Chapitre VI : La Reconquête de Trost
Amos était… contrarié.
Dès le moment où Reiner, Bertholdt, Annie, Mikasa, Armin, Jean et lui étaient parvenus à ramener Eren de l'autre côté du Mur Rose, les troupes d'élite de la Garnison les avaient encerclé, et avaient demandé à ce qu'ils leur remettent le titan rebelle. Malheureusement, ses deux meilleurs amis s'y étaient fermement opposés, les autres n'eurent d'autres choix que d'obtempérer, et d'aller attendre les prochains ordres avec les autres jeunes recrues. Nox n'était vraiment pas tranquille, il ne savait toujours pas ce qu'était Eren, mais il savait que son pouvoir de métamorphose pouvait leur rendre bien des services. Cependant, il l'officier qui leur avait donné l'ordre de leur remettre le rebelle était Kitz Weilman, le lâche qui, selon les cadets sauvés au sein du QG, les avait abandonné à leur sort.
— « Ce parasite avait un canon pointé sur Eren quand je l'ai quitté, s'il cède à sa peur comme je le crains et qu'il tire… »
Il serra le poing frustré par sa propre impuissance.
— AMOS !
Christa couru aussi vite que ses jambes pouvaient la porter tout en dégageant Connie et Jean d'un coup d'épaule avant de se jeter dans les bras du grand blond.
— Hé là, oh ! rigola-t-il en retrouvant le sourire. Du calme, je vais tomber.
— J'ai cru… j'ai eu si peur pour toi…
Le sourire sur le visage de Nox s'élargit, il savait reconnaître la sincérité dans les paroles de sa petite soeur.
— Tout va bien, je n'ai rien.
Les autres cadets sourire devant la scène touchante, une pointe de gaieté dans ce paysage moribond.
— Tu nous a fait attendre, grogna Ymir en se redressant pour les rejoindre, j'ai failli casser la graine pendant tout ce temps.
La perche tendue par la grande fille fut immédiatement agrippée par le blond.
— Et t'aurais bouffé quoi ? De l'air ? T'en as plein la cervelle.
Quelques cadets amorphes il y a moins d'une minute esquissèrent un demi-sourire, le rictus d'Ymir était total en revanche.
— J'aurais dévoré le fruit interdit, déclara-t-elle sans la moindre pudeur.
Personne à part Amos et Christa ne comprit ce qu'elle voulait dire par là, le grand blond se frappa le front en affichant une grimace dégoutée tandis que sa soeur rougissait furieusement.
— Putain Ymir… grommela-t-il.
— Quoi ? C'est délicieux, tu sais ?
— Mais ferme ta gueule…
Jean haussa un sourcil.
— De quoi est-ce qu'elle…? commença-t-il avant de faire le lien avec la figure écarlate du petit ange. Oh ! Oh…
Bien vite, il imita son major de promotion en ignorant le rire de la grande fille.
— T'es dégueulasse… marmonna Amos en secouant la tête.
Les autres recrues ne comprirent toujours pas ce qu'Ymir avait entendu par là, néanmoins ils gloussèrent à la vue de la scène familière.
— « Bien joué, » songea Annie, « vous leur remontez le moral au cas où on serait forcé de retourner se battre… Ça m'étonnerait que ça suffise par contre… »
— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda Christa pour changer de sujet en chassant son rougissement. Pourquoi vous avez mit autant de temps à monter sur le mur ?
Amos leur fit un rapide topo de la situation, il fut cependant obligé d'omettre les détails concernant le titan rebelle et Eren.
— Hé bah, soupira Ymir en se grattant la tête, vous en avez vu des vertes et des pas mûres. Heureusement que Christa et moi on avait assez de gaz pour filer.
— Je suis désolée, renchérit la petite blonde avec tristesse, je me suis portée volontaire plusieurs fois pour le ravitaillement…
— Tu n'aurais rien pu faire, coupa Amos en balayant ses regrets d'un geste, le capitaine en charge a déserté son poste en forçant les cadets à rester. Je lui réserve une mauvaise surprise dès la fin de cette putain de journée.
L'ange acquiesça, parfaitement au courant de ce qu'il entendait par là.
— Mais alors… réalisa-t-elle soudainement, tous ceux qui ne sont pas là sont…
Nox hocha tristement la tête.
— À part Mikasa, Armin et Eren, oui, ils sont tous morts.
Le couple de jeunes filles serra les dents.
— Et où sont ces trois-là ? demanda Ymir.
— On est tenus au secret professionnel, interrompit Jean en avalant une rasade d'eau.
— Hein ?
— Pourquoi ?
— Ça restera pas secret bien longtemps, coupa Amos une nouvelle fois, mais il serait préférable d'éviter de propager des rumeurs, le moral est déjà assez bas et la panique menace de s'emparer des soldats.
Les deux filles se mordirent la lèvre, mais acquiescèrent à contrecoeur.
Le major de promotion jeta alors un coup d'oeil vers l'endroit où ils avaient été forcés de laisser Armin, Eren et Mikasa. Il n'était pas tranquille, vraiment pas tranquille, Weilman était un lâche, un imbécile et un faible, il était parfaitement capable de les abattre sans réaliser l'opportunité incroyable que représentait l'idiot suicidaire ou les capacités hors du commun de ses deux amis. Il lui fallait impérativement trouver quelqu'un de plus compétent et de plus haut placé… C'est alors qu'il aperçut l'un des officiers morts de peur qui s'était tint derrière le lâche barbu, alors qu'il expliquait la situation aux cadets juste avant de les envoyer au massacre.
Sans perdre une seconde, il se planta devant lui et effectua un salut parfait. Ce dernier était tellement distrait par ses pensées morbides qu'il sursauta en voyant Nox sortir de nulle part.
— Monsieur ! J'ai un message de la plus haute importance à transmettre au Commandant Pixis ! Où puis-je le trouver ?
Bien que décontenancé, l'officier reprit ses esprits et tenta de prendre une ton autoritaire.
— Transmets-moi ton message cadet, et je le transmettrai moi-même au Commandant.
— Négatif, Monsieur. J'ai pour ordre de le lui transmettre en personne, où puis-je le trouver ?
L'arrogance et la colère qui apparurent sur le visage du gradé ne furent pas du goût du jeune homme.
— Écoute très attentivement recrue, je suis un sergent, aussi quand je t'ordonne de me transmettre, le message tu me transmets ce message.
— « Je n'ai guère le temps pour ces conneries. »
— Sauf votre respect, sergent, négatif. Mes ordres proviennent du capitaine Weilman qui est actuellement en train de gérer une situation critique. Il est primordial que je parle au Commandant Pixis en son nom.
L'officier serra les dents, visiblement sa fierté en avait prit un coup, mais il finit par pointer l'Est du doigt.
— Le commandant est en train de discuter stratégie avec d'autres gradés, grogna-t-il vexé, tu le trouveras à côté du puit.
— Merci Monsieur ! « Je n'en ai pas fini avec toi. »
Sur ces mots, il fila aussi vite que possible en bousculant plusieurs membres de la Garnison au passage tout en ignorant leurs insultes. Il s'autorisa enfin un sourire en apercevant le crâne chauve et la moustache de l'homme qu'il cherchait. Celui-ci était en train d'écouter les différents rapports que lui faisaient ses soldats tout en s'imbibant de sa boisson fétiche.
— Commandant Pixis ! appela-t-il sans s'arrêter de courir.
Deux hommes tentèrent de l'arrêter, mais il les esquiva avec souplesse et continua son avancée alors qu'ils se vautraient sur le sol.
Il s'arrêta à moins de trois mètres de son supérieur en dérapant sur la terre, traçant au passage deux petits sillons, et effectua un salut digne de ce nom.
— Commandant Pixis ! J'ai un message à vous transmettre !
Ce n'est que parce que l'homme au crâne chauve les retint d'un signe de main que les autres soldats ne s'étaient pas jetés sur le jeune homme.
— Tiens donc ! fit le cinquantenaire en le reconnaissant. En voilà une bonne surprise ! Comment allez-vous ?
— Pas trop mal étant donné les circonstances, répondit-il avant de pointer le Sud du doigt, mais nous irons tous sans doute beaucoup mieux si vous empêchez le Capitaine Weilman d'exploser le cadet aux pouvoirs étranges qui a exterminé une vingtaine de titans.
À peine eut-il finit sa phrase qu'un coup de canon se fit entendre, Amos écarquilla les yeux de colère tandis que Pixis soupira d'exaspération.
— Je vois, reprit ce dernier une fois l'attaque portée, peut-être accepteriez-vous de m'accompagner et de m'expliquer en détail ce que vous avez vu, les rapports sont assez confus.
