Il était aux alentours de quatre heures du matin lorsque James fut tiré de son sommeil par Lily qui plantait des baisers un peu partout sur son visage. Elle ne lui adressait plus que très brièvement la parole depuis qu'elle avait trouvé la photo de Severus Rogue, une dizaine de jours auparavant, mais elle le réveillait toujours en pleine nuit de la même façon.

Ses mains remontèrent automatiquement le long de ses cuisses jusqu'au short gris qu'elle portait et qui avait un effet dévastateur sur lui, et il la sentit frémir contre sa bouche. Le tournant qu'avait pris leur relation le perturbait. Les mots n'étaient plus là, il n'y avait plus que ce moment où elle semblait le vouloir plus que tout et où il était incapable de résister, de la repousser, d'essayer même.

Il la voulait aussi. Constamment, comme une conséquence au fait qu'ils habitent maintenant ensemble. Les rares matins où elle se levait plus tôt que lui et où il se trouvait en face d'elle, à la regarder manger son petit déjeuner, il avait juste envie de l'allonger sur la table. Quand il rentrait du travail et qu'elle prenait sa douche dans la salle de bain du rez-de-chaussé après une séance de peinture intensive, il ne pensait qu'à la caler entre lui et la paroi comme il l'avait déjà fait chez ses parents.

Il lui manquait ses mots. Il aurait voulu l'entendre lui dire à quel point elle avait besoin qu'il la touche, mais elle ne lui accordait plus cette satisfaction, et lorsqu'il essayait lui même d'entamer une approche physique, elle le tenait à distance. Elle ne lui accordait son corps que lorsqu'elle était l'instigatrice d'un rapprochement entre eux. Elle se vengeait et il le savait.

Ce qu'il ne savait pas, en revanche, était le nombre de jours qu'il lui faudrait pour retrouver ce qu'ils avaient avant. Elle était là physiquement, sur lui, contre lui, et elle l'embrassait avec tout ce qu'elle avait, mais elle retenait ses mots, elle retenait l'intimité émotionnelle qu'ils avaient à ce moment là, quand il n'y avait plus que sa peau sur la sienne et ses doigts entremêlés aux siens, ses cheveux qui lui chatouillaient le visage et ses lèvres partout où il pouvait l'atteindre.

Ils n'avaient plus que l'intimité physique, et cela ne l'avait pas dérangé avec d'autres filles quand il était plus jeune et qu'il ne voyait rien de plaisant dans la stabilité d'une relation de couple, mais cette nuit là, avec Lily brûlante contre lui, il n'avait aucun mal à admettre que les sentiments lui manquaient cruellement. Il les ressentait, mais il avait besoin de les entendre, il avait besoin de les voir dans ses yeux, mais elle contrôlait absolument tout et il était en pièces, incapable de se collecter parce qu'il l'aimait trop et qu'il était terrifié à l'idée qu'elle puisse ne plus l'aimer de la même façon.

« Je t'aime. »

Il prononçait rarement les mots mais il les pensait toujours, et là, il n'avait pas pu les retenir. Il avait juste besoin de les laisser sortir. Il voulait qu'elle se rappelle que ces mots là ne partiraient jamais. Il sentit ses doigts se crisper sur les draps de chaque côté de son visage, son corps s'était figé à quatre pattes au dessus du sien et il aurait aimé s'habituer plus vite à la pénombre pour pouvoir voir son visage.

Il déplaça ses mains jusqu'à ses hanches et exerça une légère pression pour l'attirer contre lui. A sa grande surprise, elle se laissa faire et il soupira de soulagement lorsqu'il sentit son corps tout entier reposer sur le sien comme s'ils n'étaient qu'un. Sa bouche était contre son oreille et sa respiration saccadée devint soudainement son son préféré. Il avait besoin d'une étreinte comme celle-là depuis trop longtemps.

« Reste là. S'il te plaît. Juste comme ça, souffla t-il. »

Il déglutit lorsqu'elle poussa un léger soupir de protestation, mais elle resta paradoxalement sur lui et il sentit bientôt sa main sur sa joue, douce et délicate. Il n'était pas certain qu'elle allait rester là longtemps, mais ce geste le rassura un peu et il commença à lui caresser le dos doucement, retrouvant un peu la tendresse qu'il cherchait désespérément depuis leur dispute.

