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Harry se sentit d'excellente forme après s'être réveillé le jour suivant vers midi. Il avait survécu à sa première semaine en tant que professeur, et ce n'était pas grâce à Malfoy. Comme il n'avait pas de projets pour son premier week-end à Poudlard, il décida de rendre visite à ses amis en commençant par Hagrid.

Le temps était semblable à la veille et Harry vit qu'Hagrid était à l'extérieur et jardinait. Les citrouilles commençaient à devenir orange mais beaucoup d'entre elles n'avaient pas encore atteint la taille d'un souafle.

« Il semblerait que tu auras une belle récolte cette année, Hagrid », s'exclama Harry avec un sourire pendant qu'il s'approchait de la barrière.

« Harry, mon garçon ! Viens à l'intérieur pour prendre le thé ! »

Hagrid sortit de son jardin et entra dans la cabane avec Harry. Elle avait été reconstruite après la guerre, mais elle semblait être la même, et des cadeaux probablement offerts par Madame Maxime y ajoutaient une touche féminine. A sa connaissance, il se passait toujours quelques chose entre elle et Hagrid, bien que le sérieux de la relation variât vraisemblablement d'une semaine à l'autre.

Hagrid jeta des feuilles mystérieuses dans une théière et ajouta de l'eau qui était dans un seau avant de la placer au-dessus d'une flamme. Harry se fit une note mentale : ne pas boire ce thé.

« Comment s'est passée ta première semaine, Harry mon garçon ? »

« Bien, pour une bonne partie de la semaine », admit Harry. « J'ai eu quelques soucis avec Malfoy. »

« Un biscuit ? » demanda Hagrid et sur une étagère il prit une corbeille contenant des sortes de morceaux de charbon pour la placer devant Harry.

« Euh, non merci. »

Hagrid en choisit un et prit une bouchée si croquante que ses dents grincèrent.

« Malfoy ? » fit-il pendant que sa mâchoire travaillait.

Harry acquiesça. « Oui, il n'aime pas être un fantôme. »

Hagrid grogna de dérision et cracha quelques miettes sur la table.

« Bien sûr qu'il n'aime pas ça. Cela prend des années pour accepter le fait de ne plus être un être humain et de ne pas pouvoir revenir. »

« Cela semble compliqué. La nuit dernière, Malfoy a mentionné qu'il allait rendre visite aux sombrals. Sais-tu pourquoi il ferait cela ? »

Hagrid acquiesça. « Oui. Les fantômes aiment les sombrals. Je pense que c'est parce que les sombrals existent partiellement du côté astral, comme les fantômes, c'est pourquoi les humains ne peuvent les voir tant qu'ils n'ont pas été confrontés à la mort. Certains personnes disent que cela réveille une partie du cerveau. » Hagrid tapota son énorme doigt contre son front. « Que cela permet de les voir. »

Harry supposa que cela avait du sens, mais quelque chose lui titillait l'esprit. Malfoy n'avait jamais particulièrement aimé les animaux, et il avait méprisé l'existence même des sombrals quand il était innocent et non marqué par la mort.

Il détourna la discussion sur l'arrivée des festivités pour Halloween et ils discutèrent pendant un temps. Sagement, Harry signala son départ avant qu'Hagrid ne pût suggérer de rester pour le repas. Il n'y avait aucun signe de Malfoy tandis qu'il retournait à sa chambre et il se vêtit de vêtements chauds et d'une cape de voyage. Même s'il faisait beau en Ecosse, rien ne présageait que le temps était pareil à Londres.

Il voyagea par cheminette jusqu'au Chaudron Baveur et il conversa joyeusement avec le patron tout en mangeant une soupe copieuse et des croutons de pain. Heureusement le sujet de conversation tournait autour de ragots sur un officiel du Ministère sans importance dont la femme l'avait mis à la porte après qu'il eut été attrapé dans une affaire suspecte : il s'y était mêlé pour acheter un bijou onéreux à sa maîtresse. Harry y participa de bon cœur, il était heureux de ne plus être sous les feux de la rampe du Ministère et loin des yeux du public.

