Salut !

Ceci n'est pas l'OS parallèle de l'OS précédent. Pardon. Mais ça viendra !

J'ai écris ça durant le Camp Nano sur une suggestion de Ya, qui voulait voir un SaïDem basé sur les stèles de Preuve d'Existence ? Si je me souviens bien de la conversation.

Du coup voilà. Mon premier SaïDem. Qui est ému ?

C'est du canon du coup, spoilers sur KH3, sur KH2 et sur Days.

Le titre est une référence à un passage du livre Le Prieuré de l'Oranger. Grosso modo, c'est une métaphore de la rédemption. Je trouvais que ça allait bien à Saïx.

Niveau de probabilité : ?/5

Et bonne lecture !


Saïx sut dès qu'il vit la stèle se briser.

Comme toutes les autres fois où l'un de ses collègues avait disparu, le constat ne devrait rien lui faire. Un fantôme de moins pour arpenter ces couloirs vides, une main d'œuvre de moins pour compléter Kingdom Hearts, déjà presque achevé.

Durant quelques secondes, il crut qu'un Couloir Obscur s'était ouvert sous ses pieds, commençant de l'engloutir.

Ça ne devrait rien lui faire. Surtout pour lui. Numéro IX. La Mélopée Nocturne. Un titre qui ne lui allait guère, selon Saïx.

Demyx.

Demyx qu'ils avaient envoyé, comme un test, au Porteur de la Keyblade. Demyx l'inutile et l'empoté, le membre dont ils pouvaient se passer en cas de problème. Le pion à sacrifier.

Ces derniers temps, Saïx avait vu beaucoup de Simili disparaître – sans émotion, puisque les Simili n'en connaissaient aucune. Sans s'y attarder.

Alors pourquoi, cette fois-ci, les souvenirs affluaient-ils, intarissables ?


Une moue boudeuse sous des yeux vert d'eau.

« Ça a l'air compliqué. Je crois pas que je sois capable de faire ça, tu veux pas envoyer quelqu'un d'autre ? »

Il se moquait de lui. Saïx ne voyait que cette explication.

« Hors de question. Tu dois accomplir tes missions comme tous les autres membres.

— Et si je me fais éliminer ?

— Si tu te fais éliminer par trois pauvres Sans-Cœurs, Numéro IX, c'est que tu n'étais pas un candidat digne de l'Organisation. Dépêche-toi, avant qu'il n'y ait des sanctions. »

Une lueur joueuse passa sur le visage du fainéant, mais il dut décider de ne pas pousser le bouchon, puisqu'il finit par soupirer.

« Ok, ok ! Ça va ! Mais tu auras ma mort sur la conscience.

— Je peux vivre avec ça » rétorqua Saïx.


« Numéro IX. Tu n'as pas accompli ta mission.

— Hein ? Ben si, j'ai éliminé les Sans-Cœurs ! »

Nonchalamment assis dans l'un des canapés de la Salle Grise, Demyx ne daignait même pas lever les yeux vers son supérieur hiérarchique, ses doigts grattant la corde de son sitar. Pas inquiété le moins du monde – en toute logique, aucun d'eux ne pouvait ressentir d'inquiétude.

D'ailleurs, Saïx ne ressentait aucun agacement envers son poltron de collègue. Pourtant, il devait sévir. Se montrer ferme. Sinon, la construction de Kingdom Hearts n'avancerait pas. Et puis… Et puis, cette attitude stoïque correspondait un peu à sa personnalité d'avant.

« On m'a assuré que les Sans-Cœurs se trouvaient toujours bel et bien dans le périmètre que nous t'avions assigné.

— Quand tu dis "nous", tu parles de toi et Xemnas ? Parce que je vois mal le boss se soucier de qui fait quoi et chapoter tout ça. Tu dis "nous" pour avoir l'air un peu plus officiel, c'est ça ? Tu doutes de ton autorité ? »

Saïx ne pouvait éprouver aucun agacement. Aucun cœur ne battait dans sa poitrine. Pourtant, oh, il se souvenait très bien de ce que ça faisait, en cet instant, d'avoir envie d'étrangler quelqu'un.

