- Les Volturis seront bientôt là.
Edward, statufié, fixait les yeux emplis de froideur de son père, cherchant en vain une quelconque blague qui serait certes de mauvais goût mais qu'il pourrait néanmoins encaisser. Tout plutôt que cette annonce brute. Lorsqu'il tourna son regard ambre vers sa mère, il n'eut plus aucun doute. Il tiqua alors qu'une perle de sang sorti de sa lèvre inférieure martyrisée. D'un coup de langue, il la fit disparaître et un goût amer envahit son palais. Le corps presque sans vie pesait dans ses bras. L'odeur de terre et d'hémoglobine embaumait ses sens d'une façon désagréable. Pourtant, il était un vampire. Cependant, ces effluves provenaient de son compagnon et des pointes le serraient comme pour lui rappeler qu'il ne devrait pas être dans cet état. Ce fait étant du en partie par son géniteur qui se situait à quelques mètres de lui. Mais aussi par lui qui s'était gavé en le suçant à deux reprises sans aucune prise de conscience sur son état physique. Un grognement soudain surgit de son gosier. Il était menaçant et cela surpris les occupants autour de lui qui réagirent aussitôt à cette sommation.
- Edward ? hésita sa sœur Alice, osant un pas mesuré en sa direction.
Il ne l'entendit pas, trop pris dans ses émotions incontrôlables, dû à ce fichu lien qui unissait le métamorphe à lui. Il en avait marre de ne pas réussir à se maîtriser. Il sentait des vagues de colère l'envahirent par flots denses et de plus en plus forts. Ses bras parsemés de veines turgescentes, tenait avec force et resserraient par à coup ce corps à la fois si massif et pourtant réduit à une simple loque en cet instant. C'était un loup, détenant une force surhumaine et malgré toute sa haine, cette vision l'horripilait. Pourquoi ? Il voulait tant revenir en arrière et faire en sorte de ne jamais le croiser. Ne jamais se retrouver avec ce cordon qui les emprisonnait. Le bonheur devrait les emplir mais seule la souffrance et le déni les inondaient. Il ne pouvait même pas envisager un avenir avec ce canidé. La mort semblait plus gratifiante à son avis.
Carlisle était tendu tout comme les autres membres de la famille. Ils attendaient tous un mouvement quelconque venant de l'être à l'entrée portant ce cadavre vivant. Il puait et paraissait proche d'une nuit éternelle. Son souffle était si faible qu'ils parvenaient à peine à l'entendre. Pourtant, son pouls en feu continuait à pulser courageusement, tenant bien plus à la vie que son comparse. Soudain, le châtain se calma. Ce qui engendra un blanc perturbant dans la pièce. Ils le regardaient avec des yeux pris de doutes évidents et entièrement justifiés.
- Je suis désolé… articula difficilement Edward, la voix rocailleuse.
Cela détendit l'assistance, certains soupirèrent de soulagement. Esmée se rapprocha doucement de lui et lui indiqua le canapé pour déposer le loup d'une voix bienveillante. Il y consentit, épuisé moralement. Il passa une heure à attendre sur un siège en face du corps. Il fixait les actions des filles. Alice et Esmée avait contribué à soigner le plus possible les plaies et nettoyer les traces de terre qui recouvraient son pauvre corps. Elles n'allèrent pas s'occuper de certaines zones, laissant le propriétaire s'en acquitter plus tard quand il serait conscient. Une tête reposant sur sa main, Edward prenait le temps de réfléchir à la situation depuis tout à l'heure. Les Volturis… Il ne pouvait s'empêcher de penser au fait qu'ils ne tarderaient pas à pointer le bout de leurs canines ici. Malheureusement, sa tête bourdonnait et il n'arrivait pas à penser correctement à une solution adéquate. Il sentit un mouvement à sa droite et son regard se dirigea par instinct vers ce dernier. Esmée s'était arrêté et avait laissé le reste pour Alice. Elle s'était assise à ses côtés, jaugeant le résultat.
- Il est bien dans un sale état, énonça-t-elle le plus naturellement du monde.
