Le corps au sol était celui de James Potter. Le visage figé dans une expression de peur et de surprise, il était mort - probablement un Avada dès qu'il avait été vu.
Il le contempla longuement, sans le moindre sentiment. Il aurait pu ressentir de la joie à voir son ennemi terrassé, ou une sorte de nostalgie puisqu'ils se connaissaient. Sauf que James Potter avait tué tout sentiment en lui en le poussant méthodiquement chez les Mangemorts par son harcèlement constant. Alors Severus resta debout devant le corps, silencieux, avant de soupirer et de se détourner.
Il ne ressentit aucune culpabilité en pensant qu'il avait juste eu ce qu'il méritait.

Il monta lentement l'escalier, s'arrêtant à chaque marche qui grinçait, hésitant.

C'était une petite maison - Lily n'était pas du genre à vouloir un Manoir pour y vivre - mais elle était confortable et jolie. Un lieu de conte, le genre d'endroit où vivaient les gentilles familles heureuses. Des couleurs, de jolies photos familiales avec des personnes souriantes et visiblement heureuses. Affichant leur bonheur sans complexes.
A l'étage, il compta deux chambres. Une des portes était grande ouverte sur une chambre d'adulte - celle des parents Potter - et Severus détourna le regard du grand lit recouvert d'une courtepointe bariolée, refusant d'imaginer sa Lily dormir dans les bras de Potter.
L'autre porte avait dû être fermée, et elle avait subi le même sort que la porte d'entrée.

Elle béait sur une chambre d'enfant. La parfaite chambre d'enfant, décorée et aménagée avec amour. De petits personnages dansant étaient peints sur les murs, un mobile tournait doucement à cause du vent qui s'engouffrait par le toit explosé.
Il y avait des jouets, à profusion. Des jouets moldus, des jouets sorciers. Des peluches, douces et colorées.

Le coeur de Severus se serra, lorsqu'il se demanda si c'était ça une enfance normale. De toute évidence, Lily aimait son fils. Plus que tout. Le garçon avait été désiré et attendu, et il était choyé.
Il serra les poings en pensant au petit coq arrogant et gâté qu'avait été James Potter et il se demanda si le gamin deviendrait comme son père en grandissant. Probablement. Il y aurait toujours le reste de ses amis Maraudeurs pour bercer le gosse des exploits du grands James Potter.

Il repoussa la pensée du gamin, et son regard glissa sur le petit lit à barreaux sans s'y attarder, ignorant l'occupant qui le fixait en silence.
Ses yeux fouillèrent la chambre avant de se fixer sur un tas de gravats devant le lit, à l'endroit où le toit manquait.

Un pied dépassait.

Un pied de femme, menu et délicat.

Severus s'accrocha à sa baguette et lança un sort, écartant les débris pour dévoiler la personne prise au piège. Voyant les mèches rousses, il accéléra, refusant de laisser son esprit le paralyser par la peur.
Lorsque son visage apparut, Severus eut un hoquet, et serra les poings. Il sursauta lorsque le bambin dans le lit tendit la main vers le corps en criant "Mama" désespérément.

Le Maître des potions tomba à genoux près de son amie, regardant son beau visage figé par l'Avada, les yeux grands ouverts. Elle avait une expression suppliante, mais ses yeux verts ne reflétaient plus le moindre sentiment.
Il n'eut pas conscience de ses sanglots désespérés, alors qu'il hésitait à toucher Lily, sa Lily. Finalement il l'attrapa à bras le corps pour la serrer contre lui, caressant ses cheveux, incapable de la laisser alors qu'il laissait toute sa peine s'exprimer.

Il avait échoué. Il avait tué la seule femme qu'il avait aimé. Pas directement bien évidemment. Mais en répétant ces mots qu'il pensait anodin, il l'avait tuée aussi sûrement que si c'était lui qui avait tenu la baguette.

Lily, sa jolie fée était morte, de la main même de Voldemort. Personne n'avait pu la protéger.

Alors qu'il berçait le corps inerte, les larmes coulant sans fin sur son visage lui qui ne pleurait jamais, il prit soudain conscience des cris de détresse du gamin dans le lit.
Il hésita un instant puis se rendit compte que Lily s'était placée devant son fils pour le protéger. Elle avait probablement donné sa vie pour lui et il devait bien quelque chose à celle qu'il aimait.
- Ma Lily… Je t'aime tellement. Je te promets que je protégerais ton fils. Quoi qu'il arrive, je ferais en sorte de le garder en vie.

Il sentit dans sa magie que sa promesse était comme un serment magique et il soupira en fermant les yeux. Il posa doucement Lily au sol, l'installant au mieux, ordonnant ses cheveux. Elle était si belle, même dans la mort.
Il approcha la main de son visage pour lui fermer les yeux, mais il ne peut terminer son geste. Il ne pouvait pas cacher les yeux qu'il avait tant aimé, ces yeux d'un vert exceptionnel.
Après une dernière caresse hésitante sur sa peau douce qui se refroidissait, il se releva pour s'approcher du lit d'enfant.

Le gamin le regarda approcher, ses petites mains agrippées aux barreaux de son lit. Il aurait pu avoir peur de cette silhouette sombre et menaçante qui le surplombait, mais il le regarda au contraire avec confiance.

Severus hoqueta en voyant les yeux du gosse. Il avait les yeux de sa mère. D'un vert éblouissant, des yeux qui vous fixaient et vous transperçaient l'âme. Son visage se froissa et il se pencha légèrement.
L'enfant lui offrit un large sourire confiant et lui tendit les bras, un large sourire étirant sa bouche baveuse. L'homme se fit la réflexion que son filleul en était au même point, bavant sans cesse. Lucius avait une armée d'elfes qui suivaient le bambin pour le nettoyer - hors de question que l'héritier puisse être aperçu dans des vêtements humides de bave.

Comme Severus hésitait, le gamin s'impatienta, poussant des petits cris pour attirer son attention, bras levés, ses petites mains s'ouvrant et se fermant fébrilement, démontrant son impatience d'être secouru.
Finalement, il se pencha en avant et attrapa le gosse sous les aisselles pour le lever face à lui, en l'observant avec une grimace septique.

Déjà, il avait la tignasse des Potter. Des cheveux d'un noir d'encre, pointant dans toutes les directions. Mais il semblait être un enfant enjoué et plutôt calme, puisqu'il n'avait pas encore hurlé à s'en briser les cordes vocales comme Drago le faisait lorsqu'il voulait quelque chose. Ses yeux verts brillaient, et il était souriant malgré le drame qui venait de se produire et qu'il n'avait pas dû comprendre.

Severus secoua la tête, avant de plaquer le gosse contre sa poitrine pour le maintenir fermement, un bras sous ses fesses.
Aussitôt le petit garçon laissa échapper un soupir satisfait et se nicha contre l'homme, se sentant visiblement en confiance.

Attendri même s'il aurait préféré être découpé en morceau plutôt que de l'admettre, Severus lui caressa les cheveux avec douceur.
- Ça va aller bonhomme. Tout ira bien.