De justesse, l'épéiste sauta en avant lorsque Lavi le chargea, l'épée brandit.

D'un coup latéral, il lui trancha le bras. De ce fait, il avait réussi à lui arracher sa lame la plus longue.

Mais Lavi profita de sa proximité pour lui enfoncer son poignard dans la cuisse, remuant le couteau dans la chair, l'en extrayant pour le replanter rudement de manière à l'estropié puisqu'il hurla de douleur.

Les coups de poignards plurent, Lavi le poignardant à répétition. Kanda en lâcha sa précieuse Mugen, ne pouvant reprendre contenance.

Il eut un visage déboussolé. Comme s'il sentait sa vie, sa défaite, l'amener vers la mort.

Allen avait observé. Il était indécis, entre sa pitié pour Lavi, celle pour ses semblables, sa colère envers l'Akuma, envers Komui, envers lui-même. Toutefois, lorsque son amant fut attaqué, il ne put bientôt plus tenir le spectacle, et l'en délivra en poignardant Lavi dans le dos à son tour.

Ce n'était qu'un pugilat informe, hideux. Les larmes coulaient sur les joues d'Allen, de Komui, même Kanda n'était pas de marbre.

Le roux tomba par terre suite au coup, porté au niveau de la rate.

Kanda libéré, Allen ignora Lavi, et se précipita à la place sur son amant dont la cuisse pissait dangereusement le sang. La blessure était dégueulasse, avec le violent acharnement dont il fut victime. Son teint palissait à vue d'œil. Il essaya de comprimer sa cuisse autant que faire se peut, mais il perdait beaucoup trop de sang.

Komui continuait d'observer la scène sans mot dire, voyant ses hommes s'entretuer à cause de la malédiction qu'il avait ramenée parmi les siens.

« Non…, murmura-t-il. Ce n'est pas possible… Je n'ai jamais voulu ça. Jamais. »

Rampant au sol, Lavi venait justement vers lui.

En avisant sa détresse, la culpabilité le rongea de nouveau comme un ver affamé de chair fraîche en train de se repaître.

Komui laissa faire Lavi quand il l'enlaça avec une tendresse brusque car possessive et ne fut pas surpris de sentir une douleur à l'abdomen. Lavi avait gardé son poignard et venait de l'attaquer avec, le lui enfonçant dans le bas-ventre.

Peut-être que c'était comme ça que tout était censé se terminer. Peut-être qu'il n'y avait pas d'autre issue.

Ils s'embrassèrent une derrière fois, baiser au terme duquel Lavi le repoussa violemment, le laissant tomber en arrière avec la lame toujours incrustée dans l'estomac.

C'était mieux peut-être comme ça. Qu'il meurt et que la chose qu'il avait ramenée avec lui décède à son tour.

Alors qu'il gémissait de douleur, proche de la perte de conscience, Komui eut le temps de voir Tyki décapiter l'Akuma qui avait pris la place de son amant, et entendit les cris éplorés de Road qui annonçait que Lenalee était morte après avoir vomi tripes et boyaux en bas.

Un cauchemar, un massacre. C'était donc ainsi que ça se finissait. C'était couru d'avance, en un sens.

Il n'aurait jamais dû y croire.

Komui lâcha quelques larmes, plongeant dans l'agonie.

Non content d'avoir troublé le repos de l'âme de son amant, il avait aussi tué certains de ses hommes et sa propre sœur.

Il sut, d'une certitude amère, qu'il allait aller en Enfer.

Au moins, maintenant, Tout était fini.

Il sombra pour toujours dans la nuit.


Au terme d'un périple d'horreur, les pirates jetèrent leurs morts à la mer et se jurèrent de ne plus jamais les déranger.

Encore, ils devaient se reconstruire.

Road était anéantie par la mort de Lenalee, et Kanda se remettait lentement de ses blessures. Sheryl lui avait fait part d'un diagnostic peu optimiste quant à l'espoir d'une guérison. Plusieurs nerfs de sa jambe avaient été endommagés et il serait très probable qu'il passe sa vie à boiter. Sans mentionner sa chance que les vaisseaux sanguins ne soient pas touchés. Il avait essayé de l'opérer mais n'était pas aussi doué que Lavi, leur Lavi, dans les opérations de chirurgie. Il avait préféré éviter d'empirer la situation plutôt que de l'estropier davantage. Kanda avait accepté la nouvelle, mais il ne décrochait pas un mot depuis.

Plus personne ne parlait. Tous étaient plongés dans un mutisme dû au choc de la lourdeur des événements.

Ils avaient encore perdu les leurs. Dont leur Capitaine, leur chef, et leur guide. Leur clan semblait proche de l'anéantissement, ce fait les poursuivait comme une épée de Damoclès.