Nox était vraiment frustré de ne pas voir le Commandant courir en direction du point d'impact, mais il lui était impossible d'y aller seul. Avec la terreur ambiante il se serait fait traiter de rebelle et fusiller sur place.
Aussi, et malgré la tension qui s'emparait de lui étant donné le temps qui pressait, il lui raconta tout ce qu'il avait vu au sujet d'Eren et de « son » titan. Comment il avait exterminé ses congénères sans toucher aux humains, comment ils s'étaient servi de lui pour s'échapper et comment il avait surgit de la nuque de son immense corps. Il en profita pour louer la détermination de son camarade et son désir ardent d'exterminer leurs prédateurs, suite à la tragédie qu'il avait vécu à Shiganshina.
Ce ne fut que lorsqu'il acheva son récit qu'il entendit une voix lui redonner espoir :
— Je suis un soldat qui a juré d'offrir son coeur pour la renaissance de l'Humanité ! S'il me faut perdre la vie pour suivre ma conviction alors ainsi soit-il ! Si les soldats survivants s'associent à sa force de titan, il n'est pas impossible de reconquérir cette ville ! Je souhaite la gloire de l'Humanité ! Pendant le peu de temps que j'ai avant de mourir, je tente de vous expliquer que cette tactique vaut la peine d'être considérée !
— Armin…
— Quel magnifique salut, commenta Pixis en se grattant la moustache, dites-moi jeune Amos, est-ce que vous vous portez garant du cadet Jaeger ?
— Oui, répondit-il automatiquement, et de ses amis aussi.
— Donc si jamais il venait à…
— Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour le protéger, l'Humanité ne peut pas perdre un tel atout.
— Je vois…
— La ferme !
La voix paniquée et stridente de Weilman coupa court à leur discussion, et le sang d'Amos ne fit qu'un tour lorsqu'il le vit lever la main.
Prit d'une impulsion, il courut aussi vite que ses jambes pouvaient le porter, et attrapa le bras du capitaine avant que ce dernier n'ait pu l'abaisser.
Aussitôt, tous les fusils jusqu'alors pointés vers Eren se tournèrent vers le blond. Ce dernier foudroyait Weilman d'un regard si animal que le barbu manqua de s'évanouir de terreur.
La lame de Rico vint alors caresser de son tranchant la joue du cadet qui avait interrompu l'ordre de tir, le cadet en question se contenta de hausser un sourcil peu impressionné.
— « Amos ! » songea Armin en le reconnaissant. « Pourquoi es-tu intervenu ?! Tu vas te faire exécuter toi aussi ! »
— Il suffit ! tonna la voix du Commandant Pixis. Abaissez vos armes ! Tous !
Toutes les paires d'yeux tournées vers eux s'écarquillèrent, avant que leurs propriétaires n'obtempèrent.
Weilman était cependant tellement effrayé par le regard du cadet qui lui tenait le bras qu'il semblait sur le point de souiller son pantalon. Heureusement pour lui, son supérieur s'éclaircit la gorge.
— Jeune Amos ? Pourrais-tu relâcher ce bon capitaine ?
Le grand blond foudroya sa proie du regard une dernière fois, avant d'obéir en affichant un sourire carnassier.
— Kitz ? Je viens d'arriver, mais ce jeune cadet m'a déjà informé de la situation. Va donc diriger les renforts pendant que j'écoute ce qu'ils ont à nous dire.
La voix calme du Commandant Pixis suffit à désamorcer la situation, Armin s'écroula sur les genoux en respirant comme un ours tandis que des larmes de soulagement coulaient le long de ses yeux.
— J'aimerai avoir une petite conversation en privée avec vous quatre, reprit le cinquantenaire en buvant une gorgée de sa flasque, dans dix minutes si cela vous convient, Jeune Amos.
Ce dernier grinça des dents en acquiesçant.
(-)
Amos, Armin, Eren et Mikasa attendaient côte à côte l'arrivée du Commandant Pixis au sommet du Mur Rose. Le major de promo avait apporté des vivres et de l'eau à ses camarades afin que ceux-ci reprennent des forces, le Titan Rebelle ne s'était pas privé étant donné l'état d'épuisement dans lequel il était.
Nox s'allongea sur le Mur une fois sa distribution terminée, et alluma une cigarette.
— Quelle journée, marmonna-t-il en laissant la fumée s'échapper de ses lèvres, et dire qu'elle n'est pas encore terminée.
Les trois amis le regardèrent, chacun hésitait à poser les questions qui les turlupinaient tous.
— Si vous avez des trucs à me demander vous devriez vous dépêcher, les informa-t-il poliment, dans quelques minutes Pixis sera là et on parlera stratégie. Au passage, ne vous inquiétez pas à son sujet, c'est quelqu'un de bien et de raisonnable malgré son penchant pour la boisson.
Ce dernier détail ne les rassura pas des masses.
— Comment vont les autres ? questionna Eren soucieux.
— Pas trop mal de ce que j'ai pu voir, mais il va leur falloir un sacré coup de boost pour retourner au front.
Le titan rebelle enregistra l'information avec une mine pleine de regret.
— Comment tu connais le Commandant Pixis ? demanda Armin avec curiosité.
— J'ai joué plusieurs parties d'échec avec lui, il a une bonne tête sur les épaules malgré son alcoolisme.
— Comment est-ce que tu l'as rencontré ? insista Mikasa en remarquant sa tentative pour éluder la question.
Amos poussa un profond soupir fumeux.
— Ça je ne peux pas encore vous le dire, désolé.
L'orientale et son frère adoptif acceptèrent sa réponse malgré la curiosité qui les rongeait, ils gardèrent cependant la question dans un coin de leurs têtes.
— J'espère que je ne vous interromps pas, dit Pixis en faisant connaître sa présence.
Les cadets saluèrent immédiatement.
— Repos, repos, gloussa l'officier de la Garnison, j'ai passé l'âge de voir des jeunots talentueux comme vous me témoigner leur respect.
— Commandant, permission de parler librement ? demanda Amos.
— Accordée.
— N'exagérez pas. Vous avez mon respect depuis notre troisième partie d'échecs.
Un large sourire s'afficha sur le visage du cinquantenaire.
— Notre première était plus marquante à mes yeux, admit-il en secouant la tête, jamais un enfant de sept ans ne m'avait traité de… comment était-ce…? Ah oui ! De « vieux tricheur sénile ».
Amos se couvrit le visage d'une main à la mention de ce sobriquet, Armin écarquilla les yeux en se retenant de rire, Mikasa haussa un sourcil amusée et Eren dit d'un ton taquin :
— Je savais pas que t'étais un si mauvais perdant.
— Je n'ai pas perdu, se défendit le jeune homme, c'est lui qui a fait exprès de perdre. C'était de loin la pire victoire de mon existence.
Pixis gloussa à nouveau, avala une lampée de sa flasque, et s'approcha du bord du mur pour y observer les titans agglutinés.
— Non, marmonna-t-il déçu, pas une seule. Ça ne m'aurait pourtant pas dérangé de me faire dévorer par une titan canon.
Les cadets haussèrent un sourcil devant cet étrange aveu.
— « Toujours aussi excentrique, »songea Amos.
Pixis se retourna tout en prenant une autre gorgée de sa flasque.
— Maintenant, cadet Jaeger, si tu me disais ce que tu as en tête.
Ainsi, Eren lui raconta l'histoire de sa vie aussi vite qu'il le put, sur la façon dont son père l'avait transformé en Titan après la chute de Maria et comment il avait la clé du sous-sol qui contenait les secrets des Titans.
— Je vois, dit Pixis une fois qu'il eut fini d'expliquer. Alors, visiter cette cave devrait répondre à toutes nos questions ?
— Oui, monsieur, répondit Eren. Du moins je le pense.
— Pour le moment, il n'y a aucun moyen de valider toutes tes affirmations, dit Pixis en tournant la tête avant de tapoter sa tempe. Je me contenterai donc de le garder en mémoire. Cela dit, je peux généralement faire la différence entre le contestable et le sincère… c'est pourquoi je garantis personnellement votre sécurité. Non pas que ce soit nécessaire avec ce garçon à vos côtés.
Les trois cadets se tournèrent vers Amos en affichant des expressions interloquées, celui-ci préféra regarder ailleurs.
Les yeux du commandant se posèrent alors sur Armin.
— Tu es le cadet Armin Arlert, n'est-ce pas ?
— Oui, monsieur, répondit-il en le saluant.
— Tu as mentionné un plan pour exploiter cette soi-disant capacité de Titan pour reprendre la ville. Penses-tu sincèrement que cela pourrait fonctionner, ou étais-tu simplement en train d'essayer de sauver vos peaux ?
