Désolée pour le retard, j'ai eu un peu de mal avec une des scènes ! Les phrases marquée d'une petite astérisque (*) sont directement tirées des livres de JKR. J'ai essayé de mettre le plus de discours indirect et indirect libre possible, mais il fallait quand même que ça reste digeste pour vous. Bonne lecture !


Sirius Black

Assis sur le petit canapé de Godric's Hollow, Sirius passa une main sur son visage et retint un ricanement. Merde, foutue prophétie. Pourquoi avait-il fallu que ça tombe sur eux ? Que ça tombe sur Harry ? Le petit garçon souriait, observant le monde alentour de ses grands yeux verts et expressifs. Malgré lui, Sirius ne put s'empêcher de sourire en retour, attendri par l'adorable frimousse de son filleul.

— James, Lily ! appela-t-il ses amis, sa famille.

Ceux pour qui, sans hésitation, il donnerait sa vie.

— Il y a un problème avec Harry ? s'enquit la rouquine en revenant de la bibliothèque, suivie de près par son mari.

Sirius prit une grande inspiration, ferma les yeux. Se donner de la force, apprendre à faire confiance. Ils étaient une famille, après tout. Il avait pris sa décision. Pour James, pour Lily. Pour Harry.

— C'est trop évident. Je suis trop évident. Il faut... Il faut que vous changiez de Gardien du Secret.


La nuit était tombée depuis quelques temps déjà. Quatre jours plus tard, Sirius aurait vingt-deux ans. Ce serait son premier anniversaire sans James depuis ses onze ans. L'âge de la rentrée à Poudlard. Tout ça paraissait tellement loin, à présent. Le temps avait passé, des liens s'étaient brisés, d'autres s'étaient formés. Des gens étaient morts, d'autres étaient nés, et la guerre n'avait fait que prendre de l'ampleur, grondante et pernicieuse.

Cela faisait quelques mois que Sirius ne s'était pas retrouvé seul avec James et Lily, comme au tout début de la guerre. Depuis qu'ils avaient brisé le Fidelitas, à vrai dire. Il savait bien que ça avait été le bon choix, que ça avait été la meilleure chose à faire. Il était un Gardien bien trop évident, après tout. Mais... Peter n'avait jamais été le meilleur pour se cacher, malgré sa forme Animagus minuscule.

Pris de doute, Sirius sortit de son lit. L'appartement était bien vide, à présent. Peter avait sa propre cachette, Remus était toujours dans le Nord de la Grande-Bretagne. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu Remus, aussi. Il se demanda vaguement s'il serait rentré pour son anniversaire, puis sortit, et enfourcha sa moto volante.


— Queudver ! murmura-t-il en toquant à la porte. Queudver, ouvre-moi !

Mais il n'y avait rien que le silence. Sirius jura et murmura le mot-de-passe d'urgence, pour constater que la cachette était vide. Peter n'était pas là. Il n'y avait aucun signe de lutte et, fouillant dans les papiers à la recherche du moindre indice, Sirius sentit son sang se glacer à la vue d'un petit bout de parchemin.

Le Maître passe à l'action ce soir. Tiens-toi prêt. B. B. L.

Sirius aurait pu se voiler la face. Il aurait pu chercher moult et moult explications, inventer des histoires pour expliquer l'utilisation du mot Maître, balayer avec un sourire fou l'idée même que Peter ait pu les trahir. Mais Sirius connaissait sa famille. Il avait appris à connaître leur écriture, avait appris à reconnaître leur signature.

B. B. L. Bellatrix Belvina Lestrange.

Le visage gris, les yeux écarquillés, la gorge nouée, Sirius se précipita dehors, le petit mot encore serré dans son poing. Courir, pour ne plus penser.

Il enfourcha sa moto, à nouveau, actionna le moteur, survola la West Country à toute vitesse, presque inconscient de ses gestes. Il n'espérait qu'une seule chose : ne pas être arrivé trop tard.

Ah, l'espoir ! Alphard aurait ri. Le sale espoir, disait-il souvent. Toujours terriblement tentateur, toujours terriblement déçu.

Sirius pouvait voir la maison. La porte était ouverte. Il n'aurait jamais dû être capable de voir cela. Peter ne lui avait pas révélé le Secret, c'était ce qu'ils avaient décidé pour éviter d'autres inconvénients. Mais Sirius pouvait voir la maison. Cela voulait juste dire que Lily et James avaient trouvé la mort. Cela voulait juste dire que...

Il y avait une sensation bizarre, au niveau de sa poitrine, pas très loin de son cœur. Comme si quelqu'un appuyait très fort avec une aiguille, comme si l'eau avait empli ses poumons, comme si l'air lui manquait. Il avait envie de vomir.

Hagrid était là. Il pleurait, tenant le petit Harry dans ses bras. Sirius atterrit en catastrophe, trébucha en descendant de sa moto et courut vers le demi-géant, les mots se bousculant à la porte de ses lèvres sans parvenir à formuler une phrase vraiment cohérente. Harry avait une cicatrice en forme d'éclair sur le front.

— Hagrid, que s'est-il passé ?

— Tu-sais-qui a... Oh, Merlin ! jura le garde-chasse en essuyant ses larmes avec sa main libre. James et Lily sont morts, et Harry a tué Tu-sais-qui. Il a été incroyable mais... t'sais, j'les aime beaucoup, James et Lily, ils sont...

Hagrid se tut, semblant réaliser que, non, ils n'étaient pas. Ils avaient été, mais n'étaient plus. Sirius réprima un haut-le-cœur. L'air hagard, il se tenait au bras du demi-géant comme à une gigantesque bouée, l'impression de se noyer dans son désespoir, l'impression que le monde autour tournoyait, qu'il se réveillerait bientôt, mais qu'il suffisait qu'il tombe pour que le cauchemar ne prenne jamais fin.

— J'sais qu'ça veut pas dire grand-chose, reprit le demi-géant dans une tentative de le consoler, mais ils sont p't-être mieux là où ils sont. Y'a pas de guerre, là-haut, pas vrai ?

— Je sais, Hagrid, souffla Sirius en désespoir de cause, sans trouver les mots justes, encore une fois. Et Harry... où tu l'emmènes ? Donne-le-moi, je suis son parrain ! C'est à moi de m'en occuper, c'est écrit sur le testament de...

Mais Hagrid secouait la tête.

— J'peux pas, Sirius. T'es un bon gars, mais j'peux pas. J'dois suivre les instructions de Dumbledore. Il sait toujours quoi faire, Dumbledore. Si c'est sur leur testament ça peut p't-être s'arranger.

Sirius déglutit, hocha la tête, souffla un coup. C'était ça où il tombait raide, de toute façon.

— Prends ma moto, alors, proposa-t-il à mi-voix, incapable de parler plus fort. Elle vole, tu seras plus vite arrivé comme ça.

Hagrid hocha la tête en guise de remerciements et partit, le petit garçon dans les bras. Sirius resta un instant à le voir disparaître et se confondre dans le ciel nocturne, puis se tourna vers la maison. Il se souvint de l'anniversaire de Lily, l'année précédente. Il s'avança d'un pas incertain vers le bâtiment, puis entra et s'accroupit auprès du corps froid de son meilleur ami, de son frère.

Il avait toujours entendu dire que les morts semblaient dormir. Il l'avait cru, lui aussi, en voyant les cadavres après les diverses attaques. Mais c'était faux. Lui qui avait si bien connu James, lui qui avait partagé avec lui ses peines et ses joies, ses rires et ses larmes... Sirius voyait bien, que ce n'était pas le même. Que jamais plus il ne rouvrirait les yeux. Que jamais plus il ne sourirait à une blague de Marlene, que jamais plus son visage ne s'illuminerait à la vue de sa Lily.

