Bonjour à tous/toutes et merci de poursuivre cette fiction ! Nous avons dépassé les 1000 vues. Je dois dire qu'il devient de plus en plus compliqué de tenir le rythme… Mais vos commentaires sont très encourageants pour moi. Je voudrais aussi prendre le temps de remercier Bérénice et Gaeaquest pour leurs gentilles reviews (en effet j'essaie toujours de faire en sorte que les personnages soient le plus réaliste par rapport à leur véritable personnalité, ça fait vraiment plaisir que ce travail soit remarqué). Excellente lecture, en espérant que ce chapitre vous plaise.
Dans la maison du Lion, cela faisait maintenant une bonne heure que le gardien du Temple était levé, sur sa terrasse, les yeux fixant au loin la maison du Scorpion. Ce matin, il s'était réveillé avec un bien mauvais pressentiment. Cette horrible sensation, cette atmosphère malsaine, il l'avait déjà ressenti dans le passé. Hadès, était-il réellement venu au sanctuaire ? Non, ce n'était pas possible, il devait se tromper. Secouant la tête pour se changer les idées, il alla prendre son petit déjeuner en cuisine, quand le cosmos du Bélier l'interrompit. Mu, intrigué, s'invita sans permission dans la pièce et s'excusa :
— Pardon de venir de si bon matin sans avoir été invité…
— Il n'y a pas de problème. Qu'est-ce que tu as ?
— Je ne suis pas sûr de moi, mais j'ai ressenti quelque chose d'étrange ce matin.
— Ah, toi aussi ? s'intéressa le Lion.
— J'ai cru ressentir un cosmos identique à celui d'Hadès. S'est-il présenté au sanctuaire aujourd'hui ?
— Je n'en ai pas la moindre idée et j'ose espérer que non. Que viendrait-il faire là après tout ?
— Le Temple du Scorpion semblait rempli de son aura, continua le Bélier. Cela n'a pas duré longtemps, mais si tu as été capable de la ressentir aussi, je crois qu'il était vraiment parmi nous le temps d'un instant. Peut-être visitait-il Milo… ?
— Visiter Milo… ? se vexa Aiolia. Manquerait plus que ça, qu'il se croit dans la permission de venir ici comme s'il s'agissait d'un moulin… Cette situation ne peut plus durer.
— Je vais monter le voir, j'espère qu'il se porte bien. J'ai entendu que les premières douleurs commençaient à se faire sentir.
— Attends, je viens avec toi, décida Aiolia en finissant son café en vitesse.
Alors qu'ils montaient les escaliers, les deux chevaliers d'or arrivèrent enfin dans la maison de la Vierge. Comme à son habitude, Shaka semblait ne pas avoir bougé, au milieu de son lotus, en pleine méditation. Mais cette fois-ci, quelque chose semblait différent. Les yeux fermés, les mains jointes entre ses jambes en tailleur, le blond semblait pourtant vide et absent.
— Shaka… ? appela Aiolia perturbé par cette vision.
— Est-ce qu'il est endormi ? questionna Mu.
— Impossible, en pleine méditation ? Cela ne lui ressemble pas.
Le Lion s'approcha dubitatif de son tendre ami, se penchant légèrement sur son visage. Il l'appela de nouveau :
— Shaka ?
— C'est bizarre… Je ne parviens pas à ressentir son cosmos, remarqua Mu inquiet.
— Hm… Ce n'est pas normal. Habituellement il ouvre les yeux dès qu'il ressent ma présence.
Aiolia savait à quel point la méditation était devenu le quotidien du blond. Quand il était en plein dedans, il était hors de question de l'interrompre. Mais pour cette fois, l'inquiétude du Lion était bien plus importante que toute forme de politesse. Doucement, il approcha sa main de l'épaule de la Vierge et alors qu'il voulut le secouer juste légèrement, dès son toucher, le chevalier inerte tomba doucement en arrière, inerte. Le cœur du Lion fit un grand bond dans leur poitrine.
— Shaka ?!
Aiolia se jeta sur son ami, le secouant par les épaules.
— Shaka, qu'est-ce que tu as ?! Pourquoi il ne réagit plus ? Son cosmos a complètement disparu !
— Attends, ordonna le Bélier en posant sa main sur la poitrine du bouddhiste. Son cœur bat faiblement… On dirait qu'il est plongé dans une sorte de coma.
— Coma ? Shaka ? Qu'est-ce qui aurait pu le mettre dans un tel état ?! Il allait très bien hier, nous avons déjeuné ensemble !
— Je n'en sais rien… Transportons le dans sa chambre et prévenons tout de suite le Pope. Quelque chose me dit que la présence d'Hadès est en lien avec ça.
Pendant ce temps, au sommet du Sanctuaire, Shion levait les yeux vers la statue d'Athéna, les mains dans les poches. Quand il sentit la présence de Rhadamanthe, il ferma les yeux, le cœur lourd. Depuis leur discussion dans le royaume des enfers, le Grand Pope se sentait confus de bien des choses. Le regard que la Wyverne lui avait lancé l'avait hanté depuis, sans plus jamais le quitter. Il savait qu'il l'avait blessé et ce depuis le départ, mais pas à ce point. Le fait que le Juge quitte les montagnes pour se rendre jusqu'ici était étrange. Doucement, Shion se tourna vers le nouveau venu et affronta ses pupilles remplies d'amertume, prenant les devants :
— Je suppose que tu es venu m'expliquer pourquoi Hadès s'est montré au sanctuaire au lever du soleil ?
Rhadamanthe ne répondit pas tout de suite, faisant quelques pas de plus avant d'observer son interlocuteur longuement. Il croisa les bras, un air défiant sur le visage.
— Je vais être clair. Je ne suis pas venu t'annoncer une bonne nouvelle, commença le spectre.
Shion resta sur ses gardes, attentif.
— Le seigneur Hadès était bel et bien présent ce matin, dans le Temple de Milo plus précisément.
— Que faisait-il là ? Votre présence est certes tolérée, mais le dieu des enfers n'a pas à se montrer au sanctuaire d'Athéna, peu importe la raison !
— Ce n'était pas prévu. Tout ceci a été provoqué par l'un de tes précieux poulains.
— Pardon ? dit l'ex-Bélier étonné.
— Shaka de la Vierge a dépassé les bornes.
— Et puis-je savoir de quelle façon ? Cela ne lui ressemble pas.
— Hadès avait ordonné à ce que le chevalier de la Vierge ne s'approche jamais du Scorpion durant sa grossesse, nous en avions parlé à notre première réunion. Mais Shaka est comme qui dirait, têtu et buté sur ses idées.
— J'ai pris garde à tout ça et il ne s'est jamais approché de Milo.
— Alors laisse-moi te dire que quelque chose t'as échappé. Hier dans la nuit, ton petit chevalier s'est plongé dans les rêves de Milo pour pouvoir lui parler sans être vu.