Il était beaucoup plus sentimental qu'il ne l'aurait jamais pensé depuis qu'il sortait avec Lily. Il n'en avait pas honte. Il aimait ça. Il avait besoin de sa proximité et il ne s'en cachait pas, alors le traitement qu'elle lui faisait subir ces derniers jours était pour lui un véritable calvaire. Il aurait tout donné pour l'entendre dire qu'elle l'aimait aussi. Il aurait tout donné pour qu'elle se niche dans ses bras sans arrière pensée. Il aurait tout donné pour remonter le temps et mettre un coup de pied au derrière de cet abruti qu'il était quand il n'avait pas su lui dire les choses au bon moment.

Il réalisa qu'il retenait sa respiration seulement quand elle se détacha de ses bras pour se rallonger à l'autre extrémité du lit dans un troublant silence qui lui fendit le cœur. Il se demanda pendant un instant si ce n'était pas pire que quand elle l'utilisait sans détour. Il n'allait pas dormir de la nuit, il le savait. Il tenta un geste dans sa direction, mais elle repoussa immédiatement sa main. Il inspira longuement et ferma les yeux. Elle le rendait malade.

Après s'être tourné et retourné pendant plusieurs heures, il décida de se lever. Il descendit les escaliers jusqu'à la cuisine, bailla longuement, le regard dans le vague, et se pencha sur le lavabo pour boire une longue gorgée d'eau avant de se rendre au salon et d'allumer une petite lampe d'un rapide coup de baguette.

Il s'allongea sur le canapé et tira le plaid de Lily sur ses épaules. Son parfum était partout. Il soupira. Elle était à l'étage mais elle lui manquait. Il voulait retrouver leur complicité. Il en avait besoin. Il ne pouvait pas continuer à dormir trois heures par nuit juste parce qu'il cogitait trop. Il aimait l'ambiance rassurante et chaleureuse du salon la nuit, éclairé seulement par la lampe que sa mère l'avait laissé prendre au manoir, mais il aurait largement préféré en profiter avec elle.

Elle projetait un faible halo orangé autour d'elle, assez lumineux pour qu'il puisse s'endormir sans problème, mais aussi pour qu'il puisse lire si l'insomnie ne le lâchait pas. Finalement, sa culpabilité eut raison de lui. Après avoir gardé les yeux rivés sur la lampe pendant un long moment, il décida qu'il ne pouvait plus vivre de cette façon. Il fallait qu'il fasse quelque chose, n'importe quoi pour arranger ses problèmes avec Lily, alors il s'habilla en vitesse, enfila son manteau, et hésita un instant avant de s'emparer de la photo qui traînait sur le buffet de l'entrée.

La seule idée qui avait germé dans son esprit n'était certainement pas la meilleure, il en était bien conscient, et quand il ferma la porte derrière du cottage derrière lui pour s'engouffrer dans la nuit, baguette en poche, il se haït un peu de ne pas lui avoir au moins laissé un mot sur la table de la cuisine.

Il transplana à deux pas du ministère et s'empressa de rejoindre le bureau des aurors. Il y avait toujours du monde, même à cette heure avancée de la nuit, mais il se recouvrit de sa cape d'invisibilité et profita du départ de l'un de ses collègues pour entrer avant que la porte ne se referme.

Sa mère lui avait raconté que le ministère montait un dossier contre Rogue alors il espérait qu'il aurait les réponses qu'il cherchait ici. Kinglsey Shackelbolt le frôla en se dirigeant vers les toilettes et il retint sa respiration. Quand l'auror s'arrêta à quelques pas de lui en fronçant les sourcils, il songea qu'il l'avait remarqué, mais il reprit son chemin quelques secondes plus tard et James ravala un soupir de soulagement.

Il esquissa un mouvement en direction du bureau de Maugrey Fol Oeil. Il savait que si des dossiers sensibles se trouvaient quelque part, c'était ici, mais il s'arrêta finalement devant les vestiaires à l'intérieur duquel deux aurors qu'il ne connaissait pas discutaient. De là où il se tenait, il voyait nettement le casier de Sirius, grand ouvert. Sa veste en cuir était restée là, comme le rapport qu'on leur avait expressément demander d'étudier.