Il se pencha et baisa son front. Les yeux fermés, il prit quelques instants pour se recueillir, puis se releva en essuyant les quelques larmes qui avaient coulé. Il avait perdu tous ses frères. Regulus, d'abord. Et maintenant James. Il ne comptait pas Peter, qui ne méritait même plus le nom d'ami, pas plus qu'il ne comptait Remus, qui n'avait jamais vraiment été un frère, qui avait toujours été autre chose.

Sirius n'avait plus rien. Il était orphelin.

Et cette sensation qui le prenait depuis qu'il était arrivé... C'était comme si une partie de lui était partie, avec eux. Comme s'il était mort, avec eux. Il aurait préféré l'être, en vérité.

Alors qu'il s'apprêtait à monter pour se recueillir sur le corps de Lily, un homme se précipita à l'intérieur de la maison, l'air affolé. Sirius reconnut Rogue. Il ne fit même pas l'effort de sortir sa baguette.

— Ton Maître est mort, Rogue. Il n'y a plus rien à sauver. Va-t'en.

— Lily, se contenta de répondre le sorcier, qui semblait avoir pris dix ans en une nuit.

Il avait l'air perdu de ceux dont le monde vient de s'effondrer, et Sirius se souvint d'une époque où Lily avait été sa meilleure amie, où il l'avait aimée. Mal, certes, mais il l'avait aimée. Alors Sirius se contenta de secouer la tête et de montrer du menton l'escalier dans lequel se précipita le Maître des Potions. Il semblait bien fragile, à présent, les mains tremblantes et les larmes maculant ses joues.

Passant une main sur les siennes, Sirius se fit la réflexion qu'il ne devait pas être dans un meilleur état. Parcourant la pièce du regard, faisant ses adieux à cette maison qui avait été l'hôte de certains des moments les plus heureux de sa vie, il croisa le regard de Peter. Sur la photographie mouvante, les Maraudeurs riaient à gorge déployée sur la berge du Lac Noir.

Les Maraudeurs. Quelle connerie ! Merlin, et dire que Peter avait été leur ami. Dire que Peter avait été son frère ! Une haine telle qu'il n'en avait plus ressentie depuis cette fameuse nuit de juillet 1976 grandit en lui, faisant bouillir le sang dans ses veines et le faisant grincer des dents à s'en détruire la mâchoire.

Peter, ce sale traître. Il allait payer. Il allait payer, cet enfoiré.

Patmol renifla la pièce et la trouva toute pleine de l'odeur de magie noire significative du passage de Voldemort. Mais il y avait une autre piste, plus récente. Entre l'odeur de Snape et celle de Hagrid, il y avait ce relent de pourriture, cette odeur tenace qui rappelait très légèrement les égouts.

L'odeur du rat.


Patmol avait couru toute la nuit, suivant la piste du traître. Quand finalement il le vit, la baguette de Voldemort dans les mains et le visage déformé par la terreur, Sirius se transforma, tapi dans l'ombre, et s'avança vers le traître.

Peter le vit tout de suite et sa terreur sembla décupler. Il tenta bien de fuir, mais Sirius avait toujours couru plus vite que lui. Se sentant sans doute acculé, là, debout sur sa petite plaque d'égout, le rat tenta le tout pour le tout.

— Tu n'as pas honte d'avoir tué Lily et James ? hurla le traître à la ronde en sortant sa baguette de l'autre main, prenant Sirius de court. Ils te faisaient confiance !

Il y eut une explosion, puis plus rien. Douze cadavres d'innocents recouvraient le sol, ainsi qu'un doigt boudiné, celui de Peter. D'abord abasourdi, Sirius finit par comprendre la machination de l'immonde tas de crasse qui avait autrefois porté le nom de Maraudeur.

Alors, en ce premier novembre de l'année 1981, alors que les Aurors arrivaient et que Dawlish lui passait les menottes, alors que les Moldus étaient interrogés et que ceux qui avaient été ses collègues le méprisaient du regard, Sirius riait, de ce rire glaçant qui était la marque de fabrique de sa famille de cinglés, de ce rire inquiétant et fou, brisé, parce qu'il ne pouvait rien faire d'autre.

Parce que Peter se faisait passer pour mort, parce que les Maraudeurs n'avaient été qu'une vaste blague, parce qu'il était orphelin, parce qu'il n'en pouvait plus, parce qu'il n'avait pas le droit de pleurer. Pleurer, c'est faire son deuil. Pleurer, c'était accepter la mort de James et Lily, et Sirius ne voulait pas faire ça. Pas encore, pas tout de suite. Parce que c'est beau, le déni, parce que l'espoir, ce sale espoir, a la fâcheuse tendance de germer quand on est au plus bas. Peut-être que c'était un rêve, peut-être que Sirius allait se réveiller bientôt, un matin de juillet, avec une petite chouette hulotte qui cogne à sa fenêtre pour lui amener sa lettre pour Poudlard, pour la première fois.

Ah, le sale espoir ! Toujours bien accueilli, et pourtant toujours déçu. Il y avait les rêves et il avait la réalité : les cris, les crachats, les mères qui cachent les yeux de leurs enfants et les sorts que les Aurors ne tentaient même pas de dévier. Parce qu'il était un Mangemort, sans aucun doute, parce qu'il avait fait l'impensable et trahi celui qui l'avait accueilli. Parce que Voldemort était tombé, parce que le garçon avait survécu, parce que l'heure était à la fête et qu'il fallait bien que l'on venge les morts, même à tort.


— Parle, Black ! grogna Alastor Maugrey en lui tirant les cheveux. Est-ce que tu as tué Peter Pettigrew et trahi les Potter ?

Leurs visages se touchaient presque, et un souvenir remonta soudain. L'Auror légendaire qui lui dit de s'asseoir sur une chaise et lui annonce la mort de son petit frère. Sirius rit doucement devant l'ironie de la situation. Cela ne faisait pas sens, n'en ferait jamais. Il n'aurait jamais dû se retrouver de l'autre côté de la ligne. Il n'aurait jamais dû être celui qui ne portait pas l'uniforme, celui qui était sale, celui qu'on accusait et qu'on voulait faire parler.

À nouveau, il riait à gorge déployée, et riait, et riait ! Merlin qu'ils le faisaient rire, tous, avec leurs questions stupides ! Bien sûr qu'il avait tué Peter, enfin ! Bien sûr qu'il avait trahi James et Lily ! Ce n'était pas comme s'il leur devait la vie, après tout, ce n'était pas comme s'il leur devait tout ! Ce n'était pas comme s'il les aimait, hein ? Evidemment qu'il les avait toujours détestés, et avait bataillé avec le Choixpeau pour aller à Gryffondor et trahir le plus de futurs opposants à Voldemort possible ! Et les larmes qu'il avait versées à la mort de son petit frère ! Maugrey se souvenait-il ? Ces larmes n'avaient pas été pour Regulus, bien sûr, mais pour le Seigneur des Ténèbres, qui avait ce soir-là perdu un de ses serviteurs ! C'était l'évidence même, enfin, comment personne n'avait-il pu le remarquer avant ?

Maugrey l'arrête dans sa tirade en lui cognant la tête contre la table.

— Ce sont tes derniers mots, Black ? siffla-t-il, avant d'être interrompu par un autre Auror.

— Maugrey, on a besoin de toi, y'a un problème chez les Londubat !

