Interlude 3:

Sept ans plus tôt.

Novembre 1997 seconde partie

Potter fila devant lui et Draco le suivit du mieux qu'il put. Comme toujours le vol du gryffondor était rapide, précis mais avec assez de folie pour rester totalement imprévisible.

C'était un peu le paradoxe du balafré. Draco connaissait sa façon de penser, savait où et comment le blesser et le faire réagir au quart de tour mais dès qu'il était sur un balai, Draco n'arrivait plus à le comprendre.

Comme si Potter volait trop haut pour lui.

Pourtant Draco aimait voler lui aussi. Saint Potty n'avait pas le monopole du plaisir de se sentir planer au-dessus du monde. Mais il se retrouvait toujours derrière. Le dos de Potter était ce qu'il voyait le plus lors d'un match de Quidditch.

Il était encore à dix mètres de lui quand Potter fit brusquement demi-tour. Draco freina immédiatement et le regarda foncer sur lui, incapable de faire un geste. Puis le balafré s'arrêta à sa hauteur avec une parfaite maîtrise de son vol et eut un sourire en coin terriblement sardonique devant son air surpris. Tout était silencieux dans les tribunes et il sembla à Draco que le temps venait de se suspendre. La seule chose qui continuait sa course avait l'air d'être son coeur et il le faisait bien trop violemment à son goût. Il ne pouvait s'empêcher de penser que la dernière fois qu'il avait été si près de lui, Potter l'avait embrassé. Le gryffondor, son sourire horripilant toujours collé à ses lèvres, tendit la main.

Draco crut qu'il allait la poser sur son épaule mais elle s'arrêta quelque part à côté de sa tempe puis Finnigan hurla que Potter avait attrapé le vif d'or et dans les gradins en bas, les spectateurs crièrent de joie. Le temps avait cessé de s'arrêter. Potter lui montra le vif qui se débattait encore entre ses doigts.

-Encore gagné, dit-il en dégageant ses lunettes adaptées pour le Quidditch en haut de son crâne.

Il avait les yeux verts et brillants de joie : ça empêcha Draco de répondre du tac au tac.

Quand il allait enfin dire quelque chose, Potter fut happé et emmené loin de lui par un Ronald Weasley hilare et les crétins faillirent tous les deux tomber de leur balai. Ce qui ne les fit que rire encore plus. Les autres membres de l'équipe rouge et or s'agglutinèrent aussi autour de leur attrapeur tandis que Draco descendait lentement en direction du terrain.

°O°O°O°

Quand Draco sortit des vestiaires, Pansy l'attendait mais le soleil, lui, avait préféré se cacher derrière les nuages.

-Draco, c'est totalement injuste ! commença directement Pansy. Potter n'avait pas le soleil dans les yeux lui ! De plus, il n'a même pas...

-Arrête, murmura Draco en remontant son sac sur son épaule, il est meilleur. Voilà tout.

Pansy le regarda avec surprise puis inquiétude. C'était sûr que ce n'était pas habituel pour elle de l'entendre dire que Potter était meilleur que lui. Draco se demandait ce qu'elle faisait là, à l'attendre malgré tout. Crabbe et Goyle ne se donnaient plus cette peine depuis au moins la mi-octobre. Il eut un sourire amer et regarda plus attentivement sa camarade de classe.

Pansy était charmante, pas une de ces beautés pures comme l'était sa mère, mais charmante tout de même avec ses yeux sombres et son nez aquilin. Elle était maligne surtout, elle pourrait séduire tous les Blaise Zabini de la terre, alors pourquoi s'obstinait-elle avec Draco Malfoy - celui qui avait perdu son trône - ? Ça restait un mystère pour le serpentard.

Pansy était tombée amoureuse de lui dès qu'elle l'avait vu et cet amour n'avait jamais vacillé. C'était épatant et totalement infructueux. L'attachement visible de la jeune fille avait d'abord flatté son ego avant de le lasser, surtout en quatrième année où elle l'avait embrassé par surprise. Ce seul baiser n'avait pas été bien terrible, il s'en était rendu compte à l'époque et à présent qu'il avait un point de comparaison, il préférait même ne plus y penser.