Il eut un temps d'absence à cette phrase. Il ne savait pas quoi lui répondre. C'était certainement rhétorique.
- Edward. Il va falloir que vous alliez sur mon île, poursuivit-elle en tournant sa tête vers lui, le regard appuyé. Immédiatement, bien entendu.
Ses paupières se relevèrent, étonné. Il n'y avait pas pensé lui-même mais c'était criant maintenant qu'elle lui avait dit. Il était vraiment fatigué pour ne pas y avoir songé une seule seconde.
- Tu as raison, fut tout ce qu'il put sortir.
Il se sentait bête tout à coup. Il se releva lentement et se dirigea vers le canapé. Son ombre enveloppait le corps qui avait un aspect plus correct qu'il y a quelques temps. Il était toujours dans un état de sommeil profond. Et il le serait certainement pour un long moment. Il le méritait. Edward s'accroupit élégamment puis passa ses bras dessous le dos et l'arrière des genoux pour le soulever avec une facilité déconcertante. Debout, il eut un reflux odorant provenant du loup qui l'arrêta en plein mouvement. Il sentait terriblement bon. Grimaçant d'inconfort, il ignora ce fait et se tourna vers sa mère. Elle seule était resté avec Alice. Les autres étaient partis faire une ronde pour surveiller la venue tant attendue des Volturis.
- Pars maintenant Edward, ordonna platement Esmée en le fixant d'une façon si maternelle.
- Oui, lui répondit-il avec de la peine dans la voix et dans le regard.
Il causait du tord à sa famille et il s'en voulait furieusement. La femme se rapprocha de lui et tendit ses lèvres pour les poser sur son front dans un geste aimant. Il ne pouvait l'enlacer mais il lui rendit son baiser avec autant de non-dits. Il se dirigea vers la porte et croisa sa sœur. Elle avait un sourire tendre, digne d'elle.
- Fais attention à toi et je t'en prie à lui aussi maintenant, exigea-t-elle en appuyant ses propos en montrant du regard son fardeau.
- T'inquiètes pas pour ça Alice, grogna-t-il malgré lui.
Quelques secondes plus tard, il avait déjà disparu, laissant la jeune femme seule et remplis d'appréhensions. Elle savait au combien tout pouvait déraper entre eux d'un instant à l'autre.
Quand Edward arriva devant la villa, il soupira de lassitude. Il avait eu de la chance de ne croiser aucun Volturi. Ils devraient être arrivé à la maison principale désormais. Il espérait sincèrement que rien de grave ne tomberait sur sa famille. Il entra, chargé de l'homme, et le conduisit à la chambre. Déposant le corps, il se stoppa une minute devant ce lit. Jacob était si paisible enfin. Son poitrail se gonflait beaucoup plus à chaque respiration, signe qu'il reprenait petit à petit vie. Son regard vagua vers le cou où on pouvait voir encore deux cicatrices. La fierté gonflait son égo en observant son œuvre. Malheureusement le regret venait vicieusement gâcher le tableau et il se détourna de cette vue attrayante. Il passa la nuit à méditer à eux. Ce nous dorénavant… Il savait qu'ils n'avaient pas le choix. Ils allaient devoir se supporter et encore plus pendant ces prochains jours. Il n'arrivait même plus à être écœuré par les circonstances. Et pourtant, il l'aurait voulu, il aurait du l'être. Mais ce stupide fil qui le faisait avoir des émotions d'attachements et d'empathie envers ce loup l'empêchait de ressentir réellement ce qui le faisait vibrer. La haine. Tout ce qu'il s'était passé était entièrement de sa faute. La mort odieuse de Charlie. Sa rupture désastreuse avec Bella. Sa relation disloquée avec son père. L'arrivée ennuyeuse des Volturis. Et surtout, son envie insatiable pour son sang… Son délicieux liquide rougeâtre qui l'appelait inlassablement. Il arrivait à le sentir d'ici, vibrant dans ses conduits et attendant d'être aspiré par ses soins. Ses yeux se dilatèrent et sa respiration commença à être erratique. Ces pensées le rendaient fous.
