Bonjour à tous ! Voilà un nouveau chapitre où vous allez pouvoir apercevoir Draco, mais pas seulement ! C'est un chapitre assez long, mais je voulais prendre le temps de tout développer correctement. J'espère qu'il vous plaira !
Quelques jours s'étaient écoulés depuis la dispute et les réconciliations, depuis nos retrouvailles tous les quatre. La vie avait suivi son cours, je continuai à voir Drago et à envoyer des hiboux à Amber qui restaient tous sans réponse. Elle ne m'avait pas encore pardonnée et cela me peinait grandement. Je repensais souvent à notre dispute et à ce qu'elle avait dit sur mon enquête. Elle avait raison. Il ne fallait pas que cette enquête devienne un énième plaidoyer contre les Sang-Purs. J'avais continué à interroger des anciens amis comme Dean et Seamus mais il me semblait qu'il fallait absolument que je recommence à interroger des Serpentards, pour faire plaisir à Amber tout d'abord, pour me donner bonne conscience ensuite, et surtout pour le bien de l'enquête. Je pensais commencer par interroger Blaise, mais il me semblait que ce ne serait pas le témoignage le plus intéressant. J'avais déjà interrogé Nott, mais je n'étais pas totalement satisfaite par ses réponses. Je savais qu'il m'avait caché des choses. De plus, la hache de guerre avait été enterrée le temps d'une soirée, mais j'avais bien conscience que tout ceci ne serait que provisoire. Le temps des explications viendrait. Il en était d'ailleurs de même pour Opale. Même si au cours de cette dernière semaine, elle m'avait fait de nombreux témoignages d'amitié, je ne savais toujours pas pourquoi j'étais restée sans nouvelles d'elle pendant six ans, ni ce qu'elle avait fait pendant la guerre. Je savais bien qu'il me faudrait un jour ou l'autre interroger Opale, mais je n'en avais pas encore le courage. Comme si j'avais peur des réponses qu'elle me donnerait. Bref, notre amitié reposait encore sur un équilibre trop fragile pour être perturbée par mon enquête. Etant donné que je n'avais aucune envie d'entendre parler de nouveau des actions ignobles de Drago, je n'avais pas tellement le choix. Je devais interroger Pansy Parkinson et Daphné Greengrass en premier. A vrai dire, j'avais déjà interrogé Pansy, mais ses réponses ne m'avaient pas satisfaite. Quant à la Greengrass, je me souvenais avoir dit à Amber et à Blaise que je l'avais interrogée, mais il n'en était rien. Je m'étais contentée d'interroger sa sœur, Astoria, qui ne m'avait pas dit grand-chose d'intéressant.
J'avais l'intention de débuter par Daphné, puisqu'il m'était plus facile de la recontacter. Il me suffisait de demander son adresse à Blaise ou à Opale. Je n'avais toujours pas accepté qu'Opale puisse être amie avec une fille comme elle. Pour Blaise, c'était différent, j'étais habituée à leurs embrassades passionnées depuis la sixième année. Mais je ne pouvais m'empêcher de penser à la formidable bataille de boue qui avait eu lieu entre Opale et elle, et je n'arrivais pas à surmonter la haine que j'avais pour elle. Comment Opale y était-elle arrivée, cela restait un mystère. En réfléchissant, je pensais qu'il serait intéressant de commencer par cerner la personnalité de Greengrass (puisque d'après Amber, je ne pouvais plus l'appeler LA Greengrass) avant de l'interroger. J'avais envie d'en apprendre plus sur elle, et le badinage de Blaise n'allait certainement pas aider. Je transplanai donc au Nid Douillet, m'assis à ma place habituelle au comptoir, en attendant que mon amie sorte de l'arrière-cuisine et finisse de servir certains de ses clients. C'était une matinée plutôt calme aujourd'hui et Opale aurait sûrement un peu de temps à m'accorder.
Ce n'était pas la première fois que je revenais. J'étais allée assez régulièrement dans la pâtisserie d'Opale, d'abord pour lui rendre visite, mais aussi parce que je trouvais ce lieu terriblement agréable. Je m'asseyais souvent pour lire un recueil de poèmes ou une pièce de théâtre. Mes conversations avec Opale tournaient toujours principalement autour de la littérature moldue, ou de Blaise et des nouvelles conquêtes qu'il avait ramené. En somme, la conversation restait toujours quelque peu badine, mais il valait mieux ça que l'absence totale de conversation. Récemment, Opale s'était mise à me parler de ses clients. Elle connaissait chacune de leurs manies, chacun de leur vices, et surtout leur pâtisserie préférée. Avec le temps, elle se mit à me parler d'un jeune homme, visiblement le blondinet que j'avais aperçu la dernière fois. Il s'appelait Edward, et il était autant passionné de littérature que nous « Il faudrait que je te le présente » me dit une fois Opale. A chaque fois qu'elle en parlait, elle rougissait, mais continuait néanmoins à faire comme si de rien n'était. Je voyais assez clair dans son jeu. Il lui plaisait drôlement. C'est à partir de là que je lui ai demandé si elle croyait encore au PC, au Prince Charmant, comme quand nous étions adolescentes. Elle me répondit qu'elle n'y croyait plus, qu'elle avait grandi et que l'amour fou n'existait pas. Je n'étais pas du tout convaincue par sa réponse. Fondamentalement, à la voir évoluer ainsi, avec toutes ses amourettes pour ses clients, je sentais qu'elle était encore en train de chercher ce fameux PC. Opale semblait vivre sa propre vie et ses histoires d'amour en se repliant dans les livres et en fantasmant sur des clients du Nid Douillet. Elle vivait en quelque sorte l'amour par procuration, ce qui expliquait pourquoi elle aimait tant les histoires de Blaise.
Mais je divague un peu trop, pardonnez-moi. Revenons au jour présent et à mon entretien avec Opale. Je lui parlais de Daphné, et elle semblait enchantée de voir que j'avais l'intention de l'interroger.