— Quoi ?! s'écria Shion surpris. Comment ça ?!
— Il est venu me voir hier après-midi en disant qu'il s'était rendu compte de notre petit manège. Shaka s'est mis en tête qu'Hadès souhaite vous tendre un piège.
— Un piège ?
— L'enfant que Milo porte, selon lui, sera destiné à détruire Athéna une fois sa maturité et la trêve terminée. Il croit qu'Hadès veut se servir de ce bébé pour en finir avec la déesse Athéna et la planète Terre, car sa puissance sera inégalable. De ce fait, il attendait simplement le bon moment pour pouvoir tuer l'enfant au sein de Milo.
Rhadamanthe fut étrangement surpris par le silence dans lequel s'était plongé le Pope. Shion ne disait pas un seul mot, ne quittant pas le Juge du regard. Perdant patience, Rhadamanthe fronça les sourcils et reprit :
— Cela ne semble te faire ni chaud ni froid… Dans ce cas je vais en venir aux faits. Nous avons informé notre seigneur Hadès de ce qui était en train d'arriver. Il est apparu également dans les songes du Porteur et a détruit l'esprit de Shaka. Avant de t'entendre hurler, je préfère mettre les choses au clair : Shaka n'est pas tout à fait mort. Son esprit se trouve actuellement dans une dimension infernale. Un mot du seigneur des enfers et il tombera dans le supplice pour l'éternité. Voilà, tu sais tout. A ta place, je tâcherai de tenir tes subordonnées de façon un peu plus sévères. Non pas que je souhaite remettre en question ton leadership, mais je trouve soupçonneux que les chevaliers d'or soient capables de désobéir aux règles imposées par les dieux eux-mêmes en faisant tout ce qu'ils souhaitent. Sur ce, bonne journée.
Alors que le Juge se tourna et commença sa route, Shion l'interpella :
— Je te déconseille de faire un pas de plus, Rhadamanthe.
La Wyverne s'arrêta net, surpris par ce ton soudain.
— N'oublierais-tu pas quelque chose ? continua le Pope.
— Quoi donc ?
— La théorie de Shaka. Est-elle vraie ?
Le spectre se tourna à nouveau vers le commandant du sanctuaire.
— Supposons qu'elle le soit. Que ferais-tu ?
— Pourquoi ne réponds-tu pas juste à cette question ?
— Parce que je n'en ai pas la réponse.
Shion fronça les sourcils, curieux. Rhadamanthe avait toujours été un homme franc. Il ne passait jamais par quatre chemins et n'avait pas peur de blesser ou de détruire par ses mots. Il n'avait peur de rien et respectait Hadès plus que tout. Le Pope était convaincu que la dernière phrase prononcée par le Juge n'était pas un mensonge, ce qui le plongea dans une sérieuse inquiétude. N'était-il pas le général le plus proche du dieu des enfers ? Comment pouvait-il ne pas être informé d'un tel projet, d'une façon comme d'une autre ? Comment lui-même pouvait aussi avoir le doute ?
— Qu'Hadès ait prévu d'exécuter ce plan ou non, cela m'est bien égal, continua le spectre. Ma tâche est de veiller sur le Porteur et d'être sûr que son enfant arrive dans les meilleures conditions. Je ne sais pas pourquoi est-ce que Shaka a été imaginé tout ça, mais cela ne change rien aux circonstances actuelles. L'accord a déjà été signé… Il n'y a rien que vous puissiez faire à présent. Les jeux sont faits.
— Si nous sommes tombés dans un piège… La moindre des choses est de me donner une explication plus plausible que celle-là.
— De mon opinion, Hadès ne vous a pas tendu de piège. Tu n'as pas idées du temps qu'il a mis pour enfin parvenir à avoir un enfant. Cela dure depuis des siècles. Il veut être père plus que tout et rien n'est en droit de le lui interdire. Shaka a joué avec le feu, qu'il en subisse les conséquences.
— Aurais-tu envoyé ton fils à la guerre ?
Le temps d'un instant, le Juge perdit tous ses moyens. Sa dureté, sa confiance en lui, tout s'était volatilisé en une phrase.
— Tu étais un fier général de l'armée quand tu vivais sur Terre. Tu connais la guerre plus que personne. Tu sais à quel point elle est dure, froide, cruelle. Aurais-tu envoyé ton propre fils vivre toutes ces choses comme tu l'as vécu ?
— Ne t'ai-je pas déjà interdit de parler de lui ?! éclata le spectre. Tu n'en es pas digne ! Quel est le rapport ?!
— Hadès, enverra-t-il son propre enfant vivre toutes les choses qu'il a lui-même vécu ? Toutes ces souffrances pour devenir père, pour envoyer sa précieuse progéniture à la guerre ? Tous les deux, avons perdu un enfant, nous savons à quel point cette marque peut rester à vie. Le laisserais-tu aussi passer par là ?
— Effronté… Ne nous compare pas. Mon fils est mort à 12 ans à cause d'un vulgaire accident de voiture, le tiens est mort parce que tu l'as tué !
Une grande déchirure se créa dans le cœur, la gorge et l'estomac du Pope. Tous ces secrets, ces paroles, ces confidences qu'ils s'étaient faites avant que la guerre n'éclate, revenaient à la surface. Rhadamanthe et Shion s'étaient tout dits de leur passé. Mais jamais le Juge n'avait été aussi loin dans ses propos. Les larmes montèrent aux yeux du Pope, paralysé dans le silence. Le spectre continua dans la colère :
— Je ne sais rien de ce qu'Hadès prévoit après la trêve, et peu importe son choix, je serais toujours de son côté ! Son enfant ne perdra pas la vie, rien ni personne ne pourra se mettre en travers de son chemin et je serais là pour veiller sur eux ! Dis à tes stupides gardiens d'Athéna de se tenir loin du bébé s'ils ne veulent pas subir le même sort que Shaka !
Le Juge se tourna prêt à s'en aller, quand il aperçut Mu et Aiolia à quelques mètres, tout ouïes. Bouche bée, aucun son n'osait sortir de leurs bouches, l'expression alertes et sous le choc de ce qu'ils venaient d'entendre. Rhadamanthe, récupérant ses moyens, passa entre eux en les poussant du passage, s'en allant sans plus se retourner.
— Celui-là, murmura Aiolia. Qu'est-ce que je donnerai pour le tuer tout de suite… Donnez-moi l'ordre maintenant et je le ferai ! s'adressa-t-il à Shion.
— Aiolia, appela Mu pour le calmer.
Shion avait la tête baissée, ses cheveux masquant son regard. Les larmes coulèrent sur ses joues abondamment, tandis que les deux plus jeunes ne surent pas comment réagir. Le Pope s'était toujours montré fort, inébranlable et strict. Voir à quel point la faiblesse l'avait envahie à ce moment précis, les plongeait dans la confusion.
