OOC : Bonjour à tous. Je vous présente le dernier chapitre de Suis-moi. Merci à tiredvampire, Hahn Yan Thel et cosmothediclonus pour votre suivi et vos reviews. J'espère que la suite vous plaira tout autant. Je dois avouer que même si je vais m'atteler à la suite dans pas trop longtemps, je vais surtout attendre un peu la sortie de Intergrade (par rapport à Weiss notamment. Sans faire ma fangirl, je croise les doigts pour qu'on voie Nero aussi. Et qu'on approfondisse leur relation, sans qu'on détruise ce qu'elle était dans Dirge of cerberus donc j'espère qu'ils vont sortir quelque chose de super).
J'ai écrit ce chapitre avec la musique « Cherry Wine » de Hozier en tête.
Sur ce, bonne lecture !
Ce fut Vincent qui leur avait donné les clefs de leur nouvel appartement.
Suite à la signature de l'accord avec Rufus, Nero avait dû attendre encore quelques jours dans sa cellule. Selon les mots de Vincent, il fallait encore effectuer quelques préparatifs pour pouvoir les accueillir. Nero ne doutait pas qu'ils évoquaient leur nouveau logement, il ne doutait pas qu'il y avait Shiro qui était encore faible et qui devait se reposer quelques jours supplémentaires dans l'aile médicale de l'ORM.
Mais cela n'avait pas empêché à Nero d'éprouver un certain agacement. Il aurait désiré sortir tout de suite. Il aurait souhaité rejoindre l'enfant et qu'ils en finissent le plus vite possible. Mais cela n'avait pas été le cas.
Parce qu'il devait se rappeler que Nero n'était pas libre.
Il était en surveillance conditionnée. Ils avaient parlé d'un bracelet électronique, ainsi qu'une « apparence humaine » qu'il manifesterait à l'égard des autres humains, pour se fondre dans le décor et notamment restreindre encore plus l'usage de ses ténèbres.
Nero n'était pas sûr de savoir ce qu'ils sous-entendaient par là. Restreindre ses ténèbres... Oui. Au début, durant toute son enfance et pendant une partie de son adolescence, Nero s'était détesté.
Il s'était détesté à cause d'elles, de ses pouvoirs, parce qu'il avait cru les mots des scientifiques et de Restrictor qui lui répétaient encore et encore combien Nero était une abomination et sa seule existence en elle-même était un péché.
Aujourd'hui, Nero les avait acceptées. Elles étaient devenues une partie de lui-même. Aussi important qu'un cœur qui batte.
Mais maintenant, il devait à nouveau les contenir. Et on allait le soumettre à une nouvelle « expérience », même si ni Reeve, ni Rufus Shinra n'employaient ce terme.
Jouer le jeu.
Telle avait été la décision de Nero.
Il allait se soumettre à leur jeu pendant un temps, juste le temps qu'ils retrouvent Weiss et afin d'observer si la nouvelle vie qu'on leur offrait convenait à Shiro.
Le jour où on était venu lui poser, sous haute surveillance, le bracelet électronique à sa cheville, Nero sut que son départ de la cellule était imminent. Que ses retrouvailles avec Shiro arriveraient très vite.
Il aurait voulu demander comment les autres membres de l'ORM avaient réagi, comment Shelke elle-même avait réagi en apprenant que Nero ne serait pas soumis à un procès, qu'ils ne se débarrasseraient pas encore de lui tout de suite...
Mais il avait préféré se taire à ce sujet. La seule chose dont il s'était autorisé avait été un bref commentaire en direction de Vincent lorsque ce dernier était venu lui donner l'adresse, ses papiers et les clefs de l'appartement :
« ...Je crois que nos destins seront désormais éternellement liés, malheureusement. »
Vincent n'avait pas répondu. Il s'était contenté de garder le silence avant de s'écarter pour laisser Nero quitter sa cellule pour rejoindre l'hôpital où l'attendait l'enfant.
Mais pour Nero, c'était une certitude.
Leurs destins seront à jamais entremêlés.
Mais cela n'importait pas Nero. Il pourrait endurer Vincent, il pourrait endurer Shelke, Reeve et le reste de l'humanité si cela lui permettait de parvenir à ses objectifs.
L'ancien Tsviet jeta un regard à Shiro, encore assis dans son fauteuil roulant.
- ... Prêt ? lui demanda-t-il, le ton tendre.
Shiro sourit en guise de réponse.
- Prêt.
Nero enfonça la clé dans la serrure.
La porte devant eux s'ouvrit en grand.
Ici.
Leur nouveau logement. Nero hésita quelques secondes, demeurant immobile sur le pas de la porte.
Non. Il n'y avait pas d'embuscade. Personne à l'intérieur.
Un réflexe qu'il garderait éternellement. Nero poussa le fauteuil roulant devant lui pour se rendre dans l'entrée.
C'était un salon tout simple, tout en blanc orné de marron. Un canapé beige, une petite télévision au centre de la pièce. Une kitchenette adjacente avec un frigo et des plaques pour faire chauffer les aliments.
Nero ne put s'empêcher de se demander si quelqu'un avait déjà logé ici avant eux. Mais il effaça cette pensée alors qu'il guidait Shiro à travers les pièces.
Une salle de bain... une douche, des toilettes et un labo, le carrelage bleu et blanc...
