Neris repensait en ce moment au commentaire d'un professeur peu encourageant vu sur le bulletin d'un camarade de lycée il y a maintenant bien longtemps : « Touche le fond, mais creuse toujours ». C'était tout elle en ce moment même. Lorsqu'elle pensait que la situation était au plus mal, un nouvel événement avait lieu et le bout du tunnel s'éloignait, inexorablement. En plus, pour la première fois depuis le début des problèmes, Neris se retrouvait sans arme à portée de main. Portée de main d'ailleurs considérablement réduite depuis que ses poignets avaient été entravés par des liens. L'utilisatrice au visage tavelé de taches de rousseur avait d'abord cru – assez naïvement, il faut l'avouer – qu'elle resterait à peu près libre de ses mouvements, mais Rinzler avait changé d'avis peu de temps après s'être débarrassé du morceau de verre que Neris avait dissimulé. Les prochaines heures allaient être extrêmement pénibles. Neris en regrettait presque les cours de géographie, cours qui pourtant, en plus d'avoir été très ennuyeux, s'avéraient depuis un certain temps parfaitement inutiles pour elle.
Debout au pied de l'imposante tour abritant le club End of Line, Neris piétinait sur place, calmement et en silence, comme un enfant jouerait du pied dans le sable : elle avait encore la possibilité de marcher un peu, elle ne voulait pas perdre ce privilège, mais elle savait qu'elle avait tendance à s'attirer des ennuis même lorsqu'elle prévoyait de se tenir tranquille. Alors, autant profiter d'être libre de ses jambes avant de se retrouver les pieds maintenus en place dans le vaisseau. Surtout qu'elle supportait difficilement l'immobilité : à chaque fois qu'elle était contrainte de rester fixe, elle sentait son cerveau et ses muscles bouillonner d'impatience, quémandant du mouvement. De quoi rendre dingue lorsque cela durait.
À quelques mètres de là, Rinzler s'était accroupi, une main posée à plat sur le sol, et alors que Neris se demandait ce qu'il pouvait bien faire, de fines lignes bleutées se dessinèrent spontanément autour et sous la paume du soldat, et bientôt, d'autres lignes apparurent, cette-fois ci en forme de doubles hélices, formes représentatives de brins d'ADN. Matérialisées une à une, ces étranges marques animées semblaient tracer un chemin débutant au pied de l'élévateur et s'éloignant de l'immense tour.
Neris était très inquiète : qu'est-ce que c'était que ça ? Des empreintes numériques ? Des traces a priori invisibles, révélées grâce à l'énergie de la Grille et… et grâce à quoi d'autre au juste ? Comment Rinzler pouvait-il faire ça ? En tout cas, ça n'était pas bon signe : comment Flynn pourrait-t-il s'échapper si l'un des Gardes Noirs au service de Clu était capable de le suivre à la trace si facilement ?
Mais brusquement, les inquiétudes de Neris prirent fin. Une nouvelle explosion retentit, bien plus importante cette fois, toujours au sommet de l'imposante tour. Les yeux levés vers la source de la déflagration, Neris recula de plusieurs pas, comme électrisée par la fournaise glaciale qui se déchaînait dans la boule de feu bleu pâle en train de dévorer la cime de la tour. Alors que s'éloignaient les vaisseaux de Clu et des gardes qui l'accompagnaient encore, l'explosion se résorba, disparaissant progressivement pour ne plus apparaître que sous la forme instable d'un épais nuage azurin parcouru d'arcs énergétiques cérulescents.
