OOC : Bonjour à tous. Voici un nouveau chapitre. J'espère que vous apprécierez. Sur ce, bonne lecture.

« Mitsuko et Moogle ont pu enfin s'enfuir du méchant Chocobo rouge ! »

« Et maintenant, ils partent sur leur vaisseau spatial pour de nouvelles aventures ! »

L'un après l'autre, les deux enfants abaissèrent leurs peluches Moogle avant de se laisser tomber au sol, au beau milieu du couloir, lessivés.

Cela faisait plus de deux heures qu'ils jouaient... Et Shiro aurait menti s'il niait que cela faisait si longtemps qu'il ne s'était pas amusé comme ça.

Lorraine reprit doucement sa respiration avant de se retourner vers l'enfant aux cheveux blancs, le toisant d'un air curieux :

- C'était...

- Ouais, approuva Shiro en ricanant, embarrassé.

- Tu penses qu'on pourrait leur envoyer un script ? A ceux qui ont créé le dessin animé ?

Shiro sourit alors qu'il s'étirait.

- Cela serait bien... Voir Mitsuko et Moogle dans un épisode.

- Oui, approuva Lorraine avant de poser sa peluche à côté d'elle.

Passé le jeu, Shiro remarqua qu'elle ne souriait plus. Elle ne riait plus.

Non...

Elle eut... brusquement l'air triste.

Etait-ce sa faute ? Est-ce qu'il avait fait quelque chose de mal ?

- Je... ça va ? lui demanda Shiro, s'inquiétant immédiatement pour elle.

- ... Non.

Lorraine se recroquevilla sur elle-même alors que ses lèvres tremblaient.

- Mitsuko... Elle me manque tellement. Je... j'ai pu l'oublier pendant deux heures, pendant qu'on jouait... Mais maintenant, j'aimerais vouloir jouer tout le temps pour ne plus avoir à penser à elle.

- Oh...

Quel idiot.

Pourquoi... Pourquoi n'avait-il pas compris plus tôt ?

- Je... J'adorais juste... y jouer avec ma grande sœur. Regarder le dessin animé avec elle. C'était notre moment du matin. Même si elle trouvait que c'était bébé, elle jouait toujours avec moi.

- ... Elle doit te manquer terriblement, remarqua Shiro.

Lorraine hocha la tête.

- ... Mitsuko... Papa... Maman... Je voudrais qu'ils soient là.

Il eut envie de lui demander ce qui leur était arrivé.

Mais... il ne voulait pas que Lorraine craque et se mette à sangloter s'il lui posait la question. Il ne voulait pas lui faire de la peine. Une part de lui avait peur de se faire gronder... mais c'était moindre comparé à la peur de voir des larmes couler sur ses joues.

C'était idiot. Shiro la connaissait à peine... Mais voir quelqu'un pleurer, ça pouvait le faire craquer aussi. Parfois, quand il se disputait avec son oncle et qu'il lui disait des choses horribles, il avait peur de le voir se décomposer. Du coup, parfois il pleurait avant que cela n'arrive, ce qui conduisait Nero à le prendre dans ses bras et à le consoler.

- Tu... Tu as quelqu'un qui s'occupe de toi ? lui adressa Shiro.

- Oui, fit Lorraine, d'une voix éteinte.

- Et ils sont gentils ?

- Ce n'est pas la même chose.

Lorraine reprit sa peluche pour la poser sur ses genoux, lui faisant face.

- On m'a dit que... J'aurais bientôt une nouvelle famille. Mais je ne pourrais pas. Je ne pourrais pas voir des inconnus comme mes parents. Ni même déménager. Je ne veux pas... quitter ma maison, ma ville.

- J'imagine, approuva Shiro. Après, l'essentiel est que tu aies quelqu'un qui s'occupe de toi, non ?

Il se sentait bizarre de dire ces mots...

Parce que, aux vues de l'attitude de Vincent... Il était très probable que s'il n'agissait pas, il ne reverrait jamais Nero.

Il lui avait promis qu'il ne serait pas seul.

Mais... il ne voulait pas de quelqu'un d'autre. Il voulait son oncle. Son seul oncle. Sa seule famille.

Et pendant qu'il jouait, il n'avait pas cessé de penser au moyen de le retrouver...

- Je crois que je sais ce que tu traverses. Je crois que... je vais avoir droit à la même chose, admit Shiro, le timbre bas.

Lorraine se frotta les yeux. Elle le toisa avec curiosité.

- Vraiment ?

- Oui. Je crois que je vais être séparé de ma famille aussi. Ils ne m'ont pas dit grand-chose mais... je sais que c'est ce qui va se passer.

La petite fille fronça les sourcils, intriguée.

- Mais... Peut-être que ce ne sera pas le cas. Tu pourras rester avec ta famille. Pourquoi serais-tu séparé d'eux ?

Shiro ne répondit rien.

Il se sentait... incapable d'en parler. De préciser les détails.

- Tu ne veux pas parler de ta famille, hein ? comprit Lorraine.

L'enfant répondit par l'affirmative.

- Cela ne fait rien, le rassura la petite fille, un sourire compatissant aux lèvres. Moi non plus, je n'ai pas envie d'évoquer la mienne.

- Ok. On n'en parle pas.

- Si tu veux, suggéra Lorraine, on peut parler d'autre chose ?

Shiro lui rendit son sourire.

- J'adorerais.

- C'est bien de voir quelqu'un comme moi ici, admit Lorraine. Les adultes sont... Ils sont tous occupés. Ils ne disent pas les choses.

- Ils ne disent rien, renchérit Shiro tandis qu'il pensait à Vincent.

Oh oui. Il était complètement d'accord avec ça.

- Tu as d'autres dessins animés que tu regardes ? finit-il par lui demander.

Lorraine parut enchantée par la question. Elle le fixa d'une manière qu'on n'aurait pas cru qu'elle était sur le point de pleurer quelques instants avant.

- Oui. Plein. Le premier est...

En même temps qu'ils échangeaient sur les différents dessins animés, les différents jeux, les différents livres qu'ils connaissaient, Shiro apprit pas mal de choses sur Lorraine.