Il trouvait que cet amour la desservait. A croire que les sentiments faisaient perdre toute rationalité aux gens. Pansy avait tout intérêt à lécher les bottes de Zabini à présent, mais non, c'était lui qu'elle attendait comme la plus fidèle des chiennes.

Lui, dont le capitaine de leur équipe de Quidditch avait accepté avec un empressement certain la démission, quinze minutes plus tôt. C'était presque risible.

-Tu sais, dit-il en montrant son sac bien trop gros pour de simples habits de rechange, je ne fais plus partie de l'équipe. J'arrête.

-Mais...tu adores voler.

-Ce jeu me lasse.

C'était vrai. Potter avait gagné et il n'avait même pas été dépité. Le Quidditch était devenu une gêne, il prenait de son précieux temps. Il avait joué ce match parce qu'il savait que Potter voulait qu'il le joue mais c'était son dernier.

-Draco, - la voix de Pansy lui sembla minuscule - je m'inquiète pour toi. Les autres chuchotent derrière ton dos et Blaise se considère à présent comme le chef, voire Dieu en personne, pour ce que j'en sais... Il faut que tu fasses quelque chose pour que tout redevienne comme avant.

Draco eut un sourire. Si elle savait que c'était justement ce qu'il s'obstinait à faire, que dirait-elle alors ?

Qu'il était cinglé, c'était ce qu'elle dirait et son amour à toute épreuve, pas sûr qu'il se relèverait après ça.

-Je laisse tous les Serpentard à Blaise. Toi comprise, dit-il finalement. Ça aussi, ça m'a lassé.

Il la planta là, continuant son chemin.

Cependant, il était presque arrivé à la hauteur du terrain quand il s'arrêta une seconde fois, devenant très pâle.

Près des gradins des Serdaigle, un mec était penché sur Potter - qui devait être encore plein de sueur puisqu'il portait toujours ses habits de Quidditch - pour lui parler et il lui arracha un rire.

En entendant ce rire chaud, Draco fut pris de l'envie irrésistible de jeter un sort au balai de Potter qui gisait aux pieds des deux garçons, pour qu'il se fracasse sur la tête de son nouvel ami.

Draco resta cependant sage et la seconde d'après le type s'était penché encore plus et avait embrassé le balafré.

Potter avait attrapé le col de sa robe pour accentuer le baiser. Le serpentard fut incapable de faire un geste et sentit même son sac glisser un peu de son épaule. Il se disait qu'il devait se bouger de là mais Potter embrassait un homme et la seule chose qu'il parvenait à faire, c'était de se demander si Potter et lui avaient l'air aussi débauchés quelques jours plus tôt dans le couloir.

Quand Potter se recula enfin, il leva la tête et s'aperçut de la présence de Draco à quelques mètres de là. Il lui fit un salut narquois de la main, qui le fit sursauter comme un enfant prit en faute.

Le mec qui avait embrassé le gryffondor se retourna vers lui et Draco sentit son cerveau s'emplir d'acide quand Blaise Zabini lui adressa un sourire froid.

°O°O°O°

De rage, Draco jeta sa fiole qui alla s'écraser contre un mur. D'une main tremblante, il remit en place ses cheveux qui étaient tombés sur son front en sueur.

Il s'humecta les lèvres et le sel de ses efforts se déposa sur sa langue.

Il avait encore loupé sa potion mais c'était la première fois qu'il réagissait aussi violemment et il ne voulait pas croire que le fait d'avoir vu Potter et Zabini se rouler une pelle en soit la cause.

D'un geste de sa baguette il répara les dégâts qu'il avait causés et essaya de se concentrer sur le livre Bleu.

Depuis la rentrée, il s'échinait à faire la potion qu'il devrait boire pendant l'incantation mais il la ratait tous les jours.

Il lui restait tellement à faire et il piétinait beaucoup trop sur cette phase.