« Je sais que vous êtes devenues amies, Amber me l'a dit. J'ai du mal à t'imaginer amie avec quelqu'un que tu as vaincu par KO lors d'une bataille de boue il y a six ans. »
« Les temps changent Mary, je n'allais pas me laisser dévorer par la rancœur. Je lui en voulais à l'époque, à cause de Blaise, mais maintenant, tout est différent. Blaise est mon meilleur ami et j'ai souvent vu Daphné ici ».
« Comment est-elle ? »
« Oh, elle a beaucoup changé elle aussi, tu sais. Elle a une vilaine cicatrice, infligée par un Mangemort, quand elle a décidé d'arrêter de suivre le Seigneur des Ténèbres. Elle a pris beaucoup de risques en le trahissant. »
J'ouvris de grands yeux écarquillés. Je n'aurais jamais pensé que Greengrass aurait trahi Voldemort au péril de sa vie, avant qu'il soit vaincu.
« Qu'a-t-elle fait ensuite ? »
« Elle s'est engagée dans un réseau de résistance annexe, et elle a résisté comme vous, mais loin de Poudlard. Tu verras quand tu l'interrogeras, elle a beaucoup changé. Elle a failli mourir elle aussi. C'est pour ça qu'Amber l'aime bien. Elles ont failli être sacrifiées sur l'autel de la guerre. »
Je restai pensive, sans rien dire, les yeux dans le vague. Je n'aurais jamais pensé qu'il existait d'autres réseaux de résistance, annexes à l'Ordre du Phénix. Je n'en avais jamais entendu parler, et jamais les journaux ou les politiciens n'y avaient fait allusion. Je ne comprenais pas tout ce mystère et ce secret. Pourquoi vouloir cacher l'existence d'un autre réseau ? Pourquoi les participants de ce réseau ne s'étaient-ils pas manifestés ? Plus que tout, j'étais profondément troublée par ce qu'Opale venait de me dire à propos de Daphné. Elle qui avait rejoint les rangs de Voldemort dès la sixième année, aurait pu changer de camp ? Le cas de Greengrass venait d'infliger un coup mortel à toutes mes certitudes. Les gens peuvent changer, tout n'est pas noir ou blanc, et Daphné, qui venait d'une famille de Sang-Purs de surcroit, venait de me prouver que mes préjugés ne tenaient pas debout. Je me rappelai d'un article que j'avais rédigé sur sa famille, et je fus prise à la gorge par un gigantesque sentiment de honte. Amber avait raison, je ne faisais que diviser, alors que je ne savais rien. Je me retrouvai subitement prise à mon propre piège. Avec Drago, la situation était différente, parce que mes sentiments jouaient pour m'aider à combattre mes préjugés. Mais avec Daphné, que je détestais, ces révélations prenaient un tout autre tournant.
Opale dû voir mon trouble, ma gêne, voire ma honte, et me sourit, comme pour m'assurer que ce n'était pas grave. Avant d'aller servir un autre client, elle se retourna vers moi pour me dire :
« Tu devrais lui donner rendez-vous ici, pour ton enquête, elle sera bien plus à l'aise. Elle est très timide comme fille, maintenant ».
J'envoyais un hibou à Daphné Greengrass, en lui expliquant les tenants et les aboutissants de mon enquête. Elle me répondit en fixant un rendez-vous deux jours plus tard. Elle semblait ne pas avoir de jugement sur l'enquête, n'exprimant ni joie, ni réticence, convenant simplement d'une rencontre, avec politesse.
Le lendemain, je me rendis à mon bureau pour retravailler de récentes interviews. Il fallait choisir les passages intéressants, retranscrire ce qui avait été dit, choisir ce qu'il fallait citer directement…cela représentait beaucoup de travail. Je venais de finir de m'occuper de l'interview de Dean, et me préparais à attaquer celle de Seamus, quand j'entendis toquer à la porte. Rien qu'au son que produisait le poing contre la porte de mon bureau, je savais que Drago allait entrer dans mon cabinet. C'était ce qu'il avait fait lors de notre première rencontre, et il avait depuis pris la mauvaise, ou plutôt bonne habitude, de se présenter régulièrement sur mon lieu de travail. Je savais automatiquement que quelque chose n'allait pas quand il s'annonçait ainsi.
Je ne me trompais pas. J'ouvris la porte et accueillis dans mes bras un Drago mal en point, visiblement encore un peu saoul de la veille, la mine défaite. Dans ces moments-là, je ne demandais jamais ce qui n'allait pas, puisque fondamentalement, tout allait bien dans la vie de mon amant. Enfin, si l'on retirait le fait que sa copine le tannait pour avoir un enfant, ce dont il n'était absolument pas prêt. Ce qu'il fallait bien comprendre, c'est que Drago était atteint par que Musset, dans la Confession d'un enfant du siècle, appelait « le mal du siècle ». Drago avait conscience de faire partie d'une génération sacrifiée, qui ne pouvait ni se retourner vers le passé pour le contempler d'un nouvel œil, ni envisager l'avenir avec espoir. Notre jeunesse, en effet, n'aspirait à rien, si ce n'est à se reconstruire, mais ne trouvait pas de point d'appui sur lequel le faire. Elle errait dans le néant de l'après-guerre et tentait de conjurer les fantômes du passé. Malheureusement, l'avenir qui nous attendait était encore bien imprécis, et les fanatiques de Voldemort étaient encore bien trop nombreux. Drago était bien placé pour le savoir, puisqu'il passait son temps à les traquer au Ministère. Ainsi, où qu'il aille, Drago trainait avec lui son spleen et le répandait sur son passage comme une trainée de poudre.
« Elle veut un enfant » me répéta-t-il, la tête dans les mains, de son habituel air de désespéré.
