le juste vivra par sa loyauté


TADAAAAH, 101 reviews, ma gueule ! Si ça c'est pas incroyable ! Merci, merci, merci ! Je me remémore encore l'époque où je publiais mais n'avais aucun retour. J'avoue, j'avais failli lâcher le morceau mais je suis contente d'avoir continué, de m'être amusée à écrire, de m'être triturée l'esprit pour l'intrigue ou des tournures de phrases (lol), d'avoir rêvassé à de futures scènes en écoutant de la musique badass mais surtout d'avoir persévéré et de m'être petit à petit améliorée :)) Un merci très spéciale à Baccarat V qui a été la première à me soutenir et peut-être sans qui on ne serait peut-être pas arriver si loin, haha. Merci aussi à Moow, Belette, Jane9699, KorriganTanNoz, Liaux et Ewi ! Ce chapitre est pour vous !

Ewi, bon courage pour les concours et merci d'être si fidèle ! :p


Chapitre 31 : La fin du cache-cache


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Si ça avait été un des romans d'Emmeline, ça aurait été le moment où Eva aurait enfin choisi d'abaisser ses barrières. Elle aurait laissé les larmes tomber puis elle se serait effondrée contre Sirius dans l'espoir qu'il lui ferait oublier tout ce qui la pesait. Si ça avait été un roman, Sirius l'aurait serré contre lui et lui aurait assuré qu'elle pourrait toujours compter sur lui, qu'il lui laisserait autant de temps qu'elle désirait pour qu'elle soit enfin prête à lui dire la vérité.

Mais la vie d'Eva n'était pas un roman et le Choixpeau ne lui avait pas nié l'entrée à Gryffondor pour rien.

Dès qu'elle posa les yeux sur Sirius, les épaules de ce dernier se soulevant et s'affaissant comme s'il avait couru à sa poursuite, Eva sut qu'elle n'était pas prête à lui faire face.

Elle tourna les talons et prit la fuite.

« EVA ! » hurla furieusement Sirius derrière elle mais elle l'ignora, se dirigeant vers les gradins de Poufsouffle qu'elle avait tant de fois fréquenté.

Son premier réflexe fut de gravir les escaliers des gradins mais l'entrée était condamnée alors elle réfléchit frénétiquement à la seconde meilleure option, consciente que Sirius la suivait à la trace.

Elle pensa à Amos. L'année dernière, il s'était vanté devant Akash que lui et Charlotte avaient passé le match de Quidditch Serdaigle-Gryffondor à se faire des mamours en-dessous des gradins, cachés par l'immense bannière à l'effigie de Poufsouffle. À l'époque, Charlotte avait viré au rouge cramoisi et s'était empressée d'agrandir le nez de son petit ami jusqu'à ce qu'Amos en perde l'équilibre et tombe du canapé de la salle commune à l'hilarité d'Akash.

Il n'en fallut pas plus pour qu'Eva soulève la bannière et s'engouffre en-dessous. Ce qu'Amos n'avait pas précisé à l'époque était que l'espace était vraiment restreint à cause des planches de bois qui étaient la fondation des gradins. Eva dut se courber en deux pour avancer et ne pas se cogner la tête. Finalement, elle tomba à genoux et posa sa tête contre une poutre de bois pour reprendre sa respiration.

Elle était si faible. Ce simple sprint avait réussi à l'essouffler si facilement. Eva se fustigea de ne pas avoir continué ses joggings pour une raison aussi stupide que les températures hivernales. Si elle n'était pas si lente, elle n'aurait pas pris tant de temps à trouver Charlotte. Si elle était arrivée ne serait-ce une minute plus tôt, Charlotte n'aurait pas été seule à faire face à Rosier et Royce dans les ténèbres des cachots. Si Eva n'était pas si idiote, elle n'aurait pas embarqué Charlotte dans ses emmerdes.

Mais Sirius ne laissa pas le temps à Eva de reprendre son souffle alors que l'arrière de sa cuisse lui rappelait furieusement qu'une seule soirée n'était assez pour réparer le dommage qu'elle s'était causée.

« Tu me rends la vie difficile, tu le sais ça ? C'est un don que toi et James partagez. »

Horrifiée, Eva tourna la tête et posa les yeux sur la chevelure ébène de Sirius.

Avec une grimace, Sirius leva la tête. Il était courbé en deux et sa main était accrochée à la planche en bois au-dessus de son visage.

Eva ne voulait pas lui parler. Pas après qu'il ait vu son état pathétique. Ses souvenirs de la veille étaient flous mais le peu dont elle se rappelait lui donnait envie de se cacher sous terre. Et, après qu'il vienne tout juste d'assister à sa toute dernière crise de nerfs, Eva avait encore moins le courage de lui faire face.

Elle posa ses mains sur l'herbe sèche, prête à s'enfuir à quatre pattes s'il le fallait. Au damne sa dignité tant qu'elle n'aurait pas à affronter Sirius et ses yeux inquisiteurs.

Mais, bien sûr, Sirius avait toujours été aussi butée qu'elle.

« Oh non, tu ne vas pas t'échapper si facilement que ça, » dit-il derrière son dos.

La seconde suivante, Sirius attrapa la chaussure d'Eva. Il la tira en arrière et, avec un glapissement de surprise, les bras d'Eva se dérobèrent sous elle. Son buste percuta l'herbe sèche.

Humiliée mais refusant d'admettre défaite, Eva posa un genou à terre et se mit à ramper par terre en usant de la force de ses bras.

« Arrête de t'enfuir, grinça Sirius entre ses dents en tirant avec plus de force sur sa chaussure.

– Lâche-moi », lui ordonna Eva d'une voix enrouée en donnant un coup sec à sa jambe.

Elle entendit Sirius pousser un juron et elle n'éprouva aucun remord à l'idée qu'il avait failli se prendre son pied dans la figure. Si elle lui disait de le lâcher, il n'avait qu'à le faire ! Orpheline d'une chaussure, Eva continua de ramper à terre pour s'éloigner de lui, haletante à cause de l'effort et traînant sa jambe douloureuse derrière elle.

Elle avait honte. Elle était mortifiée. Pire que ça, elle se sentait humiliée. Elle savait qu'elle ne faisait qu'empirer son humiliation à s'enfuir à quatre pattes mais elle était à bout et elle n'était plus en mesure d'avoir des pensées ni des actions raisonnables. Tout ce qu'elle savait était qu'elle n'était pas prête.

Mais contrairement à Dumbledore, Sirius n'eut pas la patience d'attendre qu'elle trouve enfin le courage de lui faire face.

Eva entendit Sirius pousser un nouveau juron et, la seconde suivante, elle hoqueta de surprise lorsqu'elle se retrouva le torse collé au sol. Un poids sur son dos l'empêchait d'avancer d'un centimètre de plus.

Les bras de Sirius se plantèrent devant son visage, lui interdisant l'accès du fond des gradins de Poufsouffle.

« Sirius ! » s'indigna Eva d'une voix rauque après avoir hurlé jusqu'à ne plus en avoir de voix.

Elle pouvait sentir contre son dos le torse de Sirius qui l'effleurait à chacune des inspirations du garçon. Ses jambes encadraient les siennes et, pire que tout, elle sentait son haleine contre l'arrière de son crâne.

« Arrête de te cacher, lui ordonna-t-il et Eva n'avait pas besoin de le voir pour savoir que Sirius lui adressait un de ces regards irrités qui mettrait au pas même Akash.

– Je ne me cache pas, » le contredit-elle en un chuchotis, fixant le brin d'herbe jaune sous ses yeux, plus que consciente de la précarité de sa situation.

Du coin de l'œil, elle vit le coude du bras de Sirius se plier devant elle. Il se rapprocha davantage et son haleine chatouilla cette fois-ci son oreille.

Eva enfonça ses ongles dans les paumes de ses mains.

« Si tu ne te caches pas, alors pourquoi tu prends la fuite ? » dit Sirius à son oreille.

Elle pouvait sentir la chaleur de ses jambes contre ses hanches.

Eva ferma les yeux et se mordit violemment la lèvre, tentant de contrôler sa respiration.

La veille, elle avait suffoqué sous le poids d'Evan Rosier. Or, à l'instant présent, bien que la situation ne soit pas si différente, ce n'était plus le désespoir et la terreur qui la tourmentaient. Non, en-dessous de son humiliation tremblait une émotion à laquelle elle refusait de donner un nom.

Pourquoi est-ce que tu me fais ça, Sirius ? Pourquoi toi ?