Pour faire revenir Narcissa, il y avait une liste de choses à respecter en tout point. Draco les énuméra mentalement.

Tout d'abord, l'incantation devait avoir lieu le jour de sa mort, donc le 21 avril.

Le mort de remplacement - donc Potter - devait être tué huit heures avant l'incantation.

L'incantateur - donc lui - devait boire une potion qui le mettrait en transe puis commencer l'incantation apprise par coeur - qui n'était pas en anglais évidemment et la moindre faute ou le plus petit balbutiement équivaudrait à sa propre mort -.

Et bien sûr avant ça, il allait devoir tracer sur le sol, avec du sang de licorne, un cercle de Nécromancie dans lequel il placerait le corps de Potter.

A part les ingrédients pour la potion - qu'il avait obtenus cet été en y mettant le prix et en faisant d'autres choses moins recommandables (comme piller la tombe de sa mère) - il n'avait rien de plus. Et même avec tous les composants nécessaires, il n'arrivait pas à réussir la potion. Il avait beau suivre le livre Bleu à la lettre, elle n'avait jamais la couleur désirée.

Avec un soupir las, Draco remit le feu à chauffer sous un nouveau chaudron et reprit tout à zéro.

Sept heures plus tard, il sortit de la salle sur demande, épuisé. Il avait encore une fois sauté l'heure du repas mais avait grignoté un sandwich dans son laboratoire. Il avait encore foiré sa potion mais il était trop fatigué pour tenter de la faire une nouvelle fois.

°O°O°O°

Il était allongé sur son lit, lisant encore le livre Bleu - il avait transformé la couverture en celle de son livre de potion - quand Zabini entra accompagné de Crabbe et Goyle. Draco leur jeta un bref regard avant de reprendre sa lecture. En réalité il avait envie de hurler après Zabini mais il ne savait pas vraiment pourquoi.

-J'aimerais parler à Draco, seul à seul, dit Blaise aux deux autres adolescents, faisant revenir le regard de Draco sur eux. Surveillez la porte. Personne ne doit entrer tant que je n'en aurai pas donné l'ordre. Surtout pas ce traître de Nott.

Crabbe et Goyle acquiescèrent silencieusement et sortirent sans poser de questions. Il avait fallu au moins deux ans à Draco pour arriver à un pareil résultat, cela ne fit que renforcer son irritation envers Zabini.

Draco ferma son livre et le posa doucement sur sa table de chevet avant de s'asseoir sur son lit. Ensuite, il regarda tranquillement Blaise, avec toute la hauteur dont il était capable. Et à ce jeu-là, il restait encore le roi.

En effet, il ne fallut que cinq secondes de ce silence pesant pour que son camarade perde son sang-froid et sorte sa baguette.

La minute d'après, il lançait un sort d'insonorisation dans la chambre avant de pointer sa baguette sur lui. Draco sentit sa gorge devenir sèche. Sa baguette à lui était tranquillement posée sur son bureau. Il n'y avait qu'un mètre entre son lit et sa table de travail mais à cet instant, il lui sembla qu'elle se trouvait à l'autre bout du monde.

-Tu veux me parler ou me tuer ? demanda-t-il finalement.

Il fut étonné, mais ravi, par le ton calme et froid de sa voix.

-Tu m'as vu avec Potter tout à l'heure ! attaqua immédiatement Blaise, refusant de répondre.

-Oui, avec le suceur de queue, répondit Draco sans pouvoir s'empêcher de sourire en coin. Il semblerait qu'il ne soit pas le seul à aimer se faire péter le cul. Dis-moi Blaise, c'est comme ça que tu prends ton pied ? En te faisant labourer par des bites ? Et peu importe la taille, à ce que je vois, étant donné que tu as jeté ton dévolu sur Potter. Je suppose que la sienne est ridiculement petite et que ça te...

-TA GUEULE !

Le sourire de Draco s'agrandit. Blaise avait le visage couleur de cendre à présent et sa baguette tremblait violemment dans sa main. Il dut inspirer lentement pour se reprendre. Il fit presque pitié à Draco.

