Si la mort du roi Robert Baratheon, bien que cela ait été considéré comme un accident, avait soulevé beaucoup de questions, ce ne fut pas le cas de celle d'Euron Greyjoy.
Bien sûr, tout le monde savait ce qui s'était réellement passé. Après tout, on avait tout de même retrouvé son cadavre au pied du château, brisé, comme l'avait été celui du roi Tommen lorsqu'il avait décidé de mettre fin à ses jours en se jetant par la fenêtre, mais cette fois-ci, il était juste en dessous de la fenêtre des appartements de la reine.
Il était évident que c'était elle qui l'avait tué, et pourtant, les gens n'en parlaient pas.
Ils n'étaient pas idiots.
Ils venaient à peine d'échapper à Daenerys Targaryen. Ils savaient que c'étaient en partie grâce à la reine que la menace que représentait la Mère des Dragons avait été évincée, mais ils n'avaient pas oublié la manière dont son règne avait débuté, et étaient parfaitement conscients que s'il y avait des débuts de rumeurs sur son implication dans la mort de celui qui avait été son mari pendant moins d'une journée, elle les ferait taire, d'une manière ou d'une autre.
La population de Port-Réal, et de Westeros, avaient été suffisamment épuisés par la dernière guerre, pour risquer à nouveau la mort, si peu de temps après avoir échappé au feu et au sang.
Donc, ils se taisaient.
Ils avaient fini par apprendre que s'ils laissaient la famille royale tranquille, ils les laisseraient tranquilles également.
Ce n'était donc pas une parfaite harmonie, maintenant que tout était fini, mais ils réussissaient à vivre relativement paisiblement, et c'était tout ce qu'ils voulaient, après les horreurs qu'ils avaient connues.
oOo
Jaime jeta un coup d'œil à la chaise vide d'Euron Greyjoy lorsqu'il entra dans la salle du Conseil Restreint, suivi de Sercilia.
Il sourit.
Il n'avait eu que ce qu'il méritait. Si cela n'avait tenu qu'à lui, il serait toujours en train de souffrir, et de mendier pour sa vie, ou plutôt, pours qu'on l'achève.
Jamais, de toute sa vie, il n'avait connu plus grande satisfaction à tuer quelqu'un que quand son épée, soutenue par la main de Cersei et la sienne, s'était enfoncée dans ses côtes.
Personne d'autre n'était encore là, alors, il s'assit à sa place, et se laissa aller au cours de ses pensées.
Son sourire s'élargit en songeant à ce qu'il avait à faire une fois que la réunion du Conseil serait terminée.
Il fut tiré de ses pensées par le bruit de la porte qui s'ouvrit pour laisser passer Tyrion et Sansa.
Les deux passaient de plus en plus de temps ensemble, et il était évident qu'ils s'étaient beaucoup rapprochés.
Lorsqu'ils s'assirent, ils échangèrent un regard lourd de sens, et Jaime se retint de faire une remarque à ce propos.
Il était content que son petit frère ait enfin trouvé quelqu'un de bien, quelqu'un qui lui correspondait, quelqu'un qui lui rendait ses sentiments.
Il méritait d'être heureux.
Ils n'eurent pas le temps de se mettre à discuter que Cersei et Qyburn, les deux personnes restantes, arrivèrent dans la pièce à leur tour.
Jaime sourit à nouveau.
La naissance devenait imminente. Le ventre de Cersei s'était considérablement arrondi, et elle semblait avoir de plus en plus de mal à se déplacer.
Tyrion fit remarquer à Cersei, l'air amusé :
''On a failli t'attendre.''
S'asseyant à sa place en bout de table, elle répliqua :
''J'aimerais bien t'y voir. Je suis tellement grosse que j'ai l'impression que je vais exploser. Cette petite ne peut pas arriver assez vite.''
Tyrion sourit. Il y a quelques semaines, il aurait été risible de penser qu'un jour, il plaisanterait avec sa grande sœur, et surtout, si peu de temps après s'être ouvertement affiché comme étant de son côté. Il haussa les sourcils :
''Persuadée à ce point que c'est une fille ?''
''Moi non. Mais ton frère, oui.''
Jaime fit mine de lever les yeux au ciel :
''Fille ou garçon, peu importe, tant qu'à la fin, le bébé et la maman sont en bonne santé.''
Mais alors que Cersei allait embrayer sur la suite, il ajouta :
''Mais c'est quand même une fille.''
Sansa, Tyrion et Qyburn éclatèrent de rire, tandis que Cersei regarda Jaime, faussement exaspérée.
''Bon. De toute manière, ce n'est pas le sujet d'aujourd'hui.''