Elle voulait lancer un silencio à sa poitrine. Elle voulait hurler sa frustration de nouveau. Elle voulait qu'il cesse de l'effleurer et la touche pour de vrai. Elle voulait être effrayée de se trouver de nouveau prise au piège. Elle voulait lancer un incendio aux gradins de Serpentard. Elle voulait que les frissons que Sirius déclenchait chez elle ne soient pas si agréables. Elle voulait lui dire la vérité mais elle voulait qu'il continue de l'ignorer. Elle voulait qu'il cesse de se préoccuper d'elle mais elle voulait qu'il s'occupe d'elle. Elle voulait qu'il lui promette qu'il l'aiderait à les faire payer mais elle voulait également qu'il lui dise qu'elle n'était qu'une timbrée qu'il ne voulait plus fréquenter.

Je ne peux pas. Pas maintenant. Je ne suis pas prête.

Il y a encore quelques instants elle sentait les mains de Rosier effleurer son cou mais maintenant elle n'arrivait qu'à penser à la proximité de Sirius.

« Eva ? la héla Sirius après de longues secondes de silence où on n'entendait plus que la pluie qui s'était mélangée au vent furibond d'Ecosse. Hé, t'es encore là ? »

Fronçant les sourcils, Sirius décida qu'il n'avait plus besoin de rester au-dessus de la Poufsouffle pour s'assurer qu'elle ne prenne pas de nouveau la fuite. Il se laissa tomber sur le côté et, sur le flanc, il observa Eva.

Elle avait ramené ses bras contre son buste et ses poings cachaient ses yeux.

« Tu pleures ? » demanda lentement Sirius, hésitant sur l'attitude correcte à adopter alors que la veille elle avait serré si fort sa main qu'il en avait eu la circulation coupée.

Moins de vingt-quatre heures plus tard, Eva ne semblait pas vouloir lui révéler ce qu'elle avait marmonné en le regardant avec des yeux si suppliants qu'il avait en avait eu la boule au ventre le reste de la nuit. C'était seulement ce midi, en entendant les cris des Serpentards noyés sous le mélange d'Empestine et de pus de Bubobulb qui avait plu du plafond magique, que le malaise de Sirius avait disparu pour laisser place à une satisfaction vengeresse.

La veille, Sirius n'avait été capable que de serrer la main d'Eva et de lui ordonner de rester éveillée. Un vieux réflexe qu'il avait toujours après que son oncle Alphard lui ait crié de s'assurer que Regulus reste éveillé après que son cheval ait cabré et que Regulus ne s'effondre.


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« Sirius, j'ai peur, » lui avait chuchoté Regulus en serrant entre ses doigts la manche du manteau de Sirius.

Regulus l'avait supplié de ses yeux larmoyants de le rassurer mais, à neuf ans à peine, Sirius n'avait que bêtement répété à son petit frère de ne pas s'endormir. L'arrière du crâne de Regulus avait été la première partie de son corps à avoir fait connaissance avec la terre de la campagne galloise et, depuis sa chute, Regulus ne bougeait plus. De l'autre côté de Regulus se trouvait leur oncle Alphard qui, après avoir enchaîné une litanie de jurons que Sirius aurait pris en note s'il n'avait pas été paralysé, avait commencé à agiter sa baguette pour s'assurer que Regulus qui avait monté son cheval seul pour la première fois ne subisse pas les contrecoups d'une commotion cérébrale.

« N'aie pas peur, il n'y a que les lâches qui ont peur, » avait dit Sirius à son frère qui se mordit la lèvre pour arrêter le flot de larmes qui traçait un chemin sur ses joues.

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Huit ans plus tard, Sirius était toujours aussi pitoyablement impuissant. Hier, lorsque Pomfrey avait dénoué le tissu autour de la cuisse d'Eva pour révéler un spectacle sanglant, il était resté stupidement paralysé. Aucun sortilège ne lui était venu à l'esprit, Sirius n'avait pu qu'observer Pomfrey faire ce qu'il n'aurait jamais pu.

Sirius avait toujours estimé que l'attaque était la meilleure défense. Il réalisait maintenant à quel point il était con. Il fallait qu'il commence réellement à s'armer de sortilèges de guérison. Il ne devait plus attendre que Madame Pomfrey apparaisse et guérisse les blessures de Remus, de James, de Peter, d'Eva. À quoi bon être fier d'être l'un des plus jeunes animagus (illégal de surcroît) s'il n'était pas capable de faire disparaître cette expression d'agonie sur le visage de ses amis ?

Pourquoi être fier d'avoir fait hurler de rage Snivellus, littéralement vert de rage, dans la Grande Salle alors qu'il était incapable de capter le regard d'Eva ?

Allongé sur le côté, Sirius attendit qu'Eva lui réponde enfin.

Et finalement, elle le fit. Toute aussi butée qu'en temps habituel.

« Je ne pleure pas, nia-t-elle d'une voix plaintive, toujours le visage caché dans ses mains.

– De là où je me tiens, ça ressemble drôlement à ça pourtant, ne put s'empêcher de commenter Sirius.

Mais quel idiot, » l'entendit-il marmonner et, la seconde suivante, Eva tourna la tête vers lui, ses poings cachant dorénavant sa bouche.

Les yeux d'Eva n'étaient plus comme hier. Ils n'étaient plus injectés de sang. Il ne semblait plus qu'elle allait s'effondrer d'une seconde à l'autre. Avec ses yeux quelque peu brillants, elle semblait simplement fatiguée après une nuit agitée. Il l'avait déjà vu plusieurs fois dans cet état ces derniers temps lorsqu'Eva lui adressait de rares regards dans les couloirs auquel s'ajoutait un faible sourire lorsqu'elle remarquait qu'il avait surpris son regard.

Remus s'exaspérerait sans doute de son manque de tact mais Sirius était trop satisfait d'avoir réussi à faire apparaître cette lueur d'agacement dans les yeux d'Eva pour se soucier de ce que dicteraient les règles de la bienséance.

« On fait une belle paire dans ce cas, se moqua-t-il avec un sourire amusé. Parce que je crois que courir sous la pluie pour hurler en plein milieu d'une tempête mérite le même titre.

– Tais-toi, » chuchota Eva de sa voix toujours enrouée et, en la voyant amorcer un geste pour se cacher de nouveau derrière ses mains, Sirius tendit son bras et lui attrapa le poignet.

Il retira ses doigts lorsqu'il vit le sursaut qui fit tressaillir les épaules d'Eva.

« Désolé, je ne voulais pas – »

Il n'avait jamais été à l'aise pour demander pardon.

« Je ne veux pas te parler. »

Mais il était bien trop obstiné pour ne pas obtenir les réponses qu'il était venu chercher après avoir vu Eva passer comme une flèche devant lui, les remontrances de McGonagall sifflant encore dans ses oreilles alors qu'elle l'avait jeté à la porte pour hurler sur James cette fois-ci.

« Je pense qu'après hier soir il n'est plus question de vouloir me parler ou pas. J'ai besoin de réponses, Eva. »

Elle ne répondit rien, toujours allongée sur le ventre et les bras ramenés contre son buste.

Sirius eut l'image d'un hérisson en tête.

« Tu ne peux pas faire semblant qu'il ne s'est rien passé. »

Il sentait l'énervement monter alors qu'elle restait prostrée.

Sirius se redressa pour s'asseoir. Il se passa une main frustrée dans les cheveux, serrant les dents pour essayer de contenir des mots qu'il viendrait sans doute à regretter.

« Eva, » grinça-t-il.

D'ici, il ne voyait que ses cheveux qui reposaient sur la longueur de son dos. Le vent qui rugissait toujours dehors les avait emmêlés.

« Eva, parle-moi ou je vais faire quelque chose que tu n'apprécieras pas, » la prévint Sirius.

Il ne savait pas être doux. Il savait simplement s'enfoncer dans la colère et user du poison des mots. Il détestait sa mère, son père, ses oncles – à l'exception d'oncle Alphard, ses tantes, ses cousines – à l'exception d'Andromeda – mais il ne pouvait nier qu'il partageait les mêmes traits qu'eux.

Sirius posa sa main sur l'épaule d'Eva, prête à la secouer s'il le fallait mais il n'eut le temps que d'effleurer son épaule que déjà elle se redressait. Maladroitement, Eva se mit à genoux et lui jeta un regard noir à travers ses cheveux.

Avec une main impatiente, elle rejeta une mèche de cheveux qui lui tombait sur le visage. Sirius n'était pas assez perdu dans son irritation pour ne pas suivre son mouvement du regard.

« Ne me menace pas ! Je ne suis pas – »

Mais l'exclamation d'Eva se perdit dans une quinte de toux qui la fit se plier en deux.