Lorraine adorait écrire.

Elle adorait écrire des histoires, dessiner des bandes dessinées, se raconter des choses... La maîtresse à l'école lui disait qu'elle avait une imagination débordante.

Encore une fois, ils reparlèrent du fameux sujet : l'école.

- Mais je dessine mal, soupira Lorraine. Je ne sais pas faire les mains ou les bras. C'est juste des ronds et des bâtons.

Shiro haussa les épaules.

- J'adore dessiner aussi. Et ce n'est pas difficile à faire.

- Ah oui ?

- Je pourrais te montrer, si tu le souhaites.

Les yeux de Lorraine s'éclairèrent.

- J'adorerais.

- On dessinerait ensemble ! proposa Shiro. Tiens. On pourrait dessiner l'aventure de Mitsuko et Moogle en BD. On n'aurait qu'à l'envoyer au créateur du dessin animé.

- C'est idiot de penser qu'avant, je croyais que les personnages étaient réels ? fit naïvement Lorraine.

Shiro se gratta la tête, gêné.

- ... Pareil. Je pensais que c'était de vraies personnes. Mais mon oncle m'a expliqué que c'était des acteurs. Même si cela ne m'empêchait pas de dessiner.

- J'aimerais bien être écrivain, plus tard. Ecrivain ou scénariste. Ma mère me disait que j'avais tout le temps de réfléchir, mais je sais ce que je veux faire.

Oh.

Ce qu'elle voulait faire plus tard...

- Et toi ? l'interrogea-t-elle. Tu voudras faire quoi, quand tu seras grand ?

Shiro voulut répondre qu'il ne savait pas. Qu'il n'avait jamais pensé à « ce qu'il ferait quand il serait grand ».

Grand... A quel âge pouvait-on considérer qu'on était grand ? L'âge de Nero ?

Puis, il repensa à leur conversation, lorsqu'ils avaient fêté l'anniversaire de son oncle.

Son oncle voulait qu'il dirige Deepground... Qu'il prenne la suite de son père.

- ... Dirigeant, répondit Shiro à contrecoeur.

- Ouah ! Comme un chef ? Tu voudras changer le monde ?

- C'est idiot ?

Cela pouvait être idiot, après tout.

Lorraine secoua la tête, rassurante.

- Non. Mon père me disait que le monde doit changer. Et pour le mieux. La Shinra a causé beaucoup de malheur alors... si tu deviens dirigeant, tu pourras protéger la Planète.

- Tu penses ?

Il n'avait pas envisagé cela comme ça.

Pour Nero, régner sur Deepground signifiait se défendre des humains qui leur faisaient du mal. Mais est-ce que cela impliquait aussi de protéger la Planète, comme Lorraine le disait ?

Il n'avait jamais... envisagé la chose sous cet angle.

- Oui. Et je t'encouragerais si tu veux, sourit Lorraine en lui adressant un clin d'œil malicieux.

- Tu m'encourageras ?

Même si elle était humaine ?

- Bien sûr.

Ses mots... malgré tout, les mots de Lorraine le rassurèrent grandement.

Protéger la Planète...

Pourquoi pas ? Il appréciait l'idée.

Alors qu'il pensait à Nero, alors qu'il pensait aux aventures que Lorraine et lui avaient imaginé ensemble en jouant avec Mitsuko et Moogle, il ne put s'empêcher de poser à la petite fille une question qui lui brûlait les lèvres :

- Hé. Tu crois que notre scénario... il était possible ?

- Hm ? Avec Mitsuko qui va secourir Moogle qui a été kidnappé ? l'interrogea Lorraine.

- Ouais.

Shiro croisa les bras, songeur.

- Tu penses que... cela pourrait se réaliser ? Dans la vraie vie ? Le plan pour secourir Moogle ?

- Bah... Il n'y a pas de raison que cela arrive, répondit Lorraine en inclinant la tête sur le côté, curieuse.

Elle haussa les épaules alors qu'elle se relevait.

- Mais... La seule chose est qu'on n'a pas de vaisseau spatial à disposition.

- Hm.

C'était clair qu'un vaisseau spatial, cela pourrait régler tant de choses.

S'il savait en piloter un, délivrer Nero et partir ensemble à bord du vaisseau spatial... Cela serait le scénario idéal.

Il ne manquerait plus que les lettres « FIN » affichées en gros sur l'écran tandis qu'ils s'envoleraient à bord du vaisseau spatial.

Mais... il n'en avait pas. Et ce n'était pas un dessin animé.

C'était la réalité...

Mais... il repensait à ce qu'ils avaient concocté comme plan, pour faire fuir le méchant Chocobo Rouge.

Est-ce que cela, cela pourrait marcher ?

- Mitsuko et moi, on est fatiguées, soupira Lorraine. Et... je dois rejoindre la salle d'ordinateur. Il est tard.

- Hm. Je comprends. Moogle aussi est fatigué.

- Tu crois qu'on pourrait rejouer ensemble demain ?

Cette question avait été posée sur une note de timidité mêlée à de l'espoir.

Shiro hésita.

Est-ce qu'il serait encore là demain ?

- ... J'essayerais, mentit-il.

Il n'avait pas envie de lui faire de la peine. Mais la réponse parut réjouir Lorraine.

- Super ! Je t'attendrais dans le couloir, alors.

Shiro opina du chef.

- Ok.

Jouer avec elle une nouvelle fois... Il en avait envie.

Il en avait envie, mais partir d'ici était le plus important pour lui.

- Alors, à demain, le salua Lorraine avec enthousiasme alors qu'elle manipulait Mitsuko dans les bras pour que cette dernière fasse un signe « au revoir » avec ses pattes. J'ai hâte !

Amusé, Shiro leva Moogle à son tour pour lui rendre le geste, quoique plus maladroitement.

- A demain. J'ai hâte aussi.

Les deux enfants s'échangèrent un ultime sourire qui promettait qu'ils s'amuseraient deux fois plus demain avant de se séparer.