Qyburn prit la parole :
''Nous devons nous occuper des seigneureries, les réattribuer pour celles qui n'ont pas de seigneurs, et s'assurer que celles qui en ont nous sont toujours fidèles.''
Sansa retint son souffle. Elle allait être fixée quant à l'avenir du Nord.
Tyrion lui avait dit pour la mort de Bran, ce qui signifiait que, selon l'ordre de succession, le Nord, Winterfell, et tous les titres qui s'y rattachaient étaient à elle.
Elle avait demandé à Cersei s'il était possible que le Nord obtienne son indépendance, mais elle n'avait toujours pas eu de réponse.
Après tout, pourquoi la reine accepterait de se défaire de l'un de ses royaumes ? Elle avait déjà fait une faveur à Sansa, en acceptant de la laisser rester à Port-Réal pendant la fin de la guerre contre Daenerys, guerre que le petit peuple commençait déjà à appeler ''La Guerre des Trois Reines''. Elle ne lui devait plus rien.
Il saisit un de ses papiers, et commença à lire ce qu'il était écrit dessus.
''Pour ce que l'on en sait, Lancehélion, Hautjardin et Castral Roc n'ont pas de seigneurs. Le Val a toujours Lord Robyn Arryn, seul fils de Jon Arryn. Avec l'assassinat de la maison Frey, il est probable que les seigneurs du Conflans veuillent que Vivesaigues revienne à Lord Edmure Tully. Ces deux seigneurs ne représentent pas une menace importante. S'il leur prenait l'envie de commencer une rébellion, nous serions parfaitement en mesure d'y faire face.'' Il regarda Cersei. ''Je pense qu'il est donc judicieux de laisser ces deux places-fortes entre les mains de leurs familles ancestrales, les seigneurs du Conflans et du Val seront plus à même de reconnaître leur autorité, et la nôtre, étant donné qu'on accepte de faire cette concession. Mais la décision vous revient, Votre Majesté.''
Sansa regarda Cersei.
Ces deux royaumes appartenaient à des membres proches de sa famille. Si Cersei acceptait de leur laisser leurs terres et leurs seigneureries, cela voudrait dire qu'elle avait un minimum confiance en eux, et donc, en elle.
Cersei acquiesça :
''Bien. Laissons donc le Val aux Arryn, et le Conflans aux Tully. Pour ce qui est de Lancehélion, nous avons tout intérêt à laisser aux Dorniens le soin de décider de qui sera leur nouveau prince. Etant donné leurs relations avec la Couronne, et les relations de notre famille avec les Martell, c'est le meilleur moyen de nous assurer qu'on ne se retrouvera pas avec une révolte sur les bras. Dans le cas de Hautjardin, je les ai promis à Ser Bronn de la Néra, en échange de son voyage vers le Nord. Il n'est pas encore revenu, mais Jaime m'a dit que, pour ce qu'il en savait, il est vivant, ce qui veut dire que le Bief et les titres qui s'y rattachent sont à lui. Winterfell et le Nord ne sont plus un problème non plus… '' Sansa retint son souffle. ''Etant donné qu'ils ne font plus partie des Sept Couronnes, ce qui veut dire que cela devient le royaume des Six Couronnes, je laisse le soin à leur dirigeante, Sansa Stark, d'annoncer aux Nordiens cette décision.''
Elle ponctua sa phrase d'un petit sourire à Sansa.
Cette dernière n'en revenait pas. Elle avait réussi à obtenir officiellement l'indépendance du Nord, que les Targaryen leur avaient prise, lorsque le Roi du Nord Torrhen Stark avait ployé le genou devant Aegon le Conquérant.
Elle se retint de hurler de joie.
Cersei reprit :
''Bien. C'est donc ça de réglé.''
Tyrion allait lui faire remarquer qu'il restait Castral Roc et les Terres de l'Ouest, mais il n'eut pas le temps de le faire avant qu'elle ne parle à nouveau, s'adressant à lui directement :
''Ce qui me fait penser que j'ai une demande à te faire, Tyrion…''
Elle attrapa une petite boîte en bois parmi la paperasse, et la fit glisser sur la table, jusque devant lui.
Avant de l'ouvrir, il plaisanta :
''Tu ne crois pas qu'il est un petit peu tôt, pour me faire ta demande en mariage ? Après tout, tu es à peine veuve…''
Elle leva les yeux au ciel, feignant l'agacement :
''Tu es insupportable. Tu ne veux pas juste l'ouvrir, et poser tes questions après ?''
Il sourit, et obtempéra.
Mais l'étonnement prit le dessus lorsqu'il souleva le couvercle de la boîte, et aperçut une épingle en forme de main dorée et brillante, semblable à celle que Qyburn arborait.