Il se sentit étrangement seul à ce moment là. C'était la première fois que Sirius n'était pas à ses côtés pour se faufiler dans un endroit où ils n'avaient absolument pas le droit de mettre les pieds. Il décida de s'arrêter devant son casier en prenant soin de ne pas faire le moindre bruit, attrapa une plume et un morceau de parchemin qu'il y trouva, et laissa un simple mot « Je suis parti chercher Rogue. ». Il n'avait pas besoin de le signer, son meilleur ami aurait reconnu son écriture entre mille, il en était persuadé.

« … Vont renforcer les défenses du côté moldu, il entendit un auror dire à l'autre alors qu'il passait devant eux pour sortir des vestiaires.

- Fol Oeil pense que des attaques d'une autre ampleur se préparent un peu partout, lui répondit son camarade. »

Il n'écouta pas la suite de la conversation car, à quelques mètres de lui, la porte du bureau de l'auror en question venait de s'ouvrir à la volée, et l'homme au physique atypique traversa la pièce en appelant Shackelbolt. C'était le moment ou jamais.

Toujours recouvert de sa cape, il se hâta dans l'office à l'intérieur duquel se trouvaient des tas d'objets magiques qu'il n'avait jamais vu, certains à l'allure terrifiante comme un pot de fleur en forme de cœur humain à l'intérieur duquel dormait une plante dont s'écoulait un liquide pourpre, presque noir, semblable à du sang.

Il n'y avait aucun tableau au mur, probablement pour éviter que qui que ce soit ne puisse les utiliser pour avoir des informations sur ce qu'il se passait ici, pensa James tout en contournant un bureau en bois foncé qui ne contenait que deux minuscules tiroirs. Il n'y avait aucun placard, aucune armoire, rien d'autre pour ranger des dossiers. Juste ce bureau derrière lequel se trouvait une chaise absolument basique, comme celles que l'on trouvaient dans les salles de classe de Poudlard.

Il savait que Fol Oeil n'était pas un as de la décoration, mais cet endroit était aussi étrange que lui. Aucun des objets magiques qui s'y trouvaient n'étaient posés sur du mobilier. Ils étaient tous à même le sol, comme si l'auror avait déménagé dans la précipitation. Il savait cependant que ce n'était pas le cas car il avait déjà entendu Shackelbolt commenter avec ironie son « drôle de foutoir ».

Connaissant Maugrey, il ne s'était simplement pas installé. Il disait toujours qu'il fallait être prêt à partir dans la précipitation peu importe le lieu où l'on se trouvait. Vigilance constante, songea James en haussant les sourcils et en ouvrant le tiroir du bureau le plus proche de lui, surpris qu'un auror si pointilleux sur la sécurité n'ait pas au moins lancé un sortilège de verrouillage sur le seul mobilier où se trouvait probablement ce qu'il cherchait.

Cependant, à la seconde où il commença à fouiller à l'intérieur du minuscule tiroir qui, doté d'un enchantement d'extension, était infiniment plus profond qu'il n'y paraissait à l'oeil nu, une bruyante alarme retentit et sa main se retrouva engluée au meuble alors que l'autre tâtonnait désespérément sa poche opposée dans une drôle de contorsion.

Il finit par refermer ses doigts libres sur sa baguette et parvint à se décoller du meuble après avoir essayé absolument tous les sorts qu'il connaissait. Il dégota au même moment le dossier au nom de Rogue et eu juste le temps de voir l'adresse affiliée et de refermer le tiroir avant que Shakelbolt, Fol-Oeil, et Dawlish ne fassent irruption dans la pièce, baguette à la main. Il se faufila discrètement derrière eux alors que les trois hommes faisaient le tour de la pièce, hagards.

« Encore un problème avec cette fichue alarme. Ça fait deux semaines que je dis à Williamson de s'en occuper, gronda Maugrey sans pour autant arrêter de scruter la pièce dans ses moindres recoins. »

Le maraudeur était certain que s'il était resté une seconde de plus dans la pièce, Fol Oeil l'aurait remarqué. Il avait un sixième sens pour cela. Fort heureusement, l'antique cape d'invisibilité de James pouvait se jouer des êtres humains les plus brillants.

Quelques minutes plus tard, il était déjà sur Charing Cross Road. Il avait traîné sur le chemin de Traverse assez longtemps pour connaître les rues alentours, et Maiden Lane qui figurait sur l'adresse de Severus Rogue en faisait partie. Il retrouva rapidement l'étroite rue jusqu'à tomber sur un bâtiment à la façade en briques. Il portait le numéro 31, le même qu'il avait vu inscrit sur le dossier. Il jeta un bref coup d'oeil par dessus son épaule puis retira sa cape avant de frapper à la porte.