-Ta gueule ! répéta Blaise cette fois plus calmement. Je ne suis pas une tapette !

-Oh, alors Potter est une fille ! s'exclama Draco. Je l'ignorais, c'est tout bonnement stupéfiant ! Et il a réussi à cacher ça pendant dix-sept ans !

-Arrête de jouer au con, siffla Blaise.

-Alors arrête de pointer ta baguette sur moi. Tu ne m'impressionnes pas Zabini.

Blaise sembla hésiter puis il abaissa sa baguette lentement.

-Je ne suis pas là pour débattre avec toi de ce qui s'est passé près des gradins. Je veux juste m'assurer que tu ne diras rien à personne.

-Pourquoi te ferais-je ce plaisir ? demanda Draco.

-Parce qu'à présent j'ai le pouvoir de faire de ta vie un enfer entre ces murs et tu le sais.

Bien sûr qu'il le savait, c'était évident. Il suffisait que Blaise claque des doigts et les Serpentard en auraient après lui.

Les gens de sa maison n'étaient pas des enfants de choeur et ce n'était bon pour personne quand ils prenaient quelqu'un en grippe.

Pour l'instant, Blaise s'était contenté de le mettre à l'écart et ça convenait parfaitement au blond.

-Je ne suis pas sûr qu'ils t'obéissent tant que ça s'ils apprennent que tu es une tantouze, répliqua tout de même Draco.

Il aurait pu boucler cette conversation depuis longtemps mais il avait envie de s'en prendre à Blaise. Ce mec à qui il avait laissé le contrôle de sa maison, sans rien dire, osait faire des trucs avec Potter et Draco détestait ça. Un pédé dans l'école était bien suffisant.

-Je ne suis pas gay ! cria presque Zabini. Ça m'a dégoûté de faire ça !

Draco sursauta et fixa son camarade de classe avec surprise. Il ne s'attendait pas à un tel éclat. Blaise lui fit une grimace involontaire et commença à faire les cent pas dans la chambre.

-Je n'ai pas eu le choix, dit-il finalement, marchant toujours. Il avait l'air d'avoir oublié que Draco était sensé être, si ce n'est son ennemi, du moins son rival.

-Potter t'a forcé ? demanda Draco perdu.

Même si Potter lui avait volé un baiser une dizaine de jours plus tôt, il n'arrivait pas à l'imaginer en train de forcer quelqu'un. Et puis c'était tout à fait différent, il avait été celui qui avait commencé...

-Non, pas lui ! balaya Blaise. Le week-end dernier, mes parents ont demandé à Dumbledore, si je pouvais rentrer pour assister à l'enterrement d'un vieil oncle. Je ne l'avais jamais vu... et je m'en fichais, mais j'étais heureux de quitter l'école quelques jours et... pourquoi je te raconte ça à toi ?

-Peut-être parce que je t'ai vu mettre ta langue dans la bouche de Potter, rappela Draco.

Ils se toisèrent un instant. Draco crut que Blaise allait s'arrêter là mais il reprit finalement la parole.

-Il y avait un invité chez mes parents, dit-il avec un mélange de peur et d'excitation.

-Qui était-ce ?

Les yeux noirs se fixèrent aux siens, semblant le sonder puis Zabini eut une moue dédaigneuse à son encontre.

-Bref, reprit-il, on m'a demandé de faire quelque chose de spécial et j'exécute juste les ordres.

Draco se leva brusquement, se sentant pâlir.

-Il t'a demandé de séduire Potter ?!

Blaise haussa les épaules mais il était aussi livide que Draco. Le nom de Voldemort flottait entre eux mais personne n'osait le prononcer.

-Il a fallu que ce connard soit gay ! cracha Zabini. Tu ne peux pas comprendre Draco, tu ne sais pas quel effet ça fait d'être embrassé et touché par un mec, mais je t'assure, c'est vraiment dégoûtant.

Draco sentit avec horreur ses joues reprendre des couleurs.

-Je ne suis pas sûr qu'il y ait tant de différence entre embrasser une fille ou un mec, ce n'est qu'une bouche après tout, dit-il rapidement.