— Shion… Il avait vraiment un enfant… ? hésita Aiolia.
Mu hocha la tête doucement, sans rien ajouter. Le Pope se retourna et marcha jusqu'à la statue d'Athéna, avant de soudainement se volatiliser.
— Hein… ? souffla le Lion surpris.
Mu couru jusqu'à l'emplacement, regardant dans tous les sens où le Pope était passé. Aiolia le rejoignit le cœur battant.
— Shion ?! Où est-il allé ?! Je ne ressens plus sa présence au sanctuaire !
Mu poussa un long soupir et ferma les yeux en baissant la tête.
— Mu ?! Où est-il allé ?!
— … Il est parti.
Chapitre 6
Le temps des secrets
— Je comprends la situation, dit Shura en compagnie des autres chevaliers.
Les Golds, à l'exception de Saga et Shaka, s'étaient tous réunis au sommet, écoutant tout ce qui venait de passer de la bouche du Lion et du Bélier. L'air grave, chacun réalisait à quel point la situation devenait sensible et compliquée.
— Je ne savais pas qu'il avait eu un enfant, dit Aldébaran en coupant le silence. Que lui est-il arrivé ?
— Je n'en sais rien, je n'ai jamais osé lui poser la question, répondit Mu.
— Ce n'est pas tout, coupa Angelo. Qu'allons-nous faire à présent ? Tout ça nous met dans un sacré pétrin, il a l'air de vraiment s'être tiré.
— Qu'allons-nous faire pour Shaka ? s'inquiéta Aiolia.
— Je pense que nous devrions commencer par avertir Athéna de ce qui se passe ici, proposa Camus. Peut-être devrions-nous attendre que Saga revienne de mission, il saura probablement mieux que nous quoi faire.
— Pardon ? s'alerta le Lion piqué. Pourquoi Saga saurait quoi faire dans un moment pareil ?
— Aiolia, il nous a dirigé pendant plus d'une dizaine d'années. Il nous faut un commandant maintenant que Shion s'est absenté.
— J'espère que c'est une plaisanterie ? Le jour où Saga me dira quoi faire n'est pas arrivé.
— Ce n'est pas le moment Aiolia, interrompit le Sagittaire. Ne nous disputons pas pour si peu dans un moment aussi critique. Nous avons tous besoin les uns des autres. Tout d'abord, il faudrait des volontaires pour veiller sur le corps de Shaka.
— Je le ferai, dit immédiatement le Lion. Mu le fera avec moi.
— Je vais avertir de ce pas Athéna, décida Aphrodite.
Alors qu'un étrange silence vint entre les chevaliers, tous eurent soudainement les yeux posés sur le chevalier du Scorpion, qui n'avait pas dit le moindre mot depuis le début. Les yeux sur le sol et les bras ballants, il semblait ailleurs.
— Milo ? appela Aphrodite.
Le Scorpion leva la tête, regardant le Poisson qui lui fit un sourire.
— Ne t'en fais pas, rassura le gardien de la douzième maison. Tout ira bien. Tu n'es pas tout seul, nous sommes tous là. Surtout ne crois pas que tout cela est ta faute, ce n'est pas le cas.
— Il a raison, ajouta Shura. Puis, Shaka n'est pas mort, alors pas d'inquiétude à se faire. Je suis sûr qu'il nous reviendra bientôt. Athéna ne laissera pas Hadès lui faire du mal.
Milo aurait voulu acquiescer, sourire, quitter cette humeur dévastatrice qui le torturait depuis ce matin au réveil. Mais il ne pouvait pas. Il n'y parvenait pas. Il ne savait plus si c'était la crainte, la honte, la culpabilité ou ces douleurs qui venaient et s'en allaient dans son bas ventre, qui le rendaient ainsi. A la fin, il ne voulait même plus savoir.
— Je…, osa-t-il enfin. Je ne saurais pas vous dire à quel point je suis désolé.
— Milo, tu n'as rien fait, insista Mu.
— Si quelqu'un devait présenter des excuses, ce serait clairement Athéna, fit remarquer Camus.
Tous le regardèrent les uns retenus, les autres sous le choc.
— Et ne faites pas ces yeux de merlans frits avec moi, ajouta le Verseau. Je sais que vous le pensez tous. Avec le temps, j'avais fini par me dire que vingt milles années de paix ne pouvaient être que merveilleux pour tout le monde. Mais si l'hypothèse de Shaka est vraie… Nous serons dans la légende pour avoir été très stupides.
— Aussi loin que je me souvienne, Shaka ne se trompe jamais, lança Aldébaran. S'il le dit et s'il est allé aussi loin, c'est qu'Hadès a réellement prévu d'en finir avec Athéna grâce à son enfant, je ne pense pas qu'il y ait encore de place pour le doute.
— Milo, qu'est-ce que tu en penses ? demanda Camus.
Alors que tous étaient dans l'attente de la réponse du Scorpion, Minos et Eaque s'avancèrent, restant à quelques mètres. Eaque cachait son rire derrière sa main tandis que le Griffon, les bras croisés, observait les Golds indifférent.
— Qu'est-ce que vous faites ici ? menaça Shura en les rejoignant.
— Nous sommes juste venus tendre l'oreille par curiosité, répondit le Garuda.
— Tendre l'oreille ?
— Il paraît que Rhadamanthe a été très méchant… Si méchant que ça a expédié votre Pope loin d'ici. C'est donc vrai ?
— Eaque, ça suffit maintenant, ordonna le Griffon.
Le Garuda croisa les bras et soupira, tandis que Minos reprit la parole :
— Rhadamanthe nous a expliqué ce qui s'est passé et nous sommes sincèrement venus nous excuser à sa place. Je suis certain que son but n'était pas de le blesser. Vous savez, quand certains d'entre vous étaient aux enfers, Shion et Rhadamanthe ont tissés une relation très spéciale. Je pense que cette amitié aurait pu durer s'ils ne servaient pas des divinités différentes.
— Le Grand Pope et cette ordure, amis ? lança Shura dubitatif.
— Surveille ton langage toi, agressa Eaque.
— Quoiqu'il en soit, repris Mu, cela n'explique pas la présence d'Hadès dans ces lieux, pourquoi est-il venu ? Milo, j'ai ressenti sa présence dans ton Temple. Que s'est-il passé ?
— Il est venu s'expliquer par rapport à Shaka et il est parti.
— Penses-tu toi aussi que cet enfant apportera des problèmes plus tard ?
— Comment suis-je censé le savoir ?! Laissez-moi tranquille à la fin ! éclata le Scorpion.