Je ne savais quoi lui répondre. A vrai dire, je n'avais pas du tout envie d'entendre parler « d'elle ». Je me demandais subitement s'il était toujours ainsi avec elle, ou si elle avait parfois le droit aux moments de gaité dont il faisait preuve avec moi. Ou alors peut-être était-ce le contraire, et que sa mélancolie se réveillait justement quand il était avec moi.
En ce qui me concerne, j'avais une propension certaine à la déprime et à un certain vague à l'âme. La grand-mère d'Opale, que j'avais eu l'occasion de rencontrer une fois en troisième année, avait une fois dit qu'il y avait « de la tristesse dans mes yeux ». Je m'étais approprié cette qualification, cherchant dans mes yeux sombres la moindre trace de tristesse, que je trouvais presque tout le temps. Plus tard, d'autres personnes firent le même constat, et quand je m'écroulai après la guerre, tout le monde eut l'air de trouver cela normal, parce que j'étais une gamine aux yeux tristes.
Drago transportait avec lui plus que de la tristesse, du spleen à l'état pur. Alors nos âmes écorchées avaient trouvé leur point d'appui : nous-mêmes. Ainsi, il résultait un curieux mélange de la combinaison de ma tristesse et de celle de Drago. Nous avions certes une propension à nous tirer mutuellement vers la douleur, mais de l'accord de ces deux douleurs naissait une gaité incontestable, qui tenait au fait que nous avions enfin trouvé quelqu'un pour partager cette douleur. C'est pourquoi les yeux de Drago étaient toujours emplis d'un mélange de nostalgie et de bonheur sans failles.
En y repensant ainsi, je ne pensais pas qu'avec « elle », il puisse éprouver un sentiment de plénitude égal à celui qu'il trouvait avec moi. Il le disait lui-même. Elle était trop heureuse pour lui. Mais je ne pouvais m'empêcher de penser qu'un jour, quand Drago aurait enfin envie de se sauver, ce serait vers elle qu'il se tournerait, comme attiré par la lumière d'un autre soleil. Je ne pouvais pas lui offrir l'aide et les encouragements dont il avait besoin. Je n'avais qu'à ouvrir une bouteille de vin ou de vodka, m'asseoir avec lui pour écouter de la musique, ruminer notre spleen. Je pouvais le soutenir et lui offrir des moments de gaité quand il se croyait le seul au fond du trou. Mais je ne pouvais pas, sur le long terme, lui offrir le soutien dont il avait besoin. Alors je comprenais que l'amour que j'avais à lui offrir puisse sembler totalement dénué de fin, puisque je savais qu'il serait vain.
Cependant, en proie à ces réflexions, j'avais oublié Drago le temps d'un instant, et je finis par relever la tête, en pensant à cette histoire de bébé.
« Tu te demandes comment on pourrait vouloir d'un enfant dans un monde qui n'est que destruction, c'est ça ? »
Drago hocha la tête. Il n'avait rien à dire de plus. Le mal du siècle, je vous dis. Alors puisque je ne savais comment le réconforter, je décidai qu'il était temps pour nous de nous replonger dans nos paradis artificiels, pour oublier la guerre, le spleen, et les bébés non désirés. Je partis chercher une bouteille de vin, Drago mis de la musique moldue, toujours les mêmes, et le temps nous accorda un bref moment d'éternité. Le vin avait réchauffé nos cœurs et nos âmes, et je chantonnai sur le Klub des Loosers. Drago me gratifia d'un grand sourire.
« C'est bon d'être comme ça avec toi. On aimerait que ça ne s'arrête jamais. Plus de problèmes, rien du tout, juste toi et moi, comme toujours », me dit-il.
Je l'embrassai avec passion et me resservit un verre de vin. Je ne finirais certainement pas mon travail aujourd'hui. J'aimais quand Drago se présentait ainsi à mon bureau, de manière totalement spontanée, pour chercher un réconfort que j'étais alors en mesure de lui offrir. J'aimais moi aussi ces moments suspendus, si précieux parce qu'ils étaient secrets. Peut-être que cela me plaisait au fond de n'être que la maitresse. Les musiques défilaient, nos baisers s'intensifiaient. Je fus prise soudain d'un vague malaise, que je ne parvenais pas à identifier. La musique avait changé, il me semblait la reconnaitre de loin, mais je ne me rappelais pas du titre.
« C'est Rub a Dub de Fauve, un vieux titre qu'on écoute de moins en moins. Je peux changer si tu veux », me répondit Drago.
Je lui demandai de la laisser, m'interrogeant sur ce que cette chanson pouvait bien provoquer en moi. J'écoutai attentivement les paroles. A la fin de la chanson, un immense sentiment de tristesse m'envahit alors. Je savais comment je connaissais cette musique.
« Et même si tu vois que je suis pas quelqu'un pour toi, si le soir, quand ça va pas, que t'es triste, qu'y a quoi que ce soit, fais moi signe, je bouge pas, j'te promets je serais là »
Nous écoutions très souvent Fauve avec Opale, et nous y avions converti Blaise et Théo à l'époque, en sixième année. Je me souviens que Rub a Dub était la préférée de Théo, j'optai, personnellement, pour Blizzard. Un soir où j'étais triste, pour une raison obscure puisque j'étais souvent triste, Théo avait écrit ces paroles sur un parchemin, et me l'avait fait parvenir dans ma chambre. C'était quelques temps après sa déclaration d'amour. Je me sentais coupable d'avoir oublié une si belle preuve d'affection, mais maintenant que je m'en souvenais, cela me laissait une impression toute drôle. J'avais été frappée par la gentillesse de son geste ce jour-là, et c'était comme si, tout d'un coup, toutes les fois où Théodore avait été bienveillant et agréable avec moi, refaisaient surface. Le Mangemort s'effaçait peu à peu pour laisser place à l'incroyable jeune homme de sixième année qui avait été si amoureux de moi.