-Je t'assure qu'il y en a... Avec Potter c'était rugueux et possessif...il n'y a pas de plaisir tu comprends ? Il ne se passe rien.

« Et que doit-il se passer ? » voulut demander Draco mais il ne dit rien, trop perturbé par la description du baiser de Potter.

-Arrête ça ! dit-il soudainement. Oublie cette mission ! A ce niveau-là, c'est de la prostitution !

Zabini le regarda comme s'il venait de lui pousser une seconde tête et ricana méchamment. Rire qui se coupa rapidement.

-C'est un honneur, dit-il glacial, et tu le sais très bien. Je n'aime pas cette mission mais je ne vais pas tout foirer à cause de ça. Si je réussis à me faire aimer de Potter, d'ici quelques mois, il ne sera plus qu'un tas de cendre. Et une fois que je l'aurai livré au Maître, je serai récompensé au-delà de mes espérances.

-Joue à la pute autant que tu veux mais...

-Je vais avertir ma famille que tu es au courant Malfoy. Je ne pense pas qu'il soit judicieux pour toi de me mettre des bâtons dans les roues. Et puis tu rêves autant que moi de voir Potter mourir. Oh non, tu souhaites sa mort mille fois plus que je ne le ferai jamais ! Oublie notre rivalité en ce qui concerne cette mission. Je suis sûr que le Seigneur des Ténèbres viendra te chercher toi aussi un jour. Après tout, tu es le fils de Lucius. Mais en attendant, ne te mêle pas de ça et ne viens surtout plus jamais me dire de désobéir ! Suis-je assez clair ?

Draco hocha la tête lentement et Blaise eut un sourire supérieur.

-Parfait, dit-il.

Il leva le sort qu'il avait jeté et après une brève vérification de sa tenue, il ouvrit la porte du dortoir et sortit.

Seul dans la pièce, Draco serra les dents, il avait envie de hurler. Ça n'allait pas du tout. Il devait être celui qui approchait Potter, pas Blaise. Blaise allait tout faire foirer. Potter n'allait pas y réfléchir à deux fois s'il devait choisir entre Zabini et lui.

Zabini devait être à son goût, ça c'était sûr. De toute façon, c'était pour cela que Voldemort l'avait choisi, parce que Zabini était beau.

Sauf que Draco n'allait pas baisser les bras. Jamais il n'abandonnerait. Que Blaise aille se faire voir et avec Voldemort s'il le fallait.

Potter allait être à lui.

Il n'était pas le plus beau mais Potter et lui étaient en phase. Mentalement ils étaient déjà un couple. Un couple de haineux mais un couple tout de même. Le physique suivrait...il le fallait.

-Ça va aller maman, murmura-t-il tendrement. Je te sauverai cette fois. Je te le promets.

Comme toujours, seul un silence assourdissant lui répondit et il sentit sa gorge se serrer.

Parfois, comme aujourd'hui, le manque d'elle était presque physiquement douloureux. Il ferma les yeux pour ne pas pleurer et retourna s'allonger sur son lit.

Il s'endormit vite et les talons qui claquaient sur le pavé envahirent ses songes presque au même moment. A chaque pas qu'elle faisait, c'était comme si un clou avec la mention « COUPABLE » gravé dessus s'enfonçait de plus en plus dans le coeur de Draco.

°O°O°O°

Il mit trois jours avant de se retrouver seul avec Potter et encore il avait dû programmer la rencontre. Il avait été obligé de lui envoyer une lettre le matin dans la grande salle, comme s'il était un amoureux éperdu. Sauf que le contenu de la lettre n'avait - fort heureusement - rien à voir avec des mots doux. Il lui donnait juste rendez-vous en salle du duel le soir même.

Draco fut affligé de voir Potter faire lire son mot à ses deux amis et encore plus quand les trois Gryffondor le regardèrent ouvertement. Après un moment où Draco les traitaient mentalement de tous les noms, Potter hocha la tête dans sa direction, donnant son accord.