Neris ne parvenait toujours pas à détacher le regard du sommet, et lorsque ses iris couleur jade se désintéressèrent de l'emplacement du club End of Line, ce ne fut que parce qu'une autre explosion se manifestait, au sol dans le cas présent. Un peu trop proche d'ailleurs, car le souffle fit basculer Neris sur la plateforme sombre de la Grille. Après une roulade sur le côté, imposée par l'explosion tout comme la chute, l'énergie se dissipa, mais Neris, qui se relevait aussi vite que possible, les yeux papillonnant et les oreilles faiblement sifflantes, put remarquer qu'un épais nuage azuréen l'empêchait de voir à plus d'un mètre ou deux. Et là, sur sa droite, une lame, blanche et brillante, tenue par un programme parcouru de circuits tout aussi clairs. Moins d'une seconde plus tard, l'arme rompit les liens qui gênaient Neris, et le programme charitable tira l'utilisatrice par le bras pour lui indiquer la direction dans laquelle elle devait courir. À toute vitesse, Neris le suivit, et lorsqu'ils eurent dépassé le nuage opaque, le programme mystérieusement apparu tendit à la rescapée un bâton. Sans perdre de temps, Neris s'en saisit et sauta en avant sans cesser de courir. Une moto noire complétée par de fins circuits brasillant dans l'obscurité de la Grille se déploya, et Neris put s'éloigner à toute allure de la haute tour. À ses côtés, également à grande vitesse, deux autres cycles lumineux évoluaient, et leurs propriétaires adressèrent à Neris un signe de la main. Aatka et Kinso. Quelle bande de génies. Neris les adorait. Non, elle les aimait, de tout son cœur, de toute son âme.
Enfin loin des artères principales, les fugitifs descendirent des motos et s'engagèrent dans une ruelle déserte.
« Comment vous avez fait ça ? lança alors Neris en se retenant d'enlacer ses deux sauveurs.
— C'était difficile, admit alors Kinso en croisant les bras. C'était même difficile sa race. On en a bavé, on aurait pu crever d'ailleurs, et bordel on…
— Un peu de retenue, Kinso », le coupa Aatka.
Un léger rire sincère échappa à Neris. Aatka avait eu raison d'interrompre son acolyte du jour, quand il commençait à utiliser un vocabulaire peu courtois, il ne s'arrêtait pas de lui-même. Neris lui avait un jour proposé de jeter un œil à son disque pour voir s'il y avait une anomalie superficielle, suffisamment simple à régler pour que la rousse puisse faire quelque chose malgré ses faibles connaissances du fonctionnement du système créé par Flynn. Résultat, il y avait bien une correction à apporter à un ficher, et, toute fière, Neris était parvenue à rétablir le fonctionnement normal. Mais, à sa grande surprise, Kinso avait continué à user du même vocabulaire. Neris avait alors compris qu'il aimait tout simplement augmenter la concentration d'insultes dans ses phrases, et depuis ce jour, tous deux feignaient de croire que l'impolitesse du programme résultait d'une erreur dans son code source. De cette façon, les autres membres du groupes restaient persuadés que Kinso ne pouvait rien à ce souci, et le programme insulto-phile était bien moins réprimandé que si tout le monde savait qu'il se comportait ainsi par simple choix d'emmerder le monde.
« D'ailleurs… reprit Aatka d'une voix qui restait mystérieuse malgré la modification apportée par sa visière. On aurait sans doute eu plus de mal encore si on n'avait pas eu ça… »
Et, la programme récupéra dans son dos un disque, qu'elle confia à Neris. Une fois entre ses mains, l'objet circulaire laissa apparaître le visage de l'utilisatrice en hologramme, avant de faire défiler des informations générales.
« Mon disque ! Vous l'avez récupéré ! » s'enthousiasma Neris comme une enfant le matin de Noël.
C'en était trop, et Neris sauta dans les bras de ses sauveurs pour les enlacer chacun leur tour.
« Je ne sais pas comment on t'aurait trouvée si on n'avait pas vu ton visage sur l'interface de ton disque, lui confia Kinso après un rire face à la réaction de Neris. C'est vrai, c'est plus sûr de ne pas savoir à quoi les autres ressemblent, mais quand on veut les trouver… Heureusement, tu es toujours habillée comme tout à l'heure, et puis bon, quand on t'a vue au pied de la tour, on a plus eu trop de doutes. Tu as eu de la chance, on venait tout juste de récupérer ton disque dans le vaisseau de Clu pendant qu'il était quasiment désert, laissé à l'abandon. Et l'explosion, on a pensé que c'était l'occasion qu'il nous fallait pour déclencher la nôtre.