En même temps, ils avaient chacun des blessures à panser, et là encore, le temps paraissait plus prompt à rouvrir leurs plaies qu'à les refermer. Ils devaient refaire le deuil de Lavi, faire le deuil des autres, c'était beaucoup d'énergie pour beaucoup de douleur.

Ils avaient fini par accoster sur la terre ferme, sur une île isolée, et s'étaient ressourcés quelques temps là-bas. Néanmoins, ses ressources s'épuisaient et ils ne pourraient pas y rester éternellement, ils devraient donc bien repartir.

Dans l'une des cabines, Kanda était couché, silencieux. Si ce n'était pas étonnant venant de lui, son silence était exceptionnellement réservé et il avait contaminé aussi Allen.

Le maudit observait le vide en lui tenant la main, largement aussi malheureux.

Les journées s'écoulaient ainsi sans qu'ils ne les voient passer.

Un beau jour pourtant, un Tyki bizarrement empressé fit irruption dans leur chambre, une pipe fumante au coin du bec, et s'assit au bord du lit de garde de Kanda :

« Bon, j'ai discuté avec les gars. Ce serait bien qu'on élise un nouveau Capitaine. De manière symbolique. Quelqu'un qui a la tête sur les épaules et qui ne jouerait pas avec la magie. On repartirait et on apprendrait de nos erreurs. On peut pas rester prostrés comme ça, ça fait déjà deux mois. »

Allen releva la tête.

Deux mois ? Ils s'étaient envolés comme une trainée de poudre.

Kanda se redressa dans le lit, toisant furieusement l'intrus. Pour la première fois depuis un long moment, sa voix retentit, chargée de hargne :

« Tu crois que c'est le moment ? »

Allen posa une main sur son épaule, confus et inquiet, voulant de cette façon le soutenir.

« Il a raison, Tyki. On est tous perturbés et…

—Je le suis aussi, mais tout le monde flippe, ça serait mieux de faire quelque chose.

—Qu'ils aillent tous se faire foutre. Je les conchie. On décidera de qui sera le Capitaine quand ce sera le moment, un point c'est tout. Là ça l'est pas, putain. »

Kanda avait gueulé. Allen secoua la tête.

« T'énerve pas sur Tyki, Bakanda, il essaie d'être utile. »

Tyki se marra.

« Le truc, c'est que les rumeurs disent que les plus habilités seraient soit toi, mon cher Kanda, ou moi. Y'en a qu'ont proposé Road, mais elle est trop tête brûlée et ça partirait en couille avec elle aux commandes.

—Quoi, t'veux qu'on se batte tous les deux pour décider du gagnant, avec ma jambe traînante ? » gronda le Japonais.

Allen s'apprêta à tempérer que c'était ridicule, ignorant son pincement au cœur d'entendre Kanda parler ainsi, mais Tyki leva les mains en l'air.

« J'suis un flemmard, moi. Tout le monde le sait. Je pensais que ça t'irait bien, à toi.

—J'suis pas prêt. »

Le blandin intervint :

« J'admets être d'accord avec Tyki, Yû. Tu devrais considérer l'idée, quand tu penseras qu'il est temps.

—On verra. »

Le Portugais tira sa pipe un bon coup et leur fit un clin d'œil.

« C'est tout vu. Reste plus qu'à se remettre sur pied. Prends donc ton temps mais pas trop, Capitaine. »

Tandis que Kanda grommelait et qu'Allen ricanait, étrangement égaillé, le bouclé disparut dans le couloir sur un seul murmure.

« On y arrivera. »

Se remettre, ce n'était pas facile à mettre en place. Ils devaient d'abord endurer la nuit, pour encore mieux apprécier le jour. Ils ne pourraient pas aller contre, aussi pénible et laborieux que ça puisse être.

Parce que rien ne s'oppose à la nuit.

Preuve étant, ils avaient tenté de la dissiper, et elle les avait tous engloutis.

Fin


Le message final est un brin pessimiste, mais en fait, il y a de l'espoir. Seulement, ils doivent d'abord endurer leur souffrance et ne pas la fuir pour avancer. C'est un peu triste mais après la pluie vient le soleil ! ;)

J'espère que ça vous aura plu ! C'était particulier comme histoire, mais j'ai bien aimé l'écrire. Malheureusement pas beaucoup de fluff au rendez-vous (et l'humour que je comptais inclure... humour, humour, où es-tu ?), mais on peut pas tout avoir XD.

Reviews ? N'hésitez surtout pas, ça fait toujours plaisir !

Merci d'avoir lu !