Il n'avait pas de mots pour décrire ce qu'il ressentait. Jamais il n'aurait cru que Cersei lui proposerait un jour d'être sa Main, jamais il n'avait osé en rêver, c'était trop beau, bien trop beau pour qu'il puisse l'imaginer.
Il regarda sa sœur :
''Tu penses que les gens accepteront pour Main de la Reine un traître qui a aidé Daenerys Targaryen à venir à Westeros ?''
Cersei répliqua :
''Père avait pour habitude de dire que le lion ne se soucie nullement de l'opinion des moutons. M'est avis qu'il avait raison à ce sujet. Peut-être que les gens n'accepteront pas le traître qui a aidé Daenerys Targaryen à venir à Westeros pour être ma Main. En revanche, ils accepteront le Seigneur de Castral Roc, et Gouverneur de l'Ouest.''
Tyrion mit quelques secondes à comprendre ce qu'elle sous-entendait :
''Comment ça, ils…''
Elle le coupa :
''Je ne saurais tolérer que, tant qu'il reste des Lannister de la branche principale, des membres des branches cadettes récupèrent les rênes du Roc.''
Tyrion acquiesça, sans pour autant vraiment réaliser ce qu'il venait de se passer.
Cersei venait de faire de lui le Lord de Castral Roc et des Terres de l'Ouest, Gouverneur de l'Ouest, et sa Main.
''Mais, et Qyburn ?''
Il tourna la tête vers ce dernier :
''Après une longue discussion avec Sa Majesté, nous avons convenu qu'avec la reconstruction de Port-Réal et le futur héritier de la Couronne qui arrive, il y aurait bien assez de travail pour deux.''
Tyrion sourit, presque béatement.
Cersei se leva, non sans difficulté :
''Bien. Alors, au travail.''
oOo
Dès que la séance du Conseil Restreint fut achevée, Jaime entraîna Cersei à l'écart :
''Est-ce que tu voudrais bien venir dans les jardins avec moi ?''
Cersei fronça les sourcils.
Ils avaient pris l'habitude de faire une balade dans ce qu'il restait des jardins du Donjon Rouge tous les jours, mais ils avaient bien été obligés d'arrêter, provisoirement du moins, à cause de la grossesse de Cersei, qui faisait qu'il était de plus en plus pénible pour elle de marcher.
Néanmoins, elle acquiesça, et elle se retrouva accrochée au bras de Jaime qui l'entraîna vers l'extérieur du château, leurs dæmons sur leurs talons.
Le soleil brillait doucement dans le ciel, l'hiver était bel et bien terminé, mais le printemps n'était pas encore tout à fait là.
Cersei sentait qu'elle allait regretter d'avoir accepté de faire cette promenade, quand, après seulement quelques pas entre les arbustes dont les bourgeons commençaient à peine à fleurir et les massifs, Jaime s'arrêta.
N'ayant pas la moindre idée de ce qu'il se préparait à faire, Cersei fronça à nouveau les sourcils, l'incompréhension naissante sur son visage, alors qu'il se tournait pour se mettre face à elle, et, avant qu'elle n'eut le temps de demander quoi que ce soit, il déclara :
''Je dois t'avouer que je n'aurais jamais cru avoir la possibilité de faire ce que je m'apprête à faire, mais… Nous y voilà. La guerre est terminée, tout va aussi bien qu'on pourrait l'espérer… Nous allons bientôt avoir un bébé… Alors, je pense que c'est le moment…''
Ce fut quand il posa un genou à terre que Cersei comprit ce qu'il était en train de faire.
Une vague intense de bonheur se répandit en elle.
''J'aurais dû faire ça il y a bien longtemps… Tu es la femme de ma vie, Cersei. Tu l'as toujours été, depuis le début, et tu le seras toujours…''
Il sortit une petite boîte de sa poche, et, avec un peu de mal à cause de sa main dorée, l'ouvrit pour révéler une splendide bague en or, sertie d'une émeraude au milieu, et de diamants tout autour, une véritable bague Lannister.
''Veux-tu m'épouser, Cersei ?''
Les lèvres qu'il sentit s'écraser contre les siennes et les bras qui vinrent s'enrouler autour de son cou étaient la seule réponse dont il avait besoin.
Sans hésiter, il lui rendit son baiser, prenant garde à leur petit lionceau entre eux.
S'écartant à peine, posant son front contre celui de Jaime, Cersei murmura :
''Oui… Oui, bien sûr que oui, je le veux…''
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Ce texte répond à des dettes prises sur le serveur Discord ''Les Défis Galactiques'' :
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- Prompt du 11/07/2020 – "Veux-tu m'épouser ?"