Drago dû s'apercevoir de mon trouble, mais galant homme, il n'en fit rien et passa la chanson. Je retrouvais peu à peu des couleurs, mais la magie du moment était passée. Je me resservis du vin pour me donner une contenance et repartit dans un débat philosophique avec mon compagnon. Il s'agissait de savoir, qui, de Merleau-Ponty ou de Levinas, déconstruisait le plus habilement le sujet transcendantal. Quand nous fûmes las de cette discussion, Drago m'attira à lui, m'assis sur ses genoux, et nous testâmes ensemble, une nouvelle fois, la stabilité de mon bureau.
J'observais Drago se rhabiller délicatement et je passais mes bras autour de lui pour l'aider à remettre son t-shirt. C'était comme ça avec Drago, si nous nous déshabillions ensemble, nous nous rhabillions aussi toujours ensemble, pour la poésie du geste.
« Je dois me sauver, j'ai une réunion dans une demi-heure », me dit-il en enfilant sa chaussette droite.
Je lui fis remarquer qu'après tout l'alcool qu'il avait bu, il lui serait difficile de suivre son meeting. Mais j'avais aussi du travail à finir, et nous convînmes donc de nous revoir le soir-même. J'attendis que Drago sorte de mon bureau pour me passer un peu d'eau sur le visage, tentant de réarranger des mèches de cheveux rebelles, témoignages de l'ardeur de mon amant.
J'étais complètement paniqué à l'idée de toquer à la porte du bureau de Mary. Elle avait oublié, la dernière fois que nous étions vus, le léger pull qu'elle portait en-dessous de sa veste demi-saison. Je me souvins qu'elle était très bien habillée ce soir-là, des chaussures à talons hauts, un jean qui mettait ses jambes en valeur, et ce fameux pull kaki. Je ne savais pas ce qu'il m'avait pris. J'aurais pu aussi bien donner le pull à Blaise ou à Opale, mais elle l'avait laissé sur ma chaise dans un moment d'inattention, et il me semblait qu'il était juste que ce soit moi qui le lui rapporte. Ne connaissant pas son adresse, son bureau me semblait tout indiqué. J'espérais qu'elle ne serait pas là, pour pouvoir le laisser à sa secrétaire si elle en avait une. Mais en étant de bonne foi, j'espérais surtout créer une occasion de la revoir.
Pendant ces six ans, il est vrai que j'avais eu le temps de passer à autre chose. J'avais beaucoup souffert d'avoir été éconduit, mais peu à peu, la tristesse était passée. J'avais eu d'autres histoires d'amour, d'autres cœurs brisés. J'avais construit des choses que j'avais ensuite détruites, mais j'avais aimé. En six ans, j'avais eu le temps d'oublier Mary, vous pensez bien. Cependant, pas une semaine n'était passée sans que je pense à elle avec une certaine nostalgie. Je pensais à elle à quand je rencontrai Opale, que je n'avais jamais cessé de côtoyer pendant ces six ans, je pensais à elle à chaque fois que j'écrivais une lettre qui, je le savais, ne lui serait jamais adressée, à chaque fois que l'on me traitait de Mangemort, à chaque fois que Blaise me rappelait nos années d'adolescents. Je pensais à elle parfois quand les oiseaux chantaient, parfois quand je dormais seul le soir, parfois en travaillant dans mon bureau. Je n'étais pas resté amoureux d'elle pendant tout ce temps. Mais elle avait été mon premier vrai amour, et cela m'avait marqué. Et maintenant je la retrouvais, six ans plus tard, avec une personnalité plus affirmée que jamais, une détermination à toute épreuve, une beauté qui n'avait fait que s'étendre. La revoir me troublait toujours profondément. Ce n'était plus de l'amour, mais une sorte de fascination. A chaque fois qu'elle ouvrait la bouche, je sentais mon cerveau pousser quelque chose comme un « waaaw » d'admiration. Mais hélas, Mary n'avait pas changé, et les défauts qui étaient les siens il y a six ans n'avaient fait que s'amplifier eux aussi. Mary était en quelque sorte devenue la caricature de son être il y a six ans. Ses plus grandes qualités et ses plus grands défauts avaient surgit de ces années d'absence.
Quoique qu'il en soit, elle était restée très importante pour moi, et nos réunions à quatre me manquaient terriblement. Malheureusement, Mary semblait toujours en colère contre moi, et cela perturbait la dynamique du groupe. J'y étais peut-être aussi pour quelque chose. Si seulement je pouvais être moins timide, moins réservé, plus extraverti, comme elle ! Alors en allant la voir aujourd'hui, je tentai un pas vers elle. J'avais écouté les conseils de Blaise, il fallait que je sorte de ma rigidité de Sang-Pur, que j'arrive à lui faire part de mes pensées, que je parvienne à lui faire comprendre qu'elle m'avait manqué et qu'elle comptait pour moi.
J'arrivais à grand pas au niveau du bureau de Mary, quand j'aperçu une silhouette, qui ne pouvait qu'être celle de Malefoy, refermer la porte. Je savais qu'ils couchaient ensemble, Blaise me l'avait dit. Et puis de toute façon, qui n'était pas au courant de cela ? Il n'y avait qu'Astoria, la copine de Malefoy, pour fermer les yeux. Je croisai son regard quand il se retourna après avoir fermé la porte. Il semblait légèrement saoul et parut ne pas me reconnaitre tout d'abord. Je tentai de l'observer d'un œil indifférent, mais le dédain perçait dans mes yeux, et il me le rendit bien, quand il se rendit compte qu'il était face à moi. Nous nous détestions déjà dans notre métier, parce que nous étions amenés à travailler ensemble régulièrement, et que nos méthodes étaient fondamentalement différentes. Maintenant, nous avions une raison supplémentaire pour nourrir notre haine. Je me souvenais que déjà en sixième année, il avait pris l'habitude de me regarder avec ces mêmes yeux venimeux. Il passa à côté de moi, le regard fier et la tête haute, sans même me dire bonjour, et sortit.