— J'ai eu de la chance, ouais, mais bon, si j'en avais vraiment eu, je n'aurais pas eu besoin d'avoir du bol cette fois-ci justement…
— Hmm, ouais, je suppose, fit Kinso dans un haussement d'épaules.
— Bon, faut que je file, je dois retrouver Flynn, il a sûrement un plan, il est peut-être déjà en route vers le portail…
— Tu vas avoir besoin de ça, dit Aatka en lui tendant un bâton lumineux.
— Oh, vous êtes vraiment parfaits, lâcha Neris alors qu'elle récupérait le light jet. Prenez soin de vous, restez prudents.
— Bonne chance à toi, content d'avoir vu ton visage et entendu ta vraie voix au moins une fois ! fit Kinso en posant brièvement une main sur son épaule.
— Salut, utilisatrice ! renchérit Aatka.
— Ouais, désolée d'ailleurs de ne pas en avoir parlé…
— T'as bien fait, j'suis une petite salope de balance moi », assura Kinso.
Aatka secoua la tête, un peu désespérée, et ses deux camarades échangèrent un rire. Puis, les trois hors-la-loi se séparèrent. Neris aurait pu leur parler du disque de Flynn qui devait être récupéré, mais ils auraient voulu s'en charger eux-mêmes, et il était certain que Clu veillerait dessus bien plus attentivement que sur le disque de Neris. Hors de question qu'Aatka et Kinso se mettent encore en danger.
La tâche était excessivement compliquée : il fallait trouver Flynn, en partant de la supposition selon laquelle il serait entre la ville et le portail, avant la fermeture du passage, et sans se faire repérer par des oranges transgéniques. C'est donc crispée sur les commandes de son light jet que Neris progressait dans les airs, visage protégé du vent par sa visière, regard agité pour tenter de repérer quelque chose dans l'atmosphère épaisse d'un bleu sombre qui enveloppait tout. Plus elle avançait, plus Neris craignait d'avoir raté le groupe de fugitifs, plus loin sur sa gauche ou sur sa droite. Mais peut-être étaient-ils déjà arrivés à destination ? Peut-être étaient-ils morts avant, rattrapés par Clu et ses funestes projets ?
Neris souffla bruyamment, un peu découragée. Pourtant, un peu plus loin, sur un voilier solaire, elle pensa distinguer des formes lumineuses. L'utilisatrice ralentit autant que possible pour avoir le temps de vérifier ce qu'elle voyait, puis elle se mit à la hauteur du voilier pour se poser sur sa surface claire. Son light jet re-matérialisé en un simple bâton noir, sa visière rétractée, Neris s'avança lentement vers les deux silhouettes appuyées contre les barrières de chaque côté de l'étroit pont du voilier. À la vue de la nouvelle passagère, les deux utilisateurs s'étaient redressés, méfiants, mais une fois le visage de Neris découvert, le concepteur de la Grille s'était avancé, grand sourire aux lèvres.
« Tu es vivante, fit-il une fois arrivé à sa hauteur en posant les mains sur ses épaules.
— C'est un boulot à plein temps ici, précisa Neris en souriant elle aussi.
— Je ne te le fais pas dire », confirma Kevin Flynn après un léger rire.
L'homme vêtu de blanc relâcha Neris, puis il pivota vers la silhouette restée en retrait.
« Sam, viens ici que je te présente officiellement ! »
Sam rejoignit alors son père et Neris, et Kevin s'écarta sur le côté pour les laisser se faire face.
« Sam, Jenna Hopkins. Jenna, voici mon fils, Sam. Vous avez dû vous croiser à la salle de jeu il y a bien longtemps.
— Oui, maintenant que tu le dis, je me souviens vaguement d'une petite rousse un peu bizarre, confirma Sam.