« À l'avenir, tâche d'évoquer le nom de notre Supérieur avec un peu plus de respect. Et méfie-toi, Numéro IX. Tu sais que si tu n'accomplis pas tes tâches, nous pouvons te changer en Reflet. »

Retour de la moue boudeuse. Un enfant.

« Oh, Saïx, déjà, je suis pas un numéro ! J'ai un nom, même que c'est Xemnas qui me l'a donné, ça doit être pour s'en servir, nan ? Et je te dis que j'ai éliminé les Sans-Cœurs ! C'est pas ma faute si de nouveaux sont apparus au même exact endroit, si ? »

Bien sûr.

Saïx croisa les bras, le fusilla du regard, et n'insista pas. À entendre le soupir de soulagement que sortit Demyx en le regardant s'éloigner, celui-ci pensait l'histoire terminée.

Pas tout à fait.


« Numéro IX. Cette fois, c'est fini, je vais demander au Supérieur de te transformer en Reflet. »

Le tire-au-flanc, allongé à l'ombre pour se protéger du soleil d'Agrabah, eut l'audace de lever son regard trop clair vers lui et de sourire.

« Ah, Saïx ! Tu devineras jamais ! Je me suis foulé la cheville et -. »

D'instinct, il s'interrompit lorsque l'autre homme croisa les bras. Saïx savait qu'il pouvait avoir l'air menaçant sans trop essayer d'ailleurs. Globalement, il n'en faisait pas grand cas, mais lorsqu'il s'agissait d'intimider Demyx, il en jouait peut-être un tout petit peu.

« Sais-tu ce que j'ai fait, aujourd'hui, Numéro IX ?

— Bah, t'as engueulé de pauvres hères, comme à ton habitude. Tiens d'ailleurs oui, tu fais quoi de tes journées ? Une fois qu'on est tous partis en mission, j'veux dire. Et Xemnas ? Vous passez la journée ensemble ? Oh ! Est-ce que -

Aujourd'hui, recadra le Numéro VII, j'ai suivi un petit importun que je soupçonnais de ne pas accomplir ses objectifs journaliers. De me mentir, en somme. Sais-tu ce que j'ai découvert ?

— Laisse-moi deviner. C'est Axel ? »

Pourquoi faisait-il ça ? Il savait très bien que l'autre parlait de lui. Encore ce rôle de clown ridicule.

Saïx secoua la tête.

« J'ai découvert que ce subordonné se payait ma tête. Purement et simplement. J'ai découvert qu'il passe son temps à jouer de la musique au lieu de se battre, puis qu'il rentre, tous les soirs, et prétend qu'il a bel et bien éliminé ses cibles.

— C'est pas très gentil de la part d'Axel. Il joue de quel instrument ? Du banjo ?

— Numéro IX. Ne me donne pas envie de te faire disparaître sur le champ.

— Oh, ça va… T'es pas très drôle, hein ?

— Toi non plus, mais tu ne sembles pas t'en apercevoir. »

L'imbécile. Il n'y gagnerait qu'à se faire éliminer, s'il ne servait à rien. Pourquoi l'avait-on recruté ? Et comment un si piètre combattant avait-il pu générer un Simili-humain ? Seuls les cœurs les plus puissants le pouvaient, et Saïx ne voyait en Demyx qu'un lâche et un menteur pathologique.

Mystère.

« Dernier avertissement. Si je te surprends encore une fois à te la couler douce, j'en référerai au Supérieur. Nous ne pouvons pas nous encombrer de membres inutiles.

À partir de ce moment, Demyx fit le strict minimum de ce qu'on attendait de lui, ni plus ni moins. Il tentait toujours, bien entendu, de marchander, d'esquiver, mais Saïx faisait preuve d'intransigeance.

Il ne comprenait guère l'attitude de ce Simili. Ne voulait-il pas retrouver son cœur ? Pouvoir reprendre le cours de son existence ? Il ralentissait tout le monde dans la quête de leurs émotions perdue, et ne semblait guère s'en soucier – ne pouvait pas s'en soucier, étant donné son absence de cœur. Le serpent qui se mordait la queue.

Saïx devrait réellement en parler au Supérieur. Histoire de le remplacer par un Simili plus compétent. Trouver un nouveau candidat. Cela dit, il avait déjà suffisamment de choses à gérer comme cela. Tant que Demyx accomplissait son travail, même bâclé, cela ne valait pas le coup de s'en occuper.