Médusés de la soudaine colère du Porteur, plus personne ne dit mot. Doucement, la pluie commença à tomber au sommet du sanctuaire. Le ciel se grisait, prévoyant un mauvais temps pour un bien long moment. Seules les gouttes qui se brisaient sur le sol se faisaient entendre. Les cheveux de plus en plus mouillés, le Scorpion reprit plus calmement :
— Désolé… Je ne voulais pas crier.
Le cœur battant, une main sur son ventre endolori, son regard se leva timidement sur l'ancien général de Poséidon. Ce dernier le lui rendit. Un pincement se fit dans le cœur du Scorpion, qui s'il s'écoutait, se jetterai à ses genoux et le supplierai de leur laisser une chance. Il était au fond du gouffre et n'avait plus personne sur qui s'appuyer. Bien sûr, Camus était toujours là et même si son amitié était précieuse pour lui, cela ne valait pas les bras de l'homme qu'il aimait. Abandonnant, Milo baissa la tête, retenant ses larmes.
— J'ai besoin de me reposer, finit-il en s'en allant.
— Milo, viens chez moi et buvons un thé, proposa Camus en le suivant.
— Non, j'ai besoin d'être seul.
— Viens je te dis, insista son ami en passant son bras sur ses épaules. Il est hors de question que je te laisse tout seul. Je suis ton ami, tu te souviens ?
Le regard touchant du Verseau réchauffa le cœur du Porteur. Il finit par acquiescer de la tête et le suivit jusque dans son Temple.
A l'intérieur, Milo était en tailleur sur le canapé, enveloppé dans une couverture avec une tasse chaude entre les mains. Le regard terne et la mine affligée, il ne disait rien. Camus consterné, se demandait que dire ou que faire pour lui remonter le moral. Dans le fond, il savait que rien n'y ferait, mais bon. Assit sur le siège d'en face, il commença :
— Tu sais que si tu veux parler, je suis là. Je n'aurais certainement pas les mots pour te faire aller mieux, mais je ne veux pas te laisser dans cet état sans rien faire…
— Je ne peux pas m'empêcher de penser que tout ça est ma faute.
— Je sais. Et tu connais mon avis sur le sujet. Athéna trouvera une solution à tout ça, c'est sûr.
— Ne me parle pas d'Athéna.
Camus fut saisit d'étonnement à la demande de son frère d'arme. Mais malgré tout, il comprenait son état d'esprit et à quel point il était normal d'en vouloir à la déesse.
— Camus… Pardonne-moi. Je ne sais pas si je fais un bon ami…
— Qu'est-ce que tu racontes ?
— Il y a quelque chose dont je ne t'ai jamais parlé. Mais avec tout ce qui se passe, je ne me sens plus la force de garder autant en moi. J'ai besoin que ça sorte…
Le Verseau pensait pourtant tout savoir. Ils se fréquentaient depuis tous jeunes et ils se disaient tout, du moins, à peu près. Savoir que quelque chose turlupinait le Scorpion et qu'il ne savait pas de quoi il s'agissait, le rendait un peu morose.
— Je… Je t'ai menti.
— … A quel sujet ?
— Je pensais vraiment t'en parler, mais je n'étais jamais prêt, je me disais que je devais attendre encore un peu…
— Mais de quoi tu parles ?
Milo soupira et s'ouvrit enfin.
— De Kanon.
— Quoi… ?
— La vérité, c'est que ça fait presque un an. Mais, nous ne sommes plus ensemble à présent.
— Quoi ?!
Le Verseau fit le tri dans sa tête, se demandant s'il avait bien entendu. Non, ce devait être une blague. Une blague ? Dans un moment comme celui-ci et avec un visage aussi détruit ?
— Attends, tu… Tu aimes les hommes ?
La boule au ventre, Milo se gratta doucement le front, hésitant, réfléchissant à quoi répondre. La vérité c'est qu'il n'en était lui-même pas sûr.
— J'aime Kanon..., avoua-t-il. Je ne sais pas trop pour le reste. Tu sais il y a un an, j'ai commencé à m'attacher à lui. Je l'admirais. J'aimais passer du temps avec lui, il était doux et rassurant. J'avais l'impression d'apprendre de lui chaque jour, et… Il s'est confessé et je crois que quelque chose s'est passé à l'intérieur de moi ce jour-là. Je n'ai pas cessé de penser à lui, je ne comprenais pas ce qui m'arrivait… J'avais peur du jugement des autres, j'avais peur que tout le monde sache…
— Milo, le coupa Camus. Je n'en ai sérieusement rien à fiche que tu sois de l'autre bord. Tu as osé me cacher ça pendant un an ?!
— Je sais, je sais, grimaça le Scorpion. Désolé Camus.
— Et donc ? Pourquoi il t'a quitté… ? demanda le Verseau d'une voix douce.
— Il… Hadès, tout ça. Il n'a pas supporté. Mais je sais que j'ai aussi ma part de responsabilité…
— Explique-moi ?
— J'avais tellement honte de moi quand j'ai réalisé avoir des sentiments pour lui. Si honte. Au point que même quand nous étions ensemble, je me montrais toujours froid et distant. Je lui disais à peine que je l'aimais car je n'osais pas. Je ne savais plus ce que je voulais, ni où j'en étais. Je sais qu'il en a souffert. Et… Ce qui se passe entre Hadès et moi, ça n'a pas aidé.
— Je peux le comprendre… Tu n'as pas essayé de le retenir ?
— Si, mais ça n'a rien donné. En même temps, je me suis réveillé peut-être un peu tard. Même à mon retour des enfers, je ne me suis pas montré démonstratif avec lui. Tout ce que j'ai trouvé à lui dire était « ne cause pas de problèmes ». Je ne l'ai réalisé que lorsqu'il a décidé de partir… J'ai réalisé à quel point j'avais besoin de lui dans un moment aussi sombre où rien ne va. Je suis perdu car même s'il me manque horriblement, je me demande si les choses ne sont pas mieux ainsi. Avec tout ce qui se passe, je n'ai pas la moindre idée de la suite des évènements… Je ne veux pas qu'il souffre davantage à cause de moi.
Camus marqua un temps de pause. Il était en train de réaliser que non seulement les récents évènements étaient en train de torturer son ami physiquement et moralement, mais de plus, il passait par un chagrin d'amour sans pouvoir en parler à qui que ce soit.
— Idiot… Milo, tu n'es vraiment qu'un pauvre idiot, déclara le chevalier des glaces en se levant pour le prendre dans ses bras. Sérieusement, quelle est l'utilité d'avoir un ami si tu ne peux pas lui parler de ce genre de choses. Tu es d'un stupide des fois.
— Je sais…, admit le Porteur.
Et s'il n'y avait que ça… Le Scorpion mourrait d'envie de se libérer complètement, mais il ne le pouvait pas. Il ne se sentait pas encore la force de lui annoncer que ses souvenirs d'enfance étaient intacts. C'était peut-être trop tôt. Ne disant rien, il se laissa juste aller dans les bras du Verseau, se retenant de verser quelques larmes.