Puis, enfin les chambres. Il y en avait deux : une au papier peint bleu pâle, un lit simple d'enfant et un petit bureau. L'autre consistait en un papier peint sombre mais qui possédait les mêmes meubles que la première.
Nero aurait aimé un lit double pour la sienne. Au cas où il accueillerait une troisième personne. La seule qu'il attendait. Mais il secoua la tête à cette pensée. Quel intérêt ? Il ne dormait plus, après tout. Il n'en avait pas besoin depuis qu'il avait été rejeté par la Rivière de la Vie.
- Regarde, Papa Nero, lui montra Shiro. Un balcon.
Oui.
Une fenêtre avec un petit balcon, avec vue sur la ville d'Edge.
Nero comprit la demande de Shiro. Il s'avança vers la fenêtre pour l'ouvrir, laissant le fauteuil roulant dans l'entrebâillement pour que l'enfant et lui puissent profiter de l'air.
Ils restèrent comme ça, pendant de longues minutes, à ne pas parler, à contempler l'horizon qui s'étendait à perte de vue devant eux.
C'était faible, comme sensation.
Il y avait presque... un vent de liberté.
Mais il ne doutait pas qu'il était surveillé. En bas de l'immeuble, Nero put remarquer une voiture noire avec deux individus à l'intérieur, les yeux rivés sur leur étage.
Nero préféra les ignorer.
Au-dessus d'eux, la nuit. La vraie nuit. Pas la nuit verdâtre dans laquelle ils avaient vécu pendant trois ans.
- ... Regarde, Shiro.
L'enfant leva la tête.
Les étoiles commençaient à apparaître.
Je te promets que tu verras les étoiles.
Qu'on ira les voir ensemble, tous les trois.
Malgré tout, l'enfant souriait. Il y avait une lueur de tristesse dans ses yeux, ce qui fendait le cœur de son oncle à cette vue.
Mais il gardait le sourire.
- C'est plus beau qu'à la télévision.
Nero approuva.
- C'est plus beau que ce que toutes les simulations pouvaient imiter à Deepground.
De la brise frappa leurs cheveux. Il entoura ses bras autour des épaules de Shiro, ayant peur qu'il attrape froid.
- Et si on rentrait ? Je crois qu'il y a une pizza au frigo.
Reeve et Rufus avaient vraiment mis le paquet sur l'opération « séduction ». Mais Nero n'était pas dupe. C'était juste pour les acheter. Acheter l'enfant, surtout.
Shiro sourit.
- C'est parfait.
Tant que cela faisait plaisir à l'enfant.
Nero le fit rentrer à l'intérieur et ferma la fenêtre.
Ils firent chauffer la pizza que Shiro mangea sur le canapé, Nero l'observant manger avec un léger sourire derrière son masque.
Il ne s'était pas plaint de la situation.
Il ne savait même pas si l'appartement lui plaisait. Ou peut-être avait-il besoin de temps pour s'adapter ?
Oui. C'était sûrement le cas.
« Tiens. »
Lorsque Shiro eut fini sa pizza, Nero se leva du canapé pour rouvrir le frigo. Il récupéra quelque chose à l'intérieur avant de le refermer.
Discrètement, il ouvrit le paquet et posa dessus une bougie qu'il alluma.
Lorsque Nero revint avec la tarte, les yeux de Shiro s'éclairèrent tandis qu'il fixait la bougie allumée, ébahi.
- ... Je crois me rappeler qu'on a quelque chose à fêter aujourd'hui.
Il posa la tarte sur les genoux de l'enfant. Précautionneusement, Nero se glissa derrière lui pour lui tenir les cheveux et éviter qu'il se brûle les mèches quand il se pencherait pour souffler la bougie.
Shiro lui adressa un regard malicieux.
- Avoue. Tu y as pris goût.
- Pas du tout, mais cela te fait plaisir.
- Oui, oui, répéta Shiro, nullement convaincu.
Nero leva les yeux au ciel. Il n'était pas question qu'il y ait pris goût. Il demeura sur sa position tandis que Shiro ricana avant de se pencher pour souffler les bougies.
- Huit ans... constata Nero.
- Hm ?
- Rien. Cela passe tellement vite.
Trois ans... Trois ans depuis qu'ils s'étaient rencontrés. Nero l'étreignit contre lui avant de lui avouer :
- Je suis désolé. Je n'ai pas de cadeau à disposition.
Shiro lui rendit l'étreinte.
- Cela ne fait rien, Papa Nero. En fait, tu m'en as déjà fait un.
- Vraiment ?
Oh.
Il venait de comprendre.
Bien sûr.
- Je ne pouvais pas rêver mieux, lui adressa Shiro tandis qu'il le serrait contre lui une nouvelle fois.
Une fois que Shiro fut lavé et installé dans sa nouvelle chambre, dans son lit, Nero se préparait à le border.
« Hé ? »
Nero le regarda, curieux.
- ... Tu peux rester dormir avec moi, ce soir ? lui demanda Shiro d'une petite voix.
- Tu es un peu grand pour cela, Shiro.
Les mains repliées sur sa couverture, Shiro baissa la tête, un peu gêné.
- C'est juste que... j'ai peur de cette nouvelle chambre. Je ne me sens pas de dormir ici seul, cette nuit.
- Tu risques d'avoir des cauchemars, Shiro. A cause de mes pouvoirs. Rappelle-toi.
Shiro haussa les épaules.
