*BAIE DE FHARUN*
WROTHGAR
HAUTE-ROCHE
La plage toute entière bourdonnait d'activité : les soldats Altmers, Bosmers et Khajiits ainsi que les marins s'affairaient à décharger les navires accostés sur le sable blanc. Alors que la plage se remplissait rapidement, d'autres bâtiments s'arrimèrent à des navires déjà débarqués. Les planches d'embarquement et les cordes se déployèrent pour amener les hommes, les montures et les vivres vers le rivage.
Le général Lyliyarel Highlock et son équipe se déplaçaient çà-et-là, supervisant l'aménagement du camp du Domaine. Les membres de celui-ci faisaient de leur mieux pour dissimuler leur dégoût à la vue des Brétons, Rougegardes et Orcs qui se baladaient dans leur camp. Les vamphires aux yeux rouges et les vargulfs aux croissants d'argents révélateurs étaient disséminés partout dans les rangs des heretai, de mêmes que des nécromanciens en robe noir et types moins que fréquentables. Plus exaspérant encore étaient les soldats de l'Alliance arborant ouvertement des amulettes et des totems de la divinité ou du culte daedrique de leur choix. Les Nordiques aux larges poitrails mettaient un point d'honneur à porter leurs emblèmes de Talos tout aussi ouvertement, osant défier tout soldat du Domaine.
« Rappelez-vous nos ordres, » souffla-t-il pour la millième fois depuis leur départ du Port de Primeterre, dans l'Archipel du Couchant. Cette opportunité d'une alliance contre l'Empire avait été jugée trop bonne pour être écartée par les Anciens de la Tour de Crystal, qui avaient ordonné à Lyliyarel de coopérer avec les heretai (« pour le moment » étaient les maîtres-mots dans ses ordres scellés).
Le groupe se déplaçait désormais en direction d'une grande tente noire au sommet d'une colline surplombant la plage bondée et la vaste plaine dans laquelle l'Armée Septentrionale du Domaine Aldmeri était actuellement établie. Se tenaient là des hommes-loups et hommes-ours, ouvertement et effrontément transformés dans leur forme bestiale. Ils s'écartèrent et ouvrirent la porte de la tente, où une table massive était dressée. Le Thalmor put voir pour la première fois Tala Niwot du Vodahmin.
La femme Rougegarde à la peau sombre était vêtue de la tête aux pieds d'une armure noire Daedrique chatoyante, ce qui fit immédiatement grincer les dents de Lyliyarel.
« Notre ligne de conduite est claire, » était en train de dire le Bréton en armure. Andorak Septim, reconnut Lyliyarel. « Nous devons nous diriger vers Blancherive, et détruire cette… armée… arriviste du « Haut-Roi ». »
« Je ne suis pas d'accord, ma reine, » contra une silhouette que le général identifia par les parchemins de renseignement comme étant Icando Rune-Damnée, le chambellan Dunmer de la reine. « Daguefilante et Camlorn doivent être mises au pied du mur en premier, avant que toute tentative soit faite à l'est. »
« Daguefilante et Camlorn ne feront aucun mouvement, par peur de la Flotte Corsaire d'Haltevoie, » répliqua un Orc massif depuis un coin.
Le « Roi » Burguk d'Orsinium.
La reine leva une main et dériva son regard vers le groupe du Domaine.
Ces yeux… ils… luisent.
« Bienvenue, Général Highlock, » murmura la Reine. Contre sa volonté, Lyliyarel se sentit se détendre légèrement.
C'est un enchantement de Charme qui est à l'œuvre, et un puissant par-dessus le marché, pensa-t-il, mais il afficha un sourire désarmant et s'inclina légèrement jusqu'au niveau de la taille, un geste qu'il était heureux de constater que son personnel avait imité.
« Quel plan d'action suggérez-vous ? » demanda la Reine, en montrant l'espace vide à ses côtés. L'Altmer se déplaça lentement autours de la table, jetant un regard sur la carte de Tamriel déroulée devant eux.