De l'extérieur, l'endroit semblait beaucoup trop luxueux pour un jeune homme comme Severus Rogue, mais James ne s'en alarma pas. Il avait l'habitude de ce genre de bâtiments, il baignait là dedans depuis toujours. Un bruissement d'ailes attira son attention vers le toit du bâtiment sur lequel un patronus en forme d'oiseau était perché. Il fronça les sourcils et s'emmitoufla un peu plus dans son manteau au moment où une bourrasque souffla si fort que la porte s'ouvrit à la volée devant lui dans un grincement sinistre.

L'oiseau se mit à piailler au dessus de lui lorsqu'il fit un pas à l'intérieur, frappant une nouvelle fois à la porte tout en gardant les yeux vissés vers le long couloir sombre qui s'étendait devant lui. Les murs étaient recouverts d'une vieille tapisserie indigo à motifs anciens déchirée par endroits, et sur le sol s'étendait un long tapis de couloir oriental rougeâtre qui avait certainement autant vécu que le papier peint. Une odeur de moisissure régnait dans l'endroit et il plissa le nez en s'y engouffrant, tirant sa baguette de sa poche pour la brandir devant lui.

Son cœur se mit à battre un peu plus fort lorsqu'il atteignit l'angle du couloir et qu'il vit un halo de lumière émaner d'une pièce à quelques mètres de là où il se tenait. Il retint sa respiration avant de faire apparaître une faible lumière au bout de sa baguette, soucieux de vérifier où il marchait pour ne pas se faire surprendre.

Il avait l'habitude de se retrouver dans des endroits où il n'avait rien à faire, mais pour une fois, il était arrivé ici sans aucun plan. Il avait juste prévu de discuter avec Rogue, de tirer les choses au clair pour Lily, et cela lui semblait à présent profondément absurde. Le bâtiment dans lequel il se trouvait reflétait l'âme du Serpentard. Il était triste, inhospitalier, malsain, et James savait jusque dans ses tripes qu'il n'aurait jamais dû y mettre les pieds.

Pourtant, il fut incapable de reculer. Sa curiosité et son entêtement eurent raison de lui, et il poursuivit son chemin le plus discrètement possible, contournant habilement une sellette en noyer aux pieds recourbés sur laquelle reposait le buste de Phineas Black que James avait déjà vu sur l'une des photos de famille que Sirius avait brûlé dans leur dortoir en sixième année, manquant de mettre le feu à toute la tour Gryffondor.

La statue cligna des yeux lorsqu'il passa devant. Plus il avançait, plus il entendait des voix entremêlées, et il se plaqua contre le mur du couloir lorsqu'il arriva au niveau de la pièce dans laquelle des chandeliers étaient allumés. Il retint sa respiration et tendit l'oreille à l'affût du moindre bruit.

« … Pensent qu'ils sont si malins alors que le maître à déjà cent coups d'avance ! ricana Avery, James reconnut aussitôt sa voix.

- Tais-toi ! D'après Black, nous ne sommes plus seuls. Hominum Revelio ! »

Une seconde plus tard, Severus Rogue se trouvait en face de James, baguette pointée sur sa gorge. Le jeune maraudeur déglutit et sentit la sienne lui glisser des mains lorsque l'ancien serpentard le pétrifia avant qu'il n'ait eu le temps de faire le moindre mouvement.

« Potter... Je ne suis même pas surpris, toujours en train de fouiner... marmonna t-il de sa voix traînante en ramassant la baguette qui était tombée devant lui. »

Une seconde plus tard, Avery, Mulciber, et Lucius Malefoy apparaissaient dans son champ de vision. Le dernier donna un coup de pied dans ses jambes avant de faire signe à Mulciber et Avery de le porter jusque dans la pièce où ils se trouvaient tous initialement. Elle était vaste et regorgeait de dorures affreuses.

« Tu crois qu'il est venu seul ? demanda Mulciber à Rogue.

- Où est ton petit-ami, Potter ? l'interrogea Avery, faisant clairement allusion à Sirius.

- Personne d'autre, affirma Severus en observant James d'un drôle d'air.