— « Ne mens pas, Armin. »
— Eh bien, les deux, Commandant, admit le petit blond. J'allais suggérer à Eren de soulever ce rocher géant en utilisant sa force de Titan. Nous pourrions l'utiliser pour bloquer la porte Sud. C'était la meilleure idée que je pouvais trouver sur le champ. Je voulais juste faire voir à tout le monde comment la capacité d'Eren pourrait apporter une solution au problème auquel nous sommes tous confrontés aujourd'hui.
Pixis se retourna en pensant à sa solution.
— Mais il est vrai que je voulais désespérément survivre, admit-il à nouveau.
— Désespéré de survivre, hein? répéta le commandant en continuant à boire. C'est une raison aussi crédible que n'importe quelle autre, fiston. Essuyant sa bouche de toute trace de boisson, il se dirigea vers Eren. Qu'en dis-tu, Cadet Yeager ?
— Quoi donc, commandant ?
— Ce trou, expliqua-t-il. Penses-tu pouvoir le reboucher ?
Eren hésita à donner une réponse définitive.
— Eh bien, je-je ne sais pas. C'est possible… mais pour le moment, je ne comprends pas plus mon pouvoir que vous. Je pense qu'il serait irresponsable pour moi de répondre, parce que… je ne sais pas.
Amos poussa un soupir exaspéré avant d'esquisser un sourire.
— Vous avez posé la mauvaise question, commandant, dit-il avant de se tourner vers son camarade avec tout son sérieux en pointant l'entrée béante du doigt. Eren ? Ce trou tu vas le reboucher, oui ou non ? Si oui, on y consacrera toutes nos ressources, nos camarades et nous mêmes retourneront tous au combat et risqueront nos vies pour que tu y parviennes. Si non, hé bah on a plus qu'à abandonner cette ville, aller se coucher, accorder un bout de territoire en plus aux titans et perdre une nouvelle fois. Donc… en sachant tout ça… tu vas reboucher ce trou ou pas ?
Ses yeux verts s'écarquillèrent alors qu'il sentait la responsabilité de la tâche s'abattre sur lui. Satisfait par la question d'Amos, Pixis encouragea Eren a observer l'enceinte du Mur Rose derrière eux, toutes les maisons, tous les gens et toutes les vies qui comptaient sur le miracle qu'il représentait. S'il manquait à son devoir, alors chacune de ces personne mourrait. Il a fait le serment de protéger et de servir l'humanité, et il ne pouvait pas laisser ses doutes l'en empêcher.
— Je vais le faire, promit-il soudainement. Je vais le faire ! Je ne sais pas si je peux sceller ce trou, mais ... je le ferai.
Pixis sourit et tapota les épaules de ses soldats.
— Bien dit cadet Jaeger, tu as le cœur d'un lion.
Amos foudroya le commandant du regard en entendant cela, mais il n'eut qu'un sourire pour seule réponse.
Le cinquantenaire retourna ensuite voir ses hommes en criant :
— Officiers, debout ! Nous avons un plan à étoffer !
Les yeux d'Armin s'écarquillèrent d'inquiétude :
— Attends, on ne peut pas baser notre reconquête sur…
— Armin, trancha Amos d'un ton sec, cesse de douter de toi, c'est un bon plan et c'est le seul qui soit techniquement réalisable. Pour ce qui est de l'organisation des troupes et des rôles à attribuer tu peux faire confiance à Pixis.
— Il semble savoir ce qu'il fait, acquiesça Eren. Il a tout sous contrôle, comme s'il avait une vue d'ensemble de la situation. Comme s'il voyait ce qu'on ne voit pas.
— Ce qu'on ne voit pas ? demanda Armin.
— Tu vas très vite comprendre, rassura Amos.
— Mais on a un autre problème à régler avant de pouvoir lancer le plan, et mon instinct me dit que le commandant est parfaitement conscient de celui-ci.
— Lequel ? insista Armin.
— Les titans ne sont pas nos seuls ennemis.
À cela, Amos haussa les sourcils de surprise, et un petit sourire apparu sur son visage.
— Considère-moi impressionné Eren, je ne pensais pas que tu aurais compris si vite.
Il fut un temps où Jaeger aurait rayonné à cette éloge, mais il était trop inquiet pour y penser sur le moment.
Avant que le petit blond ne puisse leur demander d'élaborer, Pixis les interrompit :
— Nous n'avons plus une minute à perdre, dit-il avec plusieurs officiers derrière lui. Le sort de l'humanité repose sur vos épaules, jeunes soldats
Les cadets pensaient tous la même chose: « pas de pression ».
(-)
— Tu crois que ça va marcher ?
— Hm ? fit Amos en tournant sa tête avec la cigarette au bec.
— Le plan d'Armin, clarifia Mikasa en agitant sa main devant son visage pour chasser la fumée qui s'approchait de ses narines, est-ce que tu crois qu'il marchera ?
Le jeune homme haussa les épaules avant de tirer une bouffée.
— Je n'en ai pas la moindre idée, admit-il, on ne connait pas la force physique exacte du titan d'Eren ou la solidité réelle de son corps. Et même s'il y arrivait, il faudrait qu'il traverse la moitié du district avec cet énorme caillou sur le dos, faisant de lui une cible idéale pour les titans. Ce plan est un gigantesque pari avec toutes ces inconnues.
L'orientale fronça les sourcils avec inquiétude.
— Alors pourquoi est-ce qu'on s'y tient ?
— Parce qu'on a jamais réussi à battre les titans, répliqua-t-il en jetant sa cigarette du haut du mur, parce que si on subit une défaite de plus on sera tous fichu quoiqu'il arrive, donc si on veut les battre, si on veut survivre, il va falloir prendre de très gros risques. Gagner ou crever, ce sont nos seules options.
— SOLDATS, VOTRE ATTENTION !
Les soldats rassemblés au pied du mur furent instantanément réduits au silence par le cri du commandant. Tandis qu'Amos et Mikasa tressaillaient face à cette tonalité démentielle.
— Le plan de l'opération de récupération de Trost est le suivant: notre objectif principal est de refermer le trou ! Oui, vous avez bien entendu. De plus, cela sera fait manuellement !
Plusieurs marmonnements au sein de la foule mirent en doute ses affirmations.
— Quant à la façon dont la tâche sera accomplie, continua-t-il en indiquant Eren à ses côtés, c'est là que ce camarade entre en jeu. Permettez-moi de vous présenter le cadet Eren Jaeger!
L'adolescent salua automatiquement.
— Ne vous laissez pas tromper par les apparences, prévint Pixis. Ce jeune homme est en fait le produit à succès d'une expérience scientifique de pointe ! Aussi fantastique que cela puisse paraître, le Cadet Jaeger possède la capacité de fabriquer et de contrôler un corps de Titan à volonté ! Rappelez-vous l'énorme rocher à environ un lieu de la porte ! Sous sa forme de Titan, le cadet Jaeger portera ledit rocher sur son dos, l'emmènera au trou, et le scellera ! Et c'est là que vous entrerez tous en jeu ! Votre travail sera de le défendre ! Oui, défendre un Titan contre sa propre espèce !
Pendant que Pixis faisait son discours, Amos et Armin discutaient stratégie avec les officiers de la Garnison :
— On ne doit pas se battre contre les titans ? demanda l'un intrigué.
— Heu… je suis désolé, s'empressa d'ajouter le petit blond, qu'une jeune recrue comme moi…
Le grand blond le fit taire d'une taloche derrière la tête, ce qui lui valu le regard noir de Mikasa.
— Je t'ai dis d'arrêter de t'excuser pour rien, dit-il avec sérieux, tu ne manques de respect à personne en exprimant ton opinion comme tu le fais. Au contraire, ai confiance en ton plan, il n'est pas supposé être parfait, il doit juste nous donner une base solide. On s'occupera de le peaufiner ensemble.
Armin se gratta la tête, avant d'acquiescer et de poursuivre :
— Les titans se pressent là où les humains sont nombreux. Si en suivant ce principe nous arrivons à les appâter près du mur, on pourra les éloigner d'Eren sans entrer en contact avec eux. Et les exterminer au canon sans faire de victime. Toutefois, nous ne pouvons pas laisser Eren sans défense, quelques membres de l'élite devrons donc le protéger. Et il faudra impérativement affronter les titans qui entreront par le trou, là tout repose sur le travail des escouades d'élite.
— Hmm… fit Amos pensivement, il y a plusieurs failles.
Sur ces mots, il sortit un crayon de la poche de sa veste tandis qu' Armin s'éloignait pour lui laisser la main.