- ... Je le sais. Mais je sais à quoi cela ait dû. Tu pourras toujours me consoler si je me réveille avec toi.
- Shiro...
Il ne souhaitait pas effrayer l'enfant.
- S'il te plaît... juste ce soir, le supplia l'enfant, lui offrant ses célèbres yeux de chien battu. Les cauchemars ne me font pas peur. Je veux seulement être avec toi. S'il te plaît.
Nero le contempla, hésitant mais néanmoins attendri s'allumant dans ses yeux.
Combien de fois avait-il demandé à Weiss la même chose ? Sans raison particulière, si ce n'était pour avoir sa présence à ses côtés.
Ils étaient seuls contre le monde...
- ...Il ne faudra pas te plaindre, Shiro. Seulement pour cette nuit.
- Je suis sûr que je ne me plaindrais pas, jura Shiro.
Nero en doutait.
De toute manière, Nero ne serait pas en mesure de dormir. Il ne pouvait même pas se téléporter au risque que son bracelet électronique sonne et avertisse qu'il avait dépassé le périmètre.
S'il insistait...
Il pourrait surveiller le sommeil de l'enfant et intervenir s'il se réveillait en hurlant.
A moitié convaincu, Nero se glissa dans le lit de l'enfant, sous les couvertures. L'enfant sourit à sa réaction et le serra contre lui tandis qu'il enfouissait son visage dans sa poitrine.
Puis, ses yeux papillonnèrent avant de se fermer lentement, glissant doucement dans l'inconscience.
Nero ne cessa jamais de le regarder, lui caressant les cheveux en signe de tendresse.
Cette nuit, Shiro ne fit aucun cauchemar.
La nuit fut paisible... Et Nero la passa à contempler les étoiles à travers la fenêtre de la chambre de l'enfant.
Il avait oublié la sensation que cela faisait... Observer les étoiles. Les vraies étoiles.
« Si tu te laisses faire, tout sera plus agréable. Ils te laisseront partir. Accomplis seulement ton devoir. Tu seras libre. »
« Je serais gentil. »
« Restrictor. Ne vas-tu pas me libérer ? »
« Je veux essayer mes nouvelles épées. »
« Commençons. »
« Oui... Unissons-nous. »
« Unissons-nous. Allons le rejoindre. »
« Nero... »
« Vous êtes... un ami ? »
« ...Si on veut. Ferme les yeux. »
« Levons les rideaux sur l'acte final, mon frère. »
Réprimant un râle au fond de sa gorge, il eut l'impression qu'un flot de pensées qui n'étaient pas les siennes avait envahi sa tête, son corps...
Des pensées de tout individu...
Homme, femme, enfant...
Des pensées douloureuses, surtout.
Des cris de terreur, d'agonie...
Deepground.
Il n'y avait que ces cris à Deepground... Même s'il y avait également...
Non. Il y avait quelque chose de plus.
Quelque chose... quelque chose...
C'était comme s'il était seul au monde.
Weiss peina à ouvrir les yeux.
Au début, il ne vit rien. Tout fut tellement sombre.
La première chose qu'il ressentit fut la sensation d'être assis sur une chaise, sur un fauteuil.
Etait-il retourné à Deepground ?
Etait-il sur son trône ? Le trône de l'Empereur de Deepground ?
Pourquoi... s'était-il réveillé de ce rêve ?
Il n'y avait que des cauchemars à Deepground.
Des cauchemars ou des rêves... vides, sans aucun sens.
Ici, ce ne fut pas le cas.
Un rêve où il observait les étoiles...
Un rêve où il était avec...
Tout était si confus dans sa tête...
Combien de temps avait-il dormi ? Il ne se rappelait plus de rien.
« ...Weiss », l'appela une voix.
L'homme aux cheveux blancs cligna des yeux, le regard vide.
Cette voix... elle paraissait si étrange... si familière.
Où l'avait-il déjà entendue ?
- Où suis-je ?
« Levons les rideaux sur l'acte final, mon frère. »
Frère ?
Il n'en avait qu'un seul. Il n'en avait qu'un seul.
Mais ce ne fut pas lui qui l'avait appelé. Ce ne fut pas lui qui l'accueillit.
Non...
Lorsque la vue fut enfin nette, il remarqua une silhouette grande. Un homme aux cheveux très longs, au manteau rouge...
- Bon retour parmi nous, Weiss.
Au premier abord, Weiss ne le reconnut pas.
Il le scruta, sans comprendre. Qui était-il ? Que lui voulait-il ?
Pourquoi était-il ici ?
- ... J'ignore qui vous êtes, déclara-t-il, la voix rauque.
L'homme ne parut pas surpris.
- Pourtant, nous partageons des liens très particuliers, toi et moi. Autrefois, tu disais même qu'il s'agissait du lien « le plus précieux » qui pouvait le rattacher à un homme.
L'inconnu se raccrocha. Il parut... détaché. Quand bien même il l'avait salué, lui avait souhaité un bon retour, il n'y avait aucune chaleur dans ses mots.
Le lien « le plus précieux » ?
Weiss ne comprenait pas de quoi il parlait.
- ... J'ignore vraiment qui tu pourrais être. Pour moi.
- Je pense que si tu cherches, tu parviendras à trouver. J'ai en réalité plusieurs noms. Certains m'appellent « la Genèse ». D'autres me surnomment « Le Gardien ». Mais encore d'autres me prénomment « G », tout simplement.