L'Auror hocha sèchement la tête et cracha sur Sirius, puis partit en claquant la porte, laissant l'accusé seul dans le noir, la gorge nouée et son rire mourant dans sa gorge. C'était un pétage de plomb en règle, un appel à l'aide et personne ne l'avait entendu. Personne n'avait observé son visage de plus près, n'avait distingué les larmes de colère et de rage des supposées larmes de rire.

Merlin, bien sûr qu'il n'avait pas trahi James et Lily ! Ne pouvaient-ils pas se poser quelques secondes, regarder son bras vierge de toute Marque ? Ne pouvaient-ils pas réfléchir avec leurs neurones, plutôt que de laisser l'urgence et la déraison les diriger ?

Pourtant, il ne dit pas mot de tout ça, même quand Barty Croupton l'envoya à Azkaban d'un geste, sans procès. Il ne leur cracha pas sa vérité au visage, comme il avait pu leur servir ses questions rhétoriques désespérées. Parce que, en vérité, Sirius n'était pas innocent. Il n'avait pas trahi James et Lily, certes, mais il était bien responsable de leur mort.

Après tout, n'était-il pas celui qui avait demandé à ce qu'ils changent de Gardien du Secret ?


Des bruits de pas résonnèrent dans le couloir froid et humide. On entendait le clapotis des gouttes tombant dans les flaques, et le râle lointain des Détraqueurs. L'Auror s'arrêta à côté de la cellule de Patmol. Enfin, Sirius. Il avait du mal avec la réalité, ces derniers temps. Il semblait que le temps passait, puisqu'un Auror était venu, mais Sirius était persuadé que seulement trois jours s'étaient écoulés depuis la dernière visite. D'habitude, c'était une fois par mois.

— Black, Lestrange ! Pas de journal aujourd'hui pour vous deux. Walburga Black est morte, sourit sinistrement l'Auror.

Enfin, Sirius supposa qu'il souriait sinistrement. On ne voyait pas grand-chose, en vérité. L'Auror avait visiblement un compte à régler avec Bellatrix, parce qu'il lui cracha dessus. Sirius entendit distinctement le bruit mouillé de la collision et, s'il en avait eu la force, il aurait probablement grimacé de dégoût.

Le rire de sa cousine lui fit comprendre ce qu'avait dit l'Auror, qui venait de repartir en lui crachant dessus aussi, mais en manquant sa cible. Sirius ne faisait pas attention à grand-chose, mais il récupéra le vieux journal qu'on lui avait apporté le mois dernier. 1985. Il ne voulait que partir, très loin, s'attendait toujours à ce que Dumbledore débarque avec ses yeux pétillants, à ce qu'il lui annonce que c'était une bonne blague. À ce qu'il lui assure que, bien sûr, ils avaient toujours su qu'il n'aurait rien fait de tel à James. Mais quatre ans avaient passé depuis son emprisonnement, et personne ne venait : il n'y avait rien d'autre que le froid, l'odeur âcre de la mer et de l'urine, et le rire grinçant de sa stupide cousine.

Walburga était morte. Sa mère était morte. Il l'avait aimée, petit. Parfois, elle le laissait monter sur ses genoux et lui racontait une histoire. Sans qu'il ne s'en rende vraiment compte, les larmes avaient commencé à couler sur ses joues. Il songea qu'elle avait perdu ses deux fils. En avait-elle fait un troisième ?

Ah, mais Orion était mort aussi. Donc ce n'était pas possible. Et puis, elle était trop vieille. Il faisait froid. Les Détraqueurs revenaient. Le rire sinistre et angoissant de Bellatrix mourut dans sa gorge, remplacé par un hurlement abominable. Sirius rassembla les forces qui lui restaient et se transforma en chien. Patmol souffrait moins, lui.


Fudge était passé. Il l'avait regardé avec mépris, avait observé l'état de la prison, s'était assuré que personne ne pouvait s'évader et était reparti très satisfait de lui-même. Ah, et il lui avait aussi filé son journal, ce qui signifiait double lecture pour le mois – et ça, c'était plutôt sympathique. En tout cas, ça permettrait à Sirius de ne pas se noyer dans l'ennui.

Il passa les questions météorologiques avec un ricanement amer – après tout, le temps ne changeait jamais vraiment à Azkaban – et lit avec le sourire les articles de Rita Skeeter, son divertissement mensuel. Cette stupide blatte avait au moins l'avantage de bien écrire et d'être drôle, quand on n'était pas concerné.

Entre deux articles sur le génie de Fudge et la sénilité de Dumbledore, il y avait un petit encart. Oh, trois fois rien, juste une photo légendée de la famille Weasley au complet. Mais ce n'était pas le grand sourire de Molly, la bonhommie d'Arthur ou l'air pincé d'un leur fils qui attira son attention, pas plus que la présence de jumeaux qui n'étaient pas sans rappeler Fabian et Gideon, ou le grand gaillard semblant tout droit sorti d'un élevage de dragons.

Non, Sirius se moquait bien de tout ça. Sur l'épaule du plus jeune fils, il y avait un animal, ô combien familier. La fourrure grise, les yeux minuscules et rapprochés. Et puis surtout, il lui manquait un doigt.

Une bouffée de haine le prit, si soudainement qu'il hurla, hurla et déchiqueta le journal avec ses crocs, ses instincts animaux reprenant le dessus. Un des Aurors qui avait accompagné Fudge accourut, baguette à la main, pour le trouver la gueule écumante de rage, les yeux fous et les membres tremblants.

Le jeune homme soupira de soulagement, rangea son arme et secoua la tête avec dépit, donnant un coup de pied au prisonnier à travers les barreaux.

— Les autres croyaient que ça arriverait jamais, mais faut croire que treize ans dans ce trou suffisent pour faire perdre la boule à n'importe qui, même au pire des monstres. Profite, Black, la prochaine étape... couic ! sourit sinistrement l'Auror en passant un doigt sur sa propre gorge.

Mais Sirius ne faisait pas attention à lui. Le regard fixé sur le petit morceau de journal d'où l'animal l'observait d'un œil morne, il ruminait sa vengeance.

Peter Pettigrew était vivant.


Poudlard. Godric's Hollow. Les Maraudeurs. Lily et James. Le Quidditch. Les séances de révision à la bibliothèque. Le sourire doux d'Euphémia sur le Chemin de Traverse. Harry, ses gazouillis. Et Peter, toujours, dans l'ombre ou au premier plan. Il était là, partout Sirius allait, là où il posait son regard, là où James avait été. Même là où Regulus avait été.

Peter souillait tous ses souvenirs, tous ses rêves. Il avait entendu les autres prisonniers, ceux qui étaient encore relativement conscients de leur environnement. Il les avait entendus parler de lui, des mots inquiétants qu'il prononçait dans son sommeil. Même Bellatrix s'était foutue de sa gueule, la veille, entre deux crises de démence.

Ses yeux s'ouvrirent, grandes perles grises dans l'obscurité. Faisait appel à toutes les forces qui lui restaient, il se transforma. Patmol était d'une maigreur extrême, désormais. Il avait des puces, aussi.

Quand les Détraqueurs ouvrirent la porte de sa cellule pour lui donner à manger, il se faufila à travers l'interstice. Dans l'obscurité, les autres ne pouvaient pas le voir. Les Détraqueurs étaient aveugles. Il ne risquait rien.