Toute la nuit fut rude. Il ne faisait que ressasser les derniers événements et retenir cette soif cynique qui le prenait aux tripes. Le loup ne s'était toujours pas réveillé arrivé à l'aube. Le soleil baignait la maison et traversait les quelques interstices des stores. Il s'ennuyait fermement. Il n'avait strictement rien à faire et l'autre dormait toujours aussi profondément. Soupirant de lassitude, il se releva de son siège en cuir et se balada de pièces en pièces à la recherche d'une activité qui pourrait potentiellement l'occuper un temps soit peu. Lorsqu'il arriva dans la cuisine, il eut un temps d'arrêt. Jacob aurait peut-être faim à son réveil… Se préoccupait-il vraiment de lui là ? Edward grogna une nouvelle fois en se massant les tempes. Il était préoccupé par tout ça et ça ne faisait que tourner en rond. Rien n'arrivait à se placer correctement dans son cerveau. Toutes les émotions liées à son vrai lui et son lien se mélangeaient et il n'arrivait plus à se reconnaître. Tout en marmonnant, il se décida à tout de même préparer quelque chose de comestible à la boule de poil. Il fouilla les placards et détecta directement un sachet de pâtes. Bon. C'était la base et il ne s'en plaindrait certainement pas. En tout cas, il avait intérêt, pensa-t-il avec dédain.
A plusieurs reprises, je l'ai vu. Cette lumière brillante et éclatante de chaleur. Elle m'attirait tel un aimant. Mais j'avais résisté malgré cette tentation, je savais de quoi il était question. Je n'étais pas idiot. Je ne sentais presque plus rien. Mon corps était amoché de part en part et je sentais mon cœur battre faiblement. Parfois, je croyais sentir assez de force en moi pour émerger mais la seconde d'après tout se rappelait à moi et je retombais dans les abîmes. J'étais au bord de la mort. Je ne savais pas comment je faisais pour être encore en vie. Peut-être ce lien qui me retenait et sa présence… Son odeur embaumait mes narines, ce qui plaisait à mon loup et étrangement à moi aussi. Il m'apaisait d'une façon incompréhensible. Je n'avais même pas la force de répliquer quoi que ce soit à cette constatation, je voulais simplement me réveiller et régler mes comptes avec cet enfoiré de sangsue.
Lorsque mes yeux s'ouvrirent, la lumière m'aveugla aussitôt. Je grinçais des dents dans un râlement. Ma bouche était pâteuse et quand je me mis à bailler, cela me décrocha presque la mâchoire. Relevant un bras pour le placer au-dessus de mon visage, je rêvassais. J'étais dans les vapes. Je prenais connaissance de mon nouvel environnement. Ou étais-je ? Je sniffais par habitude, puis osais rouvrir mes paupières. Mes yeux chocolat déterminèrent l'ensemble et j'étais vraisemblablement dans une chambre. Une belle et grande chambre. Le lit était en hauteur ce qui ne me plaisait pas. Je grognais foncièrement et décidais de me redresser. Mon corps me tirait cependant j'allais mieux. Je sentais désormais d'autres odeurs. Une que je reconnus comme de la nourriture, ce que je ne refuserai pour rien au monde en cet instant, et enfin une autre qui à la fois me déplaisait mais me rassurait tout autant. Malheureusement pour moi…
Au moment où je tentais de poser un pied au sol, une apparition soudaine atterrit devant moi me faisant sursauter brutalement de peur.
- Mais ça ne va pas la tête ? criais-je au châtain avec véhémence, le cœur battant la chamade.
- T'aurais-je fait peur ? susurra-t-il avec un air sadique sur son visage cireux où quelques parties brillaient à cause des reflets lumineux, son corps posé nonchalamment contre le mur d'en face.
Je l'ignorais éperdument, il ne méritait pas que je lui accorde la moindre attention. Je descendais du lit faiblement, sous le regard insistant du vampire. Je ne voulais pas à avoir à me confronter à lui. Je voulais être seul. Mais où étais-je bordel ?