G...
Malgré le chaos, malgré le nuage qui embrumait sa tête, Weiss tiqua. Ce nom lui parlait, cette lettre lui était plus que familière.
« Projet G ».
Mais... acceptera-t-il son sort ?
- ... Toi, gronda Weiss, le ton froid.
Alors, il était de retour.
Cet homme qu'il avait appelé son frère autrefois... Lui était revenu ?
Weiss le toisa, un silence pesant envahissant les deux hommes. G hocha la tête, comme s'il s'attendait à cette réaction.
- Je sais. Je suis la dernière personne que tu t'attendais à revoir. Que tu désirais revoir.
- ... A part Restrictor et Hojo. Tu es troisième sur ma liste, railla Weiss sans un sourire.
G approuva.
- Je m'en doute bien. Est-ce que tu te souviens de quelque chose ? De comment tu es arrivé là ?
- ... Je suis mort, n'est-ce pas ?
« Unissons-nous. Allons le rejoindre. »
C'était l'explication la plus logique.
Il était retourné à la Planète... Il revoyait quelqu'un qui était censé être mort.
Mais... cela ne ressemblait pas à l'idée qu'il se faisait de la Rivière de la Vie, ayant baigné dedans pendant la majeure partie de sa vie.
- ... Oui et non, en réalité, lui répondit G. Mais peut-être aurait-il mieux valu que tu le sois.
- Je n'ai rien à recevoir de toi.
- Tu as été rejeté par la Rivière de la Vie.
Pourquoi ne pouvait-il pas mourir ?
Il s'était préparé à la mort depuis longtemps.
Avec Restrictor, avec son virus surtout.
Pourquoi ne pouvait-il pas mourir et retourner à la Planète, si tel était son destin ?
- La Planète a un autre rôle pour toi, Omega. C'est l'unique raison pour laquelle tu es encore en vie.
Weiss fronça les sourcils, toisant G sans le comprendre.
- Je me moque bien du rôle que la Planète a pour moi, maintenant.
- Tu préfères que je le dise ? Que tu l'entendes ?
G soupira.
- ... On a besoin de ton aide, Weiss.
Ah oui ?
Weiss lui adressa un sourire mauvais.
- Hors de question que je t'aide. Pas après ce qui s'est passé.
« J'ai assez de sang sur mes mains. »
« Nous sommes frères. Que tu le désires ou non, nous sommes de la même famille. »
« ... Je ne veux plus causer de tort à quiconque. »
- Autrefois, je t'avais demandé ton aide. Mais tu as refusé. Tu m'as rejeté.
G ne montra aucun signe de regret. Ni même de tristesse.
Mais qu'était-il, à présent ? Weiss ne comprenait plus rien. Weiss avait perdu son humanité il y a longtemps, s'il en avait eu une un jour. G... s'y était accroché. Avait cru en posséder une malgré les circonstances.
- Vous auriez tout détruit, Weiss. En sortant, vous auriez tout décimé sur votre passage. Et la Planète n'avait pas prévu ce rôle pour vous à l'époque.
Weiss le toisa, ne cessant pas de sourire.
- Tu sais ce que ton frère a fait ? Nero ?
Weiss tiqua à la mention de son nom.
Tout de suite, son sourire disparut. Il voulut se lever mais il n'en eut aucunement la force.
Comme s'il était prisonnier de son propre corps.
- Il a réveillé Omega. Pour que tu en deviennes l'hôte. Pour le meilleur et pour le pire, tu es à présent ce qui représente la Fin de l'univers. La Fin de tout.
La Fin...
Weiss ne répliqua rien.
Il fixa G sans dire un mot, quand bien même son expression haineuse ne disparaissait jamais.
- Tu peux l'en remercier, déclara G avec nonchalance.
- Il a été manipulé par le dingue qui a possédé mon corps. Hojo voulait devenir Omega. Pas moi.
- Mais l'idée t'a tenté, Weiss. Admets-le. Autrement, tu aurais lutté pour empêcher la Fin de tout. Sinon, pourquoi avoir affronté Chaos ?
Que croyait-il ? Qu'il allait exprimer des remords ?
Weiss inclina la tête sur le côté, nullement impressionné par les mots de G.
- Je voulais traverser les étoiles. Oui. Et honnêtement... Qu'est-ce que j'en ai à faire, au final, du sort de l'humanité ? Après tout ce qu'ils ont fait ? La Shinra a fait ces choses. A moi, à d'autres personnes. Personne n'a jamais agi pour empêcher ces atrocités. Et après tout, Hojo avait déjà enclenché le plan. Autant le terminer, non ?
- C'était la réponse que j'attendais de toi.
Bah voyons... Ils étaient frères, ils s'étaient croisés une fois et ça y est ? Il disait le connaître ?
- L'Omega qui s'est éveillé était un Omega corrompu, artificiel, quand Nero et toi aviez fusionné. Mais... tu demeures l'hôte qu'Omega, le véritable, a choisi. Tu es l'être suprême, l'être pur qu'Omega attendait.
Weiss abaissa péniblement la tête vers son corps.
- Omega est en toi, maintenant. La Fin est en toi. Et pour le meilleur et pour le pire, nos destins sont liés. Je suis la Genèse, tu es la Fin... nous étions destinés à nous rencontrer depuis le début, Weiss.
