Chapitre 5

"Can I conceal myself for everyone?

Pretend I'm not the man I was before?

Must I lie?

If I speak, I am condemned.

If I stay silent, I am damned."

-Who Am I, Les Miserables

J'entrai dans la Salle de Commandement où je trouvai le Capitaine assis sur son fauteuil comme à son habitude. Il y avait aussi Bob, à son poste de pilotage, qui discutait avec Serge. Ils semblaient bien s'amuser.

J'approchai du Capitaine et me mis au garde à vous.

-Capitaine, vous vouliez me parler?

Il me fit un signe de la main et je me mis au repos. Je le regardai. Il avait le coude appuyé sur le bras de son fauteuil et le poing sous son menton. Il paraissait rayonner en quelque sorte. Je savais que la promesse d'une planète habitable le rendait particulièrement heureux. C'était après tout l'aboutissement de la mission, son plus grand rêve. Cela renforça mon désir de ne rien dire sur les derniers événements. Je ne pouvais pas lui faire ça, pas à lui, l'homme que j'admirais tant. De toutes façons, ça aurait été égoïste de ma part. Pas seulement pour toute la population terrienne, ou ce qu'il en restait.

-Je vous ai fait venir, Commença le Capitaine avec un grand sourire, Pour vous dire que nous organisons un souper demain soir pour notre invitée, Sulayaa, en gage d'appréciation de l'effort qu'elle a fait pour nous permettre de sauver notre civilisation.

Je me sentis pâlir. Un souper en compagnie de Sulayaa? Demain soir?

Le Capitaine dut se rendre compte de ma pâleur soudaine car son sourire s'effaça quelque peu et il fronça les sourcils.

-Vous allez bien Flavien?

Il étira le bras et prit le mien délicatement, mais je me dégageai rapidement, ayant repris mes esprits. Je feignis de m'étirer et de bailler.

-Oui, oui, juste un peu fatigué, Dis-je en me frottant les yeux, J'ai eu affaire à une très bonne négociatrice.

Je me mordis la lèvre. Je détestais mentir de la sorte, mais que pouvais-je dire?

-Vous devriez vous coucher tôt ce soir, Dit le Capitaine en se levant.

Il passa à côté de moi pour aller se chercher un café. Je le regardai, complètement abattu.

-Oui Capitaine.

Je m'éloignai vers la porte, et jetai un dernier regard au Capitaine, qui me sourit en humant son café. Je retournai les yeux et sortis.

Une fois la porte fermée derrière moi, mes jambes devinrent tellement molles que je dus m'appuyer au mur pour ne pas m'écrouler. Comment allais-je passer au travers de toute une soirée en compagnie de Sulayaa ET le reste de l'équipage?

Je priai silencieusement qu'on me donne la force traverser la prochaine soirée.

J'errai dans les couloirs du Romano Fafard pendant un moment. Je n'avais pas envie d'aller me coucher, mais je savais que le Capitaine m'avait ordonné de me coucher tôt. Je décidai de faire un dernier tour du vaisseau pour essayer de trouver le sommeil qui m'échappait.

Peut-être que si je trouvais Pétrolia, je pourrais bavarder un peu et me changer les idées. Je décidai d'aller voir dans la Salle des Machines voir si elle y était.

Je marchai encore un peu, puis j'entrai dans la Salle des Machines et comme je tournai le coin du réacteur, et je fis collision avec Sulayaa. Je reculai rapidement, terrifié.

~Non! Pas elle! ~

-Tiens, bon soir Flavien, Me dit-elle d'une voix malicieuse.

Je reconnus cette voix.

~Non… ~

Je reculai encore. Le feu brûlait dans ses yeux, et elle avança.

Je reculai…

Reculai…

Reculai…

Mon dos frappa le mur.

Des mains m'entourèrent.

Pris au piège.

Elle s'approcha de moi. Mon souffle devint rapide, saccadé.

Peur.

Angoisse.

Effroi.

Mon uniforme se fit enlever.

Des mains sous mon chandail.

Un souffle chaud sur mon cou.

Un murmure.

-Tu n'as pas le choix…Tu le sais

~Non! Je ne veux pas…Non… ~

Des mains sur mon pantalon.

Des lèvres clamant brutalement les miennes.

Son corps pressé au mien.

Mes poings se serraient, mon cœur comprimait ma poitrine. Mes jambes ramollirent. Le monde semblait tourner autours de moi, j'avais mal…

Le bruit d'une porte.

J'ouvris les yeux d'un coup sec. Je regrettai presque ce geste.

Au milieu de la porte se tenait Pétrolia, les yeux grands ouverts, qui nous dévisageant. Elle semblait en choc.

Quelques secondes passèrent.

Des larmes se mirent à perler de ses beaux yeux, et quelques unes roulèrent sur ses joues rosées. Je voulais lui dire que ce qu'elle voyait, ce n'était pas ce que je voulais, ce n'était pas ce qu'elle croyait, mais ma voix se bloqua dans ma gorge.

-Flavien, Murmura-t-elle, Comment as-tu pu…

Il n'y avait aucune colère dans sa voix, seulement un chagrin immense. Elle avait le cœur brisé, c'était plus qu'évident.

-Comment as-tu pu…

Sa voix se brisa.

Ma Pétrolia…

Elle me regarda encore un instant, puis partit en courant. La porte se referma doucement derrière elle. Je fixai la porte, stupéfié.

Ma belle Pétrolia…

Un murmure se fit entendre.

-Personne ne peut savoir…

Je fermai les yeux. Je voulais crier, je ne pouvais pas, les mots ne sortaient pas, ils restaient dans ma tête, comme les larmes dans mon cœur.

J'avais du mal à respirer.

-Souviens-toi…

Je sentis des mains se glisser vers des endroits interdits. Le sourire effacé, elle me regarda.

-Toi contre la planète…