Deux bonnes heures plus tard, la pluie n'avait toujours pas cessé. Elle tombait de plus belle et Milo commençait à y prêter attention. Camus, épuisé de sa journée, s'était endormi la tête sur les genoux du Scorpion. Il avait toujours été un couche-tôt. A vrai dire, le Porteur en était assez satisfait, car cela lui permettrait de s'éclipser discrètement sans avoir de problèmes. Lorsqu'un coup de tonnerre fit rage, il sursauta et ferma les yeux, le cœur battant. Il devait vite retourner chez lui. Très vite.
Le Gold quitta la maison du Verseau et regarda le ciel noir. La pluie s'affolait. Une tempête était en train d'arriver. Le chevalier serra les dents avant de se mordre la lèvre. Angoissé, il se précipita dans la maison du Sagittaire avant d'enfin arriver à la sienne, trempé.
— Minos ?! appela-t-il la voix cassée.
Mais aucune réponse, pas un signe du spectre. Surpris de ce silence, le jeune homme alla voir dans la cuisine, où il vit le dîner tout prêt. Celui qu'il recherchait ne s'y trouvait pas. Il alla voir dans la salle de bain et même dans sa chambre, rien à faire. On pouvait dire que cela était surprenant, le Griffon étant du genre collant avec lui. Mais il finit par trouver un petit mot, posé en évidence sur son lit : « Je vais passer la nuit avec Rhadamanthe (et en profiter pour lui donner une petite leçon). Je me suis dit que vous vouliez peut-être un peu de solitude après ce qui est arrivé, ce que je peux comprendre. Je serais là demain matin, votre dîner est prêt. Reposez-vous bien. » Au coup foudroyant de l'éclair, Milo eut un grand sursaut. Il fit tomber le mot sur le sol, ses mains désormais sur sa tête. Il devait rester calme. C'était ce qu'il se répétait en boucle, chaque fois que ça arrivait, chaque fois qu'une tempête se levait sur le sanctuaire, perdant le contrôle de son cœur affolé. Il le sentait arriver. Un froid étrange et inexpliqué commençait à lui brûler la peau. Sa vision se faisait de plus en plus trouble. Paniqué, il prit le soin de respirer profondément, en ôtant ses chaussures et ses vêtements mouillés. Il s'habilla plus chaudement, sentant les larmes lui monter aux yeux. Elles venaient quand ça arrivait, systématiquement, comme pour lui montrer à quel point il était resté faible et vulnérable. L'enfant torturé n'était jamais parti, il était là, dormant au fond de lui et se réveillant à des moments rares, dévoilant son esprit et son corps toujours traumatisés. Milo détestait l'orage. Non pas qu'il en avait peur, mais les ressentis qu'il réveillait en lui étaient insupportables. La peur, l'angoisse, le froid, la douleur, le sentiment d'être abandonné, tout revenait d'un coup, comme s'il n'avait jamais quitté la tristement célèbre île du Scorpion.
Habituellement, lors de ces instants de faiblesse et de mise à nus, Kanon était là. Il le serrait dans ses bras, lui prenait la main et l'embrassait langoureusement, lui murmurant qu'il n'avait à s'inquiéter de rien. Il savait que Milo avait des comportements « parfois étranges ». Il avait fini par se douter que certaines choses n'avaient jamais été dites. Mais Milo n'avait pas voulu s'ouvrir sur le sujet, ni à lui, ni à personne. L'ex-marina avait fini par ne plus demander, se disant que le plus jeune finirait par venir le voir pour lui en parler le jour où il en aurait besoin. Mais cette fois… Cette fois, le Scorpion était seul, tout seul, comme bien avant sa relation avec le jumeau de Saga. Il se cachait, dans un coin où personne ne pouvait le voir, le plus souvent dans son Temple, et ne se montrait qu'à la fin de la tempête. Il avait réussi à conserver ce secret bien longtemps. Beaucoup trop longtemps. Mais savoir qu'il devrait à nouveau vivre ça tout seul, sans la présence de l'homme qu'il aimait pour le soutenir, lui brisait encore plus le cœur.
Il se dirigea dans sa salle de bain et resta figé devant son miroir. Après avoir tourné le robinet, il passa ses mains tremblantes sous l'eau et se rinça le visage, se demandant combien de temps est-ce qu'il pourrait rester calme. Tout lui revenait à la surface. Il ne devait pas laisser ces souvenirs revenir. Il les détestait, les fuyait, ils étaient sa plus grande frayeur. Il devait s'occuper l'esprit, faire quelque chose, mais au final il ne savait jamais vraiment quoi faire dans ces moments de profondes angoisses. Il leva les yeux sur le miroir, cherchant sa respiration. Elle commençait à disparaître. Frustré, il donna un grand coup de point sur le miroir, qui se brisa en mille morceaux et laissa son poignet ensanglanté. La douleur revenait, pas la bien futile qui hantait désormais sa main, pas celle que le bébé créait dans son ventre, mais plutôt celle qui détruisait son corps depuis l'enfance.
— Milo…
Il entendait une voix l'appeler. Cette même voix qui l'avait torturée toute son enfance.
— C'est le moment. Arrête de bouger.
— Non…, murmura le chevalier tremblant de toute part. Pitié, non… Je ne veux pas…
Cette même odeur revenait à son nez, celle de tous ces enfants morts, dont la dépouille avait été vulgairement abandonnée ici et là sur l'île du Scorpion. La fumée, l'eau chaude de la pluie, des ustensiles de tout genre qui attendaient dans un feu ardent, et les larmes qui coulaient comme si souvent. Sauf que cette fois, il ne restait plus que lui, lui seul. Les autres enfants n'étaient plus là. Il n'avait rien ni personne derrière se cacher. Cet homme était grand et fort, il ne pouvait pas lui échapper. Il le savait et il en pleurait, criant en espérant que quelqu'un, à des centaines de kilomètres de cette île finisse par l'entendre. Lui restait-il encore de l'espoir ? Dans le fond, du haut de son si jeune âge, il savait bien que non. Milo recula contre le mur, contre lequel il finit par glisser, finissant assit, pétrifié. Il le sentait l'agripper, le toucher, il sentait ses mains sur ses bras. De gros scorpions, enfermés dans une boite, attendaient que le maître de l'île les libère pour faire leur travail. Il souffrirait, bien plus que les autres fois. Il le savait. Il en était sûr.
— Milo !