Courant le plus rapidement et le plus silencieusement possible à travers la prison, à la recherche d'une ouverture suffisamment grande pour qu'il puisse atteindre l'extérieur, Patmol se dit que c'était étrangement facile et se demanda pourquoi il ne l'avait pas fait plus tôt. Il aurait dû savoir, pourtant, que ce serait simple. Ce n'était pas la première fois qu'il s'évadait de prison, pas vrai ?

Le grand chien pouilleux passa tant bien que mal entre les barreaux et s'ébroua. Comme un écho de sa première fuite dix-sept ans plus tôt, Sirius Black marqua ce soir-là l'histoire, devenant le premier sorcier à s'échapper d'Azkaban.


Patmol était fatigué. Il avait trouvé refuge une nuit dans un centre d'aide aux sans-abris, de quoi dormir et manger pour reprendre suffisamment de forces et Transplaner. La magie sans baguette demandait beaucoup de forces, et il regrettait fortement de ne pas pouvoir récupérer la baguette de secours qu'il avait planquée dans leur appartement. Enfin, ce n'était plus le leur, à présent, mais celui de Remus. Enfin, si Remus avait renouvelé le bail, ce qui était peu probable. Patmol s'ébroua. Ce n'était pas vraiment le moment de penser à tout ça.

Il devrait aller à Poudlard, bien sûr, puisque les Weasley et le traître étaient encore en Egypte, mais il y avait plus important encore que Peter. Il voulait savoir qui lui avait volé Harry, à qui Dumbledore avait jugé bon de donner Harry. Skeeter avait parlé de Moldus en pamoison devant le Survivant, mais il n'y avait qu'une Moldue qui pouvait prétendre à la garde de Harry.

Et Patmol savait que Pétunia et son stupide mari ne se seraient jamais prosternés devant la magie de Harry, qu'ils auraient bien plutôt tenté de l'étouffer, inconscients du danger que peut représenter un Obscurial.

Il trottait dans les rues de Little Whinghing, tâchant de s'approcher comme il pouvait de Privet Drive sans se faire repérer par les Moldus. Il était un peu trop grand pour être un chien ordinaire, après tout, et Patmol ne voulait vraiment pas attirer l'attention. Soudain, il s'arrêta. À quelques mètres de lui, il y avait un petit garçon, ou plutôt un adolescent. Ses cheveux bruns ressemblaient un peu à un nid d'oiseau, et il portait des vêtements trois fois trop grands pour lui. Il avait l'air désespéré, presque paniqué, comme si on venait de lui annoncer la pire des nouvelles.

Comme un rêve, le souvenir d'un autre petit garçon lui revint, le frappant avec la force d'un ouragan. On aurait dit James. Le petit garçon se retourna, croisant son regard, et commença de reculer, terrorisé, agitant sa baguette dans le processus.

Patmol devait partir, et vite, malgré tous les mots qu'il voulait lui dire, malgré toutes les étreintes qu'il voulait lui offrir. Le Magicobus arrivait déjà. Alors il fuit et se fondit dans la nuit, s'éloignant à toute vitesse des lieux.

Merlin, il avait revu Harry. Et, l'espace d'un instant, il avait été sous l'impression que James avait survécu.


Sirius faisait avancer distraitement son ennemi d'enfance endormi, ne prêtant pas grande attention à tous les chocs que subissait son crâne. Le tunnel était étroit, et Remus, Pettigrew et Ronald Weasley devaient avancer en crabe. Ils étaient assez ridicules, mais l'image ne suffit pas à le faire sourire. Son attention était toute accaparée par le problème qui se posait à lui : Harry voudrait-il quitter les Moldus ? Sirius avait bien conscience que la sœur de Lily n'était pas une tendre âme et son mari était pire encore, mais Harry croyait, moins d'une heure auparavant, que Sirius Black était l'assassin qui avait trahi ses parents.

Et pourtant, il y avait cet espoir ténu qui, encore une fois, avait germé en son cœur quand Harry avait dit vouloir épargner son âme. Enfin, il n'avait pas utilisé ces termes, mais cela revenait au même. Si Harry se souciait de son âme, cela voulait-il dire qu'il se souciait également de Sirius, lui, le présumé meurtrier ?

— Tu sais ce que ça signifie, de livrer Pettigrew ? demanda-t-il, un peu brusquement, incertain quant à la manière de tourner sa proposition. *

Incertain quant à la manière de minimiser sa déception.

— Vous êtes libre, répondit simplement Harry, constatant l'évidence avec cette naïveté toute simple commune à nombre d'enfants. *

— Oui... mais je suis aussi... Enfin, je ne sais pas si quelqu'un te l'a dit, mais... *

Ses mots étaient trop hésitants ; ils se dérobaient sous sa langue au fur et à mesure qu'il les cherchait, désespéré de trouver en Harry un filleul qui l'aimerait comme lui l'aimait déjà depuis près de quatorze ans.

— Je suis ton parrain, finit-il par avouer brusquement, abandonnant toutes les tournures délicates mais creuses qu'il avait tenté de construire. *

— Je le savais, dit Harry, toujours aussi simplement, sans développer plus avant. *

Il laissait Sirius se dépatouiller avec ses mots, mots qui ne parvenaient pas à se frayer un chemin vers ses lèvres, lèvres qui, soudain, se trouvaient engourdies, gênant Sirius dans sa quête d'une phrase simple et pleine de sens. Il jeta l'éponge et fit avec les moyens du bord. Tant pis pour les belles phrases dignes de Keats, il ferait avec la laconisme pâlot et tremblant de Rodolphus, désigné pire orateur des Serpentard durant sa scolarité. Il fallait dire que le pauvre était bègue.

— Tes parents m'ont désigné pour m'occuper de toi si jamais il leur arrivait quelque chose. *

La phrase était rugueuse, les mots rêches, abrupts. Harry ne répondit pas. Sa nervosité monta d'un cran, ou plusieurs, et Sirius se força à parler lentement pour ne pas imploser. Ses oreilles bourdonnaient et ses joues chauffaient. Merlin, ça ne lui était jamais arrivé ! La nervosité et l'appréhension n'avaient jamais été les compagnes de Sirius, qui leur préférait largement la fougue et l'arrogance.

— Bien entendu, je comprendrais très bien que tu préfères rester avec ton oncle et ta tante, s'emmêla-t-il les pinceaux dans une vaine tentative de donner du sens à son charabia. Mais... penses-y... Lorsque j'aurai été réhabilité... Si jamais... tu veux changer de maison... *

— Vous voulez dire..., le coupa Harry d'une voix hésitante. Habiter chez vous ? Et quitter les Dursley ? *

Sirius se sentait bête. Bien sûr que le gamin préférait rester avec la sœur de sa mère, plutôt qu'avec le meilleur ami à moitié – sinon complètement – cinglé de son père. Il avait simplement espéré... Encore, encore et toujours, il se bornait à espérer. Il n'apprenait jamais de ses erreurs. Sirius espérait, puis son cœur se brisait inéluctablement en un millier d'éclats. Regulus, Remus, James, Lily, Dumbledore, Harry ! Ils n'avaient rien d'autre à lui offrir que des sourires désolés ou, pire, des dates sur une tombe.

— Je pensais bien que tu n'accepterais pas. Je comprends très bien. Je voulais simplement...

— Vous plaisantez ? le coupa à nouveau son filleul, les mots se bousculant à la porte de ses lèvres. Bien sûr que je veux quitter les Dursley ! Vous avez une maison ? Quand est-ce que je peux m'y installer ? *

Sa tête tourna si vivement qu'il en eut le tournis. Il planta son regard dans l'océan d'émeraude que l'adolescent lui offrait, miroir coloré de la mer d'espoir de ses propres prunelles d'argent. Merlin, avait-il bien entendu ?