- Où suis-je ? le questionnais-je d'un ton rude, en commençant à me diriger vers la prochaine pièce qui se trouvait être le salon, le pas claudiquant parfois.
- Sur l'île de ma mère, me répondit-il platement, me suivant comme une ombre.
Pendant que je notais les meubles et la baie vitrée immense qui laissait entrevoir la mer, une main se posa sur mon épaule ce qui me fit me tendre automatiquement.
- Tu as faim ? s'enquit Edward d'une voix retenu, proche de mon oreille frémissante.
J'étais bien trop sensible à cet endroit. J'hochais la tête pour lui répondre. Il enleva son membre et se dirigea vers ce qui semblait être la cuisine. Je soupirais de soulagement, toujours statufié au milieu de la pièce. Chaque geste, même anodin, me rendait étrange. Il fallait que je me contrôle un peu plus. Pour l'instant, je devais me sustenter impérativement. Mon ventre grondait depuis qu'il savait qu'il y avait de la nourriture non loin. Abandonnant mon emplacement, j'avançais vers la prochaine pièce où se trouvait Edward. Ce dernier remplissait généreusement mon assiette. Il n'y avait d'ailleurs que le mien sur la table. Rien pour lui. Bien évidemment, pensais-je dédaigneusement. Il se nourrissait que de sang.
- Merci, ronchonnais-je malgré moi, en me plaçant sur une chaise.
- Oh mais de rien, répliqua-t-il non sans une pointe d'ironie, en s'asseyant habilement sur le plan de travail avec un sourire sardonique.
Je commençais à littéralement dévorer mon plat. Le silence était de mise et la pièce était bien trop sombre à mon goût.
- On ne peut pas ouvrir les volets ? fis-je remarquer comme ça. Je ne vois pratiquement rien dans mon assiette.
- Si tu veux, lui accorda-t-il bien qu'on pût voir un léger rictus désappointé.
Quand il les ouvrit, des pans de peau se mirent à briller de mille feux sous les rayons du soleil rendant la scène irréaliste. On aurait dit un ange avec sa peau blanchâtre. Je me surpris à le reluquer dans sa globalité. Il était vraiment pas mal pour son genre. Je devais l'avouer même si cela faisait mal de le dire.
- La vue te plaît ? plaisanta le châtain alors qu'il se réinstallait mais cette fois-ci plus loin de la lumière.
- Non, le narguais-je intentionnellement. Trop blanc. Trop toi.
Un léger rire sortit du vampire ce qui m'étourdit pendant un instant. Il sonnait magnifiquement. C'était presque cristallin.
- Je ne sais pas comment tu fais pour manger ça… souffla-t-il avec dégoût.
- C'est délicieux. Ça devrait plutôt être à moi de te le reprocher avec ton penchant malsain pour le sang, sifflais-je en reprenant une bouchée.
- Comme si j'avais le choix… soupira-t-il en détournant son regard de moi.
Je le regardais, inquisiteur, et décidais d'en arrêter là la discussion. Nous étions déjà allés assez loin alors que nous étions ennemis. Je n'avais pas envie d'aller plus loin. Je ne voulais pas. Je devais m'en éloigner.
Alors qu'Edward était sorti me laissant finir mon repas tranquillement, je nettoyais mon assiette en pensant à tout cette situation. C'était arrivé beaucoup trop rapidement. Nous n'avions même pas eu le temps de respirer une seconde et de prendre le temps nécessaire pour poser les choses. Je ne savais pas ce qu'il faisait mais je me prenais à vouloir le savoir. Mon loup balayait sa queue dans tout les sens, content de savoir que j'allais passer les prochains jours en la présence de mon imprégné seul à seul. Rien que ça. Je commençais à peine à gérer mes émotions, je sentais la dépendance se tisser de plus en plus entre lui et moi. Le lien était dans un état conflictuel mais il s'agrandissait se fichant éperdument de nos émois. Comment la vie avait-elle pu se dire un seul instant que nous étions fait pour être ensemble… ?