— Tout d'abord, on ne peut pas tirer des coups de canon sur les titans tant que nos soldats servent d'appâts. Il faudra attendre qu'ils remontent ou s'écartent avant de les pilonner, le problème c'est que notre artillerie ne sera pas assez précise et qu'elle est lente à recharger. On aura de la chance si on tue ou incapacite suffisamment au moins la moitié d'entre eux. Les attirer vers les coins optimiserait leur efficacité. De plus quand Eren se transformera, il y aura de fortes chances pour qu'il attire tous les titans vers lui avec le tintamarre qu'il fera en portant son caillou. Et c'est sans compter le fait que de nombreux titans pourraient franchir la porte en une fois… D'accord. Voici ce que je propose, n'hésite pas à me contredire si tu as des objections ou des remarques à faire, Armin.
Une fois que le petit blond eut acquiescé, il poursuivit :
— Tout d'abord il nous faut poster des équipes d'éclaireurs sur le mur près de la porte, ceux-ci nous informerons à l'aide d'un fumigène de la meilleure fenêtre d'ouverture pour la transformation d'Eren. Ensuite, au niveau des appâts, on ne peut pas les faire remonter à chaque tir d'artillerie. En attendant l'ouverture des éclaireurs, ils devront se disperser hors de la ligne de mire avant le pilonnage et se replacer dès que celui-ci sera terminé, afin d'empêcher les titans de se disperser à leurs tours entre chaque salve. Ainsi, même si les titans venaient à oublier les appâts pour se diriger vers Eren, ils tourneraient le dos à ces derniers, leur offrant la possibilité d'en neutraliser un maximum avant qu'ils n'aillent trop loin. C'est l'équipe chargée de la défense d'Eren qui me préoccupe, elle ne doit ni être trop large, ni trop maigre. Cette tâche doit vraiment être confiée aux meilleurs des meilleurs, les deuxièmes meilleurs doivent garder la porte à tout prix. D'ailleurs nous devrions également mettre des appâts à cet endroit, pour attirer les nouveaux arrivants vers des secteurs où nos canons n'ont pas été détruits par le colossal.
Armin était impressionné par la façon dont Amos avait repéré les failles de son plan et immédiatement peaufiné les détails, mais ce n'était rien comparé à la stupéfaction qui s'étaient emparés des officiers à leurs côtés. Ces deux cadets fraichement diplômés étaient en train de leur donner une véritable leçon de stratégie.
— Mais… fit remarquer à contrecoeur le petit blond, ce plan ne vaut que si Eren réussit à porter le rocher et boucher le trou.
— Ou que le cuirassé n'apparaisse pas pour venir nous emmerder, ajouta Amos.
Armin tressaillit, il n'avait pas pensé à ça.
— Lancer une telle opération avec tant d'inconnues… ça me laisse perplexe.
Les gradés poussèrent un soupir.
— C'est vrai que la partie essentielle est incertaine, dit l'un, alors envoyer beaucoup de soldats à la mort ne me laisse pas insensible, mais je comprends aussi l'idée du Commandant Pixis.
— Premièrement, expliqua la gradée, c'est une question de temps, les titans continuent d'entrer dans la ville actuellement. Elle est tellement pleine de titans que les chances de réussite de cette opération sont désespérantes. De plus…
Elle soupira avant de continuer :
— Il y a des limites à utiliser la peur comme moteur.
— Qui a dit que le Commandant allait se servir de la peur ?
Les officiers et Armin se tournèrent vers Amos, celui-ci affichait un sourire à la croisée des chemins entre la satisfaction et… quelque chose que le petit blond qualifierait de « dérangeant ».
— Le meilleur moyen pour encourager une personne à risquer, voir à perdre sa vie c'est de mettre en péril ses raisons de vivre, dit-il en se tournant vers leur commandant. Ce n'est pas à la peur qu'il en appellera, mais au devoir. Vous allez vite comprendre.
Mikasa n'aimait pas du tout ce qu'il insinuait par là.
(-)
— Ils mentent, hurla Daz depuis le pied du Mur. Je ne vais pas me sacrifier pour cette connerie ! Nous ne sommes que des outils jetables pour vous ! Vous vous attendez à ce que nous vivions et mourions en croyant tout ce qui sort de votre bouche ?!
Cela provoqua un effet domino immédiat, et une partie importante de soldats commença à marmonner leur incrédulité face à cette situation et à s'éloigner. Certains étaient trop compromis émotionnellement pour de nouveau faire face aux titans, et d'autres voulaient passer le peu temps qu'ils pensaient avoir avec leur famille.
Naturellement, la réponse de Weilman n'aida personne, et Amos lui promit une mort lente et douloureuse lorsqu'il l'entendit hurler :
— Traîtres ! Je vous abattrai tous là sur place !
— Armin ? appela le major de promo depuis le haut du Mur. Écoute très attentivement.
Le petit blond fronça les sourcils sans comprendre, avant que Pixis ne reprenne la parole :
— Quiconque souhaite partir ... ne sera pas accusé de trahison par mon ordre personnel ! On ne s'attendra pas à ce que ceux qui ont vu un Titan en première ligne réitèrent une telle horreur ! Quelle que soit la personne à qui cela s'applique, vous pouvez partir avec ma bénédiction. De plus, n'importe qui avec de la famille ou les proches, ils épargneraient le même problème peuvent également partir. La Couronne continuera à reconnaître votre service. Merci et bonne chance !
Les soldats qui étaient prêts à partir s'arrêtèrent net dans leur élan avant de faire demi-tour et de se remettre en formation. Ils ne voulaient pas laisser leurs proches souffrir aux mains de ces monstres, ils préféraient mourir plutôt que de laisser faire une chose pareille.
— Et voilà.
Armin sentit une gêne grandir dans sa poitrine, Amos savait beaucoup trop de choses sur la manipulation pour qu'il se sente serein.
Le commandant continua :
— Maintenant, repensez à il y a quatre ans, à savoir l'opération pour reprendre le Mur Maria !
J''en parle parce que vous méritez tous que vos soupçons soient confirmés. Officiellement, nous l'avons qualifié de mission de reconnaissance, mais en fait, comme la plupart d'entre vous le savent probablement, ce n'était guère plus qu'une purge. Un exercice à peine déguisé de contrôle de la population. Nous savions cela dans nos cœurs. Bien sûr que nous le savions, mais nous avons fermé les yeux. Nous avons soutenu le mythe parrainé par l'État parce que la mort de nos semblables nous a permis de survivre, purement et simplement.
Armin serra les poings de rage, et sentit les larmes couler le long de ses yeux. Amos posa alors une main sur son épaule, et lui dit à l'oreille :
— Pourquoi crois-tu que ton grand-père s'est joint à cette « mission » sans broncher ou résister ? Il l'a fait car il savait que c'était le seul moyen qu'il avait de t'offrir une chance de survie, maintenant, comme pour nos camarades morts au combat, il te faut donner de la valeur à son sacrifice en te battant de toutes tes forces pour y parvenir.
Les traits jusqu'alors furieux d'Armin se changèrent en une expression qui aurait tout à fait pu incarner la détermination elle-même. Et si Mikasa se réjouie de voir son ami gonflé à bloc, elle n'était pas rassurée en voyant la main du grand blond sur son épaule.
— Cette culpabilité est la nôtre, et nous partageons le blâme ! Nous tous. Comme les citoyens de Maria étaient minoritaires, personne n'a remarqué de conflit ! Mais qu'en ait-il cette fois ?!
Si Rose venait à tomber, la population diminuera d'un tout autre ordre de grandeur ! Les terres qui composent Sina ne soutiendraient que la moitié de la population actuelle ! Si nous sommes effacés de la surface de la Terre, les coupables n'auront pas été les Titans ! Je vous rassure ! Non, non, nous l'aurons fait nous-mêmes ! Ce n'est pas dans l'enceinte du Mur centrale qu'il faut mourir, non ! C'est ici ! C'est ici qu'il faut mourir !
Un immense sourire s'afficha sur le visage d'Amos, et il tapota l'épaule d'Armin sous le regard méfiant de Mikasa. Elle avait beaucoup de respect pour le grand blond, il avait été et était toujours son rival. De même, elle lui était très reconnaissante pour les avoir sauvé à plusieurs reprises, elle et ses amis. Néanmoins… Il y avait quelque chose… quelque chose dans la façon dont il souriait parfois… quelque chose d'inquiétant… quelque chose de sombre…
Et elle avait le sentiment étrange que ce quelque chose était plus dangereux pour lui-même que pour les autres.
