Une fin de guerre surprenante

Le peuple sorcier britannique apprit la chute de Voldemort une semaine après son arrestation et pas de la bouche d'Albus Dumbledore. La Gazette du Sorcier, qui n'était plus à la botte du ministère depuis quelques années, avait reproduit la une de plusieurs journaux étrangers qui annonçaient l'arrestation du sorcier qui terrorisait leur pays.

Cela ne plaisait pas au directeur de Poudlard, bien entendu.

L'interview d'Harry Potter et de Vlad Tepes relatait clairement leur arrivée intempestive et leur inutilité dans la bataille dans laquelle ils auraient dû tomber. Ils ne mâchaient pas leurs mots concernant leur aptitude au combat et la présence incongrue de jeunes gens encore scolarisés alors qu'ils n'avaient aucune formation en duel. Ils n'avaient pas eu la cruauté de donner les noms des membres présents mais la grande bouche de Ronald Weasley les avait déjà placés lui et sa famille aux côtés de Dumbledore pour la bataille finale … qui s'était visiblement faite sans eux.

Pour couronner le tout, le conseil international magique venait de le convoquer pour témoigner dans l'affaire Voldemort. Visiblement, l'article avait dû lui rappeler qu'il avait longuement argué qu'il maîtrisait la situation … alors qu'elle s'était réglée sans lui.

Le vieux sorcier respira profondément pour ne pas laisser éclater sa colère. Si tout s'était passé selon ses plans, Harry Potter, indésirable dans sa famille maternelle, lui aurait obéi au doigt et à l'œil, se serait sacrifié pour tuer Voldemort et lui aurait permis de récolter les honneurs pour avoir entraîné celui qui l'aurait vaincu. Normalement, le mari de Pétunia avait été ensorcelé pour qu'il ne considère pas le jeune orphelin comme un membre de sa famille. Mais il avait négligé de vérifier son ascendance et maintenant, il s'en mordait les doigts. Les Vers étaient une famille néerlandaise puissante et il ne savait pas que contrairement aux sangs purs britanniques, ils n'excluaient pas les enfants nés sans pouvoirs comme en Grande Bretagne. Vernon avait donc dû être éduqué avec des connaissances sur le monde magique et les transmettre à Harry après son passage à Poudlard. Car oui, Dumbledore avait fini par apprendre que Pétunia et Vernon avaient divorcé trois ans après qu'il leur ait confié Harry et la tutelle de ce dernier était revenu à son oncle alors qu'ils n'avaient aucun lien de sang. Un tour dans les archives du ministère et il avait découvert que les liens magiques s'étaient établis avec Vernon et non avec Pétunia, ce qui lui avait permis de disparaitre sans qu'il ne puisse s'y opposer. Toutes les autorisations et les procurations du directeur sur le patrimoine Potter et Black avaient également sauté au douzième anniversaire d'Harry – d'où son impossibilité de pocher dans son coffre étudiant pour donner la somme nécessaire aux Weasley pour faire leurs courses sur le Chemin de Traverse – ce qui ne lui permettait pas de savoir si tout ce qu'il avait fait pour le plus grand Bien était encore en place.

Et maintenant, Voldemort était hors d'état de nuire sans que le garçon n'ait fait quoi que ce soit …

La capture des mangemorts n'avait pris qu'une dizaine de jours, comme l'avait prédit le directeur Tepes. Tous avaient été interrogés dans un cercle de vérité, puisqu'accusés de nombreux crimes et de délits, et leurs propres réponses avaient permis de démanteler tout le réseau. Malheureusement, l'une des conséquences de ce coup de filet embêtait bien le directeur Dumbledore : aucun mangemort ne reconnaissait Sirius Black comme l'un des leurs, y compris Voldemort en personne. Le conseil magique avait alors décidé d'aller au fond des choses et avait interrogé le prisonnier avant que le vieux sorcier n'ait pu l'en empêcher. Bilan des courses : Sirius Black avait été innocenté de toutes les charges contre lui, avait été libéré d'Azkaban et avait reçu un dédommagement monstrueux versé conjointement par le ministère de la magie et par Dumbledore sur ses deniers propres.