Lorraine partit de son côté en courant à toute hâte, un sourire ravi sur le visage.

Shiro... resta seul, Moogle dans les bras.

A demain... J'ai hâte.

Non.

Il ne l'attendrait pas demain, au rendez-vous.

Shiro le savait déjà.


« Donc, si j'ai bien compris, on a une autre menace sur le feu ? » gronda Cid alors que le groupe revenait aux quartiers de l'ORM, remontés par la nouvelle qu'ils venaient d'apprendre.

Les chiens de l'enfer avaient été moins nombreux que sur la place d'Edge, la dernière fois. Mais ils avaient été tout aussi résistants face à leurs armes humaines. De leurs armes, la Buster Sword de Cloud était la plus redoutable, mais même elle ne parvenait pas à éradiquer les créatures pour de bon.

Heureusement, ils avaient été en groupe et ils avaient été plus à même de se défendre contre eux.

- Cela en a tout l'air, soupira Reeve.

- Ah, bravo ! Merveilleux ! La Planète n'a pas assez souffert comme ça, on dirait. Si on n'arrête pas toutes ces fichues calamités, la prochaine fois sera la bonne ! Croyez-moi ! grinça l'ancien pilote de la Shera.

- Nero a peut-être menti, suggéra Barret.

Vincent se tourna vers lui.

- Il était là, Barret. Emprisonné dans une cuve de Mako. Comment aurait-il pu invoquer ces créatures ? Il était sous notre surveillance.

- Il est peut-être au courant de ce qui s'y passe. Ou alors, il a aidé à mettre au point ces créatures. Qui d'autre contrôle les ténèbres ici ? releva l'ancien leader d'AVALANCHE.

Général MacKurie s'empressa de renchérir :

- De toute manière, même s'il n'y est pour rien là-dedans, cela ne change pas ses autres crimes. Il reste coupable de génocide et de crimes envers la Planète.

- On le sait très bien, Général.

- Alors, qu'est-ce que vous attendez donc ? grogna-t-il.

- Ce n'est pas si simple, lui rappela doucement Vincent. Il y a un enfant concerné.

- Il ne sera pas le premier, ni le dernier orphelin de cette Planète, gronda Général MacKurie. Il fera comme tout le monde : il s'adaptera.

Vincent se raidit tandis qu'il toisait froidement le Général de l'ORM.

Oui, même si lui s'était habitué. Il s'était habitué à la perte de son père. Sa mère étant morte quand il était plus jeune, son père avait été le seul parent qu'il ait jamais eu.

- Général, je crois que le sujet est clos, s'empressa d'intervenir Reeve alors qu'il invitait le Général à prendre congé.

Ce dernier lui répliqua par un grognement outré avant de tourner les talons pour s'éloigner en direction de son véhicule. Il repartait pour la base et peut-être était-ce la meilleure idée. Vincent n'appréciait pas vraiment l'homme. Il ne doutait pas qu'il était compétent, mais son comportement l'agaçait. Et aux vues de son expression, Yuffie paraissait considérer la même chose.

- « Il fera comme tout le monde », grimaça Yuffie. Non mais, il n'a jamais eu de famille, ce type ? J'ai perdu ma mère petite. Il croit quoi ? Que c'était facile de vivre avec un père comme Godot ?

Reeve leur adressa un regard concerné.

- Ne lui en veuillez pas. Le Général a perdu ses parents très jeunes. Il avait trois frères. Trois frères qui étaient également dans l'armée et qui sont tombés au combat.

Cela arrêta net la tirade de Yuffie.

- Oh, répondit-elle, perturbée par ces informations.

- Il n'en parle pas parce que c'est un sujet sensible pour lui. Il est dur mais c'est une bonne personne, leur déclara Reeve. Il a été en première ligne lors de la bataille de Midgar. Il faut juste voir au-delà.

Hm.

Peut-être que Reeve avait raison. Vincent n'était pas du genre à porter un jugement sur les autres. Il pouvait haïr, trouver quelqu'un agaçant, mais il ne jugerait jamais quelqu'un. Chacun avait ses raisons à son comportement et nul doute que le Général MacKurie avait ses raisons, encore plus après ce que venait de leur révéler le Président de l'ORM. Il adhérait à son comportement ou non, c'était une autre histoire.

Tandis que les autres membres d'ex-AVALANCHE se réunissaient dans le hall d'entrée de l'ORM pour discuter des mesures à prendre concernant le procès de Nero, Vincent préféra s'éclipser et se rendre à l'ascenseur pour monter à l'étage où Shiro devait encore attendre des nouvelles de son oncle. Même s'il le laissait seul, des soldats avaient eu ordre de le surveiller. Il y avait également des caméras dans tous les coins, sauf dans les parties privées du bâtiment.

Lorsque les portes de l'ascenseur s'ouvrirent, Vincent pénétra dans le couloir et se dirigea vers l'enfant, qui était toujours à sa place. Il jouait avec la peluche Moogle que Marlène lui avait acheté, d'un air absent. Quand Vincent s'assit à côté de lui, l'enfant se retourna pour le dévisager d'une expression douloureuse.

Il était mort d'inquiétude. Il souffrait.

Cela peinait Vincent de le voir ainsi et de ne rien pouvoir faire pour l'apaiser.

- Comment va ta cheville ?

- ... ça va, lui répondit vaguement Shiro en tendant la jambe. Celle où sa cheville avait été lésée par le chien de l'enfer.

Nero n'aurait clairement pas laissé une créature qu'il contrôlait s'en prendre à lui. Vincent en était sûr.

Vincent sentait que Shiro se comportait de manière... distante, froide.

Il savait pourquoi. Il n'avait pas vraiment d'excuse. C'était lui qui l'avait amené ici, qui l'avait conduit ici...

Et il ne restait même pas là pour lui.

- ... Je suis désolé de t'avoir laissé seul. J'avais des obligations même si... je ne cache pas que j'aurais aimé rester près de toi.

Shiro garda le visage fermé. Il reposa sa peluche avant de secouer la tête.