Soudainement, le Gold ouvrit les yeux. Le visage inquiet de Kanon était en face de lui. Encore plongé dans l'angoisse, il ne sut dire le moindre mot, tremblant et cherchant son souffle, assit près des morceaux de verre. Était-il en train de rêver ? Une douleur lancinante traversa son corps entier, la sensation d'une piqûre, d'une seconde et d'une autre encore, semblables à des brûlures, des entailles au fer chaud. Milo hurlait et se débattait, prit au piège. Mais il ne pouvait rien faire, si ce n'était crier et crier encore, supplier que ça cesse.
— Milo, calme-toi ! s'écria le dragon des mers en essayant de le maîtriser. Je suis là, il ne se passe rien !
Kanon posa ses mains sur le visage de son ex-amant, l'obligeant à le regarder.
— Hey, tu m'entends ? C'est moi !
— J'ai mal… ! pleura le Scorpion.
— Où est-ce que tu as mal ?
— Partout Kanon, partout, aide-moi je t'en supplie ! Ne me laisse pas seul… Ne t'en va pas.
— Je reste là, je vais rester avec toi.
Alors que le tonnerre retentit une fois de plus, Milo posa ses mains sur ses oreilles comme pour se libérer, se priver de ce bruit dévastateur. Il ne voulait plus l'entendre, plus exister le temps de cette tempête.
— Viens avec moi, je t'emmène dans ta chambre, dit Kanon en le relevant avec douceur. Tout va bien se passer d'accord ? Appuie-toi sur moi.
Arrivés dans la pièce, Kanon allongea le corps affaibli de Milo. Ce dernier saisit la main de l'homme qu'il aimait, ayant une peur bleue qu'il ne s'éloigne, ou pire qu'il le laisse seul avec ses vieux cauchemars.
— Ne t'en va pas, supplia-t-il.
— Je suis là, je ne vais nulle part, rassura Kanon en examinant la main en sang du plus jeune. Je vais soigner ta main. Je suis juste à côté je te le promets.
Le Scorpion se redressa avec difficulté avant de s'accrocher à l'ex-marina, passant ses bras autour de son cou. Kanon lui rendit son étreinte, frottant son dos avec douceur. Pour sûr, Milo ne le laisserait pas quitter le lit pour aller prendre de quoi désinfecter sa main.
— Calme-toi, respire, souffla Kanon inquiet. Ça va passer.
— J'ai vraiment très mal Kanon…, sanglota le Porteur.
— Où as-tu mal ? Dis-moi.
— Partout, les bras, les côtes, les jambes…
— Pourquoi as-tu mal… ? Mon cœur… Si tu ne me dis pas ce qui se passe, je ne pourrais jamais t'aider… Tu ne veux pas faire un effort et me parler ?
— Je suis désolé, Kanon, je suis tellement désolé…, sanglota-t-il. Je ne veux pas te perdre… Je t'aime réellement. Je suis tellement désolé, pardonne-moi pour tout.
— Milo…
Kanon sentit un poids dans sa poitrine. Il déposa un baiser sur l'épaule de celui qui restait dans ses pensées depuis si longtemps. Le berçant doucement dans ses bras, il continua :
— Je ne pense pas que ce soit le moment de parler de ça…
— Si, c'est le moment. Je suis désolé d'avoir été si froid et distant tout ce temps. J'ai honte de moi, je me sens ridicule… Tout ce que je veux c'est que tu reviennes près de moi, laisse-moi juste une chance je t'en supplie. Si tu m'aimes encore, laisse-moi une chance.
— … Respire, je veux que tu te calmes avant tout. Reste dans mes bras, ça va aller mieux.
A la fin de la tempête, le chevalier du Scorpion somnolait entre les bras de Kanon. Le silence s'était imposé dans la pièce pendant deux longues bonnes heures et la nuit était déjà bien avancée. Milo était plus calme, détendu. Il n'avait plus de tremblements ou de signes d'angoisse. La crise était enfin passée. Comme pour le réveiller, Kanon caressa doucement sa chevelure.
— Milo… ?
Le Gold ouvrit les yeux, n'ayant pas lâché l'homme qu'il aimait depuis lors. L'esprit embrumé, il se recula doucement, gardant ses bras autour de lui.
— Comment tu te sens ? demanda Kanon en caressant son visage.
Le jeune homme baissa la tête, la mine triste, mais répondit :
— Mieux… Merci d'être resté.
Kanon ne répondit rien. Une atmosphère gênante s'était installée, Milo faisant le tri dans ses pensées, dans ce qu'il avait dit quelques heures avant et réalisant enfin, la présence de son ex-amant tout près de lui. Il lui avait tout dit… Probablement de manière brouillon et bordélique, mais au moins tout était sorti. Il se sentait embarrassé d'avoir été aussi franc dans ses sentiments. On pouvait dire que ce n'était pas tous les jours que ça arrivait. Comme s'il avait commis une faute, il ôta ses bras du dragon des mers, quand son regard se posa sur sa main abîmée. Il l'avait complètement oubliée.
— Je vais te soigner, dit Kanon calmement.
Le frère de Saga se leva et quitta la pièce, se dirigeant dans la salle de bain. Le temps d'un instant, il s'adossa contre le mur et passa une main dans ses cheveux. Il soupira silencieusement, prenant une petite pause psychologique par rapport à ce qui venait d'arriver. Dès que la tempête s'était annoncée, il avait tout de suite pensé à celui qui était dans son cœur. Même séparé, il ne voulait pas le laisser seul dans de telles conditions. Le garder dans ses bras lui avait fait un bien fou, il ne pouvait pas le nier. Rester plusieurs heures de plus avec son homme contre lui, ne l'aurait dérangé en rien. A présent, il ne savait pas comment réagir. Sa déclaration l'avait touchée et même si Kanon était convaincu que partir était le bon choix, son cœur voulait plus que tout essayer d'arranger les choses. Il craignait de souffrir et ne voulait pas faire le pas. Non seulement à cause du comportement de Milo, mais aussi de cette petite chose qui grandissait chaque jour à l'intérieur de lui.
Kanon revint dans la chambre avec le matériel et désinfecta la main du Gold, avant de l'entourer d'un pansement. Le silence était plus qu'embarrassant. Ni l'un ni l'autre n'osait parler. Une fois les soins terminés, Milo baissa la tête et prit enfin la parole :
— Tu sais… Je sais que je suis têtu, mais, je me disais juste que peut-être…
— Peut-être… ?
— Je me mets à ta place et je comprends ce que tu ressens. Je me disais que, après tout ça… Une fois que j'en aurai fini avec ce bébé, on pourrait… Réessayer, tous les deux. Je sais tout ce que cela incombe, je sais. Je réfléchirai à ce que je ferai avec l'enfant et tout le reste, et je t'en parlerai.
— Milo… Je ne sais pas quoi te répondre, dit Kanon hésitant.
— Je te laisse y réfléchir, je ne veux pas de réponse maintenant, c'est juste que je ne peux pas te laisser partir aussi facilement.