Le vieux sorcier ne se leurrait pas : on allait lui demander pourquoi son nom apparaissait partout alors qu'il n'avait rien fait pour redresser la situation en Grande Bretagne et qu'il avait littéralement les pleins pouvoirs officieusement. Ses détracteurs n'allaient clairement pas passer à côté d'une possibilité de l'enfoncer encore plus et ne se gêneraient pas pour révéler ses petits secrets honteux ou plutôt, ses écarts de conduite alors qu'il voulait se poser comme la conscience des sorciers britanniques et de là, étendre le plus grand Bien au reste du monde. Il pourrait convaincre le conseil du bienfondé de ses actes mais il doutait qu'il puisse user de magie dans la salle où on allait le recevoir. Tant pis, il allait devoir se débrouiller avec son éloquence et son charisme …

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Exil définitif.

Tant que ce n'était pas Azkaban à perpétuité …

La fin de la guerre avait été abrupte, dans le sens où dès l'instant où Voldemort avait été arrêté pour avoir voulu s'en prendre à Harry Potter, un engrenage infernal s'était enclenché et en moins d'un mois, tous les mangemorts et ses sympathisants avaient été arrêtés à leur tour et soigneusement interrogés par les autorités internationales, suivis par les procès.

Severus Snape avait alors découvert que toute l'Europe continentale n'était pas aussi aveugle que la Grande Bretagne sorcière concernant Voldemort. La vitesse avec laquelle l'organisation avait été démantelée lui avait montré que les autorités internationales avaient mené l'enquête depuis des années et avaient obtenu les preuves qui soi-disant manquaient pour lutter efficacement contre lui et son idéologie pervertie.

Les mangemorts et leurs sympathisants avaient été rapidement condamnés à la hauteur de leurs crimes. Severus s'était donc vu signifié son exil et on lui avait laissé vingt-quatre heures pour mettre ses affaires en ordre et prendre ses affaires. Sa maison de l'impasse du Tisseur, où il avait vécu avec ses parents, avait presque été laissé à l'abandon et il n'y avait laissé que très peu d'effets personnels. En revanche, comme il avait quasiment vécu à Poudlard depuis plus de quinze ans, il avait dû mettre les bouchées doubles pour tout emballer avant d'être jeté magiquement du pays.

Quand il fut prêt, il se rendit chez les Malfoy. En effet, malgré son jeune âge, Draco avait été condamné à cinq ans d'exil pour avoir tenté de tuer le directeur de Poudlard Albus Dumbledore et ses parents Narcissa et Lucius avaient décidé de l'accompagner. Mais personne ne se leurrait, si le couple quittait le pays, c'était surtout pour pouvoir se faire soigner sans que les sorciers britanniques ne leur crachent dessus à cause de leur nom et de ce qui leur était arrivé. Quand Fenrir Greyback avait révélé que ce n'était pas Lucius Malfoy qui se tenait fièrement aux côtés de Voldemort mais son oncle Abel, les aurors internationaux n'avaient pas tardé à faire une descente au manoir Malfoy pour découvrir Lucius et Draco dans les cachots et Narcissa enfermée dans ses appartements, tous les trois dans un sale état. Leurs procès avaient été parmi les premiers pour leur permettre de partir au plus vite. Eux-aussi avaient dû mettre leurs affaires en ordre rapidement pour ne pas être en infraction.

Quand tout le monde fut prêt, ils se rendirent au département de la justice pour rejoindre d'autres exilés, dont Fenrir Greyback, tractant dans son sillage Rabastan Lestrange.

-Ah, vous êtes là ! s'exclama Fenrir. J'ai un point de chute pour nous tous. Si ça ne vous plait pas, vous pourrez partir de votre côté.