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La contre-attaque se mit en place peu de temps après le discours de Pixis. D'autres canons furent montés sur le mur et visaient les hordes de Titans qui augmentaient de manière exponentielle à chaque demi-heure qui passait. Fort heureusement, l'artillerie permit de réduire leur nombre efficacement en attendant que le reste du plan dressé par Armin et Amos se mettent en place. De son côté Eren venait d'obtenir sa propre équipe d'élite protectrice: Rico Bretzenska, Mitabi Jarnach et Ian Dietrich, le leader.
— Cadet Amos ?
Ce dernier était en train d'observer les manoeuvres de diversion lorsque le Commandant Pixis s'adressa à lui.
— Oui, Monsieur ?
— Je t'ai assigné à l'unité qui servira de leurre à l'Est de Trost.
Si Nox était déçu, il ne le montra pas.
— Très bien, Monsieur.
Le cinquantenaire haussa un sourcil amusé devant la sobriété des réponses du jeune homme, il se comportait en véritable soldat.
— Tu sais, j'ai demandé à l'un de tes camarades de me conter la façon dont vous vous êtes échappé de Trost, dit-il en buvant une gorgée de sa flasque. Je dois reconnaître que je suis très impressionné, je ne pensais pas qu'il existait des gens comme toi dans ton milieu.
Amos tira une longue bouffée de sa cigarette, et s'assit sur le bord du Mur avant de gratifier son supérieur d'un sourire amusé.
— Vous pensiez sincèrement que j'allais devenir comme les autres quand vous m'avez rencontré ?
— Oui, répondit Pixis sans prendre de gant en venant s'asseoir à ses côtés, tu étais un insolent petit garnement. Incroyablement intelligent, mais trop arrogant pour voir ses erreurs et trop conforté dans son comportement pour avoir une réelle chance de changer.
Nox renâcla tristement, et tira une autre bouffée.
— Vous avez raison, admit-il en regardant l'horizon, j'aurais probablement fini obsédé par des objectifs insignifiants et j'aurais été incapable de réaliser ce qui importe vraiment dans ce Monde. Et puis surtout, j'aurais pas été foutu de comprendre que j'étais un immense connard.
Le sourire de Pixis s'élargit, et il but une autre gorgée.
— Je dois reconnaître que je suis curieux de savoir ce qui a pu t'arriver pour transformer le petit con que tu étais en ce remarquable jeune homme que tu es.
Amos rougit légèrement en entendant ce compliment, avant de lever les trois doigts centraux de sa main gauche.
— Trois voyages en Enfer, et trois ans entouré de bonnes personnes.
Le cinquantenaire acquiesça doucement, avant de lui tendre sa flasque.
— Les épreuves peuvent forger ou détruire un homme, dit-il en l'incitant à boire d'un signe de tête, mais l'entourage influence considérablement le caractère.
Amos sourit avant de s'emparer de la gourde et d'en avaler trois lampées, il frissonna en sentant le goût horrible envahir son palais, mais il accueillit néanmoins la douce chaleur qui envahit son visage.
— Vous avez besoin d'un meilleur breuvage, fit-il remarquer en lui rendant la flasque et en lui tendant sa cigarette, cette saloperie vous trouera l'estomac avant vos cinquante-cinq ans.
Pixis récupéra sa liqueur, et tira une longue bouffée de fumée.
— Je n'ai, hélas, pas le palais aussi développé que le tien, cadet, soupira-t-il tristement.
— Si on gagne cette bataille, je m'engage à vous offrir une véritable bouteille.
— Je m'en souviendrai, répondit le cinquantenaire avant de se redresser. J'ai vraiment apprécié cette conversation, j'espère que nous aurons l'opportunité d'en avoir au moins une autre.
Amos esquissa un autre sourire, avant d'imiter son supérieur.
— Je vais essayer de rester en vie.
— Bien, parce que ce « vieux tricheur sénile » à encore de nombreux tours dans sa manche.
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Amos et ses camarades passèrent les trois quarts d'heure qui suivirent à attirer les titans jusqu'aux coins des murs, ou l'artillerie se chargerait de les pilonner des qu'ils seraient tous là.
L'attente fut longue et terriblement frustrante pour le grand blond, principalement parce qu'il ne comprenait pas comment autant de titans pouvaient continuer d'affluer dans l'enceinte du mur. C'était comme s'ils savaient qu'il y avait une brèche et qu'un festin les y attendait. Environ dix minutes plus tard, un fumigène vert fut tiré depuis la porte, indiquant que la voix était libre, puis une autre la suivie, signalant le début de la mission d'Eren. Soudainement, un éclair jaune et vert illumina la ville, et un rugissement assourdissant mais reconnaissable se fit entendre.
— « Bien, »songea Amos alors qu'il était pendu au mur, quatre mètres au-dessus de la gueule d'un titan, « il a un boulevard jusqu'à la porte, à moins d'une complication cela devrait bien se passer. »
Évidement, à peine vingt secondes après qu'il eu pensé cela, il vit un fumigène rouge s'élevé du même endroit que le précédent.
Il écarquilla des yeux effarés, avant de serrer les poings de colère et de remonter sur le Mur.
Une fois à cinquante mètres du sol, il entendit les soldats marmonner pour eux-mêmes que ce plan à moitié cuit était perdu d'avance, et qu'ils n'allaient jamais gagner.
Même Marco, l'éternel optimiste, ne pu s'empêcher de sombrer dans le désespoir.
— C'est fini. Nous avons échoué.
Amos leva les yeux au ciel, il était hors de question que cela se termine ainsi.
— Armin ! appela alors le garçon aux tâches de rousseur en voyant le petit blond courir. Où est-ce que tu vas ?
Ce dernier ne répondit pas, il couru aussi vite que ses jambes pouvaient le porter jusqu'au point idéal pour rejoindre Eren avec son équipement TDM.
— Armin ! appela Amos en se hissant à son niveau, le faisant sursauter pour le coup. Ne fonce pas dans le tas, réprimanda-t-il, les petits titans sont de vrais pestes et savent se cacher pour bondir sur leurs proies.
Il enregistra l'information, mais ne s'arrêta pas de courir pour autant.
— Il faut qu'on atteigne Eren pour comprendre ce qui se passe. On ne peut pas échouer, pas maintenant !
— Je sais, mais sans vouloir te vexer, tu n'es pas le meilleur en tridimensionnalité, alors laisse-moi ouvrir la marche et reste dans mon sillage.
— D'accord.
Amos s'arrêta soudainement lorsqu'il repéra le chemin parfait pour atteindre le rocher, et sauta du mur. Armin écarquilla les yeux de terreur, mais il le suivit malgré lui en ravalant la peur que lui inspirait un saut dans le vide de cinquante mètres.
Atteindre le corps de titan d'Eren se révéla plus difficile que prévu, notamment à cause de deux titans de six et huit mètres qui sautaient comme des grenouilles. Armin fut forcé de patienter sur le sommet d'une tour pendant que l'autre blond les éliminait.
Ce ne fut qu'après neuf minutes de course et de voltige qu'ils finirent par apercevoir le corps du Titan Rebelle assis contre le rocher, ils atterrirent sur sa nuque.
Amos jeta des coups d'oeil à droite et à gauche à la recherche de l'équipe censée assurer sa protection, tandis qu'Armin tapait du pied sur la nuque.
— Eren, haleta-t-il en essayant de reprendre son souffle, le rythme de son camarade ayant été plus difficile à suivre que prévu. Eren, qu'est-ce que tu fais ? Réveille-toi !
— Pourquoi est-ce qu'il ne se régénère pas ? demanda Amos tout haut. Qu'est-ce que c'est que ce putain de bordel ?!
Malheureusement pour eux, la situation ne faisait que s'aggraver. Les Titans essayaient de se rapprocher d'Eren et même si l'équipe d'élite en tenait quelques-uns à distance, ils étaient trop nombreux pour eux et continuaient d'affluer, abandonnant les leurres humains.
Ils aperçurent alors Mikasa qui venait d'abattre un treize mètres à proximité de leur position.
— Mikasa ! Pourquoi le plan a-t-il échoué ?! Pourquoi diable est-il affalé comme ça ?!
— Armin, Amos allez vous-en ! avertit l'orientale. C'est dangereux ! Quelque chose s'est mal passé, il a perdu le contrôle et nous a attaqué !
— Il a quoi ?! lâcha Nox hors de lui. « Je vais lui botter le cul jusqu'à Mitras dès la fin de cette foutue mission. »
— J'ai essayé de le sortir de cet état, mais il n'a pas répondu, continua Mikasa. Il est comme ça depuis quelques minutes !
— Mais le plan… protesta le petit blond.
— Il a échoué ! Tout le monde se bat parce qu'on ne peut pas l'abandonner ici !