- Tu as le droit de m'en vouloir. C'est une épreuve terrible que tu traverses. Une épreuve qu'aucun enfant ne devrait traverser. Pas seul en tout cas.

- Vous allez vraiment me séparer de mon oncle ? lui demanda Shiro d'une petite voix.

Vincent ferma les yeux.

Il savait. Il pouvait s'en douter au début, mais à présent, c'était une certitude.

- Shiro. Il faut que tu comprennes qu'on ne te veut aucun mal. On ne vous désire aucun mal à toi et à Nero.

- Mais Nero n'est pas une mauvaise personne ! s'exclama Shiro, le ton montant d'un cran. Vous ne me dites même pas ce qu'il a fait ! Vous me dites juste qu'il souffre ! Vous me dites qu'il a commis de mauvais actes ! Mais vous ne me dites même pas lesquels !

Vincent soupira.

Après tout, cela ne servait à rien de cacher des choses.

Au contraire, cela servait seulement à retarder l'inévitable. Rien de plus.

Même si Shiro ne méritait pas cela...

- ... Il a fait souffrir des gens, Shiro. Beaucoup de gens.

- Parce qu'il souffrait aussi ? lui demanda l'enfant. N'est-ce pas ? Moi aussi, quand je suis de mauvaise humeur, je peux m'énerver contre Nero. Même si je ne le pense pas.

- Cela va au-delà de ça, Shiro. Bien au-delà.

Même le mot « génocide » effrayait Vincent. Il trouvait ce mot trop fort, même pour un enfant.

Peut-être qu'instinctivement, il souhaitait encore le préserver.

- Tu te souviens du monstre ? Celui qui hantait tes cauchemars ?

Il sentit Shiro se tendre.

Péniblement, l'enfant répondit par l'affirmative.

- Hé bien... Quand Nero t'a dit que « Monsieur Cigarette » ne viendrait plus t'embêter, il a pris les mesures nécessaires.

- Les mesures nécessaires ?

- Il l'a fait... disparaître. Mais le problème est que « Monsieur Cigarette », aussi horrible était-il... faisait partie des humains. Et Nero... voit les humains de la même manière qu'il perçoit « Monsieur Cigarette »... Il les perçoit comme des ennemis, comme des menaces. Même quand ils n'ont rien à se reprocher. Mais... Il les voyait déjà avant, de cette manière, même avant de te rencontrer, même avant qu'il n'entende parler de l'entité qui hante tes cauchemars. Et le fait que tu sois arrivé n'a pas changé son point de vue. Au contraire, je pense que cela l'a même encore plus solidifié. Probablement pour te protéger.

Shiro le considéra, une expression incrédule sur son visage.

- Et les humains... Tu as pu t'en apercevoir, Shiro. Mais les humains que tu as rencontrés. Barret, Cloud, Denzel, Marlène... Ils étaient gentils avec toi, n'est-ce pas ?

- Je l'ai dit à Nero ! fit l'enfant. Je lui ai dit que les humains n'étaient pas tous des monstres !

Oui. Il avait été présent quand Shiro avait dit ces mots à son oncle.

Parce qu'une poignée d'humains t'a fait souffrir toi, tu crois que le monde est moche !

- Le problème est qu'il les perçoit comme tels. Il les a toujours perçus comme tels. Parce que, avant de te rencontrer... Pour te donner une image, Nero a eu son propre « Monsieur Cigarette ».

C'était peut-être la meilleure façon de présenter les choses.

- Son propre « Monsieur Cigarette »... ? répéta l'enfant, ne comprenant pas.

- Oui. Un « Monsieur Cigarette » qui lui a ruiné la vie. Enfin, qui a fait partie de ceux qui ont ruiné sa vie. Tu sais que Nero aimait énormément ton père. Et ton père... Pour une raison que j'ai seulement appris après les évènements, avait rejoint la Planète. Et Nero n'a pas supporté de vivre sans lui. Alors, un jour, un « Monsieur Cigarette » est aussi apparu dans ses rêves et lui a donné le moyen de faire revivre Weiss.

- Weiss ?

- Oui. Nero était prêt à tout et... Pour faire revivre Weiss, le moyen était d'éveiller Omega. Même si cela devait provoquer l'extinction de l'humanité, Nero était prêt à tout risquer pour revoir ton père. Et « Monsieur Cigarette » lui a donné les moyens pour le faire.

Cela laissa l'enfant sans voix.

Vincent le contempla. Shiro ne réagissait pas. Est-ce qu'il avait compris où il voulait en venir ?

Est-ce qu'il allait souffrir de ces révélations ?

- ... Il était manipulé par un « Monsieur Cigarette », fit Shiro, qui se recroquevillait au fur et à mesure qu'il parlait.

- Oui.

- Alors, ce n'était pas de sa faute... Et puis, les humains sont encore là, n'est-ce pas ? Il voulait juste revoir mon père. Moi aussi, j'aurais sûrement voulu le faire. Pas toi ?

Vincent réprima un soupir.

Il aurait dû se douter que Shiro était trop jeune pour comprendre réellement l'étendue de la gravité des actes de son oncle.

Pour lui, cela demeurait son oncle. Peu importe le reste, on était toujours bornés à trouver des excuses aux gens qu'on aimait.

Mais quand il serait plus âgé, nul doute qu'il finirait par comprendre, si Nero ne lui avait pas retourné le cerveau avant.

Et cela lui ferait sûrement encore plus mal.

- C'est vrai que c'est tentant. Mais...Il faut apprendre à faire son deuil, Shiro. Nero ne l'a pas fait. Je soupçonne même que Nero soit encore coincé dans la phase du déni.

- La phase du déni ?

- Il y a le déni, la colère, les regrets, la tristesse et pour finir... L'acceptation. Je connais ce processus. Il est normal et chaque individu qui a connu une perte terrible doit le surmonter. Je le sais moi-même car je suis resté très longtemps dans la phase de la tristesse avant d'accepter que l'être aimé était parti.

Et accepter l'être aimé dans son ensemble.

Ses erreurs, mais aussi ses qualités.