Je n'avais pas de doutes quant à la présence de Malefoy dans le bureau de Mary et cela me mettait terriblement mal à l'aise. Mais je n'avais visiblement pas été le seul à être troublé, et je gagnai des points sur Malefoy. J'avais le choix entre rebrousser chemin, ou choisir de toquer néanmoins à cette porte, tout en sachant pertinemment ce qu'il venait de se passer. Avec un énorme effort de volonté, j'essayai de ne pas m'offusquer de la présence de mon ennemi dans le bureau de Mary. Après tout, elle aussi avait vécu pendant ces six ans. Néanmoins, j'étais outré que Mary ait choisi de pardonner à Malefoy, ancien Mangemort notoire, alors qu'elle continuait à me lancer des piques assassines. Pourquoi réussissait-elle à pardonner à Malefoy, mais pas à moi ? Elle devait être amoureuse de lui. Je ne voyais que cette solution pour que Mary puisse faire une entorse à la ligne de conduite qu'elle s'était fixée. La haine des Sangs-Purs, la haine des gens comme moi, trop guindés dans leur orgueil pour dire ce qu'ils pensent réellement, trop timides pour révéler leurs sentiments, et trop fiers pour révéler leurs secrets.
J'hésitai quelques instants avant de frapper à la porte. Je ne voulais pas que Mary sache que j'avais croisé Malefoy. La situation était déjà assez gênante comme ça et il ne fallait surtout pas compliquer les choses. Alors j'attendis quelques instants devant la porte, en faisant craquer l'épaule que je m'étais déboitée il y a cinq ans. Le temps semblait s'allonger, durer une éternité, et chaque seconde qui passait augmentait mon stress. Je me décidai enfin à toquer à la porte et une voix claire me somma d'entrer.
Mary parut surprise de me voir, ce qui était totalement compréhensible. Mon interruption dans son bureau avait quelque chose de surprenant. Elle tâcha d'arranger quelques mèches de cheveux, et j'essayai de ne pas penser à ce qui avait pu se passer avant que je n'entre. Je la trouvai une fois de plus particulièrement belle. Le soleil de ces derniers jours avait réchauffé son teint et cela lui allait à merveille. Elle m'impressionnait. Je ne saurais pas expliquer pourquoi, mais il me semblait qu'elle faisait partie de ces êtres qui vous renversent, de ces êtres qui ne peuvent pas vous laisser indifférents. Mary ne nous laissait pas le choix : on ne pouvait que l'aimer ou la détester, et je passai mon temps à osciller entre ces deux comportements.
J'étais profondément troublé de la surprendre là, au milieu de sa rêverie, dans un lieu qui lui appartenait totalement, dans le désordre de sa tenue qui laissait apparaitre une poitrine sans soutien-gorge, et des vêtements froissés. Je me sentais pareil au Prince de Nemours, dans la Princesse de Clèves : « voir dans le plus beau lieu du monde, une personne que j'adorais », quand la Princesse a dénoué ses cheveux et retiré le tissu qui lui couvrait la gorge. Ainsi, comme Nemours, à peine restais-je maitre du transport que me donnait cette vue. Je décidai néanmoins de ne rien en laisser paraitre, et après un bref moment d'hésitation, j'entrais dans son bureau.
Je manquai de sursauter en voyant Nott surgir à l'improviste dans mon bureau. Je repensai à ce qui venait de se dérouler auparavant, et priai pour qu'il n'ait pas croisé Drago dans le couloir. J'essayai de remettre en ordre ma tenue, mais je n'avais pas eu le temps de remettre mon soutien-gorge. Certaines de mes amies n'en mettait pas toujours, mais moi, oui, et j'espérai que Nott ne le remarquerait pas. J'étais totalement décontenancée, mais je proposais à Théodore de s'asseoir, le temps que j'aille préparer du thé, ce qui me permettrait de réfléchir à la meilleure conduite à adopter.
Théodore était venu me rendre mon pull, ce qui était foncièrement gentil de sa part. Je me rappelai l'avoir posé sur sa chaise, pour une raison obscure, et j'étais touchée qu'il vienne me le rendre en personne. D'un autre côté, il ne pouvait pas tomber plus mal. Je venais juste de voir Drago, mes vêtements étaient encore imprégnés de son parfum, et j'avais encore trop bu. J'avais été tenté de récupérer mon pull et d'attendre qu'il sorte de mon bureau. Mais j'avais encore en tête la dispute entre Blaise, Amber et moi, ainsi que l'épisode de nos retrouvailles tous les quatre. Je ne pouvais décemment pas continuer à détester Nott. Je repensai au pardon que j'avais accordé à Drago. Pourquoi étais-je incapable de l'accorder à Nott ? Qu'avait-il fait pendant cette foutue guerre ? Pourquoi avait-il rejoint le clan de Voldemort ? La succession dans mon bureau de Drago, puis de Nott, me mettait face à mes propres contradictions, une fois de plus. J'avais réussi à pardonner à l'un et pas à l'autre. En y réfléchissant bien, je me rendais compte que le rôle joué pendant la bataille était finalement assez secondaire. Ce que je n'arrivais pas à pardonner à Nott, ce n'était pas d'être un ancien Mangemort. Ce que je n'avais pas oublié, c'était qu'il m'avait abandonnée en sixième année. C'était finalement le véritable cœur du problème. Blaise l'avait dit, j'étais hantée par mon passé. Peut-être qu'il était temps de faire un geste en faveur de Nott, pour essayer de tourner la page. Je ne pouvais pas continuer à me mettre à dos tout le monde.
C'est ainsi qu'armée des meilleures intentions du monde, je m'assis en face de Nott et lui servit du thé. J'essayai de déceler la moindre émotion sur son visage, mais il était totalement fermé. Ses yeux luisaient d'un calme tranquille, où la retenue semblait régner. Il me demanda des nouvelles de mon enquête.