Toute trace de colère disparut des veines de Sirius.

L'incertitude le criblant, Sirius observa avec prudence Eva continuer de tousser dans son poing.

Lorsqu'Eva se redressa, haletante, Sirius sortit de sa poche de pantalon la gourde d'eau qu'il avait pris l'habitude de transporter après avoir regretté de ne pas s'être assez hydrater pendant une gueule de bois particulièrement douloureuse.

Ça avait été sans doute l'une de ses pires idées : boire avec Liam Olsen et Steve McAvoy la veille de son premier examen des BUSES. Remus l'avait incendié d'insultes, Peter lui avait lancé des regards de travers et James était resté étrangement silencieux. Sirius n'avait pas eu le courage de leur dire qu'il avait juste eu envie de noyer ses pensées après avoir reçu une lettre de sa mère puis que Marlène l'ait informé que Lady McKinnon voulait déjà faire des essayages pendant l'été pour leur fête de fiançailles prévue pour les vacances de Noël.

« Tiens, dit Sirius en tendant sa gourde d'eau à Eva, puis, face au regard suspicieux de la Poufsouffle, il roula les yeux et ajouta : Je ne suis pas assez idiot pour t'empoisonner alors que je n'ai toujours pas obtenu de réponses. »

Il vit l'infime réaction que son commentaire provoqua chez Eva. Bien sûr qu'il le vit, Sirius était devenu un expert pour l'analyse d'Eva Brown. Il était excédé par le nombre de fois où il s'était surpris à suivre inconsciemment du regard une jupe jaune et noire qui passait près de lui.

Pourtant, malgré sa connaissance fine des expressions faciales d'Eva Brown, Sirius était incapable de deviner qui l'avait agressé.

Sirius observa sans un mot Eva boire au goulot.

Si Remus voyait les yeux de Sirius s'attarder sur la longueur du cou d'Eva qu'elle exposait actuellement en penchant la tête pour boire, il se fouterait sans aucun doute de lui. Pourtant, cette fois-ci, ce ne fut pas son attirance physique pour Eva qui expliqua son action. Non, à cet instant précis, Sirius essayait de voir sur le cou d'Eva les bleus qui avaient grossièrement imité la forme de deux mains.

À part quelques grains de beauté éparses, le cou gracieux d'Eva n'avait rien de spécial. Cependant, lorsqu'il plissa les yeux, Sirius eut l'impression que le cou d'Eva devint flou avant de redevenir normal.

Elle avait utilisé un sortilège de camouflage.

Eva lui rendit sa gourde d'eau en la déposant entre ses jambes. Elle ne leva pas les yeux vers lui.

La jambe pliée en l'air, Sirius posa son avant-bras sur son genou puis il continua d'observer Eva.

Elle glissa une mèche derrière son oreille bien que celle-ci était déjà sagement rangée, puis, alors que la pluie assourdissait leurs oreilles, Eva entremêla ses doigts sur ses cuisses.

Parfois, il avait du mal à concilier ces deux images d'Eva. La timide qui s'échappait à ses regards et rougissait si facilement et puis celle qui le désarçonnait avec aisance en un éclat de rire, comme cette fois au bal d'Halloween où elle avait glissé sa jambe au-dessus de sa tête, comme inconsciente des pensées vulgaires que son action entraînerait.

Sirius ne pouvait en conclure qu'une chose :

« Tu me fatigues. »

Sirius soupira et laissa sa tête retomber contre la poutre derrière lui.

Les yeux fermés, il ne remarqua pas le regard brillant d'Eva quitter enfin ses mains pour se poser sur lui.

Sirius n'avait pas pris la peine de mettre de cravate aujourd'hui et cet air débraillé lui allait foutrement bien. Eva, elle n'avait presque pas dormi et elle savait pertinemment qu'elle ne ressemblait à rien. Elle préféra ne pas penser à l'image pitoyable qu'elle devait lui donner.

« Tout est compliqué avec toi…, » continua Sirius en un soupir.

Eva le savait. Elle en était désolée.

« Déjà il y a tous tes copains blaireaux qui ne te lâchent pas d'une semelle et qui s'incrustent dès qu'on veut te parler. »

Attendez, quoi ?

« Sans parler de ta copine blonde qui fusille du regard quiconque essaye de t'approcher. »

Qu'est-ce que ça voulait dire ? Ça ressemblait étrangement à …

Le cœur tambourinant, Eva observa avec des yeux ronds Sirius qui avait levé les yeux vers les fondations en bois des gradins.

« Et tous ses mini-blaireaux qui se battent pour attirer ton attention dès que ton groupe daigne te lâcher. »

Ça ressemblait à –

Non, ce n'était pas possible.

Sirius soupira de nouveau puis laissa sa tête tomber sur le côté.

Il jeta un regard en coin à Eva, semblant inconscient que sa position le faisait devenir la définition même de « sexy » avec ses cheveux ébènes qui lui tombaient sur la joue et son col de chemise outrageusement ouvert. Au fil des ans, Eva avait souvent vu cet accoutrement chez ses amis masculins mais jamais personne n'avait réussi à l'intimider rien qu'à cette vue.

« Et pourtant, tu trouves le temps de te battre avec des Serpentards sans que je ne le remarque. Comment ça se fait, Eva ? demanda Sirius et son visage revêtit lentement ce masque de froideur qu'Eva détestait tant. Depuis combien de temps est-ce que ça dure ? Parce que, après avoir vu la réaction de Pomfrey, celle de McGo et même celle de Dumbledore, ça m'a tout l'air de ne pas être nouveau. »

Pourquoi ? Pourquoi avait-elle accepté de suivre Lily Evans jusqu'à l'infirmerie ? Pourquoi n'avait-elle pas simplement déposé Charlotte dans l'infirmerie sous l'illusion d'un sortilège de camouflage ? Elle aurait alerté Pomfrey de l'urgence en faisant tomber une fiole puis elle aurait traîné sa jambe jusqu'à sa chambre. Il lui restait toujours des pommades cicatrisantes dans le tiroir de ses chaussettes ainsi que le parchemin où elle avait écrit des sortilèges de guérison l'année précédente. Elle aurait pu se soigner par elle-même. Pourquoi était-elle si faible ?

Pourquoi était-elle incapable de faire autre chose que de fixer bêtement Sirius qui la regardait en retour avec cette fureur froide ?

« Ce que je ne comprends pas c'est comment tu as réussi à le cacher si longtemps. »

Sirius termina sa phrase et un muscle tressaillit sur sa mâchoire tendue.

Comment l'avait-elle caché si longtemps ? La réponse était simple. Elle n'était pas à Gryffondor ni n'était en 6e année. Si Eva l'avait voulu, elle aurait pu passer toute sa scolarité sans croiser le chemin de ceux qui étaient surnommés les « Maraudeurs » dans Poud'news. Sauf qu'il y avait eu James et Eva avait été trop obstinée pour se faire reléguer au second plan lorsqu'il avait trouvé Sirius puis Peter et enfin Remus.

L'année précédente ça avait été si facile. Elle n'avait jamais été si éloignée de James alors qu'il devenait de plus en plus arrogant et qu'elle devenait de plus en plus silencieuse. Mais cette année…Cette année tout allait de travers. Cette année, elle ne contrôlait plus rien et il y avait Sirius qui n'avait jamais été aussi attentif. Cette année, il donnait l'impression d'en avoir quelque chose à faire d'Eva Brown et pas seulement pour savoir quand est-ce qu'elle allait lui emprunter James.

« Pourquoi ? croassa Eva et même Sirius laissa échapper une grimace à l'entente de sa voix graveleuse. Tu l'as dit toi-même, on n'est pas des am–

Merlin, Eva ! la coupa avec énervement Sirius et elle fut surprise de le voir si animé. Tu ne vas pas me sortir ça encore une fois ! On n'est pas des amis, c'est ça que tu allais me dire ?! »

Les yeux écarquillés, Eva n'envisagea même pas de hocher la tête pour lui avouer que si, c'était exactement ça qu'elle allait dire.

Sirius se rassit correctement puis se passa une main agitée dans ses cheveux avec toujours cette grimace agacée.

« Ça ne t'est jamais arrivé de dire quelque chose que tu ne pensais pas quand tu étais énervé ?! Si j'avais su que t'allais me ressortir ça à chaque fois qu'on va enfin quelque part, je me serais abstenu. »

Qu'est-ce qu'il voulait dire par « aller quelque part » ?