Harry quitta le Chaudron Baveur et se rendit à Gringotts pour retirer de l'or. Il avait une vague idée où il voulait aller et cela devint clair une fois qu'il eût son argent dans sa poche. A nouveau dans le Chemin de Traverse, il transplana au square Grimmaurd.

La maison était toujours poussiéreuse, sombre et déprimante. Harry s'y rendait rarement, sauf pour être certain que Kreattur avait tout ce dont il avait besoin, majoritairement sous l'insistance d'Hermione. Harry se disait que l'elfe se procurerait ce dont il avait besoin grâce à la magie qu'il possédait, mais Harry remplissait quand même les placards.

Harry vérifia que l'elfe se portait bien, ce dernier se glissa hors de son placard pour demander à Harry s'il avait besoin de quelque chose. Harry lui assura qu'il n'était venu que pour une visite rapide, alors Kreattur disparut dans les profondeurs du placard. Harry se fit une note : venir plus souvent et ainsi éviter que Kreattur ne meurt dans l'ignorance. Cette pensée le déprima : Harry affectionnait l'elfe de maison.

Il vérifia à nouveau les placards, laissa une note à Kreattur pour acheter plus de thé, et se dirigea vers la cheminette. Après la guerre, Harry avait ressenti le besoin de voyager, surtout pour échapper aux médias et à sa célébrité, il avait donc usé de sa célébrité pour que la vieille maison soit connectée à la majorité des réseaux de cheminettes du monde.

Harry choisit le réseau de cheminette de Berlin. Il s'y rendait souvent avec Hermione. La bibliothèque magique de Berlin était réputée pour sa collection de livres, mais Harry était plus intéressé par le côté sordide de la ville, particulièrement par la version allemande de l'Allée des Embrumes.

L'endroit était construit autour d'une étrange rue spiralaire qui se refermait sur elle-même, et semblait attirer les imprudents de plus en plus vers son centre. Les boutiques étaient proches les unes des autres et Harry avait toujours l'impression qu'elles planaient d'une manière menaçante au-dessus de la rue, même dans les jours lumineux et ensoleillés, à l'inverse du déluge qui s'abattait sur Harry aujourd'hui. Il était content d'avoir une capuche qui protégeait son identité et ses lunettes de la pluie sans avoir à utiliser un sort.

« Merveilleuse journée pour faire du shopping », grommela Harry pour lui-même et il reçut un regard de suspicion d'une femme bossue vêtue d'un foulard avec des motifs colorés et d'une robe orange. Malgré sa tenue vive, elle se faisait discrète et se hâtait de remonter la rue.

Harry s'arrêta pour regarder les vitrines. Il y avait une boutique de tabac qui possédait une collection de pipes en verre délicate qui le firent penser à Dumbledore. Il pensa qu'Hagrid pourrait aimer en avoir une, mais il aurait besoin d'une pipe faite d'une matière plus solide que le verre. S'il lui restait du temps, il s'arrêterait de nouveau pour regarder les pipes artisanales en pierre.

Une boutique de vêtements coquins et de lingeries fit s'interroger Harry sur le but du pantalon en cuir avec les boucles… Il rougit et pressa le pas.

La librairie se démarquait par une simple pancarte en forme de livre qui semblait avoir été accrochée au Moyen-Age et n'avait jamais été remplacée. Les mots étaient à peine visibles et disait seulement Buchhandlung.

Une douce sonnette magique résonna quand Harry ouvrit la porte et un homme aux cheveux gris détourna son attention du livre qu'il lisait pour regarder Harry, grogna et recommença à lire.

Harry se balada à travers les rayons, sourit quand il se souvint de la dernière fois qu'il avait été dans cette boutique avec Hermione. Elle ne pouvait pas simplement passer devant une étagère : elle s'était arrêtée une douzaine de fois quand un titre de livre avait retenu son attention. Ils sont restés dans cette librairie pendant deux heures avant de trouver ce qu'ils cherchaient, et elle était sortie les bras chargés de livres.

Harry était moins curieux. Il scannait le guide de sections affiché en bout de chaque étagère, s'enfonça de plus en plus dans la librairie et finalement, il monta le long d'un escalier branlant en bois jusqu'à ce qu'il trouvât une minuscule partie dédiée au « Fantômes et Créatures Mortes-vivantes ».

