La nuit est tombée dans la vallée d'Imladris, les étoiles brillent et la lune offre un magnifique éclat bleuté, illuminant les bâtiments, illuminant les chemins et les jardins, et illuminant le visage de la petite rousse endormie dans le lit de Dame Arwen. Cette dernière est présente, assise dans un fauteuil avec un livre entre les mains, mais elle ne peut s'empêcher de regarder cette enfant.

Elle l'apprécie beaucoup et souhaite plus que tout son bonheur. Seulement sa tête est remplie de questions quant à cette rouquine ; qui est-elle vraiment ? Pourquoi était-elle dans les Montagnes Bleues et pas ailleurs ? Où est-elle née ? Et surtout, à quoi correspond exactement cette énergie qu'elle dégage ?

Elle soupire et son regard devit vers la fenêtre, qui donne une vue sur un flanc de falaise boisée. Son attention est finalement attirée par quelque chose au loin, une silhouette imposante et animal. Un oiseau ? Aussi nette à cette distance ? C'est pourtant le cas, puisque le dit oiseau déploie ses grandes ailes et s'envole au loin :

- Sorno ? (Un aigle ?)
- Arwen ?

La brune se retourne soudainement pour voir son père devant sa chambre. Il lui fait un signe de tête, lui demandant de le suivre. Celle-ci s'attendait à ce qu'il veuille lui parler. Elle sort donc de la chambre d'un pas léger et suit son paternel dans les couloirs et les jardins :

- Tu sembles être attachée à cette petite.
- C'est une enfant enjouée, pleine de vie et de rêves.
- Tu t'es attachée à tel point que tu lui a offert une robe elfique, l'une de tes anciennes robes, et tu tentes de lui apprendre notre langue. Ne crois-tu pas que tu en fais de trop ? Il se retourne vers elle pour la voir dans les yeux. Elle ne restera pas à Fondcombe, les mortelles ne le peuvent et tu le sais. Sauf exception.

Arwen ne peut empêcher ses pommettes de rougir en comprenant l'allusion faite par son père. Ils entrent dans l'un des nombreux lieux d'études :

- Père, ne faites pas comme si vous le n'aviez pas ressenti : l'aura que dégage cette enfant est tout sauf ordinaire.
-...
- Je le sens bien, cette petite n'est pas humaine. Et vous le savez. Sa place n'est pas auprès de marchands humains-
- Ce n'est pas à nous d'en décider. Interviens Elrond, sérieux. Cette petite fera sa propre route, son propre chemin.
- Et si son chemin la ramène ici ?
- Arwen, tout ce que je souhaite est de te protéger. Ne t'attaches pas autant à elle, elle ne peut rester ici.
- Père...
- J'ai très bien compris ce qu'elle était, et si elle reste, elle ne sera pas heureuse, surtout si cela est su par notre peuple. Autant pour ton bonheur que pour le sien, elle ne peut rester ici. J'en suis vraiment navré Arwen.

Sur ses mots il prends tendrement sa fille dans ses bras, voyant la peine dans ses yeux.
Elle finit par sortir, mais une dernière question lui reste en mémoire :

- Que comptais vous faire, pour cette magie ?
- J'ai été tenté de la briser mais je crains les conséquences d'un tel acte. Je pense que ce n'est pas à moi de lui révéler ce qui a été masqué. J'espère qu'elle l'apprendra par quelqu'un d'autre et que cette personne pourra la guider par la suite.
- Très bien. Bonne nuit Père.
- Bonne nuit Arwen.

L'elfe brune pars rejoindre ses quartiers, laissant son père à ses doutes et ses craintes.

Son regard finit par tomber sur la fresque plus haut.
Il emprunte les escaliers pour aller l'observer de près, bien qu'il la connaisse déjà par cœur. Voir cet homme avec l'épée brisée, et cette ombre fumante abattant sa masse, le ramène dans de lointains souvenirs.