« J'essaye d'interroger un peu plus de Serpentard. Je dois notamment interroger Daphné Greengrass et Pansy Parkinson de nouveau. Je pense que Daphné a beaucoup à m'apprendre. Opale m'a dit qu'elle avait beaucoup changé ».
Nott hocha la tête en signe d'assentiment, et ce fut tout. Je ne savais pas quoi dire de plus.
« Apparemment, elle aurait participé à un réseau de résistance externe, hors de l'Ordre du Phénix. Je ne savais pas qu'il existait un tel réseau, et je dois avouer que je m'en suis voulu de croire que Daphné avait fait allégeance ».
« Je connais le réseau, déclara tranquillement Nott, nous sommes en train de le percer à jour au Ministère. La plupart de leurs membres sont restés cachés, et beaucoup de héros de cette guerre n'ont pas été récompensés. C'était un réseau de Sangs-Purs »
« Pendant que la plupart collaboraient, peu d'entre eux ont en effet agit du bon côté pendant la guerre » sifflai-je.
Je m'en voulus instantanément. Je ne savais pas ce qu'il m'avait pris. Je m'étais promis de ne pas faire allusion au passé de Nott, mais je n'avais pas pu m'en empêcher. Mais il avait l'air si fier de parler de son poste au Ministère, alors qu'il ne le méritait pas ! Je ne supportais pas non plus cette manie qu'il avait de toujours tout ramener sur le terrain des Sang-Purs. Comme si à notre époque, nous pouvions encore se glorifier d'être un Sang-Pur !
Nott se leva d'un seul coup, et fit un pas vers la porte.
« Attends ! criai-je, reste ! Théodore, est-ce que tu écoutes encore Fauve ? »
Il parut surpris par ma question, et se retourna vers moi, hésitant entre prendre la porte ou revenir s'asseoir à côté de moi. Je n'avais pas envie qu'il parte. Avec lui, tout était si compliqué, mais tout paraissait si simple à la fois. Je me repentais terriblement d'avoir perdu le contrôle sur la conversation. Voyant qu'il hésitait encore, je murmurai doucement un « pardon ». Il revint s'asseoir.
« Bien sûr que j'écoute encore Fauve, même si je suis sûrement le seul à continuer de le faire ».
« Je me rappelle que ta préférée, c'était Rub a Dub », dis-je doucement
« Et la tienne, c'était Blizzard. J'y ai souvent pensé pendant la guerre. Nique sa mère le blizzard ».
Nous bavardâmes encore un moment de musique, en nous rappelant des anecdotes du passé. Quand il sortit de mon bureau, j'étais calme, apaisée, contente d'avoir partagé un tel moment avec Théodore. Mais je savais que cet équilibre était fragile, et que rien n'était encore acquis. Je n'avais toujours pas eu d'explications, ni de la part de Nott, ni de la part d'Opale. J'avais l'impression de flotter entre deux rives, entre l'apaisement et la colère. Je ne pouvais pas dire que je n'en voulais plus à Nott. On n'efface pas d'un seul coup six années de silence. Je n'oubliai pas que mes amis m'avaient abandonnée une fois, ce qui voulait dire qu'ils étaient prêts à le refaire un jour. Mais en attendant, je pouvais essayer de ne pas me faire déborder par la haine et l'aigreur. Le temps des explications viendrait.
J'avais rendez-vous avec Ginny le soir même. Elle était très occupée ces derniers temps avec les préparatifs de son mariage, mais elle trouvait quand même le temps de m'inviter à diner une fois par semaine environ. Depuis peu, un heureux évènement avait eu lieu : elle était enceinte de deux mois. A mon arrivée, elle m'accueillit comme elle avait l'habitude de le faire, en me sautant dans les bras. Elle me laissa caresser son ventre et un sourire radieux s'étala sur son visage. Nous nous assîmes dans le salon et notre bavardage incessant commença. Nous avions toujours des tonnes de choses à nous dire.
« Les préparatifs pour le mariage avancent bien. J'en suis au plan de table, et c'est un casse-tête pas possible. Il faut à tout prix que j'arrive à éloigner Tante Murielle de ma mère, sinon elles vont réussir à gâcher mon mariage. Et il y a aussi les amis à rassembler par affinités. C'est assez complexe. Et puis c'est compliqué pour Harry, de voir que toute ma famille est rassemblée, alors qu'il n'a de son côté presque pas d'invités. Il pense régulièrement à Sirius. »
« Dans un sens, ta famille est devenue celle d'Harry depuis longtemps. Il a passé tant de vacances chez vous, et Molly est tellement gentille avec lui ».
« C'est ce que je lui dis, répondit-elle, mais cela ne suffit pas et je le comprends. Enfin bon, son travail d'Auror l'occupe beaucoup en ce moment, cela ne lui laisse que peu de temps pour réfléchir…et puis la famille va bientôt s'agrandir ! »
Elle toucha son ventre avec délicatesse, en souriant. Elle était rayonnante et quelque peu surexcitée. « Qu'est-ce que tu bois ? » demandais-je
« Du jus de cornichon » répondit-elle en s'esclaffant « Encore une envie stupide de femme enceinte, je déteste ce truc d'habitude ».
Nous rîmes de bon cœur et elle me confia ne pas vouloir connaitre le sexe du bébé.
« Mais j'avoue que j'aimerais bien avoir un garçon. J'ai déjà préparé une liste de prénom. Le seul souci, c'est que je serais enceinte pour mon mariage, j'espère que je n'aurais pas trop gonflé pour pouvoir rentrer dans ma robe. D'ailleurs n'oublie pas qu'Ella, Amber et toi êtes mes demoiselles d'honneur. J'espère que vous êtes prêtes à me préparer un enterrement de vie de jeune fille de folie ! »
Je fronçai les sourcils à la mention d'Amber. Mon amie ne me laissa pas le temps de dire quoi que ce soit et reprit.