Même s'il n'y avait pas beaucoup de livres, ceux disponibles étaient difficiles à déchiffrer. Un était écrit en grec ancien, un autre en latin et un autre en un anglais shakespearien qui donna un mal de tête à Harry juste en l'observant. Un livre semblait prometteur, écrit en français moderne et sous-titré en anglais : L'Au-delà : Pourquoi ne pas le chercher ? Harry le prit avec un livre qu'Hermione aurait désapprouvé en fronçant les sourcils à cause de la couverture du livre : elle était en cuir rouge sang marqué par différents symboles de magie noire. Le livre brillait d'une faible lumière quand Harry jeta un sort pour détecter des défenses. Ce serait une corvée de l'ouvrir mais le tire : Phasmatis Auctoritas semblait valoir l'effort.

Harry les acheta tous les deux pour une poignée de Gallions et garda sa capuche bien enfoncée pour cacher son visage. Le vieil homme jeta à peine un coup d'œil aux livres pendant qu'il les emballait en un paquet et les lia avec une corde pour faciliter le transport. Il lui souhaita une bonne journée d'une voix bourrue et Harry entra de nouveau sous la pluie pour retourner à square Grimmaurd.

Il déposa les livres sur la table de la cuisine et se demanda s'il devait rendre visite à Hermione ou à Ron, mais il se souvint que Ron avait un entrainement sur le terrain le lundi. Lui et Hermione devaient certainement être ensemble ce week-end. Harry grimaça.

« Maître Harry voudra-t-il dîner ? » demanda Kreattur en semblant complètement indifférent à l'idée de le préparer.

« Non, je pense que je vais rendre visite à George, mais peut-être plus tard. »

Harry décida de passer la nuit à square Grimmaurd, puisqu'une nuit sans fantôme lui semblait parfaite, au cas où Malfoy s'était remis de la visite de Narcissa. De plus, rendre visite à George Weasley avait tendance à se terminer dans un pub et il finissait par tituber jusqu'à sa maison, donc il était sage de prévoir le pire.

Cependant, George n'était pas chez lui, il était parti en Ireland à la recherche d'un ingrédient de potion. Laissé seul à lui-même, Harry décida de dîner au Chaudron Baveur, et comme il était au Chemin de Traverse, il passa à Fleury et Bott pour rechercher les quelques livres qu'Hermione lui avait recommandés. Les livres douteux qu'il s'était procuré semblait plus prometteur, mais Hermione avait eu raison une ou deux fois dans le passé, donc Harry serait stupide de passer outre ses suggestions.

Trois des livres étaient faciles à trouver et il les avait dans ses bras quand il passa aux côtés d'une femme et il eut un temps d'arrêt.

« Bonjour, M. Potter. Je ne pensais pas vous rencontrer aussi tôt. »

Harry sourit à Narcissa Malfoy.

« Deux fois en une semaine. »

Il jeta un coup d'œil aux livres dans ses mains. Un livre de fiction, publié récemment par une célèbre auteure sorcière, et un autre livre sur les soins magiques à administrer aux jacinthes. Il désigna le livre de la tête.

« Aimez-vous jardiner ? »

« Oui, cela me détend et m'occupe l'esprit de… certaines choses. »

Ses yeux se rétrécirent quand elle observa les livres que tenait Harry. Elle plissa du front et Harry eut envie de cacher les tomes derrière son dos, mais c'était trop tard.

« Je suis juste curieux », dit-il sans conviction. « Malf… Draco aime me garder éveiller la nuit. Je l'ai supporté jusqu'à maintenant, mais j'aimerais l'empêcher sur le long terme. »

« Je pourrais en discuter avec lui si vous le voulez. » suggéra-t-elle.

Harry secoua la tête. « Même en tant que fantôme, je pense qu'il se moquera de moi en apprenant que je me plains à sa mère. »

Elle fit un sourire. « Vous avez sûrement raison. » Narcissa eut un air songeur. « J'ai quelques livres au Manoir. Je les ai déjà lus après que Draco… Alors, je ne sais pas si cela vous aidera, mais je peux vous les prêter. »

« Je vous remercie. J'apprécie votre geste. »

« Alors je vous les enverrai. »

Sur ces paroles, Narcissa lui salua poliment de la tête, signa son départ et s'en alla. Harry lut attentivement d'autres titres de livres, puis retourna au Chaudron Baveur avant de retourner chez lui et de passer la nuit seul dans son lit en lisant jusqu'à tard dans la nuit.