Et accepter qu'il n'aurait rien pu faire pour la convaincre de ne pas faire d'expérimentation sur Sephiroth, son propre enfant.

- Tout cela pour dire, Shiro... que même si ton oncle a des circonstances qui expliquent son geste, il doit payer. Chacun doit payer ses actes.

- Mais il n'a pas anéanti l'humanité.

- Cela ne change pas les faits, malheureusement. Et le problème qu'on a, c'est qu'on a peur que Nero recommence. Et en t'emportant avec toi, cette fois.

L'enfant parut scandalisé.

- Mais il ne me fera pas de mal !

- Il ne te fera pas de mal à toi, répondit tristement Vincent.

- Si je le convaincs de chercher mon père autrement... Si je le convaincs en lui disant que l'humanité n'est pas aussi moche ! Il n'a pas vu les choses que moi, j'ai vu. On peut essayer !

Il le voulait aussi.

Il le voulait réellement...

Mais Vincent doutait que cela marche réellement.

- Tu peux essayer, Shiro... Mais Nero devra faire face à une punition tôt ou tard, peu importe s'il regrette ou pas. Et c'est ce qu'on désire : te préserver le plus possible.

C'était une évidence. Et même si ce n'était pas l'ORM qui le punissait, il serait puni un jour ou l'autre.

- ... Je vois.

- Mais comme on te l'a dit, Shiro... Tu ne seras pas seul. Dans tous les cas, tu ne seras jamais seul.

Mais il ne sut pas si Shiro l'avait entendu.

L'enfant se redressa.

Il toisait Vincent avec une expression inconfortable.

- ... Je veux aller aux toilettes.

- Oh. Bien sûr, c'est par là.

Vincent lui montra le chemin. Avant que Shiro ne rentre à l'intérieur, il toisa Vincent, une expression indiscernable sur son visage.

- ... Si moi, tu dis que je peux changer... Pourquoi cela ne serait pas le cas pour mon oncle ?

Il désira lui répondre quelque chose.

Mais Shiro avait déjà verrouillé la porte derrière lui. Vincent poussa un soupir avant de s'adosser contre le mur, attendant l'enfant dehors.

Après tout, qui était-il pour dire cela ?

Oui, Nero serait puni... Mais qui était-il pour dire qui avait droit à une rédemption et qui d'autre n'avait pas le droit ?

Cloud s'était reproché des choses dont il n'était pas responsable. Pendant longtemps et Vincent sentait que cela le hantait encore.

Shelke avait œuvré pour la sienne et même aujourd'hui, elle n'en était pas encore fière.

Et Lucrecia...

Il avait pardonné à Lucrecia.

Oui, chacun avait droit à une rédemption.

Mais il partageait l'avis de Reeve : il fallait œuvrer pour l'obtenir.

Il fallait la désirer.

Il n'y avait pas d'autres secrets.

Soudain, un bruit strident le fit sortir de sa torpeur.

Vincent se figea et regarda autour de lui. Il s'agissait d'une sirène...

Et pendant plusieurs minutes, Vincent ne comprit pas d'où cela venait.

Ce fut quand il vit les soldats sortir précipitamment dans le couloir qu'il réalisa ce qu'elle signifiait.

Un incendie !

L'alarme-incendie !

- Shiro ! appela Vincent en frappant la porte.

Pas de réponse.

- Shiro ! répéta Vincent. Sors, tout de suite !

Mais il ne répondait toujours pas.

Il crut cependant entendre un bruit sourd de l'autre côté...

Vincent ne perdit pas de temps. Il recula de quelques pas, prit son élan et enfonça la porte des toilettes de plusieurs coups forts d'épaule.

La porte céda.

Mais Shiro n'était plus là.

Il n'y avait ni porte ni fenêtre dans cette pièce.

- Shiro !

Toutefois, Vincent ne fut pas long à comprendre ce qui s'était passé et où était parti l'enfant.

Il remarqua la grille d'aération, qui était d'ordinaire fixée au plafond, tordue, au sol. Comme si elle avait été arrachée à mains nues avant d'être jetée par terre.

Cela ne laissa place qu'à un trou, certes étroit, mais suffisamment grand pour laisser passer un enfant ou un adulte de petite taille.

Et lorsqu'il remarqua le bouton d'alarme situé derrière la porte, Vincent quitta immédiatement les lieux avant d'appeler Reeve par le biais de son téléphone.


Autour de lui, tout était sombre. Tout était étroit. L'air frappait le visage de Shiro tandis qu'il s'avançait dans les conduits d'aération en rampant lentement et avec difficultés, manquant de se cogner la tête à plusieurs reprises, le plafond situé à deux centimètres de son crâne.

Il avait vu cela dans les films...et les aventures avec Lorraine, Mitsuko et Moogle avaient fait naître cette idée dans sa tête.

Est-ce que le plan était plausible ?

En réalité, Shiro ne pensait pas que cela marcherait réellement. Mais il connaissait sa force. Il s'était placé debout sur les toilettes pour arracher la grille avec aise, avant de sauter suffisamment haut pour s'agripper aux bords de la trappe, avant de se hisser en haut pour finir par se mettre à plat ventre.

Ces conduits étaient un vrai labyrinthe et Shiro ne savait pas du tout où était la salle où était gardée son oncle.

Mais il devait se dépêcher. Il avait peur que les autres n'arrivent avant lui.

Shiro accéléra avec hargne, usant de ses bras pour se frayer un passage.

Un croisement.

Gauche ou droite ?

Gauche, choisit Shiro avant de prendre la direction voulue.

Dans sa tête, il était désolé pour Vincent.

Il ne doutait pas que l'humain à la cape rouge lui voulait du bien. Il avait été si gentil avec lui. Il lui avait montré toutes ces choses... Toutes ces choses qu'il aurait aimé voir avant.

Il pensa à Vincent.

Il pensa à Denzel, Marlène...

Il pensa à Lorraine...

Shiro sentit sa gorge se nouer. Il ne les reverrait pas, hein ?

Nero refuserait qu'il les revoie.