Preuve d'existence. Ce jour-là, Saïx s'y rendait afin de voir si la mission au Manoir Oblivion se déroulait selon ses plans.

L'une des stèles s'était fendue, de haut en bas. Il ne s'agissait pas de celle d'Axel. Bien. Très bien.

Peu de membres connaissaient l'existence de cette salle, hormis les tous les premiers – les six apprentis, plus lui et Axel. Pas que son existence soit particulièrement cachée, cependant peu de Simili avaient exploré la Citadelle de fond en comble.

Une tombe pour chacun d'eux, pour leur ancienne vie. Pour se rappeler qu'ils avaient existé, qu'ils existeraient encore. La pierre se fendait dès qu'ils disparaissaient définitivement, qu'ils perdaient toute occasion de récupérer, un jour, un cœur. Il y avait de la place pour treize stèles.

Une main s'abattit sur son épaule.

« Oh, pardon ! Je t'ai fait sursauter ? »

Demyx. Qui d'autre serait assez bête pour se rendre ici, après tout ? Cette salle ne servait strictement à rien.

« Non, Numéro IX.

— Tiens au fait, la peur, c'est une émotion ? Ou un sentiment ? Enfin j'veux dire, on peut la ressentir ou pas, selon toi ?

— Qu'est-ce que ça peut bien faire ? Si tu en ressens un jour, alors c'est que nous en sommes capables.

— J'ai dit selon toi. Moi, je crois pas à ces histoires d'absence de cœur. »

Quelque chose en Saïx se glaça. Il se tourna vers le musicien, nonchalant comme toujours. Il se comportait comme si rien n'avait d'importance. Comme un sac en papier qui se laisserait porter par le vent, pathétique et inutile.

« Tiens donc.

— Tu me demandes pas d'expliquer ?

— Je devrais, répondit le numéro VII. Cela pourrait m'éclairer sur quelques détails de ton… attitude globale. »

L'énergumène prit cela pour une invitation à développer sa philosophie de non-vie.

Son attitude rappelait celle d'un adolescent pas tout à fait grandi, malgré son corps d'adulte. À Saïx, il évoquait de vagues souvenirs refluant, une insouciance désormais lointaine. Comment faisait-il pour mimer aussi bien la joie de vivre ?

« Bah, je pense pas que ce soit vrai, ce que croit Xemnas. À mon avis, on a encore un cœur. Il suffit de se rappeler comment s'en servir.

— Je n'ai jamais rien entendu d'aussi sot.

— Pourquoi ? J'vois pas la différence avec ma vie d'avant. »

Alors, quoi ? Il ne ressentait déjà rien en tant qu'humain ? Faisait-il semblant d'être si extraverti et joyeux depuis sa naissance ? Non. Non, bien entendu. Il disait ce qui lui passait par la tête pour avoir l'air humain.

Car les Simili n'éprouvaient rien.

« Pourquoi restes-tu dans l'Organisation, si tu es certain d'avoir encore un cœur ? Nous sommes ici pour récupérer celui que nous avons perdu, après tout. »

Demyx plongea son regard dans le sien. Lui sourit, mais pas de la même façon que d'habitude. Pour la première fois peut-être, Saïx entrevit l'ombre derrière ce masque d'exubérance.

« Moi ? Je suis juste là pour observer le spectacle. »

L'ersatz de profondeur disparut presque aussitôt de son regard et il redevint le clown habituel.

« Et puis, tu t'ennuierais, si tu ne passais pas tes journées à me courir après pour m'engueuler ! Nan ? C'est vrai quoi, à part donner des ordres, tu fais rien de tes journées ! Je te suis indispensable.

— Espèce d'imbécile.

— Est-ce que je t'agace ? Fais attention, Saïx, on dirait presque une émotion ! »


Demyx prétendait qu'il avait un cœur. Qu'ils avaient tous un cœur. Quelle élucubration stupide.

Saïx, lui, savait qu'il ne ressentait rien depuis ce jour où on l'avait arraché à sa vie d'avant, où on lui avait tout pris. Il ne lui restait rien, et la seule chose qui le poussait à se lever le matin était le désir de récupérer un semblant d'émotion, de ressentir quoi que ce fut, n'importe quoi.

