Heyo !
Vraiment désolée pour le retard, mais pour me faire pardonner, je vous poste 3 chapitres d'affilé ! ça aurait pu être pire, pas vrai ?
Bonne lecture !
Le réveil avait été plutôt difficile pour Levi le lendemain. Ce n'est pas qu'il avait trop bu avec Erwin la veille, il savait se tenir, surtout alors qu'il travaillait le lendemain, mais il doutait sérieusement de pouvoir dormir à nouveau correctement un jour. Son rythme de sommeil n'avait jamais été optimal de toute façon, il était plutôt du genre à être mis en déroute par la moindre contrariété. Ça allait probablement -probablement- de paire avec les troubles comportementaux et le stress sous-jacent. Bon, peut-être, mais il n'avait aucune envie d'y réfléchir. Il donnait cour à sa classe de terminale, la séance avait commencé depuis un moment déjà et se déroulait dans un silence religieux. Il ne pouvait entendre que le son de sa voix -il avait un jour entendu quelqu'un se plaindre des professeur en argumentant que ce n'était que des gens qui aimaient s'écouter parler, ce n'était pas faux- et c'était très satisfaisant.
A chaque début d'année il devait revoir les bases, évidemment, deux mois sans avoir ouvert un bouquin, ça ramollissait la cervelle de la plupart de ces crétins, c'était habituel. Il expliquait donc les bases de l'étude de texte. Levi n'était pas du genre à laisser les élèves se remettre dans le bain en commençant doucement, évidemment. Il leur avait donc donné une étude de texte particulièrement délicat et bourré de pièges pour les habituer à les repérer. Il n'y avait qu'en pratiquant qu'on se perfectionnait, pas vrai ? Mais puisqu'il n'était quand même pas un monstre -si- il ne passa que dix minutes à profiter de leurs expressions perplexes, perdues, voir paniquées avant de reprendre la parole.
« Si vous doutez sur un point, n'hésitez pas à me solliciter. » Rappela-t-il, il ne comprenait pas pourquoi personne n'osait lui demander quoi que ce soit, il n'allait quand même pas les bouffer. Une main qui se lève attira son attention.
« Qu'est-ce qu'il y a, Arlert ? » Demanda-t-il au petit blond qui semblait toujours sur le point de faire une syncope à chaque fois qu'il s'adressait à lui.
« Et bien...Je crois que j'aurais besoin de votre aide... »
« Non. » Répliqua immédiatement Levi dont la voix avait claqué comme un fouet.
« M-Mais professeur... »
« La dernière chose dont tu as besoin, c'est de mon aide. Ce que tu devrais demander, en revanche, c'est un bon coup de pied au cul. À chaque fois que tu me fais déplacer, tu me fais perdre mon temps, tu as toujours les bonnes réponses. Ton sens de l'analyse est très bon et tu es direct, c'est tout ce qu'on vous demandera. Alors arrête de pleurnicher et fais-toi confiance, un peu. Continue ton essai et laisse-moi m'occuper de ceux qui ont vraiment besoin de mon assistance. Tu nous feras gagner un temps précieux à tous les deux. » Le coupa-t-il fermement. Un silence de mort vint plomber la pièce tandis que l'adolescent fixait son professeur avec de grands yeux choqués. Armin Arlert était probablement l'un des meilleurs éléments de cette promotion. L'inconvénient résidait dans le fait qu'il ne semblait pas en avoir conscience. C'était clairement un problème de confiance en soi et il avait besoin d'être brusqué pour qu'on le rappelle à l'ordre. Ce que Levi faisait périodiquement. Bien sûr, certains pourraient dire qu'il manquait de tact, mais ceux qui faisaient ça étaient clairement des incapables. Il n'était pas là pour materner qui que ce soit, si on voulait que les choses avancent il fallait les provoquer. Enfin, évidemment, il ne fallait pas compter sur l'assistance de ces abrutis qui avaient tous interrompu leur composition pour le fixer bêtement.
« Si vous attendez que ça se fasse tout seul, on va rester ici un bon moment. » Leur rappela-t-il en roulant des yeux. Tous baissèrent de nouveau le nez vers leurs copies respectives et Levi soupira discrètement. Ils n'étaient pas au bout de leurs peines. Songea-t-il en se reconcentrant sur son ordinateur, passant une jambe par-dessus l'autre.
