Ce chapitre fut dur à écrire. J'espère néanmoins qu'il vous plaira.

Bonne lecture


Il faisait nuit et elle était seule. Seule entité vivante dans cette suite éclairée à la seule lueur de la lune.

De l'avis général, on la trouvait charismatique. De l'avis de ceux qui la côtoyait au quotidien, elle était d'une beauté certaine, à la fois froide et sanguinaire. De ceux qui avaient partagé une étreinte intime avec elle le temps d'une nuit, elle était également pourvue d'une sexualité insatiable.

Pour ceux qui la connaissait de près, elle était surtout une femme… Une femme au cœur brisé.

Noyant tout sa souffrance dans la manipulation des autres, les plaisirs charnelles, et la satisfaction du pouvoir. Pour ces rares personnes qui savaient appréhender cette louve affamée, l'impératrice, aujourd'hui « reine », était folle. Une folie marquée mais indétectable aux yeux de la population. Cacher son jeu était une de ses pratiques favorites. Elle en faisait souvent usage et aimait tromper ses interlocuteurs. Son tableau de chasse ne diminuait pas avec les années, au contraire, il ne faisait qu'augmenter. Collaborateurs, partenaires sexuels… la liste devenait longue et même si elle ne choisissait que ce qui lui convenait, il n'était pas indécent de dire qu'elle allait au-delà de ses besoins primaires.

Et ce trait de sa personnalité n'était qu'un mur impénétrable qui cachait une cruelle vérité. Base de tout ce qu'elle était devenue au fil des années.

Les prémices de cette destinée trouvaient leur origine dans une chambre d'auberge pas luxueuse du tout et même parfaitement anodine. Même si tout avait été fait pour éviter un « incident », le destin en avait visiblement voulu autrement. Une seule rencontre pouvait changer une vie. On lui avait souvent rabâché…

C'était vrai !

Mais cela avait tellement casser son existence…

Nausicaa, Impératrice de Lyranyann et reine d'Hyrule par coup d'état donna un coup de poing rageur dans le miroir qui lui faisait face, brisant le verre et causant des dommages à sa main nue, la faisant crier.

De multiples morceaux de verres tombèrent au sol avec fracas, énième victime de la colère intarissable de sa propriétaire. Quelques minutes plus tôt, un bel objet réfléchissant parfaitement la lumière, à cet instant, ce n'était plus qu'une miette dans un ensemble d'éléments détruits. Les matériaux se côtoyaient et contrastaient avec les amas de plumes et de tissus qui avaient composés autrefois des oreillers et des draps.

Nausicaa s'écroula à genou, les yeux rouges à force de pleurer et les bras striés de marques sanglantes qui ne lui faisait plus rien ressentir. Sa peau de porcelaine ne renvoyait plus aucun éclat, ce même éclat que les hommes avec qui elle couchait pour tromper sa peine, adoraient voir entre deux brulantes caresses. Elle ne pourrait plus se cacher indéfiniment. Mais que pouvait-elle faire ?

Elle n'avait plus la force de lutter.

Était-elle condamné à être seule ?

Sa lignée était-elle maudite à ce point ? Son arrière-grand-mère, sa grand-mère, sa mère, elle et…

Sa fille…

Était-ce là, la destiné de cette famille dont le nom de famille évoquait la lumière ? Être un astre lumineux solitaire dans le vide du néant infini ?

Elle avait endossé le rôle de souveraine beaucoup trop tôt, encaisser le poids des responsabilités sur ses épaules. Elle avait pris sur elle de guider tout un peuple animé par le chagrin, l'incompréhension et la colère. Elle avait affiché ses intentions et se comportait au quotidien dans ce sens. La « torture » qu'elle avait infligé à la cadette de la famille royale, la chasse à l'homme qu'elle avait organisé pour retrouver Link et Zelda, toutes les manigances qu'elle avait passé des mois à instaurer… Tout cela, ce n'était que ce qu'elle souhaitait que l'on voie de ces intentions.

Elle en cachait une autre et la vraie raison pour laquelle elle avait assumé son titre était un secret que seul un « ami » connaissait… ainsi qu'un « homme » qu'elle voulait entendre hurler de douleur pour le restant de ces jours.