-C'est sûr ? s'inquiéta Lucius d'une voix rauque

-Toujours plus que ce pays à la mords-moi le nœud, renifla Fenrir. Alors ?

-Si nous pouvons partir après, haussa des épaules Narcissa.

-Bien, fit Fenrir. Suivez-moi.

Il se dirigea vers l'agent du département des transports, chargé d'envoyer les condamnés à la destination de leur choix. A ses côtés, l'agent du département de la justice, chargé de l'application des peines, ainsi que les trois aurors, veillaient à ce qu'il n'y ait pas de débordements.

-Fenrir Greyback, se présenta Fenrir. Avec Narcissa Black épouse Malfoy, Lucius et Draco Malfoy, Rabastan Lestrange et Severus Snape, nous irons à Copenhague. Nous déclarerons notre situation nous-mêmes.

-Qui nous dit que vous ne disparaîtrez pas dans la nature ? cracha l'un des aurors

-Qui vous dit que nous avons réellement envie de revenir ici ? rétorqua Fenrir. Du moment que nous quittons le pays, tout ce qui nous concerne ne vous regarde plus. Enregistrez notre destination et laissez-nous partir. Vous pourrez rester entre étroits d'esprit.

L'un des aurors voulut tirer sa baguette mais Fenrir montra son sourire carnassier, rappelant à ses interlocuteurs qu'il n'était pas un sorcier lambda mais un loup garou. Tous eurent un mouvement de recul.

-Pas de soucis à se faire, j'ai déjà mangé ce matin, ricana Fenrir. En plus, je n'aime pas le sorcier britannique, un peu trop rance à mon goût.

Personne n'apprécia la blague à sa juste valeur mais cela eut le mérite de faire accélérer la procédure administrative. Les documents furent signés en un rien de temps et le groupe fut poussé devant la cheminée internationale la plus proche. Deux par deux, ils traversèrent les flammes enchantées, d'abord Severus Snape et Rabastan Lestrange, puis Narcissa et Lucius Malfoy et enfin Draco Malfoy et Fenrir Greyback. Quand ce dernier fut sur ses pieds au ministère de la magie à Copenhague, il examina les alentours en reniflant ouvertement.

-Par ici, grogna Fenrir.

Ils enregistrèrent leur arrivée au ministère puis sortirent dans les rues danoises. Prenant soin de ne pas perdre ses camarades, ils s'enfoncèrent dans la vieille ville jusqu'à une petite ruelle. Mais au lieu de l'emprunter, ils entrèrent dans une propriété privée.

-Tu en as mis du temps, railla une voix.

-On devait semer les espions britanniques, répondit Fenrir. Pas très doués mais tenaces. Fais ce que tu as à faire, ensuite on se barre d'ici !

-Si tu pouvais y mettre les formes, soupira la voix qui sortit de l'ombre. Bienvenue à vous. Je suis Leïla Greyback et oui, ce fou furieux s'est reproduit, puisque je suis sa fille. Je vais devoir tous vous examiner puisque, comme l'a si bien dit mon cher père, vous avez été suivis. Votre futur hôte tenant particulièrement à son intimité, il préférerait ne pas devoir encore discuter avec le conseil magique parce qu'il a dû tuer les personnes qui vous suivaient illégalement. Acceptez-vous ?

Tous les sorciers se regardèrent avant d'hocher la tête. La jeune femme se dépêcha de faire les vérifications d'usage avant de leur tendre une corde.

-Il va nous mener à notre destination finale, indiqua Leïla. Accrochez-vous !

Quelques secondes plus tard, ils atterrirent dans une salle aux murs nus.

-Merci Leïla, fit une nouvelle voix.

Tous se retournèrent, sur leurs gardes.

-Tu ne t'es pas taillé les canines, suceur de sang ? railla Fenrir

-Très chère, tenez votre géniteur en laisse, grinça la voix. Je n'ai clairement pas envie de l'éduquer aujourd'hui.

-Père, je vous en prie, soupira Leïla.