— C'est tout ?! explosa Amos avant de reprendre le contrôle de lui. Non, ça ne peut pas être tout.
Son regard se posa alors sur la nuque du rebelle, une expression froide comme la mort s'était emparée de son visage.
— Eren est juste en-dessous, dit-il en tapant du talon, ce qui signifie qu'on devrait pouvoir l'atteindre.
— Et en l'atteignant, continua Armin sur le même chemin de pensée, on devrait pouvoir le réveiller.
Ils échangèrent un regard.
— Tu penses pouvoir t'en occuper ?
— Il le faut, répondit le petit blond en s'agrippant à la nuque tout en dégainant une lame, mais j'ai besoin d'autant de temps que possible.
Amos acquiesça, avant de grimper au sommet du rocher. Cinq secondes plus tard, Armin transperça la peau du titan Rebelle qui se mit à cingler furieusement en se tordant de douleur.
— Armin ! hurla Mikasa horrifiée.
— Ne t'occupe pas de lui ! répliqua Amos depuis le sommet du rocher. Il va réveiller Eren ! Fais-lui confiance ! Nous nous devons nous assurer qu'aucun titan ne les atteigne ! Cette mission sera un succès si chacun fait sa part !
L'orientale serra les dents de frustration, mais elle finit par céder, elle avait apprit sa leçon, elle ne pouvait pas laisser ses émotions se mettre en travers de son chemin, c'était presque l'assurance de courir à la catastrophe.
Amos se servit de sa nouvelle hauteur pour observer les horizons, il vit un neuf mètres au Nord, un quatorze au Nord-Est, et deux six mètres à l'Est. Les autres étaient l'affaire de Mikasa.
— Ça ne va vraiment pas être facile… murmura-t-il alors que le temps ralentissait autour de lui, qu'une série de calculs défilait devant ses yeux, que son imagination simulait déjà ses prochaines manoeuvres, et qu'un filet de sang coulait le long de son nez.
— « Etape 1 : le neuf mètres, contourner la tour de l'horloge pour le surprendre par derrière. Etape 2 : le quatorze mètres, trancher le tendon du pied droit et l'achever au sol. Etape 3 : les deux sept mètres, abattre celui qui est le plus en retrait pour qu'il tombe sur son compère et profiter de l'entrave de ce dernier pour l'achever. Durée de l'opération : six minutes et vingt-huit secondes. Chances de réussite parfaite : 71%. Risques de décès : 4%. Chances qu'Armin parvienne à réveiller Eren durant ce laps de temps : inconnues. Détermination à la survie et à la réussite de cette reconquête : maximales. »
Il essuya le filet de sang qui avait coulé sur sa bouche d'un revers de main, l'étalant malencontreusement sur ses lèvres en un rictus sanglant qui fut étrangement de paire avec la prédation dans son regard. Puis il s'élança toutes lames dehors vers la tour de l'horloge, il décrivit un arc de cercle dans les airs et passa derrière le titan de neuf mètres qu'il abattit d'un seul coup. Il atterrit ensuite sur un toit où il commença à courir sans s'arrêter pour regarder sa victime tomber. Le quatorze mètres le repéra, et tenta de l'écraser avec son énorme main, mais Amos accéléra sa course d'une poussée de gaz, glissa sur les tuiles et sous le danger jusqu'à ce qu'il ne chute librement dans la rue. Il tira son grappin dans le derrière de sa proie et se laissa balancer jusqu'au tendon du pied droit qu'il trancha. Le titan s'étala sur le sol, et eut à peine le temps de commencer à se redresser avant que son bourreau ne l'achève. Vint ensuite la partie la plus dangereuse, car les dernières cibles étaient dangereusement proches d'Eren, et Amos n'avait qu'une seule fenêtre d'action.
Il voltigea dans une ruelle, traversa une rue, puis s'engagea dans une autre ruelle juste avant que le premier titan ne lui passe devant, peu lui importait, sa cible était le deuxième. Il surgit de la ruelle tel un ouragan et charcuta la nuque de la créature qui fut emportée par son élan et s'écrasa contre son congénère. Celui-ci se débattit de manière enfantine pour se dégager du poids mort qui l'entravait, mais fut si préoccupé par sa liberté qu'il ne remarqua son assassin que lorsqu'il fut trop tard pour lui. Amos fit une très courte pause au sommet du crâne de sa dernière victime, avant de retourner se jucher sur un toit.
Il essuya un nouveau filet de sang avec agacement, avant de plaquer la garde de son épée sur son front dans l'espoir vain de calmer sa migraine.
— Putain… jura-t-il tout haut, je manque vraiment de pratique.
Maitrisant sa douleur, il balaya les environs du regard à la recherche d'une autre de ces créatures, une de celles qui étaient suffisamment stupides pour croire qu'elle allait réussir à passer son barrage pour s'en prendre à Eren.
Mais comme le disait son grand-père : « La stupidité trouvera toujours son chemin, barre-lui la route avant qu'elle ne t'atteigne. »
Un déviant de neuf mètres filait droit sur le Rebelle, son regard trahissait un espoir dément qu'Amos n'avait remarqué que dans les yeux des plus désespérés.
Notant ce détail dans un coin de sa mémoire, il s'élança vers sa prochaine victime. Il arrêta sa course effrénée en lui envoyant une épée dans le coin de l'oeil, avant de remplacer sa lame pour lui trancher la nuque avec rapidité et précision. Le titan se vautra sur le sol, son élan fut tel qu'il dérapa jusqu'à heurter le pied d'Eren avec le sommet de son crâne.
Le major de promotion du 104ème régiment atterrit sur un toit avec grâce, avant de sentir les tuiles se dérober sous ses pieds, il s'écroula lourdement sur les fesses, le souffle haletant.
— Comme j'aimerai avoir la vitalité d'un Ackerman, grogna-t-il tout bas avant de se forcer à se remettre debout.
Il balaya une fois de plus les environs du regard, avant qu'un rugissement ne vienne lui vriller les tympans, il se retourna en plaquant ses mains contre ses oreilles.
Le Titan Rebelle était debout, ses blessures totalement guéries, il hurlait à gorge déployée tel un général en pleine charge. Lorsqu'il fut à court de souffle, il prit une grande inspiration à travers sa bouche difforme, avant de se retourner. Amos écarquilla les yeux lorsqu'il le vit se saisir de l'énorme rocher, et manqua de s'exploser la rétine lorsqu'il l'arracha de la terre pour le jucher sur ses épaules.
Pendant un instant qui paru durer une éternité, Nox resta figé sur place, émerveillé par la démonstration de force dont il fut témoin. Il fut cependant ramené à la réalité lorsqu'Armin atterrit à ses côtés, les yeux pleins d'espoir.
— Eren a réussi ! s'exclama-t-il avec euphorie, avant de remarquer les coulées sanglantes qui s'échappaient du nez de son camarade. Amos ! Tu saignes !
— Ne te préoccupe pas de moi ! ordonna soudainement ce dernier en s'essuyant d'un énième revers de main. L'opération reprend ! On doit protéger Eren jusqu'à ce qu'il atteigne la porte !
Armin déglutit d'inquiétude pour récupérer son sang-froid, il acquiesça avant de filer vers Ian, Amos le suivit après avoir violemment expiré du nez pour évacuer son surplus d'hémoglobine.
— Mikasa ! cria-t-il en atteignant le toit sur lequel l'orientale et leur supérieur se trouvaient.
— Armin ! Amos, tu…
— … saignes, acheva ce dernier, je sais ! Ça n'importe pas !
— Eren a reprit le contrôle ! renchérit le petit blond. Si on arrive à le couvrir jusqu'à la porte, la victoire est à nous !
Ian enregistra l'information en affichant une mine grave, il s'écoula quelques secondes avant que le soldat de l'Humanité qu'il était ne prenne conscience de l'opportunité qui s'offrait à eux.
— Défendez-le ! hurla-t-il à ses troupes. Même si on doit en mourir, on doit protéger Eren jusqu'à la porte ! Ne laissez aucun titan l'approcher !
Une fois ses escouades mises au parfum, il se tourna vers le trio de cadets.
Il se tourna vers les trois cadets. Vous trois, allez ! Je vous veux tout de suite aux côtés d'Eren ! Sautez, soldats ! C'est un ordre !
— Oui, monsieur ! répondirent-ils en choeur.
Ian s'avança pour attaquer les cinq Titans qui se dirigeaient vers Eren, mais il se figea quand il aperçu les trois soldats qui couraient au sol derrière leurs cibles.
— Équipe Mitabi, que faites-vous ? hurla-t-il paniqué.
Avaient-ils succombé à un accès de folie collective ?