Le lendemain, le Seigneur Elrond profite sur une terrasse de la brise matinale, du soleil qui se lève doucement et des bruits de la vallée qui se réveille. Un moment de calme et de paix.
Ou presque...

S'il n'entendait pas quelqu'un raclant une chaise à terre pour venir à côté de lui. Ce son agace bien ses oreilles mais il reste les yeux fermés et tente d'ignorer :

- Bonjour !
- Bonjour jeune fille.

La petite passe son regard du Seigneur Elfe au paysage, puis inversement :

- Vous faites quoi ?
- Je profite des chants du matin qui réveille arbres et feuilles. J'entends également l'appel de la mer. Dit-il dans un profond soupir de nostalgie.
- Hoooo.

Elle ferme les yeux et pose ses bras la rambarde. Elle inspire et tente d'entendre à son tour :

- Moi j'entends rien.
- Seuls les elfes le peuvent jeune fille. Dit-il dans un soupir et avec un petit sourire
- Haaaa. Elle se tourne vers lui Pourquoi ?
- Parce que nous possédons des capacités et des dons que les Humains n'ont pas.
- Mais pourquoi ?
- Ce n'est pas moi qui ait conçu les elfes ainsi. Et si vous vous avisez de me demander qui l'a fait, vous risqueriez d'avoir un cours de quelques heures sur la naissance de ce monde et de ses premiers enfants. Je doute que vous en ayez envie.
- Je me tais !
- Sage décision.
- Mais j'ai quand même envie de savoir.

Elrond lache un long et las soupir. Cette petite ne sait pas quand il est bon de se taire on dirait. "Pleine de joie et de vie", sa fille n'exagérait pas en disant cela :

- Je peux vous poser une question ?
- Si seulement il n'y en avait qu'une. Remarque-t'il en la regardant amusé.
- Elle est où la maman d'Arwen et de ses frères ?

Elrond sent une violente et ancienne douleur enfouie en lui revenir de plein fouet. La mère de ses enfants, sa bien-aimé Celebrían, disparue depuis longtemps maintenant. L'elfe a eu le temps de faire son deuil, mais qu'on le lui rappelle ainsi est tout de même trés douloureux.

Il respire profondément et détourne le regard, ne voulant pas montrer sa peine :

- Elle... Elle est partie il y a longtemps... Et ne vous avisez pas, de me demander 'Où'.
- Moi je ne me souvient vraiment pas de la mienne. J'ai réfléchie à ce que vous m'avez dit hier, mais j'arrive pas à considérer les marchands comme ma famille. Du coup, j'aimerais bien savoir d'où je viens, et peut-être trouver mes parents-
- Il y a parfois des questions dont il est plus sage de ne jamais savoir les réponses.
- Ho.

La rousse finit enfin par se taire. Elrond remercie intérieurement les Valars pour ce petit instant de paix...

- Avant tout, retrouver Thorin !

...Qui ne dure pas !

- Je voyagerai juste pour ça !
- Et je vous encourage. Le monde est vaste, rempli de beauté et de danger. À vous de l'explorer, quelque soit la manière ou le lieu où vous irez en premier.
- Thorin m'a dit presque la même chose !
- Alors prenez bien en compte tous ses conseils.
- Vous avez déjà voyagé ?
- Plus d'une fois jeune fille. Même dans les endroits les plus reculés. Il finit par lâcher l'horizon des yeux pour regarder l'enfant. À mon tour de vous poser une question : vous dites ne rien n'entendre, mais n'avez-vous jamais ressenti un appel particulier, venant d'ailleurs ? D'un lieu, ou bien d'un objet ?

La petite le regarde avec des yeux ronds. Non seulement Elrond peut y lire de la surprise, mais il voit également qu'une pensée à traversée l'enfant, et que celle-ci semble lui faire peur :

- Vous n'avez rien à craindre. Soyez honnête avec moi.