« Le Général Tullius et les Légions, ici, dans le Nord, prendront du temps pour se rassembler, une fois que les nouvelles de notre débarquement les auront atteints, » songea-t-il doucement, penchant sa tête en direction de Solitude. « Ce… Llewellyn Né-Dragon préféra attendre que les Nordiques fasse pression contre nous jusqu'à ce que la Légion soit prête à se déplacer à leurs côtés, à moins qu'il ne soit un plus grand imbécile que nous le pensions. »
L'Altmer pointa un doigt vers la région du sud d'Haute-Roche.
« Je suis d'accord avec le Seigneur Rune-Damnée, » déclara-t-il, acquiesçant au Dunmer aux yeux rouges. « Nous sommes supérieur en nombre actuellement, et possédons l'atout supplémentaire de forteresses sûres à Gardesol et Hamugstalh. Elles peuvent servir à ralentir et encombrer toute armée envahissante pendant que nous sécuriserons tout Haute-Roche. Puis, nous pourrons les attaquer alors qu'ils seront assiégés par l'une ou l'autre des forteresses de montagne. »
« Ma reine ! »
Le cri fit se retourner le groupe vers l'entrée de la tente, d'où un géant Nordique les salua respectueusement.
« Skoberth ? » questionna la Reine.
« Nous avons des prisonniers. »
Ils se dirigèrent tous vers l'entrée, le tissu de celle-ci fut enroulé vers l'arrière pour révéler une foule de plus en plus nombreuse qui raillait et jurait alors que deux silhouettes en armure de la légion furent jetées à genoux devant la Haute-Mère du Vodahmin, au milieu du cercle de tentes.
« Des éclaireurs Impériaux, » déclara une femme, vêtue d'une… armure, si on pouvait l'appeler comme cela, des Brétons de la Crevasse.
Ce sont surtout des plumes et des morceaux d'animaux morts, pensa Lyliyarel avec mépris.
La Reine fit un pas en avant, son armure noire obsidienne lui sculptait une silhouette splendide, était forcé d'admettre Lyliyarel,
« Félicitations, messieurs, » ronronna-t-elle d'une voix doucereuse. « Vous avez trouvé l'armée du Vodahmin avec succès. »
Des rires de moqueries traversèrent le cercle et le plus jeune légionnaire blêmit, tandis que le plus âgé se contentait de serrer ses dents.
Un vétéran, paria Lyliyarel en silence.
« Je les ai attrapés sur la crête au-dessus de nous, » poursuivit la Parjure. « Sans doute pour essayer de nous compter. »
La Reine tendit la main et caressa la joue du jeune homme en face d'elle.
« Dis-moi, mon garçon… jusqu'à combien es-tu arrivé ? »
Les yeux du garçon s'écarquillèrent alors que la confusion traversait son visage.
« Combien d'ennemis as-tu compter ? » demanda la reine, sans une once d'hostilité dans sa voix.
Le jeune homme baissa la tête, par honte et indécision à la fois.
« Dix-huit mille, » déclara-t-il solennellement. « Plus six milles Aldmeri. »
La reine jeta un coup d'œil vers Lyliyarel.
« Général ? »
« Terriblement inexact, » se moqua l'Altmer avec dédain. « Il semblerait que ces Impériaux sont aussi mauvais pour compter que pour diriger des empires. »
Encore plus de rires et d'huées parcoururent le cercle, ce qui provoqua un éclat de colère dans les yeux du jeune garçon.
« L'Empereur… vous arrêtera ! » cria-t-il en tentant de se lever, pour recevoir la poignée d'une épée dans le dos pour la peine.
« Silence, gamin, » souffla son camarade apparemment plus sage, à côté de lui, alors que le garçon s'effondrait avec un grognement de douleur.