C'était de plus en plus dur pour Eva de se convaincre que le nœud dans son estomac était exclusivement causé par l'anxiété que ses secrets soient révélés et non pas par l'anticipation d'une révélation qui lui prouverait que cette tension électrique qu'elle ressentait depuis un moment entre elle et Sirius était bien réciproque.

C'est un dragueur. Il joue avec les filles. Ne lui fais pas confiance, s'ordonna obstinément Eva.

Sirius se frotta la nuque avec agitation, son coude s'arquant dans les airs.

Il eut l'air profondément agacé lorsqu'il lui dit ces mots :

« Tu me plais, Eva. »

Eva resta figée. Assise, ses jambes pliées à terre, elle serra avec force ses mains entremêlées sur ses cuisses.

Sirius avait l'air énervé alors que c'était elle qui devrait le regarder ainsi.

De quel droit venait-il briser si facilement toutes les barrières qu'Eva avait érigées avec tant de peine ? De quel droit annonçait-il cette nouvelle avec tant d'honnêteté alors qu'elle s'attendait à ce qu'il la questionne sur les Serpentards ? Eva n'était pas prête. Elle n'était pas sûre qu'elle serait un jour assez prête pour réaliser que, non, cette attirance inavouée qu'elle avait de plus en plus de mal à faire taire avait une réelle raison de se faire entendre.

« Sauf que je n'arrive pas à faire quoi que ce soit à ce sujet parce que tu es trop occupée à t'enfoncer dans des emmerdes avec les Serpentards. »

Eva enfonça ses ongles dans les jointures de ses mains. Les yeux écarquillés, elle continua de dévisager Sirius.

Ça ne pouvait pas être vrai.

« Quoi ? Ça te surprend, ricana moqueusement Sirius en se passant une main frustrée dans les cheveux. Pourtant, j'ai été plutôt clair, railla-t-il. Tu crois vraiment que j'aurais été si sympa après le coup du philtre si ça avait été quelqu'un d'autre que toi que j'avais embrassé ? »

Ses sourcils arqués moqueusement, Sirius continua :

« Et puis, je t'ai laissé pas mal d'indices. Les mots que je t'ai écrit la dernière fois ? C'est pas à n'importe qui que je les écrirais, » révéla-t-il en poussant une expression moqueuse.

Son cœur eut comme un pincement puis il recommença à galoper, comme s'il voulait sortir de sa poitrine et se diriger vers –

Lentement, elle sentait son corps s'éveiller. L'arrière de sa cuisse la gênait toujours mais il y avait une chaleur qui lui assaillait le corps entier. Pas une douloureuse comme hier mais une chaleur dérangeante qui rendait encore plus confus son esprit.

La douleur, Eva avait appris à la faire devenir une arrière-pensée en barricadant son cerveau dans un recoin sombre de son esprit. Mais ce fourmillement qui la prenait au ventre et qui parcourait son corps jusqu'au bout de ses doigts ? Elle n'avait aucune idée de comment le faire disparaître.

Sirius devait arrêter de parler. Ce n'était pas possible que toutes les spéculations qui avaient animé les insomnies d'Eva soient réelles. Elle refusait de le croire.

« Tu comptes te cacher encore longtemps ? » l'interrompit Sirius et Eva se rendit compte qu'elle avait fermé les yeux dans sa tourmente.

Elle l'entendit se rapprocher.

Pars Sirius. S'il te plaît. Je ne peux pas

Elle ne voulait pas qu'il comprenne qu'elle n'était qu'une pauvre Poufsouffle qui paniquait rien qu'à l'idée que quelqu'un puisse – qu'elle puisse plaire à Sirius.

« Tu sais, je suis presque sûr qu'une fille n'est pas censée réagir comme ça quand on lui fait clairement comprendre qu'on a envie de l'embrasser. Et sans l'aide d'un philtre d'amour. »

Eva sentit les doigts de Sirius effleurer le dos de sa main dans lequel elle enfonçait ses ongles, comme s'il voulait lui rappeler qu'elle était censée répondre quelque chose à sa déclaration et non pas se perdre dans un monologue intérieur.

« Tais-toi, » le supplia Eva du bout des lèvres en gardant fermement les yeux clos.

Sirius poussa une exclamation amusée et exerça une pression sur sa main.

« Quoi ? la taquina Sirius alors qu'Eva levait des yeux brillants vers lui, plus que consciente du fait que la main chaude de Sirius reposait sur la sienne. Tu ne veux pas que je le fasse ? Pourtant… »

Les joues fiévreuses d'Eva étaient à nue et la voix de Sirius avait délicieusement baissé de plusieurs octaves, ne faisant qu'empirer son état.

Eva savait que sa réaction amusait le Gryffondor penché vers elle. Ses yeux gris l'observant avec une sorte de satisfaction paresseuse, Sirius portait son sourire en coin qu'Eva s'était toujours refusée d'admettre être diablement sexy.

Sirius continua, son sourire s'élargissant alors qu'Eva restait bloquée à le fixer, le visage virant peu à peu au cramoisi :

« Tes yeux me disent oui, tu sais. »

Eva fut obligée de fermer les yeux de nouveau. D'une voix plaintive, elle le supplia de se taire.

Il ne pouvait pas dire ce genre de choses.

Sirius poussa une énième exclamation amusée et continua bien sûr de faire le contraire de ce qu'elle voulait, serrant la main d'Eva tel le grand salop qu'il était.

Les yeux fermés, Eva ignora de toutes ses forces la chaleur qui émanait de la main de Sirius.

« Tu sais, je me suis toujours moqué de James en lui disant qu'il n'aurait pas pu choisir plus compliquée comme fille. Franchement, Lily Evans ? soupira Sirius. Il faut être suicidaire pour penser que cette fille puisse un jour admettre ressentir une quelconque trace d'attirance pour Cornedrue. Et pourtant… »

Il laissa sa phrase en suspens.

Eva n'avait jamais su contenir sa curiosité lorsque cela concernait Sirius. Elle rouvrit les yeux et réalisa qu'il la fixait avec ses yeux gris si sérieux qu'ils réussirent à l'effrayer.

Sirius Black était censé ne pas s'intéresser à elle. Il était censé rester un fantasme inavoué auquel Eva ne toucherait pas. Elle avait décidé qu'elle ne l'approcherait pas, qu'elle laisserait Marlène McKinnon ou Lucy Emerson ou n'importe quelle autre fille extraordinaire filer le parfait amour avec lui et pourtant…

Et pourtant, malgré le toucher fantôme d'Evan Rosier sur sa gorge, malgré l'inconfort de ses cordes vocales, malgré la douleur de sa cuisse, malgré la peur des répercussions des Serpentards qui ne la laisseraient jamais s'approcher de trop près d'un sorcier au sang aussi pur que Sirius, Eva avait envie. Elle avait envie de répondre au regard sombre de Sirius.

Et Eva avait décidé pendant les heures sombres de la nuit dernière qu'elle ne se mentirait plus, qu'elle essayerait de laisser ses émotions reprendre le dessus sur ce masque qu'elle s'était forcée à revêtir.

Lentement, Eva délia ses mains. À son geste, Sirius lui adressa un regard dur qu'elle ne vit pas, les yeux toujours baissés.

Elle ne lui laissa pas le temps de reprendre sa main.

Elle attrapa le majeur et l'annuaire de Sirius.

Les sourcils de Sirius se froncèrent mais Eva ne le vit pas non plus. La gorge sèche, elle fixa les doigts de Sirius qu'elle tenait dans sa main.

Eva se racla la gorge, resserrant sa prise sur les deux doigts de Sirius :

« Je –, commença-t-elle avec une grimace avant de s'arrêter pour inspirer un bon coup et forcer sur sa voix toujours aussi graveleuse : Il y a des choses…Des choses que… »

Eva se pinça les lèvres puis se força à dire la suite sous les yeux attentifs de Sirius :

« – que je ne peux pas te dire. »

Les sourcils de Sirius se froncèrent davantage et Eva vit du coin de l'œil sa bouche commencer à se tordre, le signe indéniable qu'il allait vivement protester cet aveu.

« Je ne peux pas, » répéta Eva.

Eva ne pouvait rien dire de plus. Elle ne pouvait vraiment pas et elle se força à lever les yeux vers Sirius pour qu'il le comprenne dans son regard.

Sirius plia ses doigts et Eva lâcha sa main, se sentant terriblement fragile.

Pourtant, Sirius rattrapa sa main avec vivacité et il lui demanda entre ses dents :

« Pourquoi est-ce que tu ne pourrais pas me le dire ? »

Eva secoua la tête de droite à gauche, se mordant l'intérieur de la joue.

« Pourquoi ? répéta Sirius avec plus d'acharnement, quittant la frustration pour l'énervement.