IL lui avait volé ce qui comptait le plus à ses yeux ! Son plus grand trésor ! Une partie d'elle-même qu'elle n'avait jamais accepté de perdre. Cet homme allait payer ! Oh oui, il allait payer pour toute la peine qui lui avait infligé !

Conquérir un royaume ? Quelle importance ?

Obtenir des pouvoirs ? Et pourquoi faire ?

Tuer tous ceux qui se mettrait en travers de sa route ? Aucun problème !

Tout ce qu'elle voulait, c'était qu'on lui rende son enfant !

Qu'on lui rende sa fille : Harmonie !

Nausicaa vel Estelle, non pas en tant que souveraine mais en tant que mère éplorée, se releva, pris une épée à la lame abîmée et, avec une rage à la profondeur insondable, entreprit de mettre en pièce ce qui servait d'armature à son lit.

OoOoO

– Votre Majesté, vous n'êtes pas sérieuse ?!

– Ai-je l'air de plaisanter ?

– Mais enfin…

Il faisait jour à présent et Nausicaa faisait comme si les évènements de la nuit précédente n'avait jamais eu lieu. Sa tenue prestigieuse noire et bordeau foncé à manche longue cachait toutes ses blessures et un ingénieux mélange de maquillage cachait son teint blafard, résultat d'une nuit passée à massacrer tout ce qui se trouvait entre les quatre murs de chambre royale. Elle se tenait face à des membres imminents de SON gouvernement, entre quatre murs garnis de riches décorations et de quelques lustres au plafond.

L'impératrice, désormais « reine » par coup d'état tapa du poing sur la table, abandonnant son activité parallèle qui consistait à entretenir un couteau à la lame meurtrière. Son visage était grave et pourvu d'un air intimidant à même de calmer les ardeurs des plus folles. La crise qu'elle avait encaissé des heures plus tôt avait au moins eu le mérite de rendre son esprit plus lucide pour un temps. Ce genre de rassemblement en compagnie de ses subalternes avait aussi pour fonction de la remettre dans son rôle et dans cette façade d'elle qu'elle entretenait au quotidien.

Cette réunion d'ailleurs… elle lui tapait sur le système. Des erreurs avaient été commises et elle devait rattraper les bourdes de ceux qu'elle croyait parfaitement digne de confiance. Ça ne changeait pas vraiment du temps où elle portait le titre de chancelière mais c'était quand même affligeant. À croire que personne n'apprenait des erreurs des autres. De plus, le ton de son interlocuteur la dérangeait. Elle n'aimait pas qu'on discute ses décisions, aussi paradoxal soit-elle et le fait que ça soit un capitaine de la garde qui est fait cette réflexion était encore pire.

– Nokda, mon cher Nokda…, commença-t-elle d'une voix mielleuse en passant pour la trentième fois un tissu sur le métal éclatant. Je crois, à juste titre, que je suis VOTRE reine et vous MON subordonné, de ce fait je ne vous donne pas l'autorisation de me faire la moindre remarque, d'autant plus venant de quelqu'un qui a trahi sa patrie pour me rejoindre. Je sais faire la différence entre un acte de rébellion sincère et une preuve de lâcheté. En l'occurrence, vous vous êtes mis au service de mon armée par opportunisme et cupidité et non par nécessité. Autrement dit, vous n'êtes rien d'autre qu'une pourriture. Suis-je compréhensible ?

Le ton était glacial et n'invitait pas à poursuivre l'échange verbal.

Le soldat en question baissa les yeux, humilié, conscient que provoquer davantage la colère de la femme en face pouvait lui être préjudiciable. Nausicaa, quant à elle, jeta un regard assassin à toutes les personnes présentes autour de la grande table de la salle à manger du palais royal hylien. Lieu habituel pour les réunions en petit comité. Aucun n'eut l'audace de faire une quelconque remarque. L'autorité de la souveraine était incontestable et la piqure de rappel avait été clair.