— Tu veux vraiment ? balbutia Sirius, n'osant guère y croire. *

L'exclamation de l'adolescent qui s'ensuivit valait tout l'or du monde, comme si Harry était indigné que Sirius ait pu ne fût-ce que penser un seul instant qu'il préférerait rester chez ses Moldus. Ses lèvres s'étirèrent alors en un large sourire.

Oh, il était peut-être un peu faiblard, mais il était de ceux qui illuminaient son regard et son visage tout entier dans sa jeunesse, de ceux qui avaient accueilli chaque entrée de James, chaque regard de Remus, chaque blague de Marlene. L'espace d'un instant, Sirius se sentit comme un jeune homme de vingt-et-un ans, prêt à en découdre avec les forces maléfiques qui menaçaient sa famille, ses amis et tous les innocents d'Angleterre. L'espace d'un instant, Sirius eut l'impression que tout lui était possible, que la vie lui souriait, que son monde reprendrait ses couleurs d'autrefois.

Mais Alphard avait toujours dit de se méfier du sale espoir, poisseux et pugnace, qui parvenait toujours à se faire un nid dans les plus noirs et les plus cyniques des cœurs. Sirius n'aurait jamais dû perdre de vue la maxime favorite de son oncle et père de substitution. L'espoir, toujours terriblement tentateur ; l'espoir, toujours terriblement déçu.

Qu'importait l'accord de Harry, quand le rat avait réussi à fuir, encore une fois ? Quand la liberté tant attendue se trouvait repoussée, à nouveau ?


Merlin, Sirius voulait déjà quitter l'Angleterre alors qu'il n'était revenu que depuis quelques minutes. Buck lui suivait docilement ; Sirius s'était entiché de l'animal durant cette année sabbatique à Buenos Aires. Enfin, c'était techniquement une année de cavale, mais vu les cocktails qu'il s'était enfilés et le joli bronzage qui dorait à présent sa peau, Sirius préférait parler d'année sabbatique.

L'avantage, avec l'Amérique latine, c'était que les sorciers comme les Moldus ne s'intéressaient pas beaucoup au casier judiciaire de ceux qui avaient les moyens. Et puis, le ciel était beau. Pas comme celui de Londres.

Putain de guerre. Voldemort était revenu. Hourra ! Sirius grogna tandis qu'il galérait avec le trousseau de clés. Bon sang, qu'est-ce que c'était stupide ! Cette baraque n'apportait que le malheur. Dumbledore n'avait-il pas une autre vieille maison sous la main ?

Certes, personne ne pouvait toucher au manoir des Potter avant les dix-sept ans de l'héritier, mais d'autres familles alliées devaient bien avoir quelque chose, non ? Un cottage, un chalet, ou même une cabane... Tout aurait été préférable à ce trou à rat qui puait la magie noire, la pourriture et les Doxys.

Le seul avantage était que Sirius pourrait voir Harry plus souvent. L'ombre d'un sourire étira ses lèvres à cette pensée, alors qu'il parvenait enfin à ouvrir la porte récalcitrante. Il leva la tête pour observer le vestibule et remarqua immédiatement quelque chose qui n'était pas là, la dernière fois qu'il avait mis le pied dans cette maudite maison.

Là, trônait le portrait de feu Walburga Black.

Sirius se souvenait de la douleur qu'il avait ressenti, à sa mort, bien malgré lui. Il se souvenait de sa souffrance, presque physique, quand Alphard lui avait avoué qu'il était renié. Il devinait clairement la tache sombre qui avait remplacé son portrait, comme celle qui avait remplacé celui d'Andromeda ; il imaginait parfaitement la délectation de sa catin de mère, qui avait sans doute brûlé jusqu'à son nom, qui avait effacé son existence, éradiqué l'impureté, tué symboliquement son fils à défaut d'avoir pu le faire vraiment. Sirius se souvenait avec une précision effrayante de ce début d'incantation mortelle qu'elle avait prononcé ; il se souvenait de l'Avada.

À la vue de cette génitrice muette et visiblement stupéfaite, il ne put retenir une grimace. Alors, elle se mit à hurler et, plus que jamais, Sirius voulut repartir, claquer la porte, prendre le premier Portoloin pour la Russie, le Japon ou le Mexique, pourvu qu'il soit loin d'ici.

Parce qu'il y avait bien une chose qui n'avait jamais changé, chez lui, depuis sa première lettre à Poudlard. Tant qu'il parvenait à mettre suffisamment de distance entre lui et cette famille de dingues, il se fichait bien du reste.


Sirius entra dans le salon juste à temps pour entendre les mots du tas de chair putride qui lui servait d'Elfe de Maison.

— Kreattur fait le ménage, marmonnait-il. *

Sirius en fut prodigieusement agacé. Le ménage ! Quelle bonne blague. Comme si quelqu'un ici se donnait la peine de faire le ménage ! La crasse s'accumulait et la vermine proliférait dans une liberté totale, pas le moins du monde inquiétée par quelque sort de nettoyage. Sirius n'aurait pas été étonné si un Magizoologiste lui avait dit que la maison avait un écosystème qui lui était propre et que de nouvelles espèces y avaient vu le jour. De quoi rendre un savant euphorique, et Sirius imbuvable. Il ne s'était pas évadé d'Azkaban pour tomber dans un bouge encore plus minable, par Morgane !

— Et tu penses qu'on va te croire ? contra-t-il, la voix grondante. *

Le stupide Elfe eut l'insolence de s'incliner plus bas que terre ; la moquerie eut raison du peu de patience qu'il pouvait rester à Sirius et il lui donna l'ordre de se redresser, avant de lui demander ce qu'il manigançait. S'ensuivit une querelle qui en serait presque devenue habituelle si Sirius ne faisait pas son possible pour éviter de se coltiner la sale gueule du monstre. Merlin ! Mais comment Regulus avait-il pu supporter cet infâme Veracrasse ?

— Le maître est un sale pourceau ingrat qui a brisé le cœur de sa mère... siffla l'Elfe à voix-basse, arrachant presque un ricanement désabusé à Sirius. *

Hah ! Comme si ce n'était pas sa mère qui lui avait brisé le cœur en essayant de le tuer ! La vieille folle l'avait enfermé au cachot parce qu'il avait été réparti à Gryffondor ; elle n'avait eu de mère que le nom. Walburga Black n'avait pas de cœur ; la voilà, la vérité.

L'Elfe fit tourner encore et encore le même disque rayé jusqu'à ce que Sirius lui arrache enfin une semi-vérité. Ah, la tapisserie. Evidemment que ce stupide Elfe voulait la protéger. Sirius se força à poser son regard sur le mur qui leur faisait face, masquant sa détresse avec un rictus dégoûté. Il n'était pas vraiment prêt à affronter la tache qui avait remplacé son visage adolescent.

Sirius chassa l'Elfe qui partit à regret en marmottant des insanités – toujours les mêmes. Voilà qu'il le comparait à un assassin ! Merlin, il y avait de quoi se rendre complètement fou ! Claquant la porte derrière la créature, l'ancien prisonnier – qui l'était à nouveau, en quelque sorte – retint un profond soupir. Il n'était pas là depuis deux mois et il sentait déjà que ses nerfs étaient sur le point de lâcher. Dumbledore cherchait-il tant que ça à mettre fin à ses misérables souffrances ?