« Je sais que vous vous êtes disputés, Amber m'a tout raconté. Tu y es allé un peu fort Mary. Surtout qu'on ne peut pas dire que la famille Shaw n'ait pas souffert de la guerre. Amber a perdu sa tante et un de ses oncles, et je te rappelle qu'elle a elle-même failli mourir. La vie de Sang-Pur est plus difficile que tu ne le penses, Amber a souvent eu du mal à trouver sa place à Poudlard et dans sa famille. Ses parents voulaient qu'elle aille à Gryffondor, et elle a eu l'impression de décevoir tout le monde en atterrissant à Serdaigle. »
« Tu sais bien que dans mes articles, je ne vise jamais la famille Shaw ou n'importe quelle famille ayant aidé à vaincre Voldemort. »
« Je sais bien Mary, mais tout n'est pas si simple. La famille d'Amber et Amber elle-même ont été profondément blessés par certains de tes articles. Et elle sait de quoi elle parle quand elle dit que tu ne fais que diviser. Apparemment, un groupuscule de personnes se rassemblent pour faire payer les inactifs et certaines familles de Sang-Pur. Alors, suis mon conseil, fais attention à ce que tu écris dans tes articles ».
Je hochai la tête avec entente et demandai à Ginny quel comportement adopter face à la brune.
« Tu devrais lui écrire une lettre d'excuses, c'est encore ce qu'il y a de mieux à faire. Elle arrêtera de t'en vouloir, ne t'en fais pas. Sa colère lui passera. »
« Bon, je vais écrire cette lettre, promis. Concernant mon enquête, j'ai décidé de suivre les conseils d'Amber et de Blaise pour écrire de la façon la plus neutre possible, sans être biaisée par mes préjugés. J'ai interrogé plein de Serpentard (Ginny fit la grimace) et je dois encore enquêter sur Daphné Greengrass et Pansy Parkinson. J'ai aussi interrogé Théodore Nott. »
Mon amie ouvrit de grands yeux ronds ébahis et j'entrepris de lui raconter ma rencontre officielle avec Nott.
« Quel goujat ! » s'exclama-t-elle. « N'empêche qu'il devait être pas mal en chemise blanche. Je ne savais pas qu'il était si haut placé au Ministère »
« C'est vrai que la chemise lui allait bien, tu te souviens de la passion d'Opale pour ce genre de chemises ? (Ginny se mit à glousser). Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Je ne t'en ai pas parlé plus tôt, parce que je voulais t'en parler face à face, mais j'ai retrouvé Opale ! Elle tient une pâtisserie/ bouquinerie/salon de thé dans le nord de Londres. Le Nid Douillet. »
« Quoi !? Tu as revu Opale et tu ne m'en as pas parlé ? Mais il faut absolument que je la vois, dis Ginny d'un ton légèrement hystérique. Elle me manque tellement. Tu sais pourquoi elle est partie en sixième année ? »
« Non, répondis-je, je n'en sais strictement rien. Tu connais le talent d'Opale pour les explications. Je n'en sais pas plus pour Nott non plus. Tout ce que je peux te dire, c'est qu'ils n'ont pas changé. Opale est toujours aussi heureuse, Théodore est toujours aussi prétentieux. J'ai passé une soirée avec eux, en compagnie de Blaise. Tous les trois sont copains comme cochons. Mais Nott me tape carrément sur les nerfs. »
« Mary, tu disais déjà ça quand tu passais tout ton temps avec lui en sixième année. Si tu veux mon avis, tu lui en veux surtout d'être parti. Mais vous allez finir par bien vous entendre tu verras. »
Nous continuâmes à discuter d'Opale surtout, de la dispute qui avait eu lieu entre elle et moi, de notre réconciliation tacite. Je parlais à Ginny du Nid Douillet et elle exprima le souhait de s'y rendre.
« Je t'y emmènerai un jour où ces fichues nausées te laisseront un peu de répit », lui promis-je.
La conversation dévia ensuite sur Nott et je lui racontai tout, de la soirée à quatre, jusqu'à son entrée dans mon bureau, peu après que Drago fut parti.
« Vraiment, je pense que Nott est beaucoup mieux que Drago. Ta relation avec lui est complètement toxique, d'autant plus qu'il a une copine avec qui tout se passe très bien depuis quatre ans déjà. Ils ont même fini par emménager ensemble. Tu le savais, non ? La rumeur dit qu'ils projettent de se marier dans quelques années. »
Ainsi, j'avais vu juste. Le spleen de Drago m'était réservé. Il m'avait laissé croire que cela ne se passait pas très bien avec sa copine, mais ce n'était pas la première fois que j'entendais dire le contraire. Mais je ne voyais pas bien l'intérêt de comparer cette relation à ma relation à Nott. Cela n'avait rien à voir, je n'avais aucune prétentions sur Théodore. Mais je laissai parler ma Ginny qui était maintenant totalement surexcitée.
« Je viens d'avoir une super idée Mary. Et si nous faisions un grand diner de retrouvailles pour fêter ma grossesse et mon mariage qui approche ? Ce serait génial de se revoir tous ensemble non ? Après six ans, vraiment ce serait extraordinaire. Il y aurait Ella et Amber, et Blaise pourrait l'accompagner, et puis Opale et toi bien sûr, et Nott aussi après tout. On pourrait même inviter Hannah et Neville et aussi Padma, Justin, et puis bien sûr Hermione et Ron ! Ce serait formidable, tu en penses quoi ? Je ferais un super plan de table, ce sera un entrainement pour mon mariage ! Ah il faut qu'on envoie vite les invitations ! »
Là-dessus, elle se mit à applaudir et but deux shoot de jus de concombre. Elle partit ensuite très vite chercher des cartons d'invitation, ainsi que son carnet d'adresses, et commença à écrire. C'était la pire idée du siècle. Un diner de retrouvailles avec des personnalités toutes plus clivantes les unes que les autres ! C'était vraiment une très mauvaise idée. Je m'apprêtais à faire part de mes pensées à Ginny, mais en la voyant tout sourire, écrire les invitations, je n'osais pas la contrarier. On ne pouvait rien refuser à une femme enceinte.