– Maintenant ! Déclara Nausicaa avec un mépris certain dans la voix, preuve qu'elle était de mauvaise humeur. Que ça soit bien clair dans vos cervelles, vous savez pourquoi nous avons entrepris notre exode massif, pourquoi nous avons comploté dans l'ombre pendant tant d'années et pourquoi nous nous sommes emparés du pouvoir ici, à Hyrule. Vous le savez ! Toutefois, Leurs Majestés Link et Zelda Bosphoramus Hyrule resteront roi et reine légitime d'Hyrule ! Je veux que toutes les stupides rumeurs qu'on entend à tous les coins de rue soient balayées. Je veux également que les coupables de ces ragots reçoivent le châtiment qu'il mérite pour avoir outrepassé la figure d'autorité que j'incarne ! À aucun moment je n'ai donné l'ordre de discréditer Leurs Majestés et ce que j'ai entendu m'a très fortement déplu !

– Mais…, tenta à nouveau le dénommé Nokda.

Nausicaa regarda son interlocuteur dans le blanc des yeux. Le capitaine de la garde s'enfonça dans sa chaise, livide…

– Tenez-vous à mourir sur le champ capitaine ? Demanda fermement l'impératrice sans attendre de réponse. Si vous n'aviez pas compris, je vous ai incité à la fermer alors fermez-là ! Puisque vous semblez aussi intelligent qu'un nénuphar, contentez-vous de servir de faire-valoir et ne venez plus me faire chier quand je parle de chose qui dépasse ce que votre misérable esprit est capable de recevoir ! Et si vous n'en êtes pas capable, cassez-vous de cette salle avant que je ne décide de lâcher mes loups sur vous… !

Silence et tressaillement de peur pour tous. La magie de l'impératrice était divinement puissante et terriblement sanglante. S'y frotter revenait à signer son arrêt de mort. Et ce n'était pas une exagération. Elle était crainte en parti pour ça.

– Bien ! Fit-elle après s'être assuré que le dénommé Nokda n'allait plus l'ouvrir tout en s'adressant à ses subalternes. Maintenant, expliquez-moi ce que vous comptez faire pour réexpliquer au peuple pourquoi j'ai été dans l'obligation de dégager Leurs Majestés pour un temps… Enfin, disons plutôt, comment vous comptez « tournez » cela…

– Mais Votre Majesté, fit un homme recouvert d'une cape noir au motifs écarlates, qu'est-ce que cela change qu'on ait dégagé les deux souverains ? C'est vous-même qui aviez déclaré lors de la capture de la princesse Laura que le peuple n'entendrai qu'une seule vérité « celle qui stipule que vous avez eu l'intention de causer la destruction de mon pays d'origine tout en massacrant ses habitants. » Ce sont vos propres mots. Alors pourquoi vouloir changer radicalement de point de vue ? Nous avons mal compris ce que vous comptiez faire, c'est un fait mais nous sommes vraisemblablement dans l'incompréhension mes paires et moi alors…

Moment de silence pendant lequel chacun put acquiescer silencieusement. L'impératrice fit basculer sa tête sur le côté et porta ses iris bordeau sur chaque homme présent à cette table.

Mais elle ne fit rien d'autre que de les observer et tous furent étonnés de ne pas se faire agresser verbalement par leur dirigeante comme elle avait coutume de le faire.

– J'ai effectivement dit ce que vous venez de citer ! Accorda-t-elle simplement. Je suis satisfaite de vous entendre dire que vous êtes responsable de votre connerie. C'est déjà ça. Néanmoins, il y a une différence entre déclarer quelque chose et appliquer ce quelque chose ! Je ne comptais pas appliquer ce que Leurs Majestés ont entendu de ma bouche… sauf que VOUS, visiblement, reprit-elle en haussant le ton, vous m'avez pris un peu trop au sérieux et avez passé outre mes directives. C'est moche…très moche…

Tous devinrent aussi blanc que la neige sauf un.

– Mais alors pourquoi ?! Enchaina l'homme mystérieux à la cape noire. À quoi cela rime ? Pardonnez mon insolence Votre Majesté mais à la base, notre coup d'état avait pour but de venger le peuple Lyrannyien en nous emparant d'Hyrule, à défaut puisque que notre propre terre n'existe plus. C'est aujourd'hui chose faite, alors pourquoi ?

L'impératrice ricana.