Kanon détourna le regard, pensif, puis quelque chose lui traversa l'esprit.
— Dis-moi ce qui se passe, dit-il enfin.
— Ce qui se passe… ? demanda Milo confus.
— Tu veux qu'on se donne une autre chance… Fait le premier pas.
— Lequel ? Je peux faire n'importe quoi.
— Ces crises violentes, d'où viennent-elles ? Je veux le savoir.
Se sentant piégé, Milo ouvrit légèrement la bouche, sans pouvoir dire quoi que ce soit. Le stress se saisit de son estomac, tandis qu'il se tripotait les doigts nerveusement. Kanon caressa son visage et continua :
— Tu ne m'as jamais expliqué d'où elles venaient. Je me suis dit que tôt ou tard tu m'en parlerais, mais tu ne l'as pas fait… Je ne te force pas, mais si tu veux corriger les erreurs du passé, je pense que ce serait un bon début de me dire la vérité. Tu ne crois pas ?
— Oh…
Cette fois, il était au pied du mur. Il n'y avait pas d'issue possible. Pour la première fois, il devrait parler de son enfance tortueuse, dévoilé à quel point il avait menti à tous et démontrer comment il en était resté traumatisé. Milo prit quelques minutes pour réfléchir, puis hocha la tête, acquiesçant :
— Je vais te le dire. Mais… Je n'en avais jamais parlé avant, alors, je risque de…
— De… ?
— Pas être très bien.
Kanon sourit, amusé. Il avait arrêté de compter les fois où il avait ramassé son ex-amant à la petite cuillère, entre cris et larmes. Qu'est-ce qu'il craignait encore à présent ?
— Je crois que je saurai gérer, répondit-il sarcastique. Alors ?
— C'est à cause de mon enfance.
— Ton enfance ? Comment ça ?
— Mon séjour à l'île du Scorpion, quand j'étais encore tout petit. En fait… La vérité, c'est que je me souviens encore de tout.
— Quoi ? Mais tu disais que…
— Oui je sais, coupa le Porteur. C'était ma façon d'oublier, de passer à autre chose. Je l'ai fait, mais… Certaines parties de moi ne parviennent pas à tourner la page, je dois le reconnaître. J'entends la voix de mon ancien maître et je ressens les douleurs qu'il me faisait subir. J'espère que tu ne m'en voudras pas d'avoir menti.
— Bon sang… Est-ce que les autres le savent ?
— Non, tu es le seul. Tu ne m'en veux pas… ?
— Je ne suis personne pour te juger et je comprends parfaitement… Je ne sais pas comment tu as fait pour garder ça en toi aussi longtemps…
Le Scorpion haussa les épaules, détournant le regard.
— C'est ce que j'aime le plus chez toi, continua Kanon. A quel point tu es fort.
— Moi, fort… Je ne suis pas aussi fort que je le prétends.
— Oh si tu l'es. Bien plus que moi.
— Plus que toi… ?
— Evidemment. Tu sais que je continue de reprocher à Saga de m'avoir enfermé sous l'eau ?
— Encore ? s'étonna Milo. Cette vieille histoire ?
— Voilà à quel point je suis faible. Mais toi, tu as été torturé toute ton enfance et tu n'en as jamais parlé, tu as fait comme si rien de tout ça n'existait.
— Mon corps s'en souvient toujours… Malheureusement, ajouta le Gold en baissant la tête.
— Milo, appela Kanon en relevant le menton du Scorpion. Pourquoi n'as-tu pas demandé à Shaka de te débarrasser de tout ça ?
— Je n'ai pas osé, avoua-t-il. J'avais peur de faire face…
— Quand il sera à nouveau des nôtres, tu devrais lui demander. Tu ne peux pas rester comme ça toute ta vie.
— Tu viendrais avec moi… ?
Le dragon des mers eut un petit sourire.
— Si ça peut t'aider, oui.
Kanon avait beaucoup de mal à détacher son regard du plus jeune. La vérité, c'est qu'il avait très envie de ressentir la douceur de ses lèvres à nouveau. Il aimait l'embrasser. De toutes les conquêtes qu'il avait pu avoir, celles de Milo étaient ses favorites sans aucun doute. Le Scorpion le sortit de ses pensées avec un drôle de regard :
— Qu'est-ce qu'il y a ? questionna le plus âgé.
— Tu vas m'embrasser ?
Démasqué. Kanon rougit si fort à ces mots, que ça en étonna son ex-amant.
— Je sais que c'est ce que tu veux quand tu as ce regard. Je n'aurais pas dit non, mais bon, continua le Porteur. Je sais que les choses sont compliquées… Alors je n'insisterai pas. Haha… Si tu voyais ton visage !
— Hmm, grogna le dragon des mers. Ne te moque pas de moi.
En représailles, il força le Scorpion à s'allonger, restant au-dessus de lui, son regard dans le sien.
— Oui, je veux t'embrasser. Je n'arrête pas de penser à tes lèvres. Mais j'ai trop de respect pour toi pour te donner un baiser sans rien t'offrir après. Je ne veux pas me jouer de toi.
— Je ne penserai pas que tu te joues de moi… Tu sais bien que j'en ai envie moi aussi.
— Je veux faire les choses correctement…
Kanon déposa un baiser sur son front avant de reprendre :
— Je t'embrasserai seulement quand ce sera le moment.
La déception se dessina sur le visage de Milo.
— S'il te plait, ne fait pas cette tête, supplia le dragon des mers. Cela va finir par me donner des idées.
— Des idées ?
Kanon trouvait Milo adorable et cela faisait déjà bien longtemps qu'il songeait à lui donner bien plus qu'un baiser. Il ne l'avait jamais forcé, ni mit de pression par rapport à ça. Il voulait lui laisser tout le temps dont il avait besoin. Imaginer qu'Hadès avait pu avoir ce privilège blessait son cœur amoureux. Mais il n'y pouvait rien, ni lui, ni personne. Il essayait de froisser cette pensée entre ses mains et de la jeter à la poubelle, bien qu'elle revenait quelques fois à la surface. Le dieu des enfers touchant son petit homme adoré.
Le chevalier du Scorpion réalisa enfin de quoi son ex-amant parlait, et ce fut à son tour de rougir.
— Ah, ça… Euh… Tu sais, pour ça aussi, je suis vraiment désolé…
— Tu n'as pas à t'excuser pour ça. Si je t'aime, je devrais être capable d'attendre sans rien dire. Quant à Hadès, j'essaie de ne pas y penser.
— Tu sais avec lui, ce n'était pas… Enfin, j'ai toujours entendu que c'était différent de le faire avec la personne qu'on aime.
— Tu as aimé ?
— Hein ? Aimé quoi ?
— Le faire avec lui ?