Malfoy était dans la chambre d'Harry quand ce dernier retourna à Poudlard. Il était allongé sur le haut du lit avec ses bras croisés derrière la tête. Il jeta un coup d'œil aux paquets dans les mains d'Harry, qui avait de nouveau emballé les livres pour faciliter leur transport.

« Il t'a fallu toute une journée pour faire du shopping ? »

Harry émit un son évasif et déposa les livres sur la table, il était heureux qu'ils soient couverts. Il ne voulait pas particulièrement que Malfoy sût qu'il planifiait d'étudier les fantômes, surtout qu'il souhaitait encourager Malfoy à continuer sur n'importe quel chemin existant après la mort pour être débarrassé de sa présence irritante.

« Tu y es sûrement terrible. J'aurais dû venir avec toi. » déclara Malfoy.

« Cela t'arrive-t-il de te rendre à d'autres endroits ? » demanda Harry avec curiosité.

« Quelques fois. D'abord, je suis rentré chez moi. »

Malfoy regarda ailleurs et s'assit, il balançait ses jambes sur les bords du lit et observait le mur opposé. Harry déglutit en se souvenant d'une conversation qu'il avait eu avec Narcissa. Il pouvait bien imaginer à quel point la présence de Malfoy au Manoir avait dû être douloureux.

« Je me rends à Londres pendant les vacances. C'est festif. »

Malfoy se releva comme s'il était honteux d'admettre autant de choses.

« Bref, cela me fait plaisir que tu sois de retour. Je m'ennuyais. »

« Etais-tu à court de personnes à ennuyer ? » interrogea Harry sèchement.

« Tu es ma personne favorite à ennuyer, Potter, tu le sais bien. » Son ton était mordant, mais Harry percevait la vérité sous-entendue.

« Donc, je t'ai manqué », prononça-t-il avec un grand sourire.

Malfoy se retourna pour lui jeter un regard noir. « Les personnes ne manquent pas aux fantômes. »

Harry roula des yeux face au mensonge flagrant, enleva sa cape et posa de côté le vêtement pour qu'il soit nettoyé par les elfes de maison. Même si Malfoy l'agaçait, il préférait Poudlard au vide glacial de square Grimmaurd.

Malfoy plana près de son épaule, le regarda trier ses chaussettes. L'une d'elles semblait toujours se perdre sous son lit ou dans une dimension alternative où les chaussettes perdues se rassemblaient.

« Une de tes chaussettes est coincée entre le matelas et la colonne du lit », lui fit remarquer Malfoy.

Harry la récupéra et décida de ne faire pas de remarques sur la serviabilité de Malfoy sauf s'il voulait qu'il ne le soit plus jamais.

« Pourquoi les sombrals ? » s'enquit Harry soudainement en se tournant pour regarder le fantôme.

Les yeux de Malfoy s'agrandirent et il s'éloigna en flottant avant de détourner le regard. Il se plaça près de la fenêtre et regarda la cour où il commençait à pleuvoir. Le temps à Berlin semblait avoir suivi Harry jusqu'ici.

« Parce que je peux les toucher. »

« Parce que tu peux les toucher… tu veux dire que tu peux les sentir ? »

Malfoy acquiesça sans le regarder. « Oui, c'est bizarre. Ils semblent être plus solides dans la zone astrale. Je suppose que c'est la raison pour laquelle les gens ne peuvent pas les voir, ils sont réellement en partie fantôme. Je pense toujours qu'ils sont un peu laids, mais c'est agréable de toucher quelque chose et d'avoir de la matière sous les doigts. »

Harry l'observa avec de la pitié dans les yeux, mais il détourna le regard quand Malfoy se tourna vers lui.

« Oublions cela. Mimi m'a demandé quand tu planifiais de te doucher. »

Harry lui jeta un regard si empli d'horreur que Malfoy renversa sa tête et rigola.