14 juin 1507 : tard dans la nuit, nos invités nous ont laissés, en promettant de revenir le lendemain. Etendu sous ma tente, je ne peux m'empêcher de revivre en boucle les découvertes de cette journée, et mon sommeil est troublé de songes étranges. Mes rêves m'entraînent au cœur de la jungle : dans la semi-pénombre du couvert des arbres, des myriades d'oiseaux m'entourent, qui volent en cercle au-dessus de moi. Ils chantent d'un air moqueur, amusés par ma confusion, avant de se poser au sol où ils se métamorphosent en humains.

Loin de s'éclaircir, le mystère s'épaissit. Par exemple, pourquoi le sorcier ne porte-t-il pas de baguette ? Et comment a-t-il appris à maîtriser sa magie ? Est-ce qu'il y a une école ici, comme Poudlard chez nous ? D'autre part, si les sorciers Indiens protègent leur peuple, comment des Moldus Espagnols ont-ils pu envahir l'île ? Au petit déjeuner, nous sommes tous surexcités et chacun y va de son opinion. Mais nous sommes d'accord sur un point : si nous voulons avoir des réponses, la première étape est de comprendre ce qu'est cette « langue » dont ils nous ont parlé.

Nous nous répartissons ainsi les tâches : Elga et Romulus vont transplaner vers Londres, pour essayer de trouver dans les livres une référence à cette fameuse langue. Septimus et moi restons ici, au cas où les Indiens reviennent, pour continuer le dialogue.

Au tout début de cette aventure, j'avais fait quelques recherches, pour essayer d'apprendre magiquement l'espagnol. Ce qui n'avait donné aucun résultat. Cependant, s'il existe une sorte de langue universelle, partagée par tous les sorciers, ce sera déjà un grand pas pour dialoguer avec les Indiens Arawaks.

Cet espoir est hélas vite oublié : peu après midi, Elga et Romulus reviennent, bredouilles. Ils ont fait le tour de plusieurs librairies, interrogé certains de nos anciens professeurs… Personne n'a jamais entendu parler d'une langue comme celle-ci. En Angleterre, la nuit est tombée et ils ont dû interrompre leurs recherches, sans trouver le moindre indice.

Alors que faire ? Nous passons toutes les options en revue, avant de nous rendre à l'évidence. Si le sorcier Indien parle une langue magique, pourquoi ne la comprenons-nous pas ? Parce qu'il ne s'agit pas simplement de parler, il doit y avoir autre chose. Après tout, s'il lui suffisait de parler, il l'aurait déjà fait.

« Tout cela ressemble à un test, me dit Septimus. Je me demande s'ils ne nous mettent pas à l'épreuve, pour voir si on va y arriver.

- C'est possible, dis-je en haussant les épaules. Après tout, les premiers contacts avec les Européens n'ont pas été très paisibles… J'imagine qu'ils veulent d'abord nous jauger avant de nous laisser approcher de chez eux. »

Alors que la chaleur de l'après-midi se fait plus forte, je m'allonge à l'ombre d'un arbre. Comme toujours, du côté de la jungle, de nombreux oiseaux colorés circulent et chantent sous la canopée.

Les oiseaux… Les oiseaux chantent. Le sorcier s'est changé en oiseau. Et avant de se retransformer, il chantait… Est-ce que cela pourrait être aussi simple ?

« J'ai trouvé ! »

Mes amis se tournent vers moi, intrigués. Je m'empresse de leur expliquer le raisonnement :

« Avant qu'il ne se transforme, nous l'avons tous vu voler, n'est-ce pas ? Et chanter ? Et si c'était cela, la langue ? La communication avec les animaux ?

- Mais bien sûr, c'est logique ! intervient Elga. S'il arrive à parler leur langage et nous aussi, alors nous partagerons une même langue ! »

Reste à savoir comment nous allons faire pour « parler » comme les oiseaux. A ma connaissance, certains mages savent échanger avec les serpents, mais ce serait plutôt un don héréditaire, pas quelque chose qui s'apprend. Cela dit, avec un peu de pratique, nous transformer en oiseaux doit être possible, au moins pour de courtes durées. Est-ce que cela va nous aider pour autant ? Là encore, je ne connais qu'une personne qui s'est déjà Métamorphosée elle-même. Une vieille sorcière qui aime parfois se changer en chat. Pourtant, je ne crois pas que cela lui permette de parler le « langage des chats ».

Peut-on même dire qu'elle devient un « vrai » chat, d'ailleurs ? Après tout, avez-vous déjà vu un chat raide et guindé ? Il n'empêche que c'est une piste à explorer. Et pour un passionné de vol en balai comme moi, apprendre à me changer en oiseau, à voler de mes propres ailes, ce serait… magique.

Nous avons donc deux options. La première, continuer sur cette piste pour apprendre le langage des oiseaux. Ce qui ne paraît pas gagné. La deuxième, apprendre l'Arawak ! Mais on risque d'y passer des semaines, voire des mois…

Nous en sommes donc là dans nos réflexions, lorsque l'une des alarmes magiques résonne : les Indiens sont de retour. Cette fois, ils ne sont que deux, le chef et la traductrice. Aucun oiseau n'est posé sur leurs épaules, le sorcier ne les accompagne pas. A moins qu'il ne soit tout proche, impossible à distinguer parmi les nombreux volatiles qui peuplent les environs ?