« Pour être honnête, je suis ravie que vous soyez ici, » gloussa la Reine, avec son entourage. « Je veux que vous soyez témoin de cela ! »
Elle dégaina une dague depuis le bas de son dos, une action qui fit reculer les soldats du Domaine présents d'un pas en arrière avec un dégoût à peine dissimulé.
Le Rasoir de Mehrunès, pensa Lyliyarel. Un artéfact de magie noire.
« Je dédie ces morts, » déclara la Reine, levant bien haut la dague. « A Boéthiah. »
Lyliyarel fronça les sourcils.
« Boéthiah ? »
Le Rasoir étincela et le Général Highlock tituba en arrière, s'étouffant tandis qu'une ligne rouge apparut au niveau de sa gorge. Toutes les mains se portèrent immédiatement sur les poignées d'épée, mais elles furent entourées de crocs, de griffes et de lames. La lutte fut ridiculement brève.
Helmmir Raed-Guerre se transforma en loup et leva sa tête en direction du soleil couchant, laissant échapper un hurlement qui perça le crépuscule.
« C'est le signal, » murmura Orthjolf avec une joie non feinte, dégainant la lame vampirique courbée qui se trouvait à sa taille. « VOL-KI-HAR ! »
Alors que le cri de guerre strident emplissait les bois environnants, les Gargouilles et les chiens de la Mort arrivèrent sur la plage au pas de course, s'attaquant aux soldats Aldmeri qui se précipitaient vers leurs armes empilées et armures qu'ils avaient mises de côté pour monter le camp.
Les soldats qui, il y a seulement quelques minutes, étaient assis et riaient avec leurs camarades Septentrionaux faisaient désormais faces à leurs alliés avec des poignards dans leurs mains et des cris de guerre dans leurs gorges. Les vampires vêtus de l'armure noire et écarlate du clan Volkihar s'élancèrent, leurs longues lances et leurs boucliers hérissés de pointes embrochant aussi bien les elfes que les hommes-chats. D'autres silhouettes, à moitié nues et décharnées, se précipitèrent en avant avec frénésie et burent avidement les corps encore chauds.
Aussitôt que les corps vidés de leur sang furent jetés de côté, des silhouettes en robe noire lancèrent des sorts d'améthyste à gauche et à droite, soulevant les soldats tombés au combat dans des mouvements brusques et saccadés. Les morts-vivants formèrent des rangs puis coururent, armes brandies.
Nazir se tourna à droite, puis à gauche, ses cimeterres protégeant la petite créature drainant le sang du corps frémissant à ses pieds. Il tournoya à nouveau à droite pour voir un soldat Thalmor s'effondrer au sol, agrippant sa gorge.
« Quel amusement ! Quel AMUSEMENT ! » gloussa Cicéron, essuyant le sang sur ses couteaux « On joue au soleil, il y a un meurtre à faire et les petits oreilles pointues courent encore et encore ! AHAHAHAHAH ! »
« Par Sithis, je déteste les bouffons, » marmonna Nazir alors que la silhouette colorée dansait follement et partait en sautillant là où des bruits de combat pouvait être entendus. « Même si, je suppose que cet idiot est utile dans des moments comme celui-ci... »
Hasdach Chard regarda par la lorgnette. Dans l'obscurité grandissante, la plage devenait de plus en plus illuminée de tentes et équipement en train de brûler. Il n'y aurait pas besoin de manœuvres de navigation ce jour-ci : les Corsaires d'Haltevoie combinés aux flottes de Taillemont, Fharun et Jehanna bloquaient les navires Aldmeri dans le port.
Il n'y avait aucune échappatoire.
« Pourquoi est-ce que votre reine insiste sur le fait qu'il n'y ait pas de prisonniers, Beira ? » demanda-t-il. « Il n'y a aucun profit à tirer d'un tel massacre. »
« Il y en a pour vous, » répliqua la femme à côté de lui, tripotant ses mèches rousses. « Vous êtes payé dans tous les cas. Et n'oubliez pas : il y a la question du pillage des vaisseaux eux-mêmes et de ce que chacun des corps peut avoir sur lui. »
Le corsaire Bréton balança sa tête en arrière et ria.