Niveau discrétion il allait pouvoir repasser, ce crétin ! La moitié de l'école devait se demander à présent pourquoi Potter faisait des signes de tête à son ennemi.

Le soir venu, il était donc dans la salle de duel. Ça lui avait semblé être un bon endroit pour un rendez-vous comme le leur. Après tout, sa relation avec Potter n'était-elle pas une longue succession de duels ?

Potter arriva avec dix-sept minutes de retard, le souffle un peu court et l'air ridiculement satisfait. Son excuse fut : « Désolé, j'étais avec ton pote Zabini. »

-Ce n'est pas mon ami, répondit Draco entre ses dents.

Potter eut l'air encore plus content.

-Bien. Que me veux-tu Malfoy ?

-Que faisais-tu avec lui ? demanda Draco au lieu de répondre.

Il savait qu'il aurait dû faire abstraction de Zabini, mais c'était plus fort que lui. Il voulait savoir où Blaise en était. Potter n'avait pas l'air d'un mec qui vient de baiser mais Draco n'était pas vraiment sûr de savoir à quoi ressemblait quelqu'un qui sortait d'un orgasme.

-Jaloux Malfoy ? ronronna presque Potter.

Ce connard avait l'air de beaucoup s'amuser.

-Je vous ai vu vous embrasser, rappela Draco.

Il avait bien dit à Potter qu'il lui plaisait, il pouvait donc jouer l'amoureux outragé en toute légitimité.

-Et il embrasse mieux que toi, sourit Potter. Ton pote est vraiment...wahou, torride !

-Ce n'est pas mon ami, répéta Draco glacial.

« Et Merlin ! Que j'aimerais pouvoir te tuer tout de suite ! », pensa-t-il fébrilement.

Potter cessa de sourire et le fixa froidement. Dans les yeux verts, on pouvait vraiment voir qu'il le détestait.

-Vous me prenez vraiment pour un con tous les deux, articula-t-il. Dis-moi Malfoy, votre Maître a promis quoi au gagnant ? Un billet gratuit pour la coupe du Monde de Quidditch ? Un joli tatouage sur l'avant-bras ?

-Je t'ai déjà dit que je n'étais pas un Mangemort Et si j'étais toi, que Salazar m'en préserve, je ferais attention à Zabini.

-C'est la meilleure ! On dirait presque que tu t'inquiètes vraiment alors que je suis sûr que tu serais le premier à danser sur mon cadavre si l'occasion se présentait.

-J'ai changé ! Je ne te hais plus ! C'est même tout le contraire, je t'...

-Ta gueule. Ne finis surtout pas cette phrase Malfoy.

La voix du balafré avait claqué, sèche et menaçante.

Il ne plaisantait pas. Draco retint un sourire. Le balafré n'aimait pas les déclarations. C'était amusant.

-Tu m'as évité depuis qu'on s'est embrassé, reprit Draco doucement.

Potter sembla se détendre lui aussi.

-Tu t'attendais à quoi ? Questionna-t-il, visiblement curieux mais en s'approchant assez de lui pour attraper une mèche de ses cheveux blonds et la remettre derrière son oreille. Je t'ai déjà dit que tu ne m'intéressais pas.

Draco fut troublé par ce geste déplacé qui n'avait rien à voir avec le Potter qu'il connaissait. Il prit une brève inspiration et se décida à dire ce pourquoi il avait fait venir le gryffondor ici. Mais c'était plus dur que prévu avec l'autre si près.

-Tu as dit que tu reconsidérerais ta position si j'étais prêt à coucher, dit-il de sa voix traînante. Alors c'est d'accord. Faisons-le.

Pour le coup Potter recula comme si Draco venait de le frapper. Et pour la première fois depuis le début de cette histoire, il sembla perdre de sa superbe.

Draco sentit une joie malsaine l'envahir.

Potter doutait et ça le mènerait à sa perte.

Le serpentard se coula jusqu'à lui et l'attrapa par le col de sa robe. Potter suffoquait presque sous l'embarras à présent.