Le Gardien et Omega...
Le commencement et la fin...
Quelle ironie !
- Malheureusement, un équilibre a lieu, déclara G. Entre nous deux. Sans cet équilibre, la Planète va mourir. Même si tu t'en fiches, on t'a assigné une mission, Weiss. Et si tu ne la remplis pas, tu seras détruit.
- Bah, vas-y. Qu'attends-tu ? Détruis-moi.
Une fois de plus, une fois de moins...
G soupira.
- Tu es aussi gamin qu'autrefois.
- Je n'attends que cela, de toute manière. Depuis le jour où j'ai tué le dernier Restrictor, je m'étais préparé à mourir. Dans les trois jours. Ne va pas croire que je n'ai pas imaginé des plans pour m'en sortir. Mais je savais que cela serait toujours une possibilité.
- Et cela fait de toi un héros ?
Weiss plissa les yeux, incrédule.
- Cela fait de toi un héros ? Parce que tu as choisi de tuer Restrictor et de libérer Deepground d'un tyran pour en devenir un à sa place, cela fait de toi un héros ? Ou dirais-je, un martyr ?
- J'ai l'impression qu'on ne parle pas de moi, G.
Weiss n'avait jamais souhaité devenir un héros. Jamais.
Il était loin de l'être. A Deepground, peu importe nos actions, on devenait un monstre. Le destin était tracé.
Pendant un instant, le visage de G se fissura. Cela fit plaisir à l'hôte d'Omega.
- Je ne vois pas un héros en toi, Weiss. Je vois seulement un tyran qui prend plaisir à tuer ses subordonnés.
Qu'il dise des choses qu'il ne connaissait pas déjà, pensa Weiss, amer.
- Et donc ?
- Sauf que tu as oublié quelque chose, Weiss. J'ai dit que tu serais détruit si tu ne remplissais pas ta tâche. Mais je ne t'ai pas dit que tu rejoindrais la Rivière de la Vie.
Cela réduisit Weiss au silence.
Il fixa G, aucune expression apparente sur son visage.
Il ne rejoindrait pas la Rivière de la Vie...
Jamais...
Weiss... n'eut aucun mot pour décrire l'émotion qu'il ressentait.
- Exactement, renchérit G. Tu ne rejoindras jamais la Rivière de la Vie parce que tu as causé un dommage important envers la Planète et que tu n'as pas été en mesure de le réparer.
- Parce que la Planète ne l'a pas fait, elle ? cracha Weiss en retour.
- Arrête donc de te positionner en victime. Pour toi, à part toi-même et peut-être ton frère, tu n'as jamais accordé de l'estime ou de l'importance à d'autres personnes. Le fait que Restrictor t'ait fait souffrir ne justifie pas le fait que tu as infligé la souffrance à autrui.
Le sourire de Weiss revint sur son visage.
- Parce que donc, toi, tu n'étais pas une victime ? A pleurnicher parce que Sephiroth était le héros et pas toi ?
- Cela fait longtemps que j'ai accepté mes actes, Weiss, répondit G sans aucune émotion. J'ai fait la paix avec cela. Je sais que je dois œuvrer pour gagner ma rédemption afin de protéger la Planète.
Il marqua un temps avant de reprendre :
- Toi aussi, tu dois apprendre cette leçon. Accepte ta mission. Et ton calvaire prendra fin. Tu pourras rejoindre la Rivière de la Vie et obtenir la paix que tu désires.
Weiss n'y croyait pas.
Il y avait forcément un loup quelque part.
Oh oui, c'était certain.
- Et qui me dit que je n'aurais aucune paix ? Aucune liberté ? Que mon rôle en tant qu'Omega ne prendra jamais fin ?
- Tu as toujours désiré la liberté. Gaïa le conçoit. Elle l'accepte. Mais ton rôle prendra fin. Ce n'est pas pour une autre raison que tu portes désormais ce rôle. Le rôle de la Fin.
G croisa les bras sur son torse, pensif.
- Mais... je me dois d'être sincère avec toi.
- Allons, donc. Je savais très bien qu'il y avait un loup.
Weiss en avait assez.
Il ferait mieux de le lui révéler l'arnaque en vitesse. Il n'avait pas envie de parler, d'attendre plus longtemps.
- Vas-y. Qu'est-ce que je risque ? A devenir Omega, sous l'hypothèse que j'accepte ?
- Le même rôle que le mien.
G ferma les yeux.
Pour la première fois depuis leurs retrouvailles, Weiss... perçut un certain regret dans les yeux de G.
Viens, mon frère.
- Tu fusionneras avec Omega comme j'ai fusionné avec le Gardien de la Planète. Tu devras lâcher prise pour l'accueillir en ton sein. Pour accomplir ta mission, tu devras devenir cet être. Tu devras devenir Lui.
- ... Lui ?
G hocha la tête.
- Au fil du temps, tu perdras ta conscience. Tu perdras tes souvenirs. Tu perdras ta personnalité, ce qui faisait de toi un être humain en tant que Weiss.
Weiss se raidit à cette déclaration.
- ... Que veux-tu dire ?
- Tu ne seras plus Weiss. Tu seras Omega. Il ne restera que de Weiss ton corps. Rien de plus.
Il ne resterait que son corps...
- Il en est encore moins question. Tu as dit que je retournerais à la Planète.