Autre chose que ce vide.

La plupart des membres de l'Organisation singeaient les émotions humaines, par habitude ou par désespoir. Seul Demyx parvenait à maintenant l'illusion.

Pourtant, même lui, en apprenant la disparition de leurs camarades du Manoir Oblivion, n'eut qu'un sourire froid.

« Ah, ça fera des emmerdeurs en moins. Et du boulot supplémentaire. Oh, zut… »

S'il possédait réellement un cœur, cette réaction… Non, Saïx se refusait à y penser. De toute façon, quelle importance ? Il ne devait pas se soucier de Demyx. Il le supprimerait même, si cela pouvait lui permettre d'atteindre ses objectifs.

Il avait pourtant déjà eu l'opportunité de le transformer en Reflet pour le punir de sa flemmardise, et il ne l'avait pas fait.

Il y avait quelque chose (non, il n'y avait rien) au sujet de Demyx (rien d'intéressant) qui le faisait le guetter au détour des couloirs (pour le rappeler à l'ordre). Il se demandait ce qui lui passait par la tête (sûrement du vent), pourquoi il arpentait les mêmes salles que lui, avec son sourire insupportable et sa musique qui brisait le silence étouffant de la Citadelle (il fallait un cœur pour jouer aussi bien, non ?). Non.

Je te suis indispensable. Tu t'ennuierais.


L'imbécile. L'imbécile l'imbécile l'imbécile !

Un écho de fureur. Seulement un écho. Un souvenir.

Des pas nonchalants derrière lui. Pitié, non, ce n'était pas le moment.

« Ah, salut, Saïx ! Alors, Axel s'est barré, hum ? Eh bah.

— Tais-toi, Numéro IX.

— Tout ça pour Roxas, si j'ai compris ? C'est vrai que je l'aimais bien aussi, Roxas, mais de là à déserter… Et toi qui prétends qu'on a pas de cœur, tu penses quoi de ça ?

— Demyx.

— Oh, tu dois avoir le seum. »

Saïx l'ignora.

Un cœur, hein ? N'importe quoi. Axel le lui paierait. Il avait tout fichu en l'air, toutes ces années à avancer dans le Néant, pour rien !

Au-dessus de leurs têtes, le Kingdom Hearts brillait, écrasant, froid.

Peut-être.

Peut-être que, quand il aurait un cœur, il comprendrait les agissements d'Axel. Et ceux de Demyx.


Bientôt. Quelque chose étreignit le vide dans ses entrailles. Bientôt, Kingdom Hearts serait complet. Peut-être qu'il comprendrait.

« J'sais pas, c'est bizarre. On les utilise jamais, ces surnoms. Et puis… Ça te va pas. Pourquoi Devin ? Et pourquoi Lunaire ?

— Numéro IX, une bonne fois pour toutes, veux-tu bien aller accomplir ta mission du jour ?

— Le mien me va mieux, mais bon, ça sert toujours à rien. »

Le Numéro VII ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel, malgré son absence d'indignation.

« Il te va mieux ? Tu trouves ? »

Mélopée, d'accord. Ça avait trait à sa musique. Mais Nocturne ? Demyx faisait pourtant tellement d'efforts pour rayonner.

D'accord, peut-être pour ça. Parce qu'il devait faire des efforts, justement. Des efforts insupportables. Saïx en avait plus qu'assez de l'entendre brailler dans toute la Citadelle chaque fois qu'il ouvrait la bouche.

« Bah, ouais ! C'est mon petit côté mystérieux.

— Tu n'as pas de côté mystérieux, Numéro IX. On ne peut pas être mystérieux lorsqu'on sort toutes les inepties qui nous passent par la tête comme tu le fais. »

Et pourtant.

Après toutes ces années, il ne parvenait toujours pas à le saisir. Comme l'eau qui poursuit sa course.


Saïx regardait la stèle brisée de Demyx.

Un fantôme de sourire s'épanouit sur ses lèvres, crispé.

S'il avait eu un cœur, il aurait dit que Demyx, ses jérémiades, sa musique et le mystère qui l'entourait allaient lui manquer.

À la place, il n'y avait que le vide, rien que le vide. Un creux béant, insupportable, qui l'élançait de plus en plus. Un esartz de panique, en s'imaginant supporter cela encore une éternité.