— Ces fils de putes ont perdu tout intérêt pour nous ! cria Mitabi en retour. Nous devons nous approcher suffisamment pour attirer leur attention.
— Hé, par ici espèce d'énormes connards ! hurla un soldat à côté de lui.
— Sinon on vous enfonce nos lames dans vos culs puants !
Le stratagème fonctionna partiellement, les deux Titans les plus proches se retournèrent et se mirent à les poursuivre.
— Courez ! hurla Mitabi en faisant demi-tour tout en ravalant sa terreur. Courez vers les bâtiments !
— Ils sont fous, commenta Armin horrifié. C'est du suicide. S'ils sont acculés quelque part, ils ne pourront rien faire !
— C'est l'idée, dit calmement Amos, le but n'est pas de les affronter, mais de dégager la voie pour Eren.
— Allons-y, interrompit Ian mélancolique. Tout le monde suit l'équipe Mitabi !
— Allez ! On doit y aller nous aussi, dit l'orientale avant de sauter.
L'équipe d'Ian réussit à éloigner les trois Titans restants d'Eren, qui avait maintenant une voie relativement libre vers le trou.
— Armin ! hurla Amos alors que Mikasa et lui ouvraient la marche devant le titan Rebelle. Reste près de nous !
— D'accord !
La course effrénée du trio se déroula sans encombres pour la grande majorité du trajet, le plus difficile fut d'assister aux sacrifices atroces des soldats de la Garnison. Amos ne put détourner le regard, il devait rester aux aguets pour le cas où l'une des créatures ne décident d'abandonner les appâts pour se diriger vers eux. Ce fut dans des moments comme celui-ci qu'il regrettait presque d'avoir une mémoire infaillible, il se souviendrai de chaque détail de cette hécatombe.
L'équipe d'Ian fut rapidement dévorée par les autres Titans, dont Ian lui-même, qui parvint à expulser un de ses camarades de la main d'un monstre en échange de sa propre vie.
Le cri d'angoisse d'Armin ramena ses yeux d'émeraude vers la porte, et ceux-ci s'écarquillèrent d'exaspération et de terreur.
Deux titans de plus venaient de profiter de l'ouverture pour s'introduire dans la ville, un de huit mètres et l'autre de dix mètres.
— Je m'en occupe ! hurla Amos alors qu'il pleurait des larmes de sang.
Mikasa le vit, mais n'eut pas le temps de l'arrêter. Nox se retourna pour se projeter sur le pectoral du titan rebelle, avant de prendre appui sur le muscle et de sacrifier 60% de son gaz pour effectuer un salto arrière qui le fit passer au-dessus du dix mètres pour atteindre le mur. Là, il s'agrippa à la nuque de ce dernier, et couru à l'horizontal tout en continuant de relâcher du gaz, avant de se projeter sur une trajectoire parfaite qui traversait les points faibles des deux créatures, il les trancha tous les deux avant de s'étaler lamentablement sur le sol.
— Amos ! cria Armin horrifié.
Le concerné rouvrit les yeux, juste à temps pour voir une main géante s'approcher de lui.
Apparement son entaille sur le huit mètres ne fut pas suffisamment profonde.
—« Erreur de calcul, » commenta-t-il sobrement alors que du sang continuait de couler de ses yeux et de son nez.
Mikasa réagit au quart de tour, elle profita du fait que le titan avait la tête tournée vers son rival pour se projeter directement sur sa nuque et l'abattre d'un seul coup. Nox regarda la créature tomber, et l'orientale qui se tenait debout sur la blessure mortelle qu'elle lui avait infligée.
Son visage exprimait une inquiétude grandissante lorsqu'elle aperçu sa figure couverte de sang, elle se précipita vers lui.
— Il faut qu'on s'en aille ! On est sur le chemin d'Eren !
Il répondit d'un hochement de tête, et tenta de se relever, avant de tomber à genoux en haletant.
— Merde… cracha-t-il outré par sa faiblesse.
Un flot de sang jaillissait de ses narines et de ses yeux.
Voyant qu'il était à bout, Mikasa le ramassa telle une jeune mariée, et s'agrippa au Mur pour les dégager de la route du Titan Rebelle.
Ce dernier effectua encore quelques pas, avant de pousser un rugissement de rage et d'encastrer son énorme rocher dans la porte de Trost, la scellant à tout jamais.
Perché sur le mur dans les bras de Mikasa, Amos avait du mal à en croire ses yeux ensanglantés, il avait la bouche ouverte et l'expression effarée.
— On l'a fait… Putain… On l'a fait… La première victoire de l'Humanité contre les titans…
Une migraine effroyable s'empara soudainement sur sa cervelle, il plaqua une main sur son front et poussa un grognement de douleur.
— Qu'est-ce qui t'arrive ? s'inquiéta l'orientale en le voyant souffrir.
— Surplus d'activité cérébrale, marmonna-t-il, ça fait des lustres que je ne me suis pas autant donné à fond.
Il secoua la tête.
— C'est pas important, il faut sortir Eren de la nuque de son titan et vite grimper sur le sommet du mur.
Cette phrase ramena brutalement la jeune fille à la réalité, elle se décrocha de la paroi et atterri derrière le Rebelle.
Armin les avait devancé, et tentait de tirer son meilleur ami hors de son immense corps.
— Armin ?! Comment va Eren ?!
— Il est incroyablement brulant ! glapit ce dernier sans pour autant s'arrêter de tirer. Il faut qu'on se dépêche de monter sur le mur.
Amos mit une petite tape dans le dos de l'orientale.
— Pose moi par terre.
— Tu es sûr ?
— Il le faut.
Une fois sur pieds, les deux adolescents activèrent leurs équipements TDM pour rejoindre Armin qui s'entêtait à tirer de toutes ses forces.
— Une partie de son corps à fusionné, expliqua-t-il à mi-voix.
— Il faut trancher, décida Amos en tirant une nouvelle lame.
Mikasa écarquilla les yeux de terreur.
— Attends !
Trop tard, un coup d'épée bien placé libéra Eren de ses entraves organiques, mais lui et Armin furent emportés par l'élan de ce dernier, et il chutèrent sur le pied droit du corps en décomposition, à la merci des deux titans qui s'étaient approchés pendant tout ce temps.
— Merde, jura Nox en tirant une autre lame tandis que Mikasa se précipitait à leur rescousse.
C'est alors qu'un homme descendit en piqué du haut du mur, et abattit l'une des créatures avant de rectifier sa trajectoire et de tuer l'autre, l'action s'était passée en un éclair, trop vite pour que qui ce soit ne comprenne ce qui venait de se produire.
— Mi… kasa ? demanda Armin avant que la concernée n'atterrisse à ses côtés suivie par Amos, qui savait très bien de qui il s'agissait.
— Hé les morveux ! appela le Capitaine Levi en se retournant pour regarder le corps du Titan Rebelle. Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?
— Ça vous dérange si on cause au sommet du Mur ? demanda Amos en s'efforçant de parler fort. On est tous un peu claqués.
Le soldat le plus fort de l'humanité grimaça de mécontentement, mais acquiesça lorsqu'il vit l'état du visage de son interlocuteur. Il s'approcha pour le saisir tandis que Mikasa saisissait Eren, et en une douzaine de secondes, ils rejoignirent la sécurité des hauteurs. Les deux blessés furent allongés l'un à côté de l'autre, mais le métamorphe avait perdu connaissance.
Amos remarqua alors les dizaines de soldats qui se tenaient au sommet de la muraille, et regardaient avec des expressions effarées la multitude de titans qui infestait la ville de Trost.
— Le Mur a été rebouché ! annonça un homme blond en levant son épée. Allez secourir les forces de la Garnison !
— Oui Monsieur !
Ni une ni deux, les éclaireurs du Bataillon d'exploration sautèrent dans le vide pour aider leurs collègues. Pendant ce temps, leur chef s'approcha des rescapés.
— Bonjour cadets, je suis le Major Erwin Smith.
Les recrues encore conscientes effectuèrent un salut, Amos se contenta de l'effectuer depuis le sol.
— Quelqu'un peut-il me faire un rapport ?
Armin se dévoua pour cette tâche, résumer la situation apocalyptique à laquelle ils avaient réchappé dura dix bonnes minutes. Durant lesquelles les éclaireurs restés sur le Mur fixèrent Eren avec méfiance et terreur lorsque son étonnante capacité fut révélée, en voyant cela, Mikasa se tint immédiatement entre son frère adoptif et les soldats, menaçant ces derniers d'un regard promettant mille tourments s'ils touchaient à un seul de ses cheveux.