- Tu retourneras à la Planète, Weiss. En temps voulu. Une fois que ta tâche sera accomplie. Mais tu oublieras ton ancienne vie. Tout. Deepground... Hojo... Tout ce que tu as traversé, tu l'oublieras.
Le visage de Weiss commença à s'assombrir.
Il ne serait plus Weiss...
Il deviendrait Omega à part entière.
Il oublierait tout.
Ses souvenirs...
- ... Est-ce une si mauvaise chose ? Oublier qui n'a été que souffrance pour toi ? Oublier une vie où tu as haï l'humanité, la Planète... ? Oublier une vie où tu as été une expérience, un esclave toute ta vie ?
Oui.
G avait raison sur un point.
Qu'avait-il comme « bons souvenirs » de toute manière ?
Il ne se souvenait que de Deepground, le traitement de Restrictor... Hojo avait pris usage de son corps.
Quel bon souvenir avait-il ?
Weiss ferma les yeux.
- Weiss...
« Mon frère bien-aimé... »
« Weiss... »
Pourquoi... pensait-il à cela maintenant ?
« Enfin réunis. Je ne te quitterais plus jamais. »
« Unissons-nous, pour que personne ne puisse jamais plus nous séparer. »
- Je sais à quoi tu penses, entendit-il G.
Vous êtes... un ami ?
La vision de Weiss se brouilla.
Des souvenirs... qui n'étaient pas heureux parce que Weiss n'avait jamais été en mesure de protéger convenablement Nero.
Mais... des souvenirs qui l'avaient apaisé. Des souvenirs qui lui avaient apporté du réconfort à Deepground.
La présence d'un frère...
Un frère qui avait rendu son rôle.. moins douloureux.
Un frère qui avait su atténuer la solitude d'être l'Empereur, quand bien même ils avaient été séparés par la suite.
Pourquoi pensait-il à cela maintenant ?
- ... Tu penses à ton frère. Tu penses à ton vrai frère. Tu penses à Nero.
Weiss garda le silence, ne détachant pas son regard de G.
G baissa la tête.
Il avait déjà compris.
« Enfin réunis. Je ne te quitterais plus jamais. »
- Il est mort, Weiss, lui annonça-t-il.
Cela... ne fit pas mal à l'hôte d'Omega.
Non. Il fixa G, comme s'il n'avait pas entendu ces mots qu'il redoutait tant.
- Hojo l'a tué en utilisant ton propre corps. Son sang, le sang de ton frère est sur tes mains. Et il n'y a aucun moyen de le faire revenir, Weiss.
Sa main qui avait plongé dans le corps de Nero...
« Weiss... ? »
« ... Je n'ai que faire de toi. »
Avant de le rejeter.
- Il n'y a aucun moyen de le faire revenir. En demeurant Weiss, en conservant tes souvenirs, il n'y aura jamais aucun répit pour toi. Il n'y aura jamais aucune rassurance, aucun réconfort à tout ce que tu as traversé. Tu vivras avec cela tout le long de ta vie, jusqu'à ta mort. Tu te réveilleras avec cette pensée, tu dormiras avec cette pensée... Jusqu'à ton dernier souffle, tu vivras avec le fait d'avoir tué ton propre frère. Rien ne saura apaiser cette culpabilité. Rien. Nero est mort.
Weiss ne regardait plus G.
L'expression indéchiffrable, il fixait le vide.
Il n'y avait plus aucune vie dans ses yeux.
Il avait l'impression de ne ressentir aucune émotion. Comme si toute vie avait quitté son propre corps.
Comme si Weiss était devenu un cadavre, et peut-être était-ce le cas.
- Nero est mort. Il est dans la Rivière de la Vie. Et il t'attend. Il attend son frère, comme il l'a toujours attendu dans la vie.
Son expression vide ne changea jamais.
Mais un vent effleura sa joue humide. Weiss sentit une larme rouler sur ses joues tandis que la même phrase tournait encore et encore dans son esprit.
« ... Je n'ai que faire de toi. »
Pourquoi est-ce que Nero l'attendrait ?
Il devrait lui en vouloir... lui en vouloir pour tout cela.
G avait disparu de son champ de vision.
Il s'était à présent agenouillé à ses côtés, Weiss ne le suivant pas du regard.
- ... Tu ne désires pas le revoir ? Que vous soyez à jamais réunis ?
Il avait envie de lui crier de le laisser.
Il avait envie de croire au fait que tout n'était que mensonge. Que Nero était encore en vie... Qu'il l'attendait quelque part.
Mais tout cela... Comment croire que Nero était encore en vie ?
- Weiss ?
Weiss ferma les yeux, la larme tombant au sol.
Qu'avait-il comme choix ?
Ne pas accomplir sa tâche... et vivre à jamais avec les souvenirs de son frère mort par sa faute, avec le désespoir de ne jamais rejoindre la Rivière de la Vie ?
Ou accomplir sa tâche, tout oublier... et rejoindre son frère là-bas ?
Être à nouveau ensemble ?
- ... Si. Si, bien sûr.
G le regarda... avec une expression qu'il avait pu observer dans sa vie que trop peu de fois.
Une expression de compassion, de pitié.
- ... Tu acceptes donc ta tâche ? Ton rôle, ton devoir, en tant qu'hôte d'Omega ?
Weiss ouvrit la bouche pour répondre.
Mais aucun son n'en émana.
Il ne l'avait pas choisi.