Demyx mort. Ha.

Il s'en fichait.

Il s'en fichait.

Il s'en fichait.

Soudain, il se rendit compte que sa mâchoire lui faisait mal, à force de la contracter. Inspira en tremblant, contraignit ses muscles à se détendre.

Il s'en fichait.

Il pourrait toujours le faire payer à Sora, une fois qu'ils n'auraient plus besoin de lui.


Mourir, ce n'était pas si terrible.

Ressusciter, ce n'était pas aussi rassurant qu'on voulait bien le croire.

Xehanort l'avait recomposé, pour intégrer une Nouvelle Organisation XIII.

Saïx se sentait toujours vide.

On lui avait pourtant raconté à son réveil que cette histoire de cœur n'était qu'un mensonge. Une mascarade.

Bien. Il se sentait vide et trahi, dans ce cas.

« Yo, Saïx ! Alors, ça te fait quoi de ne plus donner les ordres, cette fois ? »

Pourtant, lorsqu'il entendit sa voix, il se mit à pleurer.


« Je t'avais dit qu'on avait un cœur ! »

Pour toute réponse, Saïx émit un grognement.

Demyx se montrait toujours aussi exubérant. Voire plus qu'avant.

Demyx, vivant.

Maintenant qu'il avait un cœur, Saïx comprenait tout ce que sa mort lui avait coûté, et tout ce que le revoir à ses côtés lui rendait.

Cela dit, le soulagement passé, l'ancien Numéro IX se remit rapidement à l'agacer.

« Allez, dis-le que j'avais raison !

— Oui, Demyx, tu avais raison, soupira Saïx. Sur toute la ligne. »

Ses nouveaux yeux, jaune sale, lui allaient fort mal. La marque de Xehanort.

« Ah ! Oh, j'aurais jamais cru entendre ça ! »

Si leur nouvel employeur gagnait la Guerre, ça ne se finirait pas bien pour eux. Ils deviendraient ses réceptacles, des pantins vides.

Si Saïx le méritait sûrement, il préférait éviter ce sort à Demyx – entre autres raisons de se liguer contre le vieil homme.

« Demyx.

— Ça fait du bien de plus t'entendre m'appeler par un numéro, la vache !

— Est-ce que… Tu préférerais un autre nom ? Celui-là, Xemnas te l'a imposé.

— Nan, Demyx, ça m'va. C'est qu'un son que les gens font pour m'appeler, et je m'y suis habitué.

— Bien. J'aurais une… Mission à te confier. Une mission qui ne vient pas de nos supérieurs.

— Oh ! En souvenir du bon vieux temps ? »

L'ancien Numéro VII ne put retenir un – très léger – rictus.

« Quelque chose comme ça. Est-ce que tu as entendu parler des répliques ? »


Le temps parmi la Nouvelle Organisation paraissait presque plus insupportable que les dix années passées à errer dans les couloirs de la Citadelle. Tout le monde paraissait dans le même état d'esprit, sur le qui-vive, tendu. Les nouveaux venus étaient encore plus insupportables que les anciens membres.

Saïx trouvait le temps long. Il ne pouvait plus se cacher derrière une absence de cœur pour étouffer sa détresse.

À chaque apparition de Demyx, avec son exubérance toute naturelle, cette atmosphère d'orage explosait en millier de morceaux bruyants. Indifférente au climat de tension qui régnait dans leurs rangs, la Mélopée Nocturne se comportait avec un naturel désarmant.

Plus étrange encore, il semblait le considérer comme un vieil ami. Le taquinait.

« Comment peux-tu agir ainsi ? Lorsque j'étais ton chef, je t'ai traité…

— Bah, ouais, comme un tyran. M'enfin. C'est ce que font les chefs, quoi. Et c'était drôle, de te voir perdre ton sang-froid, alors que tu t'en rendais pas compte toi-même. Puis tu m'as jamais transformé en Reflet, finalement ! C'est que tu m'apprécies quand même. »

Parfois, lorsqu'ils se trouvaient seuls, ils parlaient discrètement du plan. Leur plan.

« Pourquoi as-tu accepté de m'aider ? »

Demyx haussa les épaules. Gratta les cordes de son sitar. La mélodie apaisait quelque peu Saïx, lui faisait oublier la Guerre à venir, le moment fatidique il devrait affronter Lea et les autres, tout en cherchant à les aider comme il pouvait.