Le calme régna pendant une bonne demi-heure. Le genre de calme...Un peu louche, pour être honnête. C'était comme quand on avait des chiots ou des enfants en bas âge, c'est quand on ne les entendait plus qu'il fallait s'inquiéter. Levi leva les yeux vers les élèves et les plissa légèrement. Vu d'ici, ils semblaient toujours en train de se tuer à la tâche, mais rien ne pouvait être moins sûr. Donc il se leva d'un geste ample mais silencieux -à l'inverse des lycéens, il n'était évidemment pas du genre à faire racler sa chaise sur le sol, pas plus qu'à se déplacer avec la même grâce qu'un troupeau d'éléphants- pour descendre entre les rangs et jeter un œil sur les copies. Contre toute attente, ils étaient bien tous au travail. Sauf Jean, évidemment, qui avait abandonné depuis bien longtemps. Kirschtein était l'exact opposé d'Armin, c'est-à-dire qu'on n'avait aucune idée de ce qu'il pouvait foutre là. Ce n'était clairement pas un littéraire, il n'aimait ni l'écriture ni la lecture et était à peine capable de s'exprimer en français, alors dans une autre langue il ne fallait même pas en parler. C'était sans doute le coup classique du "Je n'ai aucune idée de ce que je vais foutre de ma vie future alors pourquoi ne pas gâcher trois ans de ma courte existence sur terre pour pouvoir traîner avec d'autres idiots parce que je les aime bien ?". En l'occurrence, ce n'était un secret pour personne que Jean avait intégré la filière littéraire pour suivre son crush, Marco, d'ailleurs il n'y avait bien que ce dernier pour ne pas voir que Kirschtein était raide dingue de lui. Marco Bott était un excellent élève, calme, posé et discipliné, tout le contraire de Jean, donc, à se demander pourquoi ils continuaient à se fréquenter. Étrangement, Jean semblait s'assagir en compagnie de Marco, ce qui laissait supposer que ce dernier avait la force de caractère nécessaire pour contenir le côté rebelle de Jean. Ça ne le rendait pas plus intelligent -rien n'aurait pu le faire- mais au moins, Marco avait le pouvoir de faire fermer sa gueule à ce petit con. Une des raisons pour lesquelles Levi le supportait un peu plus que les autres.
Alors qu'il continuait son inspection, Levi grimaça. Non seulement il lisait des absurdités innommables sur les copies, mais en plus elles étaient toutes bourrées de fautes d'orthographe. Alors quoi ? Il devait donc remonter si loin dans leur éducation qu'il serait contraint de leur apprendre à écrire aussi ? Soudain, alors qu'il avait presque fini son inspection et s'apprêtait à rejoindre son bureau après avoir fait le tour de la salle, son regard passa machinalement sur une des copies et il manqua de faire un arrêt cardiaque tellement la faute qu'il venait de lire était énorme. Il s'arrêta immédiatement, se penchant très légèrement sur le côté, une main sur la hanche, l'autre sous le menton, alors qu'il relisait pour s'assurer que c'était bien réel. Mais oui, c'était bien là, aussi visible pour lui que si ça avait été écrit en rouge pailleté et clignotant. Il prit une inspiration en faisant la moue, il devait intervenir cette fois.
« Jaëger, les si n'aiment pas les rais. » Lâcha-t-il. L'intéressé sursauta, comme si on venait de le réveiller d'un songe, et tourna ses grands yeux vers le professeur, l'observant avec confusion.
« Euh...Quoi ? »
Levi roula des yeux. Pourquoi était-il étonné d'entendre ça ?
« La conjonction "si" exprime déjà une condition, il est inutile de la doubler d'un verbe conjugué au conditionnel. » Précisa-t-il. Eren se figea en continuant à fixer Levi comme deux ronds de flan. Ce dernier aurait aussi bien pu s'exprimer en grec ancien que le résultat aurait été le même : il n'avait rien compris. Les deux hommes s'observèrent pendant ce qui sembla être une éternité comme ça, le professeur laissait le temps de se connecter aux neurones de son élève, des fois qu'il aurait un éclair de génie. Mais il finit par s'agacer en voyant que, de toute évidence, ça n'arriverait jamais.
« Donne-moi ça, espèce de crétin. » Râla-t-il en prenant le stylo des mains d'Eren avant de se pencher au-dessus de sa copie et la corriger.