Shiro s'arrêta momentanément, pendant cependant quelques secondes.

Avant de reprendre son chemin. Au-dessous, il s'arrêtait parfois au-dessus des grilles d'aération. Les trous lui permettaient de discerner la pièce et qui s'y trouvait...

A un moment donné, il croisa une jeune fille aux cheveux noirs et courts crier à un humain qui ressemblait à un soldat :

« Où est Lorraine ? Où est-ce qu'elle est partie ? »

Shiro baissa la tête avant de continuer sa route.

Il ne pourrait pas tenir sa promesse envers Lorraine. De revenir demain jouer avec elle.

C'était comme un mauvais choix à faire...

Choisir cette vie promise, le monde extérieur, la joie que cela lui apportait...

Ou choisir Nero, sa seule famille, qui lui avait tout donné.

Bien sûr qu'il choisirait Nero. Il ne pourrait jamais ne pas le choisir.

Mais pourquoi... Pourquoi était-ce si compliqué ?

Pourquoi est-ce que Shiro ne ressentait aucune joie à ce qu'il était sur le point de faire ?

Shiro s'arrêta devant une autre grille pour observer la pièce.

Il remarqua Lorraine à l'intérieur, penchée sur un Pad.

Le dessin animé qu'ils adoraient !

Il reconnaissait le générique. Ils l'avaient chanté ensemble pendant tout le temps de leur jeu...

Shiro voulut l'appeler, lui faire un signe de la main...

Mais Lorraine fut interrompue par l'entrée de la femme aux cheveux noirs qui lui criait de venir.

Shiro soupira.

A demain. J'ai hâte.

Shiro ne cessa pas de ramper. En-dessous de lui, il entendait des cris. Des bruits de pas précipités.

Shiro accéléra. Nul doute qu'ils étaient à sa recherche.

Cela parut durer des heures.

A nouveau, il percuta une grille d'aération.

A l'intérieur, il remarqua une lueur avec lequel il était bien familier...

Une lueur verdâtre...

Le Mako.

Etait-ce ici ?

Shiro n'arrivait pas bien à voir si quelqu'un se trouvait dans la pièce.

Mais là où il y avait du Mako...

Il devait suivre ce qui lui était le plus familier.

Sans réfléchir davantage, Shiro leva son pied.

Il prit son élan et donna un coup de pied dedans.

La grille trembla.

Un deuxième !

Cela détacha net la grille d'aération qui tomba au sol dans un bruit sourd.

Shiro prit une inspiration.

Il se hissa sur les bords du trou pour glisser ses pieds à l'extérieur.

Puis, une fois qu'il fut à la verticale, il réalisa combien le plafond était haut du sol.

Ses doigts glissèrent et il tomba dans un faible cri de surprise, avant d'atterrir douloureusement sur le dos.

Shiro cligna des yeux, sous le choc. Pendant un instant, sa vision se troubla.

Quand il la récupéra, il remarqua une cuve devant lui.

Une cuve remplie de Mako... Mais avec personne à l'intérieur.

Il est en soins intensifs...

Il ne devait pas être loin, alors ?

Shiro se redressa difficilement. La douleur à sa cheville s'était réveillée.

Mais il essaya de l'oublier, au moins temporairement.

En silence, il fouilla hâtivement la pièce à la recherche de son oncle.

Une entrée sans porte séparait les parties de la pièce.

Sans hésiter, Shiro la traversa pour la fouiller à son tour.


Ils s'étaient séparés en deux groupes.

Quatre à quatre, Vincent était avec Shelke, Barret et Cid. Ils avaient pris les escaliers pour accéder à l'étage destiné tandis que Reeve, Cloud, Tifa et Red XIII s'étaient rués vers les ascenseurs pour arriver le plus vite possible.

Il espérait que Shiro n'avait pas déjà...

« Gamin ou pas, il va s'en prendre une belle ! » cria Cid alors qu'il perdait son souffle, son bâton à la main.

Barret accéléra.

- Marre des escaliers !

Ils furent cependant rapides à arriver à l'étage des soins.

Là où étaient stockées les cuves de Mako. Au même moment, les portes de l'ascenseur s'ouvrirent. L'autre groupe arriva en même temps qu'eux, Reeve ayant déjà sorti sa carte pour ouvrir la pièce.

- J'ai sécurisé tout le QG. Les hommes sont en alerte maximale !

- Où est Lorraine ? Tu n'as pas laissé Lorraine toute seule alors qu'elle était sous ta responsabilité ? s'exclama Barret à destination de Shelke, la voix forte.

La jeune fille secoua la tête, l'expression détachée et nullement heurtée par le ton de Barret.

- Elle est avec Yuffie. Elles doivent être sorties maintenant.

- Shiro ! appela Reeve alors qu'ils s'arrêtèrent devant la pièce qu'ils recherchaient.

Pas de réponse.

Le rythme rapide, chaque membre du Groupe se positionna de manière défensive, se préparant pour le pire.

Cloud avec son Epée, Cid avec son bâton, Tifa avec ses poings...

Chacun avait ses propres armes et étaient prêts à les utiliser jusqu'à leur dernier souffle.

Reeve glissa la carte devant le détecteur.

Les portes n'eurent pas le temps de s'ouvrir complètement qu'ils s'étaient déjà rués à l'intérieur.

La cuve de Mako où était contenu Nero était vide...

Vide et grande ouverte.

Immédiatement, ils se figèrent.

C'était trop tard.

Nero était déjà sorti.

Il tenait Shiro près de lui.

Autour de l'ancien Tsviet, les ténèbres.

Les ténèbres qu'ils haïssaient tant et qui étaient prêtes à tous les aspirer et à les effacer.


« ... Eloigne-toi de l'enfant ».

Barret fut le premier à agir. Son gun-arm était pointé sur la tête de Nero, prêt à tirer.

Mais l'ancien Tsviet ne le laissa pas l'utiliser. Avant même qu'il ne termine sa phrase, les ombres apparurent sous leurs pieds.

Shiro se raidit, observant la scène avec horreur tandis que Nero ne le lâchait pas, ayant entouré ses bras autour de lui dans une tentative de le protéger.