Pendant ce temps, Amos nettoya sa figure ensanglantée à l'aide de l'outre qui lui avait été donné par un des éclaireurs.
— Je vois, dit le Major une fois le rapport d'Armin terminé, et j'imagine que vous répondez tous les trois de la loyauté d'Eren Jaeger ?
— Oui, dirent les cadets en choeur.
— Très interessant, commenta-t-il avec un sourire en regardant Amos.
Ce dernier préféra regarder ailleurs.
— Major ? appela un de ses hommes. Que devons-nous faire d'eux ?
Erwin prit quelques secondes pour réfléchir, il fixa chacune des jeunes recrues droit dans les yeux, avant de s'attarder sur Eren.
— Il semblerait que l'Humanité doive sa première victoire à l'étrange pouvoir de ce cadet, à ce titre il a au moins mérité le bénéfice du doute.
Les épaules du petit blond se relaxèrent, mais son amie orientale ne relâcha pas sa garde pour autant.
— Cependant, ajouta le Major en regardant derrière les recrues, je crains que tout le monde ne partage pas mon avis.
En entendant cela, ces dernières tournèrent la tête, et découvrir une quinzaine de soldats des Brigades Spéciales qui couraient vers eux, avant de s'arrêter et de braquer leurs fusils sur Eren.
Le sang de Mikasa ne fit qu'un tour, et elle sauta par-dessus les blessés pour se tenir entre eux et leurs nouveaux assaillants.
— Ne tirez pas ! hurla soudainement Amos en se redressant. Abaissez vos armes ! C'est un ordre !
Armin fixa son ami comme s'il venait de lui pousser une deuxième tête, qui était-il pour donner des ordres à la branche militaire qui ne répondait qu'au Roi ?
— M-messire, balbutia l'un des brigadiers, éloignez-vous de ce monstre !
— « Messire ? »songea Armin stupéfait.
— Silence ! tonna ledit Messire en sentant un pic d'adrénaline envahir son corps. Abaissez vos fusils avant que je ne fasses planter chacune de vos têtes sur des piques !
La menace fit immédiatement son effet, et les soldats obéirent sans pour autant décrisper leurs doigts.
— Armin ? Mikasa ? Aidez-moi à tenir debout s'il vous plait.
Le petit blond se précipita auprès de son ami, passa un de ses bras autour de sa nuque, et l'aida à se relever, après un instant d'hésitation, l'orientale choisit de l'imiter.
— Écoutez-moi très attentivement ! aboya Amos une fois de retour sur ses pieds. Eren Jaeger, Mikasa Ackerman et Armin Arlet sont désormais sous la protection de la Maison Hannibal ! Si vous touchez à un seul de leurs cheveux, vous êtes des hommes morts ! Ai-je été clair ?!
— O-oui Messire, glapit le leader des brigadiers en jetant un regard écoeuré à l'adresse d'Eren.
Amos poussa un soupir pour évacuer sa fatigue, mais il reprit du poil de la bête en inspirant.
— J'ai parfaitement conscience du fait que le cadet Jaeger n'échappera pas à la prison en attendant son procès.
Mikasa l'incendia instantanément du regard.
— Cependant, continua-t-il en l'ignorant royalement, les exploits qu'il a réalisé aujourd'hui méritent au moins qu'il soit traité en être humain présumé innocent. Aussi, je veux qu'il soit nourri trois fois par jour et lavé tous les jours. De plus…
Il jeta un coup d'oeil derrière lui.
— … et si vous êtes d'accord, Major Erwin, je souhaiterai que ce soit les éclaireurs du Bataillon d'Exploration qui assurent son escorte jusqu'à sa cellule.
— Messire ! s'exclama l'officier. Ce n'est pas à vous de prendre cette décision !
— Il peut se transformer en titan, répliqua Amos en haussant un sourcil exaspéré, lequel d'entre vous peut abattre un titan ?
Aucun ne répondit à cela.
— C'est ce que je pensais.
— L'une de mes meilleurs escouades se chargera du transport du cadet Jaeger jusqu'à la capitale, annonça Erwin en faisant signe à l'un de ses hommes, je me chargerai moi-même d'informer sa Majesté de la situation.
Amos adressa un hochement de tête reconnaissant à l'adresse du Major, tandis qu'un éclaireur s'approchait pour ramasser Eren.
Mikasa voulu l'en empêcher, elle refusait qu'il s'éloigne d'elle, mais Amos la retint fermement.
— Laisse-les faire, lui dit-il tout bas, pour garantir sa sécurité nous devons nous montrer coopératif et suivre la procédure afin de prouver qu'il est un allié de l'Humanité. Je ne les laisserai pas lui faire de mal, je te le promets. S'il te plait Mikasa, fais-moi confiance, ne leur donne pas un prétexte pour l'exécuter sur place.
L'orientale serra les dents, elle regarda avec anxiété son petit frère adoptif être emporté loin d'elle, une fois de plus.
— Mikasa, l'interpella Armin, écoute-le s'il te plait.
Le visage de la jeune fille se crispa de frustration, mais elle finit par acquiescer et détourna le regard.
Erwin s'approcha alors du trio de cadets, et posa une main sur l'épaule du plus fatiguée d'entre eux.
— Je vous remercie, Lord Amos, vous avez rendu un fier service à l'Humanité aujourd'hui.
Ce dernier ignora les regards curieux de ses amis pour répondre avec un faible sourire :
— Moi aussi j'ai offert mon coeur, Major Erwin.
Le leader du Bataillon d'Exploration lui rendit son sourire, avant de s'en aller avec Eren et ses subordonnés, Mikasa les regarda partir avec regret.
— Faites affréter une diligence pour le Manoir Hannibal de Mitras, ordonna-t-il aux brigadiers en sentant ses dernières forces l'abandonner, les cadets Arlet et Ackerman sont mes invités et seront traités comme tels.
L'officier des Brigades Spéciales acquiesça à contrecoeur, avant d'aboyer à ses hommes d'exécuter les ordres de leur Lord qui saluèrent avant de partir en courant.
— Lord Amos ? questionna Armin en le fixant d'un regard curieux.
Le concerné poussa un soupir empli de tristesse.
— Je suis désolé pour les mensonges, dit-il avec regrets, mais exposer mon identité c'était courir le risque de laisser la porte ouverte aux assassins et aux kidnappeurs pendant mes classes.
— Tu n'as pas à t'excuser, lui assura le petit blond, on te doit beaucoup.
— C'est vrai, acquiesça Mikasa, sans toi on serait morts.
Il laissa échapper un sourire de gratitude et se détendit un peu.
— Toi, dit-il à l'adresse d'un des brigadiers, va informer les membres du Top 10 du 104ème corps de cadets que nous allons bien, et que nous les reverrons dans quelques jours une fois cette affaire terminée. Ne mentionnez pas mon statut et ne dites rien d'autre.
— Oui Messire, dit-il avant de s'en aller.
— Tu n'avais pas à nous inviter tu sais ? fit remarquer Armin. On aurait simplement pu rejoindre les autres et les informer nous-mêmes.
L'expression du visage d'Amos s'assombrit brusquement.
— Malheureusement il était nécessaire que je vous invite, grogna-t-il tout bas, vous êtes les amis les plus proches d'Eren, certaines personnes pourraient se servir de vous comme otages pour le faire chanter ou utiliser certaines de vos paroles pour les retourner contre lui lors de son procès.
Armin et Mikasa se figèrent sur place, et échangèrent un regard inquiet.
— Écoutez-moi bien, pressa Amos, ne répondez à aucune question des Brigades Spéciales, s'ils vous demandent pourquoi vous leur dites que c'est parce que je vous l'ai interdit. La politique est un jeu très dangereux, le moindre faux pas pourrait potentiellement vous condamner, vous et Eren. C'est pourquoi je devais vous emmener là où personne ne pourra vous approcher. Laissez-moi régler ça, je vous en supplie, gardez vos bouches fermées et ne faites rien sans mon aval. Promettez-le moi.
— Je promets, répondit Armin avec empressement.
— Je promets, dit Mikasa après un instant d'hésitation, est-ce… est-ce que tu peux vraiment protéger Eren ?
— Oui, et je vais le faire.
L'orientale acquiesça pour le remercier, mais ne se relaxa pas pour autant.
— Mikasa ? Je vais m'évanouir de fatigue dans quatorze secondes. Tu veux bien me porter jusqu'à la diligence s'il te plait ?
La jeune fille hocha la tête, avant de le hisser sur son dos.
— Merci, murmura-t-il alors qu'il reposait sa tête sur son épaule et que ses yeux commençaient à se fermer, tu es un ange.
Elle ne put hélas remonter son écharpe pour cacher son rougissement.