Pour toute réponse, Fenrir renifla puis prit la direction d'un petit salon pour se laisser tomber dans l'un des fauteuils.

-Puisque tu as décidé de faire ton sale gosse, soupira Leïla. En arrivant ici, vous vous êtes soumis à un sort de secret pour tout ce que vous allez apprendre ici. Vous êtes donc sur le domaine de …

La silhouette sortit de l'ombre.

-… l'académie où a étudié Potter, souffla Severus. Vous êtes le directeur Vlad Tepes.

-Monsieur Snape, salua Vlad. Bienvenue en Albanie. Effectivement, vous vous trouvez dans mon académie. Fenrir vous a mené ici à ma demande.

-Pourquoi nous avoir fait venir ici ? demanda Rabastan

-Parce que sur toute la bande de bras cassés que constituent les mangemorts, vous semblez être les seuls à ne pas s'être leurrés à propos de Voldemort, décréta Vlad. Je voulais vous offrir un havre de paix le temps de vous reconstruire. Mais si je veux être totalement honnête, c'est monsieur Snape qui m'intéresse.

-Pourquoi ? demanda Severus, clairement intrigué

-Je voulais comprendre pourquoi, contre tout bon sens, Dumbledore vous a gardé à Poudlard alors que le secret de polichinelle concernant votre comportement ignoble avec les élèves avait été dévoilé au grand jour, railla Vlad.

Severus ne put s'empêcher de se sentir gêné. La beuglante de Vernon Dursley – ou désormais Vers – avait libéré la parole des élèves, anciens comme actuels, tant et si bien que les parents avaient exigé son renvoi. Bien entendu, Dumbledore avait balayé l'idée car le professeur de potions faisait partie de son plan pour le plus grand Bien.

-Dumbledore a fait la sourde oreille comme ça ne lui convenait pas, soupira Severus. Officiellement, à ses yeux, les élèves exagèreraient, je n'étais qu'un professeur un peu plus strict que la moyenne. Officieusement, comme j'avais juré sur ma magie que j'allais tout faire pour faire tomber Voldemort, y compris en me soumettant à ses ordres, il voulait continuer à m'avoir sous la main et sous les yeux pour avoir un espion bien docile. Pour le plus grand Bien, se préoccuper de mon bien-être n'était pas nécessaire, même si, comme l'avait souligné Vernon Vers dans sa beuglante, je déversais mon mal-être sur les élèves.

-Dumbledore aimait avoir le contrôle absolu sur ses pions, constata Vlad. Leïla, ma chère, conduis nos invités vers leurs quartiers.

-Bien, seigneur Tepes, s'inclina Leïla.

-Cette jeune femme est la cheffe de la sécurité de l'académie, indiqua Vlad. Contrairement à ce Dumbledore essayait de faire croire en Grande Bretagne, les populations magiques se côtoient souvent et ne croient pas forcément à leur supériorité par rapport aux autres. Je pense qu'une petite remise à niveau des us et coutumes magiques vous fera du bien mais vous aurez le temps d'y réfléchir après un peu de repos.

-Seigneur Tepes ? interpella Draco. En parlant de la beuglante du professeur Snape, comment un moldu a pu s'en procurer et l'envoyer ?

-Pour l'envoyer, je te signale, jeune sorcier, que Vernon a toujours eu à disposition le harfang des neiges de son neveu, sourit Vlad. Quant à la beuglante en elle-même … contrairement à la Grande Bretagne, encore une fois, les artères commerciales du continent sont beaucoup plus riches et offrent beaucoup plus de diversité dans leurs produits. Alors que dans ton pays, tu ne pouvais qu'ensorceler toi-même le parchemin avec un sort qui ne dure que douze heures, il est possible sur le reste du continent d'acheter des beuglantes prêtes à l'emploi mais le sort utilisé est de la magie « noire » pour Dumbledore.

Leïla poussa le groupe perturbé par ces révélations et ses explications en direction de leurs appartements tandis que Vlad et Fenrir s'installaient pour prendre un verre.