Elle baisse les yeux et semble éviter son regard. Elle a peur de lui avouer qu'elle a déjà entendu une étrange voix depuis qu'elle est ici, mais comment le dire sans être prise pour une menteuse ou une folle ?
Elle tripote ses doigts nerveusement :

- Je... J'... J'ai peur d'en parler...
- Jeune fille, personne ne vous punira.
- Heu... Elle hoche soudainement la tête. Non, je vois pas de quoi vous... Vous parlez. Je n'entends rien.
- Vraiment ? J'ose espérer que ce n'est pas un mensonge, car les mensonges ne mènent nulle part et peuvent attirer des ennuis.

Elrond la regarde de toute sa hauteur et l'enfant se sent encore plus petite qu'elle ne l'est. Elle déglutit difficilement en voyant ses yeux méfiant... Il a compris, et ça lui fait peur.
Elle hésite à tout lui dire, lui avouer... :

- Je... Je...
- Ha ! Te voici ! Intervient une douce voix. Je te cherche depuis un moment sais-tu ?
- Arwen !

La jeune enfant saute de sa chaise et cours dans les bras de l'elfe qui l'accueille chaleureusement. Elle la porte dans ses bras, une grand joie sur le visage et dans le cœur. Comme avec Thorin, cette petite transmet joie et rire à ceux qui l'entourent :

- Père, les marchands sont sur le départ.
- Très bien. Allons-y. Il regarde la rousse dans les bras de sa fille pour ensuite regarder cette dernière. Je pense qu'elle sait marcher toute seule, tu peux la déposer.

Il part devant.
La petite se sent plus sereine depuis l'arrivée d'Arwen, et profite d'être dans ses bras pour lui chuchoter quelque chose à l'oreille :

- Il est pas chouette aujourd'hui...
- Ne t'en fais pas, mon père est toujours sérieux. Encore plus quand il est de mauvaise humeur, car il est aussi grognon.
- Je vous ai entendues.

Les filles ricanent gentiment.
Tous les trois arrivent dans la cour. S'y trouve le couple de marchands, qui prépare la charette pour le départ. Aidés par d'autres elfes, ils chargent toutes sortes de boîtes et de sacs. Elrond a eu la gentillesse de leur offrir des vivres pour leur voyage. Ils embarquent également des herbes et des broderies, qu'ils lui ont achetées, et qu'ils pourront vendre ailleurs. Le Seigneur elfe est très généreux, malgré le comportement irrespectueux qu'a eu Barnie.

Ce dernier est dans la charrette. Pas un mot, un regard à personne, aucune aide pour ses parents... Rien ! Il reste assis et ne bouge pas. Même quand Dame Arwen arrive il ne lève pas les yeux.
Le sermon qu'il a reçu, au repas de la veille, semble l'avoir calmé. Mais il ne change pas d'avis envers sa 'sœur'.

Arwen dépose la petite dans la charette et lui offre un immense câlin réconfortant. Elles se sont attachées l'une à l'autre en si peu de temps et la séparation est difficile pour les deux.

La petite famille finit par dire au revoir à Fondcombe, et part pour une nouvelle destination bien lointaine cette fois-ci : Lacville.
Ils en ont pour plusieurs semaines de trajet en charette, voire un mois, surtout qu'ils sont à petite vitesse.

À peine deux heures après leur départ, Elrond est dans son bureau, écrivant sur des parchemins, s'affairant à ses devoirs, quand l'un de ses fils vient le quérir en toute hâte :

- Père, des Orques approchent dangereusement de nos frontières.
- Des Orques ? Il repose sa plume et se lève soudainement. Comment cela est-il possible ?
- La présence de nains et de Mithrandir nous a été rapportée.
- Fais préparer les chevaux, je vous rejoins.
- Bien père.

Son fils part sur ces mots.
Des Orques, Mithrandir,... Et des Nains ?
Elrond ne peut retenir un rictus en pensant à la rouquine qui est partie plus tôt.