– Je ne peux pas…, » commença Eva avant de s'arrêter avec une grimace exaspérée quand sa voix la quitta en plein milieu de sa phrase.

Elle se racla la gorge puis termina :

« Peux pas te dire.

– Tu crois sérieusement que ça va me suffire comme excuse ? Que tu ne peux pas ? » répéta Sirius et Eva l'entendit au tremblement de sa voix qu'il se retenait de ne pas crier.

Eva ne voulait plus être en désaccord avec lui. Elle voulait arrêter d'être cette fille frustrante qui faisait semblant de ne pas voir l'inquiétude grandissante de ses amis. Elle en avait assez de perdre ceux qui comptaient pour elle à cause de Royce.

« J'en ai parlé à Dumbledore, se défendit-elle en ne parvenant pas à lever les yeux vers lui alors que la prise de Sirius sur sa main commençait à devenir inconfortable.

– Et tu crois sincèrement que cette information me suffira ?

– Je ne veux pas que tu t'en mêles davantage, Sirius, dit Eva en élevant la voix et en se forçant à répondre à son regard furieux. J'ai vu les Serpentards à l'infirmerie et j'ai très bien remarqué ta blessure au coin de ta bouche. Tu crois que je suis idiote ? Toi et James avez encore décidé de vous venger sans vous soucier de l'avis des autres.

– J'aurais dû les laisser indemnes ? Les laisser se complaire dans leur putain de délire de mégalomaniaque ? »

Eva ferma les yeux et expira, la frustration la forçant à prendre du recul alors que Sirius s'enfonçait dans sa rage contre les Sang-Purs.

« Vous ne savez même pas qui étaient –, Eva s'interrompit et se pinça les lèvres avant de commencer de nouveau en rendant à Sirius son regard : Vous vous en êtes pris à tout le monde, Sirius. Des gens qui n'ont rien à voir avec cette… histoire. »


« Elle a toujours fait partie de nos histoires. »


Les yeux de Sirius brûlaient. Ils brûlaient d'un sentiment d'injustice qui le rendrait prêt à foutre le feu au monde et Eva était terrifiée pour lui. Elle avait déjà heurté Charlotte, elle ne voulait pas qu'une personne de plus souffre à cause d'elle.

Mais Sirius avait toujours été un électron libre.

« Je sais comment est-ce qu'ils réfléchissent, Eva. Je sais qu'ils pensent tous à leur cul et qu'ils ne lèveraient pas le petit doigt pour quiconque à part les membres de leur famille. »

Eva eut l'image de Regulus Black s'interposant pour s'assurer qu'elle allait bien.

« Mais ton frère –

– Est le parfait Serpentard, la coupa-t-il et, en voyant Eva ouvrir de nouveau sa bouche, Sirius ajouta avec plus de fermeté : Il n'est pas le pire d'entre eux mais il n'est certainement pas si différent.

– Mais tu ne peux pas blesser des innocents, insista Eva.

– Et par contre je peux les laisser te blesser toi ? » lança Sirius d'une voix rageuse.

La bouche d'Eva se referma et elle baissa les yeux vers leurs mains toujours jointes malgré leur échange tendu.

« Tu n'as pas besoin de me protéger, souffla-t-elle finalement.

– Tu es mon amie, Eva. Peut-être pas l'amie la plus platonique mais je ne laisserai jamais des connards s'en prendre à mes amis. Tu le sais ça, au moins ? »

Eva baissa la tête et posa sa main libre sur le côté de son visage, cachant son œil et le coin de sa lèvre qui se soulevait en une expression sardonique.

Bien sûr qu'elle savait à quel point Sirius tenait à ses amis et comment pourrait-elle lui en tenir rigueur ? Elle était exactement comme lui sur ce point.

« Oui, je le sais bien..., souffla-t-elle.

– Si tu le sais alors dis-moi pourquoi ils s'en sont pris à toi. »

Et comment pourrait-elle lui en vouloir d'insister autant pour obtenir enfin la vérité ?

Elle était Eva Brown. Elle était une Poufsouffle et il était bien temps qu'elle réalise que la loyauté allait dans les deux sens, qu'une relation de confiance se construisait puis s'entretenait pas à pas.

« Ils – ils me... Je suis la fille d'une mère célibataire, réussit-elle finalement à dire, la tête basse et observant avec détachement la main plus large de Sirius posée sur la sienne si petite en comparaison. Je suis au même rang que les Nés-Moldus pour eux.

– Des foutaises, » cingla Sirius et son intervention fit sourire faiblement Eva.

Eva continua toujours aussi lentement, le cœur fébrile et la gorge sèche :

« Et tu sais, quelques filles n'étaient pas très contentes de ce qu'il s'est passé entre nous ? J'avais reçu une Beuglante un jour. »

Elle osa lui jeta un bref regard et Sirius lui adressa une expression irritée.

« Ils... »


« Tu n'es qu'une pute bonne qu'à baiser comme une chienne pour lui. »


« Tu ferais mieux d'apprendre à garder ta bouche ouverte pour sucer la bite de Black, au moins tu servirais à quelque chose. »


Eva se força à continuer et l'humiliation rendit plus difficile qu'elle ne pensait son prochain aveu :

« Ils ne veulent pas qu'un Sang-Pur comme toi me fréquente.

– Ces putains de merdeux incestueux sans couilles, cracha Sirius à mi-voix en se frottant furieusement la nuque. Je les ferai gerber des limaces et chier des asticots la prochaine fois ! »

Eva posa sa main sur l'avant-bras en l'air de Sirius alors qu'il continuait de frotter sa nuque.

Elle savait que la fureur dans le regard de Sirius ne lui était pas adressée mais Eva était si fébrile après les révélations qu'elle lui avait faites qu'elle eut du mal à soutenir son regard sombre.

« J'en ai parlé à Dumbledore, » lui rappela Eva d'une voix tremblante.

De nouveau ce muscle de la mâchoire de Sirius tressaillit.

Eva insista, n'en ayant que faire que sa voix prenne une tournure suppliante. Elle ne voulait plus être la cause de la douleur de ses amis.

« Je lui en ai parlé alors s'il te plaît, n'aggrave pas encore plus la situation. »

Oh, elle n'était qu'une hypocrite. Elle lui disait ça après avoir provoqué Rosier dans le seul but de répondre à ce sentiment d'impuissance si pesant qui la faisait se détester de plus en plus fort. Elle lui disait ça après avoir directement embarqué Charlotte dans ses folies. Elle avait même adressé un doigt d'honneur à Oliver plus tôt et même si le Serpentard avait paru plus désemparé qu'en colère, Eva savait qu'elle aurait simplement dû l'ignorer. Oui, elle n'était qu'une hypocrite mais elle –

« Je ne veux pas que tu sois blessé à cause de moi, » souffla Eva du bout des lèvres en le suppliant du regard.

Ils restèrent quelques longues secondes à se fixer, le vent mugissant à l'extérieur et la pluie torrentielle s'abattant sur les gradins. Finalement, Sirius fut le premier à détacher son regard et il adressa un regard frustré à la poutre à sa droite. La mâchoire du Gryffondor s'agita et Eva observa avec inquiétude Sirius combattre sa colère qui le faisait toujours serrer sa main dans la sienne.

« D'accord, » dit-il entre ses dents.

Eva aurait pu en soupirer de soulagement.

« D'accord, répéta Sirius et ses yeux sombres fusillèrent Eva du regard. Je ne ferai rien mais en contrepartie arrête de faire semblant que tout va bien. Arrête de te cacher.

– Je ne me cache pas, nia-t-elle, les sourcils froncés de confusion en alternant son regard entre l'œil gauche et l'œil droit de Sirius pour tenter de comprendre ce qu'il cherchait à lui dire.

– Si tu ne te cachais pas tu me montrerais ce qu'ils t'ont fait.

– Je ne comprends pas, » dit lentement Eva.

Disait-il cela pour lui faire comprendre qu'il n'était pas dupe par ses demi-vérités ? Sirius disait-il cela dans le but de lui faire révéler que de simples fricotages entre adolescents étaient bien loin d'être la cause de la haine que lui vouait Royce ? Comment –

La main libre de Sirius glissa du coude d'Eva jusqu'à son épaule. Puis, sous les yeux confus d'Eva, Sirius continua son geste. Lentement, le bout de ses doigts vint effleurer la peau encore fragile de son cou.

Automatiquement, les épaules d'Eva se soulevèrent pour cacher son cou.