Ou pour l'empêcher de partir.

- Si j'étais vous, je ne ferais pas ça, gronda Nero, menaçant.

- Ne tire pas, Barret. Il y a Shiro entre nous et Nero, lui rappela Tifa, la voix blanche.

Reprenant une voix plus douce, le Tsviet s'adressa à l'enfant :

- Ne regarde pas.

Shiro s'exécuta et détourna le regard. Pour ne pas voir la scène qui allait s'ensuivre.

Il ne voulait pas affronter tout cela.

- Tu es un monstre ! lui cracha Cid tandis que sa voix se perdait dans l'hystérie. Une sale pourriture ! Pourquoi tu ne rappelles pas tes ténèbres et tu nous affrontes comme un homme ? Tu as trop peur ? Enfoiré de sale lâche !

Shiro sursauta sous les cris.

Nero gardait son emprise sur lui, ne cillant aucunement face aux insultes de l'humain blond.

- Je n'ai aucune raison de le faire, déclara simplement Nero alors qu'il détachait un bras pour le lever.

Il était prêt à l'abaisser.

L'abaisser pour tous les anéantir et les engloutir dans les ténèbres.

- Vous avez perdu, leur adressa froidement son oncle.

Il ne savait pas ce que c'était le pire. Regarder ou détourner la tête...

Non...

C'était pire d'entendre les cris et de ne rien voir.

Ne pouvant plus le supporter, l'enfant se retourna vers la scène.

Ses pensées défilèrent à toute vitesse. Ce fut à ce moment-là que Shiro croisa le regard de Vincent.

L'humain à la cape rouge paraissait... inquiet.

Déçu, même.

Il l'avait... déçu ?

Il avait déçu Vincent ?

C'était presqu'aussi douloureux que de décevoir Nero.

Alors que ce dernier avait été si gentil à son égard...

Pas que lui.

Cloud, Barret...

Eux aussi avaient été si gentils avec lui.

Tu arrives quand même à doubler la vitesse d'une moto.

Denzel, Marlène...

On est amis, non ?

Super ! Je te montrerais l'école.

Nero allait... vraiment les anéantir ?

Il allait anéantir ces humains... comme ça ? Sans aucun état d'âme ?

Shiro leva la tête vers son oncle. Son expression était suffisante pour répondre à cette question.

Oui, il le ferait.

Pendant un instant, l'enfant eut un regret. Il regretta de s'être enfui, d'avoir conduit des humains qui ne lui désiraient aucun mal dans ce piège.

Non. Il regrettait d'avoir quitté sa dimension. S'il ne l'avait pas quitté, personne ne serait ici actuellement.

Non, s'il n'avait pas quitté cette dimension il n'aurait jamais...

A demain... J'ai hâte.

A demain...

A l'instant même où Nero abaissa le bras pour diriger ses ténèbres sur le groupe, Shiro se sépara violemment de lui.

Il quitta les bras de son oncle et fonça à l'endroit même où se tenait le groupe d'humains qui l'avait accueilli.

Il effectua un pas, deux pas...

Et à présent, les ténèbres furent sous ses pieds.

- Shiro !

Avant même que les ténèbres ne l'aspirent aussi, en même temps que les autres, Nero les rappela de justesse.

Shiro réprima à peine un soupir de soulagement. Cela avait fonctionné.

Pourtant, quand il fit face à son oncle, lorsqu'il vit le visage de Nero se décomposer au fur et à mesure que la réalisation le gagnait, Shiro se demanda s'il n'aurait pas préféré affronter les ténèbres à la place.

Son oncle fut d'abord stupéfait...

Puis, vint le choc.

Enfin, la tristesse. Non. Plus que la tristesse.

C'était une expression meurtrie, ce qui reflétait à ses yeux une trahison de la part de son neveu.

Ce fut cela qui fut le plus douloureux.

- Shiro, entendit-il Vincent murmurer.

- ... Que fais-tu ? finit-il par articuler, le ton sourd. Reviens ici immédiatement !

Le groupe parut tout aussi surpris que ne l'était Nero. Même Shiro se surprenait lui-même.

- Je suis désolé, Nero, lui répondit-il, la voix faible.

Il n'y avait pas de « Papa » Nero.

Juste... Nero.

Tout simplement.

- Je ne peux pas te laisser faire cela.

- Cela ne te concerne pas, grinça son oncle. Reviens ici tout de suite !

Shiro secoua la tête.

- Mais enfin. Qu'est-ce qui te prend ?

- Je ne peux pas te laisser aspirer des humains, Nero. Je ne peux pas te laisser faire comme tu as fait avec le fermier. Je ne veux pas revivre cela. Si tu veux les aspirer, fais-le. Mais je ne quitterai pas mon emplacement.

Nero se tenait raide, les bras le long du corps.

- Ils ont essayé de nous séparer, Shiro. Si on les laisse faire, ils nous sépareront ! C'est ce que tu veux ?

Sa voix tremblait, maintenant.

- Tu veux m'abandonner ? Tu veux qu'on ne soit plus ensemble ?

- Non ! cria Shiro. Je le refuse !

Il marqua un temps avant de baisser la tête.

- Je ne pourrais jamais me séparer de toi. Mais... Mais je ne peux pas non plus vivre comme ça ! Je ne peux pas haïr les humains quand je n'ai aucune raison de le faire.

- Si, tu as une raison.

Le ton de Nero montait d'un cran.

- Tu oublies Jin Satsu. Tu oublies ce qu'il t'a fait. Ce que la Shinra t'a fait. Ce que la Shinra nous a fait à toi, à moi, à ton père. Tu oublies tout cela ?

« Viens sur mes genoux, Shiro ».

Non, il n'oublierait pas.

- Je ne pourrais jamais l'oublier, Nero. Jamais ! Et je sais que toi aussi, tu ne pourras jamais l'oublier. Je sais que tu souffres tous les jours à cause d'eux ! Je sais que mon père te manque ! Je sais que tu pleures tous les jours parce qu'il n'est pas là ! Mais moi, je suis là ! Je suis toujours là !