— Hé, se défendit l'intéressée. J'étais plus grande que toi à cette époque. Ah et euh… Désolée de t'avoir hurlé dessus et de t'avoir insulté tout à l'heure, je… j'étais…
— C'est oublié, assura le jeune homme avec un sourire. Et puis… j'imagine que je le méritais. Merci de t'être sacrifiée, tu n'avais pas à faire ça. »
La femme aux courts cheveux roux esquissa un sourire, lèvres pincées, et elle entra dans le vif du sujet :
« C'est quoi le plan ? Foncer jusqu'au portail ?
— Oui, aussi vite que possible, c'est notre seule chance », confirma Kevin Flynn.
Le concepteur devait s'attendre à lire le soulagement dans les yeux clairs de Jenna alias Neris, pourtant son visage se ferma, et les discrètes tâches de rousseur qui maculaient sa peau assombrissaient ses traits, elles qui habituellement semblaient apporter joie et espièglerie à ses expressions.
« Qu'est-ce qui te tracasse, Jenna ? s'enquit Kevin Flynn, un peu inquiet.
— Je n'ai pas pu dire au revoir à mon meilleur ami… Il a fait tellement pour moi, et… enfin, je pense que je m'en voudrais tout le reste de ma vie de l'avoir laissé là, comme ça, sans dire un mot…
— … Tu veux aller le voir, c'est ça ? » résuma l'homme à la barbe et aux cheveux blancs.
Lèvres nerveusement pincées, Jenna acquiesça. Face à elle, Flynn senior poussa un long soupir en laissant son regard se perdre dans un nuage cendré, visiblement en pleine réflexion.
« C'est dangereux, et le temps nous manque, tenta-t-il de la raisonner à voix basse.
— Je sais… mais bon, je ne pense pas que Clu prenne la peine de me chercher maintenant, il doit vouloir rejoindre le portail, il a ce qu'il voulait, il a ton disque, il n'y a pas de raison que…
— Vas-y, vas dire au revoir à ton ami, trancha le concepteur de la Grille en replantant son regard dans celui de Jenna. Je sais ce que ça fait d'avoir des regrets, ça peut détruire une âme, s'il y a un moyen de t'éviter ça, il faut essayer. En plus, en jet ça devrait être rapide… mais fais très attention, et reviens au plus vite. Dans tous les cas, on se retrouve au portail. »
Soulagée, l'utilisatrice hocha la tête lentement, mais Kevin Flynn poursuivit après un instant :
« Je suis sincèrement désolé, Jenna. Je pensais… je pensais vraiment qu'à nous trois, on pourrait être assez forts pour sortir d'ici, quand j'ai pris la décision de te contacter… je ne pouvais pas imaginer que tu resterais coincée, toi aussi… Et tu aurais pu rester avec nous, cachée, mais je craignais que tu ne supportes pas cet isolement… alors j'ai pensé que le meilleur compromis c'était que tu rejoignes la ville en ignorant ou je me cachais… mais je…
— Arrête, je ne vais pas dire que ces années ont été tranquilles, mais j'ai eu l'impression de vivre dans un film pendant trois ans… C'est un peu un rêve de gamine qui s'est en partie réalisé, et puis c'est bientôt terminé. »
Un court silence s'installa, et Jenna posa une autre question qui la tourmentait :
« Qu'est-ce qui est arrivé à Quorra ? s'enquit-elle en faisant un signe de main en direction de la silhouette allongée au sol qu'elle avait repérée lors de son arrivée.
— Elle va s'en remettre. D'ailleurs, elle redémarre. Sam, donne-lui ça, dit Flynn en confiant à son fils une fine capsule noire. Moi, je vais aller flirter avec les étoiles, et écouter le son. »
Et après une tape amicale dans le dos de Sam, Kevin Flynn s'éloigna en direction de l'arrière du voilier solaire.
« Quorra aussi m'a sauvé la vie tu sais, lui confia Sam d'une voix adoucie par l'émotion.
— Ah oui ? fit Jenna en esquissant un sourire. Ça me fait un point commun avec elle alors, c'est classe. Elle est géniale cette programme. Et elle est belle en plus. »
Les lèvres du jeune hommes aux cheveux châtains s'étirèrent en un sourire amusé, et Jenna poursuivit sur sa lancée :
« Si elle n'était pas une programme, je serais sans doute tombée amoureuse. Pas toi ?