« Tu n'as pas besoin de sortilège de camouflage devant moi, lui dit Sirius en reprenant sa main, laissant derrière lui des frissons qu'Eva remarqua à peine, une émotion qu'elle ne saurait pas nommer la laissant sans voix.

– D– d'accord, » acquiesça-t-elle finalement en se forçant à sortir de sa stupeur.

Sirius lui offrit son sourire en coin qui rendit encore plus difficile le retour sur terre d'Eva.

Elle força un sourire tremblant à ses lèvres mais, heureusement, Sirius arracha son regard du sien pour jeter un coup d'œil à sa montre argentée.

« Je pense qu'on ferait mieux de rentrer. Pomfrey a dû lancer un avis de recherche après que tu te sois éclipsée si longtemps de l'infirmerie sans autorisation.

– Elle était occupée, dit Eva, la bouche horriblement pâteuse.

– Sans doute, admit Sirius avec un rictus arrogant qui révélait qu'il ne regrettait absolument pas son attaque sur les Serpentards. Mais je ne doute pas que McGonagall l'ait rappelé à l'ordre après qu'elle ait trouvé ton lit d'infirmerie vide.

– Comment est-ce que tu sais que McGonagall…me cherche ? » termina Eva après une faible quinte de toux, imitant lentement Sirius qui se remettait sur ses pieds.

Il n'avait toujours pas lâché sa main.

– Disons que j'ai eu une petite entrevue avec elle avant que je ne te trouve en train de crier comme un Mandragore, dit Sirius en lui décochant un sourire arrogant par-dessus son épaule. Allez, viens, je n'ai pas envie de me retrouver bossu comme les sorciers des livres moldus, » ajouta-t-il avant de se pencher pour reprendre le même chemin qu'à leur arrivée.

Il la tira à sa suite et Eva jeta un dernier regard à l'espace où elle avait trouvé refuge. Elle avait envie de se cacher, de continuer à adopter son rôle de souris que ce jeu morbide lui avait attribué, mais il y avait des gens qui l'attendaient et une vie qui n'avait jamais et n'attendrait jamais qu'elle soit prête.

Eva se laissa guider par Sirius.

.


.

« EVA ! »

Eva dût prendre sur elle pour ne pas dégainer sa baguette sur la tornade rousse qui venait de lui atterrir dessus. Elle resta figée alors que Wendy Woodward enfonçait son nez dans son torse, ses boucles rousses encore plus hirsutes qu'en temps normal si possible et ses bras frêles enroulés presque douloureusement autour d'Eva.

« J'ai – j'ai eu si peur, couina Wendy dans son pull.

– Wendy…, » souffla Eva en réalisant que la personne qui reniflait contre elle était sa cadette de Poufsouffle qui avait dû être effrayée après qu'Eva ne soit jamais réapparue après s'être enfoncée dans les cachots.

Eva posa sa main sur la crinière rousse de Wendy, sentant le regard interrogateur de Sirius posé sur elle.

« Tu – tu n'es pas revenue et…Et j'ai cru que – que, sanglota Wendy.

– Pardon, pardon Wendy, chuchota Eva, caressant les cheveux de la petite 2ème année collée à elle dans l'espoir que ce geste affectueux la réconforterait comme lorsqu'Euphémia le faisait. Je vais bien. Je ne voulais pas te faire peur.

– BROWN ! »

À ce cri, Eva leva la tête vers le fond du couloir du 1er étage et fut surprise de voir Baley Finch-Fletchley arriver à grands pas avec une moue agacée, rajustant presque frénétiquement la branche de ses lunettes. La confusion d'Eva s'approfondit lorsqu'elle remarqua que la baguette de Baley était pointée vers Edgar et Nao qui marchaient devant le blaireau de 2e année en baissant les yeux.

« Baley ? Qu'est-ce que tu fais ? demanda Eva de sa voix enrouée en alternant son regard perplexe entre Edgar et Nao qui fixaient avec obstination leurs pieds et Baley qui lui adressait actuellement un regard furibond.

– C'est plutôt à moi de te poser cette question ! Qu'est-ce que tu fais, Brown ? lui rétorqua Baley avec mauvaise humeur et Eva sentit ses sourcils se jucher bien haut sur son front en entendant le ton de son cadet. Tout Poudlard te cherche ! Professeure McGonagall est furieuse et Madame Pomfrey paraissait prête à te faire avaler une potion pour te faire colmater.

– Tu ne devrais pas être en cours ?

Si ! s'insurgea Baley, ses yeux lançant des éclairs. Wendy et moi sommes censés être à notre cours de Potions mais à la place nous nous sommes fait embarquer au bureau de Dumbledore et nous avons dû partir à ta recherche comme des bons petits chiens ! Tout ça c'est de ta faute, Brown ! Tu ne pouvais pas rester te reposer à l'infirmerie comme une personne normale ?! Tu ne pouvais pas prendre quelqu'un avec toi avant de partir dans les cachots ?! Tu ne pouvais pas – »

Baley se tourna brusquement, cessant sans prévenir sa tirade enflammée. Eva jeta un regard rempli de regrets au dos de son cadet qu'elle entendait prendre de grandes bouffées d'air.

Edgar se dandina sur ses pieds et Nao, bien que triturant ses mains, lança un regard curieux à Baley qui avait cessé de les tenir en joug avec sa baguette.

« Baley, commença doucement Eva, sa gorge la faisant souffrir après avoir tant parlé. Baley, je suis désolée si je t'ai fait peur. Je –

– Je n'ai pas eu peur ! s'exclama Baley en se retournant brusquement vers elle, ses yeux rougis. Tu es juste une incapable, Brown ! Je l'ai dit à Chourave et McGonagall mais elles n'ont pas l'air de comprendre. J'ai dû aller voir le directeur à cause de toi et j'ai dû forcer ces serpents à dire plus d'un mot aux professeurs ! » ajouta Baley en jetant un regard hargneux à Edgard et Nao.

Nao ne baissa pas les yeux. Non, la Serpentarde qu'Eva avait compris être mise de côté par les Serpentards à cause de ses origines moldues fixa impassiblement Baley de ses yeux sombres. Mais ce qui fut plus surprenant fut lorsqu'Edgar pris la parole :

« Je – je voulais – voulais di- dire la vérité à Dumble- Dumbledore ! » se défendit Edgar.

Son engouement était tel qu'Edgar osa même croiser le regard d'Eva avant de fixer de nouveau le sol de ses yeux, se dandinant d'un pied à l'autre alors que tous les regards se posaient sur lui.

« Mais… mais les… »

Edgar se tut, mordant férocement ses lèvres.

« Mais termine tes phrases, par Merlin ! s'écria hargneusement Baley, rajustant ses lunettes. Ce n'est pas si compliqué de faire une phrase avec un sujet, un verbe et un complément !

– Baley..., dit Wendy d'un ton prudent en sortant son nez du ventre d'Eva qui se sentait totalement perdue.

– Quoi, Wendy ? cracha Baley en jetant un regard furieux à son amie.

– Hé, calme-toi le nabot, » le coupa Sirius qui était resté silencieux jusqu'alors.

Baley posa ses yeux sur le brun qui était posé à côté d'Eva et il parut se rendre compte de qui exactement lui avait dit de se taire car il referma sa bouche. Baley avait sans doute été à deux doigts d'envoyer Sirius paître mais seule la réputation de farceur-vengeur du Gryffondor l'avait empêché de faire entendre son avis qu'il n'avait jamais eu peur de crier haut et fort.

Même lorsqu'Amos, Akash et Howard se mettaient à trois contre lui pour lui faire avouer qu'il avait un faible pour Wendy, Baley ne se démontait pas. Il avait beau faire trois têtes de moins que ses aînés et avoir Wendy qui rougissait furieusement derrière lui tandis que le reste des 2e année de Poufsouffle ricanaient allégrement, Baley n'avait jamais peur de se faire entendre.

« Tu es idiot ou quoi le Poufsouffle ? Tu ne sais pas comment ça marche à Poudlard ? Si tu caftes sur d'autres membres de ta Maison, c'est toute ta Maison qui se tourne contre toi. »

C'était Nao qui avait pris la parole.

Eva lui jeta un regard interloqué.

Elle pouvait compter sur les doigts d'une main le nombre de fois qu'elle avait entendu la voix de la Serpentarde de 1ère année alors que ça faisait depuis plus de deux mois qu'elles se voyaient au Club de Baveboules.

Nao jetait un regard presque confus à Baley, comme si la Serpentarde ne comprenait pas qu'un élève d'un an de plus qu'elle n'ait pas encore saisi le fonctionnement de Poudlard. Sauf que, contrairement à ce que la brune qui avait révélé avec réticence à Eva être née au Vietnam croyait, ce n'était pas du fonctionnement de Poudlard dont elle parlait mais simplement celui de la Maison de Salazar Serpentard.