« C'est ce que j'aime chez vous, ma chère, » ricana-t-il. « Vous voyez toujours le bon côté des choses, quelle que soit la situation. Ca, et vos magnifiques nichons. »
Une dague lancée frôla son oreille gauche, mais le sourire de la Dame Rouge de Fharun démentait son intention hostile.
« Donnez le signal, vieille chèvre. »
Hasdach fit la moue, puis hocha la tête en direction du Dunmer sur le mât. Deux lanternes furent montées jusqu'au mât du drapeau et les voiles noires furent misent en position d'attaque. Beira alla vers l'avant du vaisseau, qui se dirigeait maintenant sur un navire Altmer bloqué qui essayait désespérément de faire ramer ses esclaves vers l'arrière.
« Une longue nuit de meurtre nous attend, » ronronna la femme, dégainant le cimeterre de sa main gauche et faisant courir la lame de celui-ci le long de son crochet d'argent.
Sur la plage, deux groupes s'affrontaient, tous étaient recouverts de la tête aux pieds de sang Aldmeri.
« Seigneur Harkon ? »
« Potéma, » ronronna la silhouette ailée, pliant ses ailes pour se retransformer dans une forme plus humaine. « Je ne peux vous dire à quel point j'étais ravi de recevoir votre message. »
« Epargnez-moi vos paroles mielleuses, Harkon, » répondit Potéma, levant sa main. « Nous savons tous deux pourquoi vous et votre coven êtes ici. »
Skoberth Chant-Noir porta une main par-dessus son épaule, tirant le Parchemin des Anciens confié par sa reine, et le tendit. Vingalmo, au signal silencieux de son maître, s'avança et prit l'objet avec précaution.
« Pour la restitution de mon bien, je vous remercie, » murmura Harkon, inclinant sa tête à destination de la Reine-Louve. « Maintenant… où se trouve ma famille adorée ? »
« Continuez de courir ! »
Le trio se déplaçait à travers les broussailles.
« Aucun signe de la Meute qui nous suit? » haleta Sérana, ses yeux rouges scrutant les ténèbres qui les entouraient.
Aela la Chasseuse souffla en se hissant sur le rebord rocheux.
« Avec le sang et le massacre sur la plage en contrebas ? C'est peu probable. »
« Et maintenant ? » demanda Valérica en portant son regard sur la plage désormais distante, entièrement illuminée de part et d'autre de tentes et navires en feu. Même de si loin, l'odeur du sang et de la mort montaient aux narines des trois prédatrices.
« Nous allons vers Folpertuis, » murmura Aela, presque à elle-même. « Pour arriver au Temple de Havreciel. Les Lames nous offriront l'asile. De là, nous irons vers l'est, rejoindre le Haut-Roi et son armée. »
« Comment savoir qu'ils ne nous tueront pas ? » questionna Sérana, ses mots lui laissant un goût amer dans sa bouche.
« Tu ne peux pas, » admit Valérica. « Mais ton père est là, sur la plage, et nous savons quel sera notre sort si nous tombons à nouveau entre ses mains. »
« Quelque chose… quelque chose a dû arriver à Tala, » insista Sérana. « Elle n'aurait… il n'y a aucun moyen… elle n'aurait jamais… »
« Nous n'avons pas vu la Reine Tala… depuis quelques temps, » lui rappela Aela alors qu'elle leurs offrait une main pour aider les deux vampiresses à grimper à ses côtés. « Quelle que soit la situation, Potéma Septim semble être aux commandes maintenant… et il n'y a rien que la Reine-Louve de Solitude ne ferait pas au nom de la vengeance et de la victoire. »
La Reine a dit : « Lorsque nos nouveaux alliés arriveront, nous balayerons tout devant nous. » Elle n'a jamais déclaré que ces alliés étaient le Domaine Aldmeri.
Nephariel
Cette fanfiction appartient à Tusken1602.