Hermione lança une idiotie à propos de libérer le pauvre Kreattur qui n'avait pas plus toute sa tête ; Sirius répondit de mauvaise grâce avec le seul argument qu'elle pourrait comprendre, à savoir les secrets de l'Ordre. Cette gamine en avait, du cran, pour ne serait-ce que proposer de libérer un Elfe dévoué à une famille Sang-Pur. Même Regulus n'avait jamais été aussi loin dans sa défense des Elfes.

À regret, Sirius s'approcha de la tapisserie. Il était temps qu'il affronte ses démons. Pas vrai ? Il fut rejoint par Harry et ses amis. Son filleul ne tarda pas à remarquer son absence de l'arbre, mais ce n'était pas tout à fait vrai. Contrairement à ce qu'il avait imaginé, son visage avait juste suffisamment brûlé pour qu'on ne puisse plus le reconnaître. On voyait encore son nom et la pointe de ses cheveux. Une émotion étrange lui noua la gorge, mais il se força à passer outre.

— J'y étais, répondit-il à Harry en montrant du doigt la petite tache. Mais ma chère vieille mère m'a effacé d'un coup de baguette lorsque je suis parti de la maison. Kreattur aime beaucoup raconter l'histoire quand il parle tout seul. *

— Tu t'es enfui de la maison ? *

— Quand j'ai eu seize ans. J'en avais assez. *

— Où es-tu allé ? *

Harry le regardait de ses grands yeux verts si semblables à ceux de sa mère et Sirius repensa à toute l'histoire. À Euphémia et ses étreintes, ses sourires. À Fleamont et ses anecdotes pas toujours très fines, pas toujours très drôles, mais qui faisaient indéniablement son charme. À James, bien sûr, et aux longues soirées où ils faisaient semblant de rien, semblant de ne pas pleurer, semblant de ne pas souffrir. Aux repas du dimanche, après Poudlard. À Alphard, cet oncle qui avait été un meilleur père qu'Orion n'aurait jamais pu l'être.

Comment retranscrire ces souvenirs intangibles, ces bribes de vérité qui lui revenaient, parfois, dans ses heures les plus sombres ? Comment dire l'amour, l'espoir, la joie et la gratitude – ces émotions si fortes qu'il avait ressenties de si nombreuses fois ?

L'ancien prisonnier tâcha tant bien que mal de mettre des mots sur ces souvenirs qui constellaient le ciel de sa mémoire, mais il ne les avait jamais maniés avec l'adresse de Regulus. C'était bien le seul domaine où son petit frère l'avait dépassé.

— Et... Pourquoi es-tu... *

— Parti ? compléta Sirius avec une grimace qui se voulait sourire. *

Personne ne lui avait jamais posé la question. Il n'y avait jamais eu besoin de mots pour que ceux qui comptaient comprennent, et il se fichait bien de ce qu'avaient pu penser les autres. Il n'avait jamais eu l'occasion de véritablement répondre à ce Pourquoi ? que tous avaient tu tant la réponse était évidente. Et pourtant les mots, aigres dans sa bouche, coulèrent comme un ruisseau.

C'était tellement simple, de déverser sa haine et sa rancœur passées, quand il était dans cette maudite maison, dans cette maudite prison. La pureté du sang, toutes ces foutaises, et la bêtise ! La bêtise incommensurable de son petit frère qui, par amour, avait cru ses parents, et l'avait par la suite amèrement regretté.

Sirius effleura la tapisserie du bout du doigt, caressa le visage de son petit frère. Le portrait de l'imbécile pinçait les lèvres. Ou bien était-ce un rictus méprisant ? On ne savait jamais vraiment, avec cette foutue tapisserie qui tomberait bientôt en miettes. En dessous du portrait étaient inscrites les dates de naissance et de mort du petit roi, cette série de chiffres que Sirius aurait voulu ne jamais voir. 1961-1979. Il n'avait même pas vu la fin de la Première Guerre.

— Il était plus jeune que moi, continua Sirius d'une voix un peu faible, et un bien meilleur fils, comme on ne manquait jamais de me le faire observer. *

— Mais il est mort, fit remarquer Harry avec son tact légendaire. *

Sirius marqua une pause. Putain de merde. Allait-il vraiment parler de ça ? Sa gorge se noua et il eut quelques difficultés à articuler sa réponse, celle qu'il aurait préféré ne jamais avoir à donner. Après tout, c'était Sirius, le plus âgé. Il s'était toujours dit qu'il mourrait en premier.

— Ouais... L'imbécile... Il s'est enrôlé dans les Mangemorts. *

— Tu plaisantes ? s'indigna Harry avec la voix inégale des adolescents en pleine mue. *

Pour la première fois, Sirius se sentit prodigieusement agacé par une remarque de son filleul. Comme s'il allait plaisanter sur un sujet pareil. Comme s'il allait plaisanter sur ce qui avait coûté la vie à son petit frère ! Harry ne savait pas, bien sûr, mais Sirius ne pouvait pas s'empêcher de grincer des dents. Cette foutue maison, et ses foutus parents ! Avec leur pureté du sang et leur racisme, et leur dédain pour les enfants qu'ils avaient été, qui avait poussé Sirius à fuguer, et Regulus à rejoindre Bella, à rejoindre les monstres.

Harry demanda si Regulus avait perdu la vie face à un Auror. Sirius eut envie de rire, mais ça aurait été malvenu. La mort de Regulus lui faisait trop mal, et les treize ans à Azkaban n'avaient rien fait pour arranger les choses.

À présent, il souffrait, mais était complètement incapable de mettre les mots justes sur sa douleur, incapable de dire qu'il avait aimé son idiot de petit frère, qu'il avait aimé le petit roi, et l'avait malgré tout abandonné par égoïsme, l'avait assassiné, lui aussi, en quelque sorte. Il raconta à demi-mots la même histoire que lui avait racontée Maugrey, des années auparavant – tellement d'années que ça avait plus la gueule d'un immonde cauchemar que d'un véritable souvenir, à présent.

Et pourtant, Regulus était bien mort. La Marque, c'est à vie qu'ils la prennent, avait dit Maugrey. Même si Reggie était mort libre d'esprit, il n'avait pas été libre de corps et en avait payé les conséquences.

Ils furent interrompus par la voix de Molly qui appelait à table. Sirius l'entendit à peine, tandis que les autres accouraient à l'appel de la faim. Cela faisait si longtemps qu'il n'avait pas regardé la tapisserie. L'avait-il vraiment regardée, un jour ? Il l'avait vue, bien sûr, chaque fois qu'il passait par le salon. Mais l'avait-il regardée, étudiée, observée avec attention comme il le faisait maintenant ? Il y eut un mouvement à côté de lui, et il se rendit compte que Harry était resté.

La nostalgie. L'émotion inconnue le prit tout entier, le pressant subitement à dévoiler ses secrets, son histoire à Harry, ce petit garçon qu'il avait aimé dès ses premiers cris, ce filleul qui était, à la vérité, la seule famille qui lui restait.

Alors, pendant que les autres mangeaient les sandwiches bien garnis et gâteaux succulents de la mère nourricière, il délivra quelques anecdotes, quelques souvenirs qui lui revenaient, bribes de soirées à apprendre par cœur la généalogie de la Noble et Pure Maison des Black ; Harry l'écoutait d'une oreille attentive, buvant ses paroles comme si elles étaient sacrées, calme et silencieux comme si le moindre froissement de chemise pouvait briser l'instant.


Sirius était seul. Harry était à Poudlard, bien sûr, et il semblait que les vacances de Noël ne viendraient jamais. Même Buck ne parvenait pas à le dérider, et Kreattur était trop insupportable pour que Sirius recherche sa compagnie.