— Bah euh… je ne la connais que depuis quelques heures…
— Ça ne veut rien dire ça ! T'as aucun goût, sinon t'aurais répondu « si sûrement » à la seconde, peu importe ton orientation sexuelle ! » s'écria Jenna avec un air faussement scandalisé.
Sam répondit par un rire tout en secouant la tête, et lorsque Quorra commença à bouger, les deux utilisateurs la rejoignirent. Comme réveillée en sursaut après un cauchemar particulièrement prenant, la programme aux cheveux de jais se redressa brusquement en position assise. Elle semblait sur le point de parler, mais sa bouche se referma lorsqu'elle découvrit qu'en plus de Sam à sa droite, Jenna se trouvait près d'elle, agenouillée sur le sol, mains posées de chaque côté de ses genoux et grand sourire aux lèvres.
« Coucou, la salua Jenna sans se départir de son sourire.
— Jenna, tu es là ! »
Quorra enlaça la femme aux cheveux roux, et Jenna répondit à son étreinte en riant doucement. L'utilisatrice adressa un clin d'œil à Sam, qui comprit parfaitement le sous-entendu : « Hé, t'as vu, j'ai une touche ! ». Un rire lui échappa, et Quorra se détacha de Jenna en pivotant la tête vers le fils du concepteur.
« Qu'est-ce qu'il y a ? s'étonna-t-elle.
— Rien, ne t'en fais pas, la rassura Jenna. Juste une plaisanterie, j'ai dit à Sam que je te trouvais géniale, que dans le monde réel j'aurais pu tomber amoureuse de toi, et j'ai profité de ces joyeuses retrouvailles pour faire comme si ce câlin était plus qu'un simple câlin. J'ai un sens de l'humour assez médiocre je sais, je plaide coupable. »
Quorra secoua la tête en souriant, mais son sourire s'effaça pour être remplacé par la curiosité alors que Sam lui donnait la capsule confiée par son père.
« Qu'est-ce qui s'est passé, Jenna ? Je t'ai vue aux Jeux…
— C'est un peu long à expliquer, mais le plus important c'est que je vais rentrer chez moi, revoir de l'herbe, ma famille et le Soleil.
— Le Soleil, c'est pas le pire ennemi des roux ? plaisanta Sam.
— Non, les appareils photo, parce que c'est comme ça que les gens se rendent compte qu'on n'a pas d'âme », répliqua Jenna en souriant.
Après un rire échangé, Jenna se releva et récupéra le light jet sur son armure.
« Je dois faire quelque chose avant de partir, mais je vous rejoins vite. À tout à l'heure vous deux, ne vous attirez pas trop d'ennuis !
— On va voir ce qu'on peut faire », assura le jeune Flynn.
Jenna commença à s'éloigner vers le bord du voilier solaire, mais Sam l'interpella :
« Attends, juste : tu préfères qu'on t'appelle comment du coup ? Jenna, ou Neris ?
— Ça n'a plus trop d'importance maintenant, mais je dirais que Neris est mon nom d'ici, et Jenna mon nom de l'autre monde. »
Un hochement de tête lui répondit, et la rousse en armure noire et blanche sourit une dernière fois avant de se baisser pour passer sous la barrière. Elle resta un instant immobile, un bras tendu en arrière pour pouvoir s'accrocher à la rambarde, puis elle se laissa tomber dans le vide, en plein dans un nuage. Le temps que son light jet se déploie, elle put profiter de la sensation de fin velours humide contre sa peau. Les yeux clos, elle se détendit, oubliant presque qu'elle était en chute libre, oubliant presque qu'elle était dans un monde isolé, loin de son univers à elle. Elle avait l'impression de s'enfoncer dans un oreiller infiniment doux, soyeux et rafraîchissant, et elle songea que rien que pour ça, son séjour dans la Grille en avait valu la peine. Peut-être n'aurait-elle jamais expérimenté cette sensation autrement. Et ça aurait été bien dommage.
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