Le thème était : Les femmes dans le théâtre.

Ne lisant quasiment pas de pièces de théâtre, j'ai pas été avantagé sur ce coup... Mais j'ai réussi à me dépatouiller un peu.

Bonne lecture !


« Les filles, on a un problème » déclara Aqua.

La professeur appelait toujours sa classe de théâtre « les filles ». Ventus et Demyx s'étaient habitués. Ils s'étaient récriés au début, puis avaient fini par comprendre, petit à petit : si leurs camarades féminines subissaient le « ils » neutre à chaque instant de leur existence, bon, ils pouvaient bien leur accorder la majorité, au moins dans cette salle.

« Il faut qu'on choisisse une pièce pour la fin de l'année, soupira la prof. Il faut quelque chose avec un casting féminin. Ce ne sera pas évident. »

Kairi leva la main, mais n'attendit pas qu'on l'autorise à parler.

« Madame ! Pourquoi on est obligées de jouer des filles ? C'est pas grave, on peut choisir une pièce avec des mecs.

-Du travestissement ? Hum… Tu as une idée ? Il faut que ça ait un sens dans la pièce. »

Le visage de la lycéenne se décomposa.

« Un sens ?

-Oui, une raison de faire jouer un personnage masculin par une actrice.

-On est une majorité de filles dans la classe, c'est suffisant comme raison.

-Non. Les spectateurs chercheront une autre justification. Ils ne vont pas comprendre. »

Les élèves s'entreregardèrent, indignées sans parvenir, à leur jeune âge, à faire comprendre à leur professeur le peu de cas qu'elles faisaient du genre des personnages.

Celle-ci, devant leur air perdu, expliqua :

« Par exemple, en 1896, Sarah Bernhardt a interprété le personnage de Lorenzo dans Lorenzaccio, parce que la pièce a tout un thème concernant la virilité du personnage. C'était bien pensé, mais il faut une justification.

-Madame, intervint Xion. La justification, ça peut pas être que le genre des personnages de la pièce est pas important pour l'histoire ?

-Euh…

-Sinon on peut jouer ça, dit Olette. Lorenzaccio. Y a des personnages féminins, et Lorenzo. On laisse Philippe et Alexandre à Ventus et Demyx, et on supprime les autres hommes.

-Bof hein, les persos féminins, intervint Larxène. Regarde, Louise, elle a une seule réplique, c'est 'Je meurs !' et la didascalie d'après c'est 'Elle meurt'. Sérieusement.

-J'avoue, dans Lorenzaccio les filles c'est soit des mères soit des godiches. »

Naminé, sur son téléphone, releva soudain la tête.

« Y a Antigone, avec des persos féminins qui ne sont pas des godiches.

-Je vais être chiante, argua Larxène, mais Antigone, même si elle est badass, l'histoire tourne toujours autour des mecs. Oui, mes frères par-ci, mon père par-là. Ça va cinq minutes. »

Aqua, qui avait suivi leur échange avec humilité, reprit la parole :

« D'accord. Je vois ce que vous voulez dire. Vous savez quoi ? Je vous suis. Jouez ce que vous voulez. »

Décidément, ses élèves la faisaient se remettre en question chaque jour, et cela ne lui déplaisait pas. Au contraire, elle éprouvait beaucoup de fierté en les regardant s'affirmer. Elle espérait que le monde était préparé à cette nouvelle génération de filles, parce qu'elles ne s'en laissaient pas conter !


Et voilà !

Lisez Lorenzaccio, même si je n'en fais pas un super portrait ici. C'est très gay et très dramatique. C'est un de mes livres préférés du monde entier alors que j'aime pas le théâtre, c'est vous dire.