Nero se figea, heurté par ses mots.

Ça y est. Il le disait.

- Si tu avais vu ce que j'ai vu, moi... Tu changerais certainement ta vision du monde.

- J'en doute, Shiro. J'en doute fortement.

- Nero... Tu ne peux pas continuer de haïr les humains comme ça. Qu'on le veuille ou non, on a besoin d'eux. On ne pourra jamais vivre comme ça éternellement isolés. Je sais que tu le souhaites. Mais moi, je ne le veux pas.

- Il est hors de question que je vive auprès des humains.

- Et le jour où on aura besoin d'aide ? Qu'est-ce que tu feras ? Tu veux vraiment continuer à vivre comme ça, dans la haine, dans le passé ? Pourquoi tu refuses de voir le monde tel qu'il est, Nero ? Pourquoi tu ne veux pas tout simplement avancer ?

Nero secoua la tête, refusant obstinément de l'entendre.

Shiro le fixa, désespéré.

- Je refuse d'avancer sans Weiss. Je le refuse.

- Tu as pu le faire pendant trois ans ! Tout seul ! Sans son aide ! C'est toi seul qui m'a élevé ! Toi seul ! Mon vrai père n'était pas là. J'ignore où il est mais tu étais là. Et je suis sûr que Weiss, même si je ne l'ai jamais connu, il te dirait la même chose que moi.

- Non... Non...

Nero se prit le visage dans les mains.

Les ténèbres crépitaient autour de lui, mais il ne le regardait plus.

- Il te dirait d'avancer, Nero. Il te dirait de continuer sans lui.

- Non !

Un jet de ténèbres frappa les murs, faisant soudainement trembler la pièce.

Cela fit frémir l'enfant, mais également tout le groupe.

- Hors de question que je vive avec les humains. Je ne le ferais pas. Je ne le ferais jamais.

- Nero...

- Je n'arrive pas à croire que tu... décides, après une journée, d'accorder ta confiance à ces personnes...

Alors, Nero ne l'écouterait pas...

Il devait l'admettre. Nero ne l'écouterait jamais, peu importe ses arguments.

Il serait toujours focalisé dans sa haine contre les humains, au point de détruire ceux qui avaient accordé une journée de bonheur à Shiro dans le monde extérieur.

- Je t'en prie, Shiro... Reviens près de moi.

Nero lui tendit la main.

Il paraissait presque... le supplier.

- Je ne veux pas que tu m'abandonnes... Je ne veux pas qu'on soit séparés. Je suis déjà séparé de ton père... Je suis déjà séparé de mon frère bien-aimé et je ne sais même pas quand je le reverrais. Je ne sais même pas s'il est en vie. Où il est. Alors s'il te plaît... Je ne veux pas te perdre non plus. S'il te plaît...

S'il te plaît...

Cela fut un choc pour l'enfant. Pourtant, Nero lui avait toujours assuré qu'il était sûr que Weiss était en vie. Qu'il était quelque part.

Maintenant, il lui disait qu'il n'était plus aussi sûr ?

Qu'il ne savait même pas s'il le reverrait ? Si Shiro lui-même le rencontrerait un jour ?

- Je ne retournerais plus dans le monde extérieur, promit Shiro.

Cela le tuait de dire ces mots...

- Shiro, l'appela Vincent. Tu n'es pas obligé de faire cela.

- Je ne retournerais plus dans le monde extérieur. Je resterais avec toi. Comme tu le désires. Mais... En échange, promets-moi que tu ne leur feras aucun mal si je rentre avec toi. Promets-moi que tu ne t'en prendras pas à eux.

Nero parut hésiter.

Son regard dériva de Shiro au groupe, avant de revenir à Shiro.

- Je resterais avec toi. Comme tu le désires. Je ne retournerais jamais plus dans le monde des humains. Je resterais avec toi, promit Shiro. Juste... ne t'en prends pas à eux.

Le silence tomba.

Nero ne répondit pas.

Il n'accepta rien, il ne refusa rien.

Après un long échange de regard avec le groupe, mais particulièrement avec Vincent, Nero finit par se détourner d'eux.

Il ouvrit un portail.

C'était le signe qu'il était temps de partir.

- Shiro.

L'enfant leur adressa un triste sourire.

- Merci pour la soirée, Vincent. Tu pourras dire... à Denzel et Marlène que... je suis désolé de ne pas avoir pu les revoir ?

Ni Lorraine, d'ailleurs.

Barret se raidit à la mention de Marlène.

- ... Je leur dirais, dit l'homme au gun-arm.

- J'aurais aimé jouer un peu plus longtemps, mais bon, dit l'enfant avec regret.

Il avait promis.

Il avait promis qu'il ne reviendrait pas, qu'il resterait avec son oncle...

Qu'il ne l'abandonnerait pas.

- Shiro, lui souffla Vincent alors qu'il s'apprêtait à rejoindre Nero.

L'enfant se retourna.

- ... Si jamais Nero te demande de faire quelque chose que tu ne désires pas, promets-moi que tu refuseras.

Shiro baissa la tête.

- J'essayerais.

Nero lui tendait le bras, prêt à quitter les quartiers de l'ORM avec Shiro.

C'était ce qu'il désirait, non ?

Repartir avec Nero...

Mais en même temps...

C'était injuste. Pourquoi ne pouvait-il pas avoir les deux ?

Le monde et sa famille ?

Juste... Pourquoi ?

Une seule journée... et il n'y en aurait pas d'autres.

- Au revoir, leur souhaita Shiro avant de se tourner vers le portail des ténèbres.

A demain. J'ai hâte.

Sans se retourner, Shiro franchit le portail, Nero à ses côtés.

Le portail se referma vite... Trop vite.

Comme si cette journée n'avait jamais existé.

Shiro n'osa pas regarder Nero.

Mais il n'eut pas besoin de le regarder. La phrase que son oncle lui adressa, d'une voix teintée de sanglots, manqua de l'achever :

- Jamais je ne te pardonnerais pour cela.