Quelque chose se noua dans le ventre d'Eva à cette réalisation alors qu'elle tenait toujours affectueusement la tête de Wendy contre son ventre.

« Qu'est-ce que tu racontes ? s'exclama Baley en fronçant les sourcils. Lorsque Henry et Lloyd ont étalé du chocolat sur mon lit, je l'ai dit à Chourave et personne ne m'en a voulu. Tu me sors juste une excuse bidon pour expliquer ta lâcheté.

Baley, l'interrompit Eva, s'attirant un mauvais regard de la part de Baley.

– Quoi ? se défendit-il. C'est vrai ! Ils n'ont même pas voulu dire à Dumbledore qu'ils étaient avec nous hier. Et même au petit-déjeuner ils m'ont ignoré quand je suis venu leur demander s'ils t'avaient vu. »

Oh, Baley était encore bien naïf. Il n'avait toujours pas réalisé qu'il y avait un mur qui s'était érigé entre les Serpentards et les autres Maisons avant son arrivée à Poudlard. Lorsqu'Eva avait été en 1ère année, ça n'avait rien de surprenant de voir Ted Tonks aller voir Andromeda Black pour discuter de leurs rondes de préfets à la table des Serpentards mais, aujourd'hui, un tel comportement était inconcevable. La preuve, lorsqu'Eva s'était arrêtée à la table des Serpentards pour se confronter à Emmeline, c'était toute la table qui s'était tournée pour la dévisager avant même qu'elle n'ouvre sa bouche.

« Baley, tu ne les connais pas, dit doucement Eva. Tu ne peux pas dire ça de Nao et d'Edgar.

– Bien sûr que je le peux ! Je suis à Poufsouffle, c'est à moi de faire respecter la justesse et la loyauté ! » s'écria Baley.

Un silence se fit face aux paroles enragées de Baley qui fixait toujours Eva avec des yeux noirs. Eva, elle, avait besoin de quelques secondes.

Dès son arrivée l'année dernière, BFF avait été un vrai enquiquineur et pourtant c'était lui qui rappelait soudainement à Eva la fierté qu'elle avait ressenti jusqu'à l'année précédente en se disant être à Poufsouffle. Avant Royce, elle n'avait jamais hésité à défendre l'honneur de sa Maison contre des élèves immatures, en particulier Liam Olsen et Steve McAvoy. Avant Royce, elle avait fait preuve de presque autant de chauvinisme que James lorsqu'elle vantait les mérites de sa Maison.

Sirius siffla d'un air impressionné :

« Dis donc, pour un petit prétentieux tu m'impressionnes. Ça me donnerait presque envie d'être un blaireau, plaisanta Sirius avec un sourire amusé, les mains dans les poches.

– Ce n'est pas drôle ! s'insurgea Baley, en triturant sa branche de lunettes. Je suis sérieux, j'ai en horreur les lâches et les hypocrites.

– Et pourtant c'est toi hier qui es venu pleurnicher auprès d'Eva, » le coupa Nao.

Le visage rond de Baley fut pris d'un rougissement – rageur ou honteux, Eva ne saurait le dire.

« Ce n'est pas pareil –

– Ah bon ? Parce que ça me semble être la définition de la lâcheté pourtant, » cingla Nao en croisant les bras sur sa poitrine.

Les doigts de Baley restèrent figés sur sa branche de lunettes.

« Viens, Edgar. Ça ne sert à rien de discuter avec lui, dit finalement Nao en attrapant Edgar par la main pour le tirer derrière elle.

– TU AS TORT ! » cria Baley au dos des deux Serpentards qui disparurent à l'intersection du couloir la seconde suivante.

Le cri furieux de Baley fit écho dans le couloir mais aucune réponse ne lui fut donnée. Finalement, alors qu'on entendait seulement la respiration hachée du 2ème année de Poufsouffle, Sirius prit de nouveau la parole :

« C'est qui cette petite Serpentarde ? demanda-t-il, le visage toujours tourné en direction des deux 1ères années qui avaient disparu.

– Nao.

– Et tu la connais d'où ?

– Club de Baveboules, lui répondit Eva en jetant un regard curieux à l'air pensif de Sirius. Pourquoi ?

– Hum, elle m'a l'air d'avoir la langue bien pendue. Une parfaite Serpentarde en somme, » ajouta Sirius en haussant les épaules.

Comme s'il sentait les yeux d'Eva posés sur lui, Sirius se concentra de nouveau sur elle puis sur la petite rousse qui avait sorti le bout de son nez pour le fixer avec des grands yeux curieux.

« Bon, j'imagine qu'il faut te ramener à l'infirmerie. N'est-ce pas, le nabot ? s'exclama Sirius en direction de Baley qui renifla hautainement avant de rajuster ses lunettes face à cette appellation peu flatteuse.

– Arrête Sirius, soupira Eva en flairant le mauvais coup à la vue du sourire en coin de Sirius et de l'air renfrogné de Baley.

– Quoi ? J'y peux rien s'il est petit le blaireau. Il m'arrive là. »

Et Sirius fit un geste pour montrer où exactement Baley lui arrivait, c'est-à-dire au niveau de ses hanches, soit un mensonge grossier.

Baley le pensa aussi car il s'insurgea (« Hé ! C'est faux ! ») mais sa protestation n'eut comme seul effet d'élargir le sourire amusé de Sirius. Eva le savait, si elle n'intervenait pas, ça ne ferait que continuer et d'empirer. C'était la même chose avec Akash, Amos et Howard qui n'avaient jamais compris ce qu'était « dépasser les limites »

« Sirius, arrête – »

Mais elle fut prise d'une quinte de toux et Wendy s'éloigna d'elle alors qu'Eva agrippait sa gorge en feu, les larmes aux yeux. La douleur parut durer une éternité et Eva eut une pensée pour Royce qui avait depuis toujours souffert de quintes de toux qui le laissaient presque bleu parfois, en manque d'oxygène qu'il était.

Finalement, elle put reprendre sa respiration et, avec une grimace, Eva avala de grandes goulées d'air, le dos courbé.

« Ça va ? » lui demanda Sirius en se saisissant de son coude.

Eva acquiesça, clignant des yeux pour chasser des larmes.

« Tu as vraiment mauvaise mine, Brown. Tu n'as pas dormi de la nuit ou quoi ? Et c'est quoi cette toux horrible ? » demanda Baley avec une grimace repoussée.

Avec un soupir, Eva posa sa main sur les omoplates de Wendy pour la faire avancer, lui adressant un faible sourire lorsque Wendy lui demanda avec inquiétude « ça va, Eva ? ».

« Chut, Baley, » dit Eva lorsqu'elle arriva à hauteur du garçon.

Elle n'en voulut pas à Baley de grimacer à l'entente de sa voix qui ressemblait à celle de Madame Boyle, la propriétaire du tabac-presse en bas du bâtiment de son appartement. Evan Rosier avait réussi l'exploit de lui donner la voix d'une fumeuse de 60 ans. Super.

Leur drôle de quatuor continua de traverser les couloirs du 1er étage pour atteindre l'infirmerie. Ils ne croisèrent personne. Après tout, la majorité des élèves de Poudlard suivait actuellement leur dernier cours de la semaine.

C'est cette pensée qui obligea Eva à racler sa gorge pour s'adresser à ses deux cadets qui étaient censés être en cours avec Slughorn :

« Vous devriez aller en cours, » leur dit-elle.

Baley renifla hautainement et, lorsqu'Eva baissa les yeux vers Wendy qui tenait le bas de son pull, Wendy s'échappa à son regard. Eva soupira mais elle était bien placée pour savoir qu'il ne fallait pas sous-estimer l'obstination des Poufsouffles.

Toutefois, elle se retint de sursauter lorsque Sirius qui marchait nonchalamment à sa droite avec les mains dans ses poches se pencha vers elle pour lui chuchoter à l'oreille :

« Tu vois ? Je t'avais dit que tes blaireaux ne te lâchent pas d'une semelle. »

Eva sentit un rougissement lui monter aux oreilles. Elle avait de nouveau la voix de Sirius dans sa tête. « Tu me plais », lui avait-il dit avec tellement d'exaspération.

Comme s'il savait exactement où son esprit s'était égaré, Sirius lâcha une expression amusée contre son oreille avant de se redresser. Lorsqu'Eva lui adressa un regard du coin de l'œil, il lui adressa un sourire arrogant.

Eva ne put s'empêcher de lui gifler le bras.