Les membres de l'Ordre allaient et venaient, ne lui adressant guère plus que quelques mots. Parfois, c'était Rogue, et Sirius se retenait de lui faire ravaler son petit rictus insupportable qui lui hurlait : Je suis libre, mais pas toi.

Cafard ! Chauve-souris graisseuse ! Hypocrite ! Sirius avait envie de hurler chaque fois qu'il voyait ses robes noires tournoyer dans une danse morbide et sèche, quand le Maître des Potions quittait la pièce. C'était lui, le Mangemort ! C'était lui, celui qui avait donné la prophétie à Voldemort ! C'était lui, qui avait causé la mort de James et Lily !

Et le bâtard était libre, tandis que Sirius, l'innocent, errait comme une âme en peine à travers les couloirs de son enfance, prisonniers de souvenirs qu'il avait voulu enfouir au plus profond de son âme, nostalgique malgré lui d'une enfance qu'il avait crue heureuse mais s'était avec le temps teintée d'amertume et de sang.

Dans le salon, on pouvait encore voir les marques des pieds du piano à queue sur le parquet, pâle preuve que Sirius n'avait pas imaginé les longs soirs heureux de son enfance, quand les adultes buvaient des liqueurs dans le petit salon et que les enfants étaient libres. Walburga en avait fait cadeau à Bellatrix pour son dix-septième anniversaire et Sirius ne l'avait plus jamais revu. Il doutait même que Bella en ait joué, ne fût-ce qu'une fois, après avoir quitté Poudlard.

Incapable de se retenir, il se mit à fredonner un air de Vivaldi, tapant des doigts sur clavier imaginaire – et peu importait si Vivaldi n'avait jamais connu le piano, et peu importait si ce n'était pas vraiment un air de Vivaldi, et peu importait s'il ne connaissait de toute façon pas quelles notes étaient associées à quelles touches, et ne savait pas si l'aigu se trouvait à gauche du grave ou si c'était l'inverse !

Il était seul, et malheureux ! Prisonnier de cette maison qu'il avait toujours haïe, prisonnier de ces murs qui le rendaient claustrophobe ! Il ne pouvait pas même pas contacter Harry à cause de cette truie d'Ombrage, et Dumbledore n'était jamais là et ne voulait surtout pas lui donner de mission parce que, oh ! Enfin, tu penses bien qu'on ne peut pas te laisser sortir, Sirius ! Tu es un fugitif après tout !

Sa danse et ses fredonnements frénétiques le menèrent à sa chambre, des murs de laquelle lui-même aurait voulu arracher ces foutus posters qui lui donnaient l'impression d'encore être au placard ! Foutues Moldues avec leurs seins, leurs culs, leurs bikinis ridicules ! Il s'en moquait, de tout ça !

Renversant le bureau dans un acte puéril qui témoignait de son incapacité manifeste à gérer ses émotions, Sirius reprit tant bien que mal sa respiration, s'arrêta de chantonner l'air qui aurait fait pâlir d'horreur tous les théoriciens de la musique, tant il avait été dissonant, discordant, disharmonique.

Il ne se sentait pas vraiment mieux, après cet éclat de colère et de folie. Au moins, il aurait une occupation pour les heures à venir : ce bureau était vraiment un foutoir sans nom. Il n'arrivait pas à croire que Walburga n'avait pas tout fait brûler.

Alors qu'il triait les morceaux de parchemin jauni et les dissertations écrites vingt ans plus tôt, Sirius sentit son cœur s'apaiser, le démon s'éloigner. Il reviendrait – il revenait toujours – mais l'évadé savait qu'il pouvait compter sur quelques jours, au pire quelques heures de repos.

Quelque chose attira son attention. Ce n'était pas le même parchemin qu'il avait toujours utilisé, il était plus fin. Et puis, l'encre était verte. Jamais Sirius n'aurait pu utiliser une encre verte pour écrire une lettre, quelle qu'elle fût. Quant à l'écriture, presque calligraphique... Son cœur se serra dans sa poitrine. Que faisait donc une lettre de son petit Reggie dans ses papiers ?

Le sorcier déroula le parchemin et comprit, soudain, ce que faisait la lettre à cet endroit. Regulus avait toujours su que quitter les Mangemorts lui vaudrait la mort. Il l'avait sentie venir.

Le petit roi avait écrit une lettre à celui qui n'était plus son frère.

Fébrile, Sirius ferma les yeux. Il savait qu'il ne sortirait pas de la lecture indemne. Il savait que les larmes qu'il avait retenues depuis la mort de Walburga couleraient. Et pourtant... Il fallait qu'il lise ce que son petit frère lui avait écrit.

Mon très cher frère,

Ce n'est jamais facile d'avouer ses torts. Ce n'est jamais facile de reconnaître que l'on est planté – et en beauté. Il m'en a fallu, du temps et des horreurs, pour me rendre compte de ma bêtise et de ma folie, pour comprendre que c'est toi qui avais raison, depuis le début. Je sais que tu me hais, je sais que tu te moques bien de ce que je peux penser, mais je ne peux pas m'empêcher d'espérer que peut-être, tout au fond, tu es encore attaché à ton petit frère.

Il ne me reste plus beaucoup de temps. Je ne peux plus cautionner la folie du Seigneur des Ténèbres. Je ne peux pas croire que je l'ai suivi aussi longtemps, que je l'ai admiré, ce monstre qui n'a rien d'un homme. Tu ne me croiras peut-être pas, mais tu es ce qui m'a permis de tenir, ma lueur d'espoir dans les ténèbres. Quand j'ai pris la Marque, c'est ta voix que j'ai entendue. Quand j'ai pris conscience de ma bêtise, c'est encore ta voix qui m'a nargué, comme un « Je te l'avais bien dit ! » métaphysique.

Tu es mon frère, et tu es tellement plus. Le roc qui me soutenait dans l'adversité, le phare qui me guidait les ténèbres, le sommet que j'ai voulu atteindre, en vain. Il y a ces mots que j'ai toujours voulu te dire de vive voix, mais que j'ai tu. Parce que ce n'était pas de notre rang, pas vrai ? Parce que nous avions nos rôles, que nous devions nous y tenir.

Tu étais le rebelle de Gryffondor, j'étais le fils à maman de Serpentard. Nous n'avions pas le droit de nous aimer, de maintenir les liens du sang. Je ne l'avais pas compris, au début, quand je t'ai souri depuis l'autre bout de la Grande Salle. J'ai eu tôt fait de m'en rendre compte, quand tu m'as regardé avec dégoût. Notre histoire est digne d'une tragédie, Sirius. La mienne, du moins. Parce que tu as joué ton rôle à la perfection ; tu m'as rejeté encore et encore, tu t'es moqué de moi, tu as écrasé sous ta semelle mes derniers espoirs de pouvoir t'aimer comme un frère.

Mais le rideau est tombé et tu es loin. Je jette mon masque, je renie ma Marque, je crache à la figure de mon supposé Maître ! Plus rien ne compte que mes dernières expirations, mes dernières paroles, mon dernier acte ! Mon histoire est une tragédie ; et, c'est reposant, la tragédie. Parce qu'il n'y a plus d'espoir ; le sale espoir, comme aurait dit Alphard. Ou plutôt, comme l'a dit Jean Anouilh. Il faut croire que nous n'étions pas les seuls à dévorer les quelques perles de littérature moldue qui se sont égarées dans notre bibliothèque au fil des années.