Etais-ce une question piège ? Le Porteur cherchait sa réponse, hésitant. Pour être honnête, oui, il avait aimé ça. Mais n'étais-ce pas du sexe ? Hadès avait vraiment fait en sorte de lui donner du plaisir et il y était parvenu. Mais il ne pouvait pas se permettre de dire ce genre de choses à l'homme qu'il aimait… Si ?
— Je n'aurais pas dû te demander ça, se résigna Kanon. Je dois vraiment arrêter d'y penser.
— Kanon, je… Je suis désolé.
— Je t'ai dit que ce n'était pas la peine de t'excuser. Tu n'y es strictement pour rien. Je m'en veux de t'avoir dit toutes ces choses la dernière fois.
Ce fut à peine s'il eût le temps de terminer sa phrase, que Milo l'entoura à nouveau de ses bras, le serrant fort.
— Je veux savoir ce que ça fait de le faire avec celui que j'aime.
— Milo, ne me dit pas des choses comme ça.
— Pourquoi ? Je le pense.
— Tu portes l'enfant de quelqu'un, je ne peux pas te toucher juste comme ça… De plus, nous ne sommes pas ensemble à nouveau. Ce serait inconvenable.
— Alors reste avec moi juste cette nuit ? S'il te plaît.
Le frère de Saga réfléchit quelques secondes avant d'accepter. Il ne pouvait pas refuser ça, car lui aussi donnerait n'importe quoi pour s'endormir avec lui dans ses bras, tout comme ils le faisaient avant.
Pourtant, le lendemain matin, quand Minos entra dans la pièce pour réveiller le Porteur… Il ouvrit de grands yeux, sous le choc de voir que ce dernier n'était pas tout seul dans son lit. Profondément endormi auprès de celui qui avait servi Poséidon autrefois.
— Qu'est-ce que ?! s'écria-t-il.
Les deux chevaliers ouvrirent des yeux fatigués, réveillés par le cri du Griffon.
— Qu'est-ce que c'est que ce cirque ?! Qu'est-ce que tu fais ici ?!
Kanon se redressa tandis que Milo fronça les sourcils, fixant le nouveau venu.
— Premièrement, rien ne t'oblige de crier dès le matin. Deuxièmement, oui il a dormi ici. Quel est ton problème ?
— Mais je croyais que… !
— Ca va, je m'en vais, déclara Kanon en quittant le lit.
— Non, répondit le Scorpion en attrapant la main de son amoureux. Reste encore un peu…
— Milo, je crois que ça suffit comme ça. J'ai dormi ici comme tu le voulais… On ne devrait pas abuser.
— Vous lui avez demandé de dormir là ?! rétorqua Minos. Mais… Vous ne pouvez pas faire une telle chose.
— Je peux savoir ce qui l'interdit ? Fiche-moi la paix, répondit le Scorpion d'humeur massacrante.
— Je pars, dit Kanon en passant à côté du spectre. Inutile de le fatiguer davantage.
— Toi, menaça le Juge en saisissant son bras. Je sais que tu as des sentiments pour lui. J'espère que tu n'as pas osé le toucher pendant la nuit.
— A travers les vêtements ? Je t'en prie Minos, ne soit pas ridicule, lança le dragon des mers en reprenant son bras avant de partir.
— Et vous…, continua le Griffon en regardant un Milo très remonté. Ne me regardez pas de cette façon. Je vous laisse seul le temps d'une nuit et voilà ce qui se passe ?! Puisque c'est comme ça, je ne vous lâcherai plus d'une semelle ! Depuis tout ce temps vous aviez des sentiments pour lui ?!
— Oui. Et ?
— … Eh bien…, bafouilla le Juge perturbé. Je… Bon. Veillez cependant à ne rien faire avec cet homme durant votre grossesse. Ce serait une disgrâce pour Hadès.
— Ne me dit pas ce que je dois faire.
Minos soupira en se grattant les cheveux.
— Bien… Tenez-le vous pour dit. Je vais faire votre petit déjeuner. Est-ce que la nuit a été agréable ?
Le Gold sourit les yeux dans le vague, le visage de son aimé dans les pensées.
— Oui. Elle l'a été.
Pendant ce temps, Aphrodite était parti bien loin du sanctuaire. Dans la chambre d'Athéna, qui l'écoutait assise sur son lit, cette dernière fut sous le choc quand elle apprit ce qui était arrivé avec Shaka, ainsi que la disparition de Shion. Le chevalier du Poisson ne put pourtant s'empêcher de lui porter un regard accusateur, préférant garder ses mots culpabilisateurs pour la prochaine fois. Ce n'était pas le moment de faire plus de dégâts.
— Shaka…, murmura Saori. Pourquoi a-t-il fait une telle chose… Pourquoi n'est-il pas venu m'en parler…
— Je pense qu'il voulait être sûr de lui avant tout.
— Le fait qu'il se soit approché de Milo constitue une faute par rapport à ce que Hadès a demandé. Même s'il a voulu le faire pour le bien, il restera en tort quoi que je dise. Mais je vais trouver un moyen pour le sortir de là.
— Si je puis me permettre, puis-je vous demander ce que vous comptez faire ?
— Pour Shaka, je vais négocier avec Hadès sur le champ. Quant à Shion, il a besoin de temps pour lui. Il reviendra quand l'heure sera venue. En attendant, Saga devra reprendre la gestion du Sanctuaire.
— Saga ? répéta Aphrodite. Je ne voudrais pas remettre vos ordres en question mais êtes-vous sûre de ce choix ?
— A l'heure actuelle il est le seul qui en est capable. Je comprends les blessures du passé mais il est grand temps de tourner la page à présent. De plus, ce sera juste le temps que Shion nous revienne, ensuite tout rentrera dans l'ordre.
— Bien… Et si le bébé s'avère réellement dangereux, que ferons-nous ? L'accord a déjà été signé et nous ne pouvons plus briser le pacte… Nous sommes coincés.
Saori soupira et se leva, allant regarder par la fenêtre.
— Je ne peux être sûre de rien… Qu'ai-je fait… Moi qui pensais que tout ceci serait une bonne chose pour tout le monde. Je n'ai plus le moindre pouvoir sur ce qui se passe car mon accord a déjà été donné…
— Il doit certainement y avoir quelque chose à faire !
— Milo peut faire quelque chose. Même s'il s'agit de l'enfant d'Hadès, il est aussi son enfant. Lui seul peut avoir l'influence nécessaire pour convaincre le père. Je lui dois de grandes excuses…
— Convaincre Hadès… ? Et si ça ne marche pas ?
— Nous combattrons, comme nous l'avons toujours fait.
C'est tout pour aujourd'hui ! J'espère que ce chapitre vous a plu et surtout on n'oublie pas, rien n'est plus encourageant pour les auteurs que de lire vos commentaires et impressions 😊 Merci de suivre cette fiction et rendez-vous lundi prochain !