Merde, se dit-elle en fixant de nouveau le couloir devant elle. Merde. Merde, merde, merde.

Et, lorsqu'ils arrivèrent devant les portes de l'infirmerie, ce fut Sirius qui réussit à forcer les deux 2e années à partir. Eva se doutait qu'elle n'aurait pas réussi à en faire de même. Contrairement à Sirius, elle n'était pas une parfaite inconnue pour Wendy et Baley et elle n'était pas non plus connue pour jeter des sortilèges à ceux qui la gênaient. Eva suspectait même que ce soit la beauté irréfutable de Sirius qui ait joué son rôle pour convaincre Wendy.

Finalement seuls, Eva s'attendit à ce que Sirius la pousse en avant pour qu'elle se fasse soigner par Pomfrey – elle n'avait pas manqué de remarquer ses regards insistants après qu'elle eut été prise de nouveau par une quinte de toux – mais il resta planté là et Eva, confuse par son manque d'action, resta plantée à côté de lui.

« Tu n'as pas cours ? demanda finalement Eva alors que des murmures de voix venant de l'infirmerie et des tableaux derrière son dos lui venaient aux oreilles.

– Si. Avec McGo. »

Eva haussa ses sourcils. Sirius rit puis il haussa les épaules.

Visiblement, il n'était pas inquiet à l'idée de subir le courroux de McGonagall qui était bien loin d'être connue pour son laxisme.

« Mais y a plus important, dit Sirius en attrapant de manière tout à fait naturelle la main d'Eva.

– Quoi ? » demanda-t-elle, à la limite du croassement tellement sa gorge était sèche.

Eva sentit ses mains, ses traîtresses, s'humidifier sous le coup du stress. Si Sirius le remarqua, il ne le laissa pas paraître. D'un air presque pensif, il fixait la main d'Eva dont il tenait le bout des doigts.

Eva suivit son regard, curieuse de savoir ce qui attirait son attention mais la seule chose intéressante était ses ongles jaunes vifs. Elle n'avait pas osé réutiliser la bouteille de vernis à ongle que lui avait offert Emmeline mais la qualité du produit était telle qu'une semaine et demi après son application, le vernis jaune n'était toujours pas parti.

Mais après quelques secondes de plus à fixer ses ongles, Eva réalisa qu'une nouvelle couleur s'était ajoutée au jaune qui était sa couleur préférée.

Du sang, il y avait des traces de sang sur le bout de ses ongles.

Eva inspira brusquement, se remémorant son désespoir alors qu'elle enfonçait ses ongles dans les mains d'Evan Rosier pour le faire lâcher prise. Elle l'avait griffé jusqu'au sang et pourtant il n'avait faire que rire, son sourire s'élargissant s'élargissant s'élargissant

Non. Elle l'emmerdait. Elle emmerdait Evan Rosier. Elle emmerdait Royce Mulciber. Elle emmerdait aussi Lizzie Lestrange qui avait voulu la rendre fautive du déséquilibre mental de son fiancé. Et elle emmerdait Oliver Avery qui avait paru presque horrifié puis coupable en la voyant apparaître aux portes de l'infirmerie.

« Tant que tu – »

Eva arracha ses yeux de ses mains pour fixer Sirius. Il lui rendit son regard. Il avait de nouveau ce regard sombre qui la brûlerait si Eva s'approcherait de trop près.

Sirius était furieux et il voulait se venger.

Il s'interrompit puis parut prendre quelques secondes pour se contrôler. Eva regarda silencieusement la mâchoire de Sirius se contracter puis se décontracter avant que sa bouche ne se torde en une grimace mécontente.

Sirius expira, plongeant ses yeux dans les siens :

« J'ai décidé que je ne t'embrasserai pas tant que tu ne m'auras pas dit pas la vérité. L'entière vérité, précisa Sirius.

– Je t'ai dit la –

– Je ne suis pas stupide, Eva, l'interrompit Sirius et Eva aurait pu croire qu'il savait lancer un stupéfix rien qu'avec ses yeux car elle fut incapable de détourner son regard malgré son cœur qui battait la chamade. Ce n'est pas à cause de quelques rumeurs qu'ils iraient aussi loin. Et puis, ça fait depuis longtemps que je sens que tu caches quelque chose. »

Elle avait peur.

« Je vais attendre jusqu'à ce que tu me dises toute la vérité, répéta Sirius. Mais ne me fais pas attendre trop longtemps, ajouta-t-il. Je ne suis pas vraiment patient comme mec. »

Elle avait peur mais il y avait une deuxième émotion qu'elle ne connaissait pas qui lui serrait la gorge.

Eva ouvrit la bouche, un élan de quelque chose la traversant, mais seul un faible râle lui échappa.

À ce bruit, la mâchoire de Sirius se contracta et sa prise sur le bout des doigts d'Eva se resserra.

« Ne me fais pas attendre, » répéta Sirius d'une voix grave qui intimida Eva puis il lâcha sa main.

Sans un mot, Eva le regarda lui tourner le dos puis s'éloigner. Sauf qu'au bout de quelques pas Sirius s'arrêta.

Eva fixa avec des sourcils froncés son dos immobile. Finalement, au bout de quelques secondes, Sirius se tourna de nouveau vers elle et s'avança à grands pas dans sa direction.

Perplexe, Eva le laissa se saisir de nouveau de sa main mais, cette fois-ci, il fit quelque chose qu'il n'avait jamais fait auparavant et qu'Eva avait seulement vu des Sang-Purs en couple faire entre eux. Luke Carstein le faisait de temps à autre à Amélia Avery et Evan Rosier et Lizzie Lestrange le faisaient il y a une éternité de ça, avant que la photo de Rosier avec sa main sous la jupe d'Ava Parkinson ne soit publiée dans Poud'news.

Plongeant ses yeux brûlants dans ceux d'Eva, Sirius se pencha et ses lèvres effleurèrent le dos de la main de la Poufsouffle. Ne la quittant toujours pas des yeux, Sirius se redressa puis, sans un mot, il partit pour de bon, laissant Eva plantée là.

Il lui avait fait un baisemain.

« Merlin ! Eva, vous êtes rouge ! Vous avez attrapé une fièvre ! Vous êtes irresponsable ! Encore pire que Monsieur Lupin ! »

Mais Eva n'écouta pas le reste de la tirade de Pomfrey. Tout son corps était en feu mais elle restait figée sur une pensée alors que Pomfrey la tirait vers son lit de convalescence.

Elle avait oublié le Serment Inviolable. Lorsque Sirius lui avait enjoint de lui dire la vérité, ses yeux gris pris dans une tornade furieuse, la bouche d'Eva s'était ouverte d'elle-même. Si sa voix ne l'avait pas quitté, Eva lui aurait dit la vérité cette fois-ci.

C'était resté sur le bout de sa langue :

« C'est Royce. Royce veut que je sois six pieds sous terre. »

Eva avait peur de ce que ça voulait dire.

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titre du chapitre : la fin du cache-cache
nombre de mots :
11 200

Oh my gooooood, Eva et Sirius sont si difficiles. Si vous cherchez un coupable pour le retard de ce chapitre, accusez-les. Ils sont partis dans tous les sens et ont été très têtus tous les deux. C'était horrible. Horrible à faire mais le rendu n'est pas si mal ? Dites-moi qu'est-ce que vous pensez de cette déclaration de la part de Sirius ? Un peu soudaine, un peu à contre-courant ? Satisfaisante ? Totalement sortie de nulle part, haha ?

Sinon, je fonds en imaginant Wendy se coller à Eva comme une bernique et Baley s'énerver parce que la stupide 7e année a réussi à l'inquiéter. Et nos chers petits Serpentards… Héhéhé, j'ai des choses de prévu pour ce groupe de jeunots ! Mais le truc que j'aime c'est que Sirius remarque direct que Nao est une Serpentarde bien que certains serpents seraient heureux de prouver le contraire. Ah oui, et que Sirius et Eva aient passé une bonne dizaine de minutes à se tenir par la main, lol. (En passant, la phrase que Sirius a sorti à Regulus pour le "réconforter" est horrible mais Sirius a toujours eu un sacré caractère donc je lui pardonne (en partie).)

Sinon, je vais faire une pause d'un mois pour essayer de prendre de l'avance. J'ai un mémoire qui va également devoir être écrit ces prochains mois et une intrigue qu'il faut que j'affine donc il faut que je réfléchisse à tout ça. On a qu'à se dire au dimanche 20 juin ? Plein de bisous à tous et KENAVO ! Et surtout n'oubliez pas de me donner vos impressions, héhéhé.