- Parfait, murmura Lucius avant d'installer James sur une chaise. »

Il brandit sa baguette devant lui et une corde rampa doucement vers l'ancien préfet en chef à la manière d'un serpent, se faufilant autour de ses jambes puis jusqu'à ses bras, l'étreignant fermement de façon à ce qu'il ne puisse bouger aucun de ses membres, même lorsque Rogue leva son maléfice de pétrification. Seuls ses avants bras étaient mobiles, mais ils ne lui seraient d'aucune aide à un contre quatre.

Sa respiration était devenue saccadée. Quel idiot. Comment avait-il pu croire une seule seconde que les choses seraient simples ? Comment avait-il pu songer que c'était une bonne idée de partir à la rencontre d'un présumé mangemort en pleine nuit sans prévenir qui que ce soit ?

« Je vous l'avais bien dit, reprit Rogue. Le ministère nous surveille. »

Ce fut à ce moment là que James réalisa qu'il y avait peut-être moyen de tourner les choses à son avantage. Il sentait la baguette d'Avery appuyée sur sa joue et il savait que ce n'était qu'une question de temps avant qu'il ne commence à s'entraîner à pratiquer ses sorts impardonnables sur lui, alors il prit la parole.

« C'est vrai. Le ministère vous surveille, déclara t-il d'une voix plus grave que d'ordinaire.

- Ferme là, traître à ton sang ! braya Mulciber avant de se faire interrompre par Lucius qui brandit son index devant lui d'une façon totalement insultante.

- Continue, Potter, lui ordonna t-il en pointant sa baguette sur lui.

- Ce n'est qu'une question de temps avant que la brigade d'aurors ne déboule ici si je ne sors pas en un seul morceau. »

Il y eut un échange de regard entre Avery, Mulciber, et Rogue, mais Malefoy garda les yeux solidement rivés sur James. Ils savaient tous que le maraudeur n'avait plus aucun doute sur leur implication dans la guerre mais quoi qu'il arrive, ce serait sa parole contre la leur. A moins que...

« Et Merlin sait que vous ne voulez certainement pas qu'ils perquisitionnent l'endroit, tenta James alors que son regard déviait vers une table sur laquelle était posé un énorme chaudron qui laissait échapper des vapeurs qui ne lui disaient rien qui vaille.

- N'est-ce pas ce qu'ils t'ont envoyé faire ? lui demanda Avery.

- Non, répondit aussitôt James. Je suis venu de mon propre chef.

- Potter a encore décidé de braver toutes les règles pour jouer au héros, c'est tout, expliqua Severus en lui jetant un regard méprisant.

- Lucius, qu'est-ce qu'on fait ?

- Il reste, décida le plus âgé. Questionnez le, il a sûrement des choses très intéressantes à raconter.

- Mais... Le ministère... s'inquiéta Mulciber.

- Il bluffe. Black serait déjà venu à sa rescousse s'il savait qu'il se trouvait là. Dans tous les cas, il vaut mieux que je parte avec la potion.

- Pourquoi tu partirais ? l'interrogea Avery. Et si les aurors débarquent ici ?

- Le maître la veut avant l'aube, lui glissa Malefoy sur un ton froid.

- Ce n'est même pas toi qui l'as faite et tu vas t'attirer toute la gloire ? reprit Mulciber avec amertume.

- Allez-y tous les trois, je vais passer un moment avec Potter, trancha Rogue. »

Tous soucieux d'être celui qui ramènerait le précieux élixir à Voldemort en personne, ils quittèrent la pièce avec précipitation après avoir rempli plusieurs fioles du liquide nacré qui se trouvait dans le chaudron, ne laissant plus que Severus avec James. C'était exactement ce qu'il avait espéré. Il voyait sa baguette, enfoncée dans une poche de sa robe de sorcier, et il savait qu'il avait peu de chance de s'en sortir à moins de la récupérer.

« Détache-moi, lui dit-il en se dandinant légèrement sur sa chaise.

- Oh mais je vais le faire, Potter, mais je veux profiter un peu avant. Comme je te l'ai déjà dit il y a un moment, j'ai des sorts qui ne demandent qu'à être testés, cracha le serpentard qui rangeait à la hâte les ingrédients qui se trouvaient toujours sur la table.

- Je ne pense pas.

- Encore une fois, pas aussi intelligent que tout Poudlard s'évertuait à le dire, grinça Rogue.

- Elle ne te le pardonnerait jamais. »

Sa main s'arrêta au dessus d'un gros livre qu'il s'apprêtait à ranger, comme suspendue dans le temps. Sa mâchoire se serra et il vit à l'expression de son visage qu'il avait parfaitement compris à qui il faisait allusion. James savait que Lily la sortirait de cette situation. Même absente, elle était beaucoup plus forte que lui.