Mais... si cela lui permettait de revoir Nero. Même de revoir sa mère dans la Rivière de la Vie.
Encore une fois, on le mettait face à une situation douloureuse.
Il sentit une main sur son épaule.
Une main froide, aussi froide que la mort...
Weiss ne tressaillit même pas à ce contact.
- ... J'accepte, déclara-t-il d'une voix à peine audible.
Que décider d'autre ?
G parut approuver ce choix.
- ... Je suis désolé, mon frère.
Brusquement, sa main fut violemment giflée, l'obligeant à la retirer de son épaule.
Weiss le toisa avec une expression de rage mêlée à de l'agonie dans ses yeux.
- ... N'ose pas m'appeler mon frère. Tu es tout seul, G.
Son seul ordre. Sa seule condition.
Il le détestait. Il ne méritait même pas un tel titre.
Il comprit qu'il avait causé une douleur plus intense, plus violente que celle portée par des coups.
Mais Weiss s'en moquait.
Il ignora le reste du monde. Il croisa les bras sur son corps, les yeux clos.
... J'arrive, Nero.
Attends-moi et je te promets que nous serons ensemble pour de bon, si les dieux ne sont pas aussi cruels.
Vous êtes... mon ami ?
Weiss ignora ce dernier appel.
Un appel qui jaillissait de son cœur, de son être...
Un appel qui paraissait le rattacher à peine à sa condition d'humain...
Non.
Il n'avait jamais été humain.
Juste... une bête. Une bête qui n'aurait aucun avenir.
Une bête qui était devenue un être divin. Un dieu.
Le commencement et la fin...
La Genèse et Omega travaillant main dans la main.
Tel était son destin, leur destin.
Nero se tenait face au miroir de sa nouvelle salle de bain.
Les yeux de l'être en face de l'ancien Tsviet lui rendait son regard attentif.
Shiro se préparait dans sa chambre. Nero sentait ses épaules se tendre et se détendre. A côté de lui, il y avait la toute nouvelle expérience de la Shinra. Sous forme d'un petit paquet simple, enroulé d'un ruban rouge.
On le lui avait rapporté le matin même.
Avec méfiance, Nero la sortit de son emballage pour contempler de quoi il s'agissait.
Une apparence humaine...
Nero se retourna à nouveau vers le miroir.
Cela serait la première fois depuis longtemps qu'il...
Nero ferma les yeux.
En silence, presque mécaniquement, il se dévêtit de sa combinaison habituelle. Sa combinaison qu'il portait durant toute la quasi-totalité de sa vie à Deepground. Pour la remplacer par ces vêtements.
Ces vêtements noirs. Un pantalon, une chemise, teintés brièvement de Mako par précaution.
Elle était devenue une part de lui-même... comme les ténèbres...
Comme son masque.
Ce fut la chose la plus difficile. Nero retirerait son masque.
Il avait toujours considéré cela comme un calvaire, comme une prison... Porter un masque qui emprisonnait son visage, qu'on lui avait interdit d'enlever...
Quelque chose qui l'empêchait d'embrasser les personnes qu'il aimait.
Mais... une partie de lui avait également peur.
Peur de voir à quoi il ressemblerait. Peur de voir ce qui se trouvait derrière son masque...
Peut-être d'être vulnérable.
Nero demeura raide.
Silencieusement, il porta la main à son visage.
Doucement, précautionneusement, l'un après l'autre, il retira les bandages qui entouraient son visage et sa bouche.
Quand il réapparut devant Shiro, ce dernier était déjà prêt pour son premier jour, cartable sur son dos.
Dès que ses yeux se posèrent sur lui, il garda la bouche ouverte, choqué de voir Nero sans son masque pour la première fois depuis qu'il l'avait rencontré.
« ... Nero ! »
Nero se gratta machinalement la tête, gêné par sa réaction.
Mince... Il oubliait que l'enfant pouvait plus facilement discerner ses émotions sans sa prison.
- Suis-je moche ?
Il n'entendit aucune réponse.
Il put seulement sentir le corps de l'enfant se jeter dans ses bras, l'étreignant avec chaleur et force.
Nero cligna des yeux, l'esprit embué par ce qu'il ressentait.
- ... Tu ne peux pas savoir depuis combien j'attends cela, lui déclara Shiro, la voix tremblante.
L'ancien Tsviet sourit en guise de réponse avant de lui rendre son câlin.
Ils restèrent un moment comme ça, l'un dans les bras de l'autre.
- Eh... proposa Shiro. On pourrait inaugurer cela. Faire une photo.
- Une photo ?
- Oui. Pour l'accrocher dans notre nouvelle maison.
Nero se détacha de lui pour le regarder droit dans les yeux.
Lentement, il se pencha vers lui.
Il put enfin faire le geste qu'il aurait aimé faire, s'il n'avait pas été emprisonné par ce masque qui l'avait tant empêché d'exprimer ses émotions.
Il embrassa Shiro sur le front pour lui exprimer, une fois de plus, son amour parental à son égard.
Shiro releva la tête vers lui en souriant.
- ... Je t'aime, Papa Nero.
Nero hocha la tête, avant de le serrer une nouvelle fois contre lui.
- Je t'aime aussi, Shiro.
On sonna à la porte.
Le bras autour des épaules de l'enfant, Nero s'empressa d'ouvrir.
Il manqua de réprimer un soupir de frustration en remarquant Vincent sur le pas de la porte.