Je passai une très bonne soirée en compagnie de Ginny et de son futur mari. En rentrant, j'écrivis une lettre d'excuse à Amber, tout en lui faisant part de la « super idée » de notre amie rousse. Elle me répondit ceci « Excuses acceptées, j'espère te voir vite, tu me manques. PS : c'est une très, très mauvaise idée…mais on ne refuse rien à quelqu'un qui boit du jus de cornichon.
J'avais aujourd'hui rendez-vous avec Daphné Greengrass, au Nid Douillet. J'étais un brin en avance, aussi discutais-je un peu avec Opale, qui pensait tout comme Amber et moi, que l'idée de Ginny était la pire idée du siècle. Mais les cartons d'invitation avaient déjà été envoyés, le rendez-vous était fixé au samedi, et nous étions déjà lundi. Le mal était fait.
Je reconnus instantanément Daphné quand elle entra dans le salon de thé. Peut-être était-ce dû à la ressemblance qu'elle avait avec sa sœur Astoria, ou alors, cela tenait à quelque chose dans sa démarche, à la fois gauche et assurée. Elle était grande, avec un carré court châtain et des taches de rousseur. Il y avait quelque chose dans son nez aquilin qui semblait la doter d'une forte personnalité. Immédiatement, je vis la cicatrice qui barrait sa joue gauche et repensais aux paroles d'Opale. Une cicatrice infligée par un Mangemort, après qu'elle les a trahis. Je sentais dès le début grandir en moi une forte admiration pour cette jeune femme qui semblait si décidée.
Elle me serra la main solennellement avant de s'asseoir et posa son sac sur ses genoux, comme pour se protéger d'une éventuelle attaque venue de l'extérieur. Je me trouvai maintenant en présence d'une jeune femme qui semblait plus craintive que déterminée. Je l'observais pendant qu'elle tentait de cacher le côté gauche de son visage avec ses cheveux. Je commençai par lui expliquer que j'étais journaliste d'investigation pour le Chicaneur et que je faisais une enquête sur les conséquences de la guerre chez les jeunes de notre génération. Daphné parlait peu, mais semblait être sûre des réponses qu'elle donnait. Elle me parla de ses troubles psychologiques, comme cela revenait souvent dans mes investigations, et je la rassurai en lui parlant moi aussi de mes crises d'angoisse. Quand j'en vins aux conséquences physiques, elle hésita avant de dévoiler la partie de son visage qu'elle essayait de cacher.
« Je dois être honnête avec vous, Mlle Smith. Je ne peux vous parler des conséquences de la guerre sans vous dire ce que j'ai fait. Je pense que vous savez que ma sœur et moi avions rejoint le clan de Voldemort assez tôt. J'étais en sixième année. En décembre 1997, j'ai fait volte-face, et j'ai rejoint la résistance. Voilà comment les Mangemorts me l'ont fait payer. J'ai failli perdre la vie lors de cette attaque, mais un de mes compagnons s'est sacrifié pour me laisser la vie sauve. Je vis avec sa mort sur les épaules depuis cinq ans déjà ».
« Comment s'appelait ce réseau ? » demandais-je gentiment, pour ne pas la brusquer.
« Ce ne sont pas des choses dont on peut parler. Le réseau est sous le sceau du secret et les conséquences pourraient bien être dramatiques si on apprenait son existence. Voyez-vous, c'était un réseau alternatif à l'Ordre du Phénix. Un réseau composé majoritairement de Sangs-Purs et d'anciens Mangemorts ».
« Mlle Greengrass, je suis soumise, dans mon métier, à un certain secret professionnel. Vous pouvez me faire confiance, je ne divulguerais pas ces informations ».
Daphné sembla hésiter une fois de plus. On sentait qu'elle avait envie de parler, mais qu'aucun sons ne voulaient sortir de sa bouche. Et puis, finalement, elle abandonna.
« Le réseau s'appelait La Voie des Sombrals », murmura-t-elle.
Respectant son souhait, je ne notai rien sur mon carnet.
« Il y a aussi quelque chose que vous devez savoir, Mlle Smith, ajouta-t-elle. Je reçois régulièrement des lettres anonymes, de menaces, d'injures et tant d'autres choses. Je suis dans une position délicate. On me reproche mon inaction, et je n'ai pas encore le droit de révéler au grand jour mes positions pendant cette guerre. Les informations que je vous donne sont donc à manier avec précaution. »
Là-dessus, elle se leva, cacha de nouveau sa cicatrice derrière ses cheveux châtains, passa dire bonjour à Opale et sortit du salon de thé, me laissant seule à ma table, complètement ébahie. J'avais été subjuguée par le tempérament si simple, mais affirmé de Daphné, et par les mots qu'elle m'avait dits. Je repensais à ce que m'avait dit Ginny sur le groupe de personnes qui agissaient pour faire payer les inactifs. J'espérais avoir plus tard le droit de révéler au grand jour ce dont Daphné m'avait fait part, pour rétablir un peu de justice. Jamais je n'aurais pensé que quelqu'un comme Greengrass aurait pu s'amender à ce point.
Et voilà, un chapitre mouvementé et surtout un long développement sur Daphné, personnage que j'affectionne tout particulièrement. Mary commence peu à peu à se libérer de ses préjugés et c'est bien mieux comme ça vous ne trouvez pas ? Ce chapitre marque aussi le retour de Ginny et prépare les suivants...le diner sera mouvementé.
Merci encore à ceux qui ont follow/mis en favori ma fic, ça me fait toujours très plaisir, alors n'hésitez pas à le faire 😊 A la semaine prochaine !