« Ici, c'est "si l'auteur avait été..." et pas, "si l'auteur aurait été". » Expliqua-t-il d'un ton sec en écrivant sur la feuille. Il leva très légèrement la tête pour croiser le regard d'Eren qui s'était comme statufié sur sa chaise qu'il avait un peu reculée pour laisser de la place à Levi. Il le fixait avec des yeux ronds et les joues écarlates. Levi n'avait pas fait attention à leur proximité jusque-là, trop obnubilé par l'énormité que Jaëger avait pondu, mais effectivement, il pouvait comprendre son trouble. Ils étaient si proches qu'ils auraient pu s'embrasser, si Levi avait fait l'effort de tourner et lever un peu la tête. Bien sûr, ce n'est pas ce qu'il fit. Il se contenta de poser le stylo sur la table et se redresser prestement. Heureusement pour lui, il savait bien mieux masquer ses émotions que ne le faisait Eren, aussi resta-t-il impassible.
« Je ne veux plus jamais voir cette faute où que ce soit, c'est clair ? » Se contenta-t-il de dire, froidement. Eren mit un temps fou à réagir, il fixait toujours Levi avec la même expression qu'un lapin figé devant les phares d'une voiture. Mikasa dut même lui mettre un petit coup de coude dans les côtes pour qu'il reprenne le contrôle de lui-même. Il secoua vivement la tête et se racla la gorge.
« Euh je...Oui monsieur ! » Balbutia-t-il finalement. Levi haussa un sourcil blasé et roula des yeux. Visiblement il devrait se contenter de ça. Aussi haussa-t-il les épaules et reprit son chemin en direction de son bureau. Il aurait adoré s'affaler sur sa chaise et appuyer son front sur la table en poussant un soupir à fendre l'âme, mais à la place il avança d'un pas mesuré et s'assit bien droit, croisant les jambes de nouveau, et ne laissant rien paraître. Il n'osa même pas penser à ce que son cerveau venait de ressentir tant il ne voulait pas que ce soit réel. C'était un bon menteur en règle générale, mais ce qu'il préférait par-dessus tout c'est se mentir à lui-même. C'est donc ce qu'il fit cette fois aussi, pensant plutôt à l'atroce souffrance que représenterait la correction de ces copies vu ce qu'il avait lu jusque-là. Une montagne de travail l'attendait s'il voulait redresser cette bande d'ignorants primates et c'était tant mieux, au moins il n'aurait pas à penser à quoi que ce soir d'autre.
La sonnerie le rappela à l'ordre. Déjà ? Songea-t-il alors qu'il assistait à la cacophonie de raclement de chaises et de bavardages. Il devrait penser à emporter des bouchons d'oreille pour les cas comme ceux-ci, s'était-il dit un jour.
« N'oubliez pas de me rendre vos copies cette fois. » Marmonna-t-il. Il ne parlait jamais très fort, mais, pour une raison ou une autre, ça couvrait le reste du bruit. Ou peut-être que tout le monde lui prêtait une attention particulière, allez savoir. Jean blêmit.
« Attendez, monsieur...Vous voulez dire que c'est noté ? » Demanda-t-il en s'approchant du bureau. Levi le regarda faire, une expression blasée, presque condescendante, sur le visage.
« Pourquoi ? Tu penses que tu aurais fait plus d'efforts si tu savais que tu allais être noté ? »
« Et ben...Je...Euh... »
« Ne t'en fais pas si c'est le cas. Même en faisant tous les efforts du monde tu n'aurais pas eu une meilleure note. Maintenant pose ce torchon » il désigna la feuille que Jean tenait à la main « sur le bureau et fiche-moi le camp. »
Jean grimaça. Il semblait contenir quelque chose. Levi n'avait aucune idée de s'il s'agissait de colère, de gêne, des deux à la fois ou d'autre chose mais il n'en avait rien à faire. Il tapota donc sur le bord du bureau et Kirschtein y posa rageusement sa copie avant de sortir en trombe de la salle. Levi roula des yeux une nouvelle fois -les yeux finiraient par lui tomber des orbites à force de répéter ce mouvement toute les deux minutes. Décidément, ils auraient tous plus de succès en école de théâtre en tant qu'acteurs de drame. Marco se dépêcha de déposer sa feuille et de partir, sans doute dans le but de canaliser son ami, et tout le monde finit par quitter la salle. Levi poussa un soupir de soulagement une fois seul, il rassembla ses affaires et les évaluations puis quitta la classe à son tour après s'être assuré qu'elle était dans un état convenable et qu'il avait verrouillé correctement la porte. Ce n'est pas parce qu'il n'était pas chez lui qu'il n'était pas troublé.