-Je suis sérieux, murmura-t-il la bouche contre sa pommette droite. Et j'apprends vite...

L'odeur du gryffondor était différente de la dernière fois, ce n'était plus seulement l'odeur de sa peau. Draco se demanda s'il s'était parfumé pour Zabini et détesta cette idée. De colère il mordilla les lèvres de Potter avant de l'embrasser vraiment.

Le baiser lui fut rendu, passionnément et Draco sut qu'ils devaient être indécents tous les deux. Et même s'il n'était pas Zabini à cet instant, il était beau lui aussi. Il le sentait.

Mais Potter ne le saurait jamais parce que Potter fermait les yeux bien trop fort.

°O°O°O°

-Je ne vois pas en quoi ça te dérange !

Weasley était un peu trop acide mais ça ne le concernait pas. Draco se renfonça un peu plus dans l'ombre, écoutant avec délectation la dispute à quelques mètres de là.

-C'est le couvre feu ! siffla Granger. Tu bécoteras ta copine à un autre moment de la journée !

-La nuit c'est mieux. Plus romantique, répondit simplement Weasley.

Et il n'y avait que Granger pour ne pas voir qu'il la mangeait des yeux.

-Tu ne penses donc qu'à ça ? Tu as couché avec elle ?

Il y avait de la haine dans la voix de la sang-de-bourbe.

-C'est toi qui ne penses qu'à ça, apparemment.

Celle du miséreux était neutre.

-Retourne dans ton dortoir ! ordonna alors Granger.

-Tu ne m'enlèves pas de points ?

Toujours la même voix calme, limite envoûtante. Draco commençait s'impatienter. Il se demanda quand est-ce que la belette allait enfin dégager.

-Malfoy ne va pas tarder à venir pour sa ronde, répondit la sang-de-bourbe entre ses dents. Si tu veux vraiment faire perdre des points à ta maison, tu n'as qu'à rester. Je suis sûre qu'il sera ravi de te satisfaire.

C'était assez juste, Draco devait l'admettre mais ce soir il avait autre chose à tête.

Weasley partit enfin après avoir murmuré un truc qui fit rougir Granger jusqu'aux oreilles et qui la laissa immobile, fixant le dos de son ami.

Draco ne voulait surtout pas savoir de quoi il s'agissait.

Quand Granger prit le sens opposé de Ron et passa finalement devant lui sans le voir, Draco sortit lentement sa baguette.

Sa main tremblait un peu. Il hésita puis pensa à sa mère et inspira brièvement.

-Imperium ! siffla-t-il et le sort toucha la sang de bourbe dans le dos.

L'instant d'après il se sentit presque ivre. Un être humain était en son pouvoir et un milliard de possibilités s'offraient à lui. Avec un effort qui lui sembla surhumain, il les balaya toutes mentalement pour n'en garder qu'une. Celle qui comptait.

-Suis moi ! dit-il à son pantin et il s'aperçut qu'il tremblait encore plus qu'avant.

Et Granger le suivit jusqu'à la salle sur demande.

°O°O°O°

C'était le dernier jour de novembre.

Draco se tenait devant le directeur, jouant le jeu du repenti. Il avait laissé tomber beaucoup de choses à l'école mais à présent il se reprenait en main. Il voulait même travailler avec le Garde-Chasse. S'occuper des créatures magiques l'intéressait tellement.

Le vieux fou goba tout.

Grâce à l'habileté de Granger - et à son aide involontaire - la potion était finie. Heureusement car autrement, il aurait dû mettre Snape sous Imperium et c'était une entreprise bien plus périlleuse.

A présent, il lui fallait trouver une licorne...et prendre son sang.

Quant à Potter...

Draco fronça les sourcils. Potter lui avait ri au nez après son baiser dans la salle de duel.

« Tu as encore beaucoup à apprendre ! » avait-il dit en essuyant ses lèvres humides d'un revers de la main. Comme s'il venait de boire quelque chose de dégoûtant. Et il avait rajouté comme pour confirmer ses soupçons : « Tu me dégoûtes ! »

Potter était un connard.

A suivre...