Tu as appris tes répliques par cœur, tu les as intégrées tellement profondément que tu t'es confondu avec ton personnage, que tu as renié l'affection que tu m'avais portée lorsque nous étions enfants. Moi, j'en ai fini avec ces conneries ! Je quitte la scène la tête haute, le menton relevé, la conscience presque tranquille.

Mais, encore une fois, il y a ces petits mots que je n'ai jamais su te dire, et qui encore aujourd'hui refusent de franchir la barrière de mon inconscient, et qui me causent ces larmes dont tu vois la trace baveuse sur ce rouleau de parchemin. Je t'aime, Sirius, mon frère. Je n'ai jamais cessé de t'aimer, malgré tous les mensonges que je me suis forcé à croire. Tu es celui qui m'a fait miroiter les ailes de ta liberté, celui que j'ai aimé, toujours, avec la force d'un ouragan.

Il faut croire que mes mots se mêlent et que l'appréhension de ma mort endort mon sens de la formule ; mais je dois te quitter. J'aimerais rester assis devant ce bureau jusqu'à ce que tu reviennes, mais si je ne meurs pas... tu ne reviendras pas, n'est-ce pas ?

Avec tout l'amour que mes mots ne peuvent décrire,

R. A. B.

Les larmes de son frère, tombées seize ans plus tôt, trouvèrent un écho en celles que Sirius déversait sans pouvoir s'arrêter. Son petit frère l'avait aimé, du début à la toute fin. Rabastan Lestrange avait menti. Il avait menti. Soulagement, regrets et remords se mêlaient, nouant sa gorge et crevant son cœur, tandis que la bile acide remontait le long de son œsophage.

Quand Rogue passa dans le couloir et le vit, prostré au sol dans une pâle imitation de la Muse tragique de Rodin, il se tut. Sirius attendit un commentaire cinglant qui ne vint pas, et le Maître des Potions se contenta de fermer la porte sans un mot. S'était-il souvenu que, le 31 octobre 1981, Sirius avait laissé le Mangemort se recueillir sur le corps de l'héroïne martyr ?

Merlin, et voilà que Regulus l'avait contaminé, avec sa manie du vocable théâtral ! Regulus, ce grand acteur qui avait mimé à haine et l'arrogance à la perfection !

Sirius avait joué un rôle, lui aussi, et avait haï le masque qu'il s'était forcé à porter ; seulement, lui n'avait pas eu le courage de le retirer avant le baisser de rideau. Il aurait voulu qu'on le remonte comme on remonterait le temps, ce foutu mur de velours rouge, pour prendre son petit frère dans ses bras et le serrer fort, jusqu'à péter leurs côtes, et murmurer ces mots qu'ils n'avaient jamais pu se dire de vive voix jusqu'à assécher sa bouche et engourdir ses lèvres, jusqu'à ce que la source infinie de son amour se tarisse et que le flot de ses mots s'amenuise.

Mais ça ne marchait pas comme ça, pas vrai ? Les masques s'étaient brisés au sol, le rideau était tombé. Regulus était mort, et Sirius n'avait jamais pu lui dire à quel point il l'avait aimé.


Le sort de Bellatrix le heurta sans qu'il n'ait rien pu faire. Une douleur atroce prit possession de son corps, puis ce fut comme s'il flottait. Il ouvrit les yeux, se sentant partir en arrière. Il entendait les voix de James et Regulus, de Lily et Marlene, d'Alphard et Euphémia.

L'instant s'étirait à l'infini et Sirius comprit qu'il était en train de mourir. Que, lui aussi, laisserait Harry orphelin, comme les Potter, Alphard et Regulus l'avaient privé de famille en quittant le monde des vivants.

Bellatrix le regardait d'un air triomphant, cette chienne. Une dernière fois, Sirius croisa le regard de Remus et celui de James, l'un retenant tant bien que mal l'autre de lui porter secours.

James avait les yeux verts. Harry.

Il y eut l'amour et la douleur infernale de les laisser derrière lui, puis la lumière : blanche, aveuglante, purifiante. Et James, à nouveau. Le vrai, cette fois.


Sirius était dans une forêt. Non, il était dans la Forêt Interdite, qu'il avait suffisamment parcourue dans sa jeunesse pour être capable de la reconnaître. James, Lily et Remus étaient là, eux aussi. Et Harry. James et Lily murmurèrent quelques mots que Sirius ne saisit pas, trop occupé à observer la détresse de son filleul. Il se rappelait d'une nuit à Little Whinghing où Harry avait eu le même regard, comme si son monde venait de s'effondrer.

— Est-ce que ça fait mal ? murmura Harry, tout bas, la voix si brisée qu'elle n'était plus qu'un souffle. *

C'était une bonne question. Cela faisait-il mal, de mourir ? Sirius pensait que ça dépendait des circonstances. Et que, mourir, quand on laisse tant de choses derrière soi, ça fait un mal de chien. Mais ce n'était pas ce qu'il était censé dire, alors il sourit faiblement et mentit, comme il avait si bien appris à le faire.

— Mourir ? Pas du tout. C'est plus rapide et plus facile que de tomber endormi. *


Bonsoir, ça va ? Moi pas mdr.

Bon je dis ça en rigolant à moitié parce que l'écriture de ce chapitre m'a vraiment arraché des larmes, honnêtement. Vraiment, Sirius c'est l'escalade à tout instant. À l'origine, le chapitre devait faire 4000 mots, puis 8000, puis 10, 12000. J'ai fini par vous dire 15000. La vérité, c'est qu'il en fait 21220 et que j'aurais dû le découper en quatre parties plutôt que trois. Mais bon, on fait tous-tes des erreurs et je ne ferai pas la même erreur deux fois. Il y a un chapitre qui sera au moins aussi long, et je crois que je vais juste direct le découper en cinq. Au moins, on sera fixé-e-s x)

Je suis désolée pour la longueur extrême de la chose (21220 mots pour être exacte aha), mais c'était... nécessaire pour moi. Sirius est un personnage que j'aime d'un amour assez extraordinaire, malgré ses erreurs adolescentes (et c'étaient de sacrées erreurs), donc je n'ai pas pu m'empêcher d'écrire autant sur lui... Tout en sachant que j'ai découpé des scènes au montage, comme qui dirait x)

L'une des principales raison de mon retard de publication, c'est un bouquin. Peut-être que ça vous paraîtra idiot, mais ça faisait des mois et des mois que je n'avais pas lu un vrai livre, en dehors de mes lectures pour les études ! J'aime beaucoup la fanfiction, mais j'avais besoin d'autre chose et, comme de juste, cette lecture m'a permis de surmonter mon blocage et de finir le passage qui me donnait du fil à retordre. Donc, voilà, je suis super contente en tout cas ! :)

Vous avez pu remarquer quelques références littéraires au fil des chapitres ; j'ai déjà mentionné le poème de Proust dans une autre note d'autrice, mais je me rends compte que je ne l'ai pas fait avec le reste. Dans le chapitre 3, j'ai parlé d'un Etranger, d'un Horla. Je faisais référence au roman et à la nouvelle éponymes respectivement écrits par Albert Camus et Guy de Maupassant. Quant à toute la rhétorique du sale espoir, je la tire principalement d'Antigone de Jean Anouilh. Voilà, il me semble que c'est à peu près tout.

En tout cas, j'espère vraiment que ce chapitre vous a plu, il me tenait beaucoup à cœur. N'hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé, ne serait-ce qu'un petit mot, et merci beaucoup de me lire.

On se retrouve donc le 20 avril (ou le 21, encore une fois le chapitre sur Sirius a tout chamboulé) avec le chapitre sur Narcissa !