« Sirius est au courant que je suis ici. S'il m'arrive quelque chose, Lily saura que tu es responsable, poursuivit-il. »

Severus continuait à ranger obstinément les ustensiles, en envoyant quelques un dans une armoire d'un coup de baguette vif et précis comme s'il ne l'entendait pas, mais ses doigts étaient si crispés sur sa baguette que ses jointures étaient blanches et James était assez observateur pour l'avoir remarqué.

« J'ai quelque chose à toi. Dans la poche droite de mon manteau. »

Cette fois, Rogue se tourna vers lui et fronça les sourcils. Ses cheveux noirs tombèrent partiellement devant ses yeux et dès que son regard croisa le sien, il sut à quoi il faisait allusion. Ils se toisèrent un long moment. C'était étrange à quel point la haine pouvait remplir le silence.

« Tu l'as laissée tomber ce jour là, à Pré-au-Lard, n'est-ce pas ? continua t-il, sachant pertinemment à quel point sa phrase était à double sens. Est-ce que tu sais seulement comment elle s'est sentie quand elle est arrivée devant Scribenpenne et qu'elle a vu cette inscription en feu sur la devanture ?

- Ce n'était pas moi, murmura t-il enfin.

- Est-ce que tu sais qu'elle aurait pu mourir ce jour là ? insista James sans prêter la moindre attention à sa réponse. »

Il allait poursuivre mais Rogue passa devant lui à toute vitesse et il l'entendit vomir ses tripes dans le couloir. Il tenta vainement de se libérer des liens qui l'enserraient toujours avant que l'ancien serpentard ne réapparaisse et ne se penche au dessus de lui pour fouiller maladroitement les poches de son manteau. C'était le moment où jamais. Il tendit sa main autant que la corde le lui permettait, s'empara précipitamment de sa baguette, et le stupéfixa, le projetant inconscient à quelques mètres de là avant de se libérer.

Il s'empressa de donner un coup de pied dans la baguette de Rogue qui vola à l'autre bout de la pièce, plongea sa main dans sa poche à la recherche de la photo dont le serpentard n'avait pas réussi à s'emparer, et la lui lança dessus avant d'articuler « Finite ».

« Maintenant, j'ai une proposition à te faire, déclara t-il alors que Rogue reprenait ses esprits. Soit on en termine une bonne fois pour toutes et les aurors et Lily seront définitivement fixés sur ton compte quoi qu'il arrive, soit... Soit je pars comme je suis entré.

- Qu'est-ce qui me prouve que tu ne vas rien raconter à qui que ce soit ? répliqua l'autre en refermant avec avidité ses doigts sur la photo que James lui avait rendue.

- Rien, répondit James sur un ton neutre. Je vais en parler, mais pas au Ministère. »

Rogue fronça les sourcils et lui jeta un regard glacial. James avait l'avantage et si cette altercation avait eu lieue deux ans plus tôt, les choses n'auraient certainement pas tourné de la même façon, mais il avait le sentiment étrange que la décision qu'il venait de prendre était la bonne.

« Je ne le fais pas pour toi, je le fais pour elle. Lily te laisserait t'en tirer. Elle te dirait que tu peux encore changer d'avis.

- Idiot ! Pesta Severus. Tu n'as aucune idée de...

- Je sais ce qu'elle ferait si elle était là à ma place, ça devrait te suffire, le coupa t-il. Reprends-toi, Rogue. Elle compte encore sur toi. »

Il avait détesté prononcer ces derniers mots alors il était parti presque immédiatement, persuadé jusqu'au plus profond de lui même que cela suffirait à ce que le serpentard ne le suive pas, et il eut raison puisqu'il émergea du bâtiment sans problème, l'air froid s'engouffra de nouveau dans ses cheveux et remplit ses poumons comme si c'était sa dernière bouffée.

Le jour commençait doucement à se lever et l'oiseau argenté était toujours sur le toit. Il réalisa à ce moment là qu'il appartenait sûrement à l'un des aurors chargé de surveiller l'endroit, et il savait qu'il aurait des comptes à rendre dès qu'il arriverait au ministère mais bizarrement, cela l'effrayait beaucoup moins que la discussion qu'il aurait avec Lily.