- Pff. Je ne peux même pas l'accompagner.
- Pas plus de deux kilomètres, Nero, lui rappela Vincent laconiquement.
Nero leva les yeux au ciel.
Même pas de remarque sur sa nouvelle apparence. Cela le décevait presque.
Il se retourna vers Shiro pour l'inspecter une dernière fois.
- Tu as toutes tes affaires ?
- Oui, répondit Shiro.
- Livres ?
- Oui.
- Stylo ?
- Oui.
- Cahiers ?
- Oui.
- Couteau ?
- Oui.
Immédiatement, Vincent attrapa le cartable de Shiro d'une seule main pour le fouiller. Nero et Shiro lui adressèrent une moue presque blasée quand il en sortit le couteau situé dans la poche arrière.
- Il faut bien qu'il se défende des attaques, se justifia Nero.
- C'est non.
- Les humains m'étonneront toujours.
- Laisse tomber, je dirais.
- Tu as intérêt à me ramener mon enfant dès que les cours se terminent.
Vincent opina du chef.
- Je le ferai.
Nero et Shiro se firent face à nouveau avant de s'étreindre une ultime fois.
Nero n'avait pas envie que cet instant se termine...
Il voulait que Shiro et lui restent comme ça éternellement.
- Nero, l'appela doucement Vincent. Tu peux le lâcher, je pense. Autrement, il sera en retard.
La gorge nouée, Nero voulut protester. Mais à la place, il obtempéra.
Shiro grandissait si vite...
- ... Ne parle pas aux inconnus, Shiro, l'avertit Nero en reniflant alors que l'enfant se détacha de lui.
Shiro lui adressa un clin d'œil joyeux.
- Pas de problème. J'ai hâte d'être à ce soir.
Touché, Nero sourit en guise de réponse.
- ... Moi aussi. Bonne journée, Shiro.
- Bonne journée, Papa !
- Papa Nero, le corrigea ce dernier.
- Papa Nero.
Tout en agitant la main en signe d'au revoir, le regard de Nero s'attarda sur l'enfant qui s'éloignait de plus en plus de lui, au bras de Vincent qui l'accompagnait dans les couloirs de l'ORM jusqu'à la sortie de l'immeuble.
Le cœur de Nero se serra une fois que l'enfant eut complètement disparu de son champ de vision. L'ancien Tsviet se frotta les yeux.
Il le reverrait ce soir.
Il le reverrait ce soir, se répéta-t-il.
Il ferma la porte et accourut jusqu'à la fenêtre du balcon pour l'ouvrir et voir si Shiro était toujours dans la rue.
Oui. Il l'était encore.
Vincent rejoignait d'autres humains qui l'attendaient pour faire le chemin de l'école.
Deux enfants humains, aux cheveux bruns et aux yeux bleus...
Et Shelke.
De manière inattendue, cette dernière leva la tête en direction de son immeuble, de son étage.
Leurs regards se croisèrent.
De cette distance, Nero ne discerna pas son expression.
Mais cela devait certainement être une expression de rancœur, de la rage froide à son égard...
Cela ne disparaîtrait jamais véritablement, de toute façon.
Nero referma la fenêtre avant de se rendre dans le salon pour s'asseoir sur le canapé, laissant sa tête s'appuyer contre le dossier.
Son nouveau logement...
Sa nouvelle vie.
Il ignorait vraiment ce qui l'attendait. Tout ce qui l'attendait, maintenant.
Mais... peut-être serait-il en mesure de tout endurer ?
Tant que Shiro était à ses côtés.
Nero ferma les yeux, se laissant doucement glisser dans l'inconscience.
Il le reconnaissait. Il l'avait déjà vu dans un rêve.
Un petit garçon. Celui aux cheveux noirs et aux yeux rouges, un sourire radieux sur le visage.
« Papa ! »
Le même rêve...
Le même champ de fleurs...
Les mêmes gestes...
Nero tendit les bras pour l'étreindre.
Et l'enfant s'y jeta avec fougue, manquant de le faire tomber.
« Papa... »
Mon fils...
Pourquoi pensait-il cela ?
Le jardin disparut.
L'enfant disparut de ses bras.
Nero... se retrouva dans un espace blanc, vide.
Rien autour de lui. Aucun son, aucune image.
Jusqu'à ce qu'une silhouette familière s'approcha de lui.
Une silhouette grande, aux cheveux blancs qui cachaient ses yeux, portant un manteau de la même couleur, s'avançant d'un pas déterminé dans sa direction.
Nero crut que son cœur allait s'arrêter à sa vue.
« ... Weiss. »
Dès qu'ils furent suffisamment proches l'un de l'autre, dès que Nero crut pouvoir toucher son frère, Nero tendit le bras vers lui pour l'atteindre, ne serait-ce que pour l'effleurer.
Mon frère bien-aimé...
Sa main traversa Weiss, comme s'il avait touché de l'eau.
Weiss ne lui accorda pas un regard.
Il continua sa trajectoire, les yeux rivés devant lui, comme s'il n'avait pas remarqué sa présence.
Nero ne chercha pas à le poursuivre...
Il abaissa lentement sa main.
Enfin, il laissa les sanglots le submerger.
Cela ira, essaya-t-il de se répéter.
Je suis avec Shiro... Cela ira.
Tout irait bien...
Tout irait bien.
