Chapitre 25 : A Moment's Silence

Les mois suivants semblèrent interminables.

Dirk écoutait religieusement chaque émission de Potterwatch, parce que tant que la radio émettait, c'est que Deryn allait bien.

Ils ne réussirent à voler à la guerre qu'une seule nuit, par hasard ou par miracle, puisqu'aucun ne savait où était l'autre.

Un soir d'hiver où la morosité des camarades était trop lourde à supporter, Deryn partit voler au-dessus ses landes galloise qu'elle aimait tant.

En survolant les tourbières gelées, elle repéra un comète volant qu'elle connaissait bien, et au mépris de toute prudence, le rejoignit.

Voyant un balai foncer sur lui, Dirk hésita, la baguette dressée.

Quand il reconnu Deryn, de surprise, il perdit progressivement de l'altitude.

Arrivant à son niveau, pris d'une faim insatiable, d'un besoin irrépressible de se sentir vivants, ils s'embrassèrent avec fougue et précipitation.

Leurs retrouvailles furent plus ardentes que douces et amoureuses.

Tout en l'embrassant, Deryn enfonça ses doigts dans le dos aux os saillants de Dirk, lui s'aggripant à ses hanches creuses.

Cherchant à sentir plus vite le corps vivant et brûlant de désir de Deryn, Dirk déboutonna avec urgence la chemise épaisse qu'elle portait, promenant ses mains sur ses hanches, son ventre musclé, puis remontant vers sa poitrine blanche.

Deryn était occupée par sa ceinture. Quand elle parvint à l'ouvrir, elle pu enfoncer ses mains vers son dos, ses épaules larges, redescendant le long de la colonne vertébrale pour atteindre ses hanches.

Elle sentait le désir lui comprimer la poitrine, et cherchait à se rassasier de sa peau, de son odeur.

Elle essayait de reprendre son souffle inutilement alors que chaque baiser lui arrachait un soupir.

Dirk, lui, aurait décrit un feu d'artifice dans ses reins, que chaque caresse, chaque frémissement du corps de Deryn si proche, rendait plus ardant.

A peine prirent-ils le temps d'étaler leurs capes sur le sol tourbeux avant de se presser l'un contre l'autre, cherchant la chaleur de l'autre, avides de sentir en l'autre cette bouffée de désir et de vitalité.

Ils se réveillèrent aux premières lueurs du jour, grelottant l'un contre l'autre sous une cape craquante de givrée.

- Tu es couvert de cicatrices et de bleus, dit sobrement Deryn en passant ses doigts sur le visage de Dirk.

- Toi aussi, lui répondit-il tristement, lissant une mèche de cheveux. Et tellement maigre…

- Tu peux parler, tu n'as que la peau sur les os.

Elle l'embrassa pour lui faire détourner les yeux de son corps émacié.

Il l'embrassa avec beaucoup plus de douceur que leur nuit n'en avait compté, poursuivant ses baisers jusque dans son cou, où il s'enivra de son odeur et de la chaleur douce de sa peau.

-Tu me manques tellement, Deryn.

-Tu me manques aussi. Tout a l'air arrêté sans toi. Il faut que je te dise...

Il la regarda.

-Oui ?

Un rideau de nuages traversait les nuages de la nuit pour former un rideau sur la lande sans ombre, rendant incandescents les cheveux roux de Dirk.

L'air était froid, pourtant on sentait encore les parfums si subtiles du marais et des bruyères. Le vent balayait les petits cours d'eau creusés entre les mottes d'herbes et mousses et faisait frémir la surface.

Dirk reliait tendrement les taches de rousseur sur la poitrine osseuse de Deryn que leurs vêtements en désordre dévoilaient largement.

Deryn le dévisagea comme si elle ne l'avait jamais vu, ou plutôt comme si elle ne devait jamais le revoir. Elle parcourut du doigt les os saillants de ses épaules larges, les clavicules trop proéminentes. Son visage amaigri et ravagé par la guerre que, pourtant, elle trouvait si beau.

- Pas maintenant. Plus tard. Nadolig Llawen, Dirk.

- Joyeux Noel à toi, mon amour, répondit-il en reprenant son baiser. Je suis heureux d'avoir au moins pu finir cette année dans tes bras.

Pourtant, ils ne restèrent pas ensemble.

Chacun avait le sentiment de mettre l'autre en danger par sa simple présence.


Les mois se succédèrent à nouveau sans leur permettre d'arracher un autre moment à la guerre pour se voir.

Puis vint le terrible mois de mars dans la caravane de Potterwatch, maintenant toujours en mouvement.

Lee Jordan et Fred Weasley échangèrent un regard affolé et se tournèrent vers le coin de la cheffe opératrice de la radio de l'autre côté de la vitre.

Deryn et Tonks les dévisageaient. Puis Lee Jordan prit une inspiration et les regarda droit dans les yeux.

"Malheureusement, ce ne sont pas les seuls décès que la gazette du sorcier n'a pas jugé assez importants pour les mentionner.

C'est avec grand regret que nous informons nos auditeurs du meurtre de Ted Tonks et Dirk Cresswell. Un gobelin du nom de Gornuk a également été tué.

On pense que Dean Thomas, né de Moldus, et un deuxième gobelin, tous deux voyageant avec Tonks, Cresswell et Gornuk, se sont peut-être échappés."

Deryn voyait leur lèvres remuer et leur bouche s'ouvrir, mais n'entendait plus rien, ne comprenait plus rien.

Elle vit passer un oiseau par la fenêtre, et se demanda comment quelque chose d'aussi prosaïque pouvait encore se produire quand le monde venait de s'effondrer.

"Nous devons quitter les ondes maintenant, mais comme nous le faisons à chaque fois, nous vous demandons de consacrer un moment de silence, à la mémoire de ceux qui sont tombés."

Deryn et Tonks demeurèrent figées. Deryn pleurait sans un mouvement. Tonks tremblait serrant ses bras sur son ventre proéminent.