« Bah, j'y comprends rien à toutes ces histoires de camps, de guerre et de trahison. Ce que j'sais, c'est que je vais là où on veut bien de moi.

— Et ?

— Et quoi ? Si tu m'as demandé de rejoindre ta conspiration à la base, c'est que tu connais déjà la réponse. T'as l'air de me faire confiance. Ou au moins, de vouloir davantage de moi que Xehanort. Regarde, apparemment, j'fais partie des remplaçants. T'y crois ça ? »

Oui, Saïx y croyait. Sans trop de mal.

« Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est pourquoi Xehanort t'as repris dans l'Organisation. Vu tes faibles résultats…

— Bah, peut-être qu'il me doit une faveur ! »

Une blague. Bien sûr. Pourtant la revoilà, cette ombre dans son sourire. Demyx parlait beaucoup, mais il ne se révélait pas facilement. Une énigme.

Une énigme qui, depuis plusieurs années déjà, l'empêchait de tout à fait sombrer dans la mélancolie. Il s'en fallait de peu, décidément.

« Enfin, je pige pas pourquoi tu m'fais confiance, en fait, marmonna Demyx. J'aurais pu tout balancer aux autres.

— Non, tu n'aurais pas parlé. Tu aurais eu trop peur que je te tue. »

Un rire franc.

« Pas faux. »

Il sembla se contenter de cette réponse.

Saïx ne savait pas quoi faire de ses émotions retrouvées. Parfois, il pensait à Preuve d'Existence. À la tombe brisée du Numéro IX. Au vide sous ses pieds.

Il ne ferait sans doute rien pour éclaircir ces sentiments-là. Ni maintenant, ni quand tout serait terminé. Il se connaissait et, lui non plus, n'avait jamais été très courageux.


« Il est parti ?

— On ne l'a pas revu depuis la fin de la Guerre. J'imagine qu'il est retourné chez lui, où que cela puisse être… »

Isa serra les dents, masqua son trouble comme il put.

Bien sûr. Demyx n'avait fait aucune promesse de rester. Ni vraiment d'adieux.

« Tu voulais lui dire quelque chose ? s'enquit Ienzo. Peut-être qu'il repassera par ici, je peux lui transmettre un message. »

Demyx n'avait jamais mentionné son Monde d'origine, ni son véritable nom. Isa s'attendait à ce qu'il parte, bien entendu, mais pas si vite. Pas avant qu'il ait pu le revoir.

« Juste… Merci pour son aide. Et pour la musique. »

Ienzo acquiesça.

« C'est vrai qu'il aurait pu au moins dire au revoir, mais… Vous n'étiez pas très proches après tout, si ? »

Apparemment pas. Isa haussa les épaules, un goût amer dans la bouche.

« Non, pas tellement. »

Il l'avait juste aidé, à sa manière, à supporter le gouffre de son existence. À présent qu'Isa reprenait sa vie là où il l'avait laissé dix années auparavant, Demyx s'évaporait comme un mirage.

Ça lui ressemblait bien.

Malgré tout, il ne pouvait se départir du sentiment que leurs chemins se croiseraient à nouveau. Il l'imaginait bien apparaître comme par magie au moment où il s'y attendrait le moins.

Très bien alors. Il n'attendrait pas, puisqu'il s'agissait du meilleur moyen de le revoir un jour.


J'aurais pu améliorer des tas de trucs à la correction, mais honnêtement, j'y aurais passé beaucoup trop de temps et ce serait devenu beaucoup trop long. J'avais pas le courage de me lancer là-dedans.

Du coup voilà, c'est pas un OS parfait du tout, loin de là. Trèèèès loin. M'enfin, j'avais bien aimé l'écrire, et je crois que j'aime bien ce pairing ? Il est fun.

Je crois que j'ai fait une incohérence aussi ? Normalement c'est Vexen qui parle du plan à Demyx, mais Vexen mentionne que "quelqu'un" (on comprend que c'est Saïx quand même) a décidé de tout ça. Je ne m'en rend compte que là, maintenant, en rédigeant cette note. Oh, well.

J'espère que ça vous aura diverti !