– Pourquoi ? Pour les écarter du danger bien sûr, répondit Nausicaa comme si cela était une évidence.

– Pard… Je veux dire… Je vous demande pardon ?

– Vous êtes long à la détente ! S'exclama-t-elle au comble de l'exaspération. Qu'est-ce que vous ne comprenez pas ? Malgré tout ce que j'ai pu cracher à Link et à la reine, j'ai suffisamment travaillé avec eux pour qu'ils méritent mon respect le plus total. À défaut de reporter tout le ressentiment de Lyranyann sur eux, j'ai choisi de les faire partir du château par la force. Voyez comme cela a bien fonctionner… Ils finiront par propager leur point de vue sur ce qu'il s'est passé, c'est un fait, mais pour le moment, le peuple hylien doit être dans l'incompréhension la plus totale. Les habitants me font encore confiance. Nous avons juste besoin de gagner du temps pour ce que j'envisage… et plus la population sera longue à comprendre, mieux ça sera. La raison officielle de notre coup d'état est la suivante : On venge nos prédécesseurs en « reprenant en partie ce qu'on nous a retiré ». Quand tout ce bordel se sera calmé, on engagera des négociations… si on ne se retrouve pas en guerre totale d'ici-là bien sûr. Ah oui, et silence absolu concernant ce qu'il s'est passé dans l'hémicycle.

– Attendez, on ne parle pas des dizaines des nôtres qui se sont fait tuer par ces deux sauvages ? Sans parler de la gérudo que vous avez égorgée ? Fit l'homme à la cape pour être sûr qu'il avait bien entendu le sous-entendu de sa souveraine.

– Ce sont des choses qui arrivent Yon ! Répondit Nausicaa sur un ton beaucoup plus sec en s'adressant au dénommé Yon. On ne fait pas d'omelette sans casser d'œufs…

Cette remarque ne plut pas à certain.

– Vous n'avez donc aucune considération pour vos propres sujets ?! S'emporta un haut gradé de l'armée situé à trois chaises de lui, surprenant les membres du gouvernement Lyrannien qui eurent soudain l'envie de regarder ailleurs.

Le visage de l'impératrice changea radicalement d'expression et une tension subite se manifesta.

– C'est à moi que vous osez dire ça ? Fit-elle d'une voix annonçant un cataclysme prochain, redressant son couteau en avant.

Le ton menaçant se suffisait à lui-même.

– Excusez-moi…

– Que je ne vous prenne plus à proférer de telle accusation en ma présence ! Cria Nausicaa avec autorité. D'autant plus que c'est vous, l'armée Lyranienne, qui aviez pris la décision, sans mon accord, de placer une bombe dans la salle de bal du château il y a plus de huit ans, causant la mort d'une centaine de personne, excepté Link, Zelda, leurs enfants, Frederick et quelques domestiques. Ça c'était de l'inconsidération envers le genre humain ! Parce que c'était parfaitement inutile et que cela a entaché ma réputation à l'époque. Déjà que j'ai eu un mal fou à me faire accepter par mon propre peuple, vous aviez failli déclencher une guerre civile par cet acte ignoble. Qui doit se sentir le plus coupable ici hein ? Dites-moi ?! En plus, cet acte a failli révéler Sanglance au grand jour. Ces foutus Chevaliers Célestes ont mené leur enquête à l'époque et nous sommes passés très proche de la correctionnel. Par la simple décision de m'ignorer vous aviez mis notre pays, notre mission, notre engagement et notre présence en terre hylienne en péril ! Alors maintenant vos remarques de ce genre, vous vous les foutez là où je pense et que je ne vous reprenne pas à m'attaquer verbalement, auquel cas, je sortirai les grands moyens pour vous faire disparaitre de la surface de la terre. Est-ce clair ?

Une sensation de froid s'empara des corps de chacun.

– Bien Votre Majesté, cela ne se reproduira plus…

– J'espère bien !

Le regard de la souveraine balaya la table. Demandant par contact visuel si on avait des choses intelligentes à lui dire.

– Majesté ! Fit soudain Yon avec une expression d'interrogation sincère en finissant de noter les dernières informations sur un calpin. Vous venez de dire que Frederick en avait réchappé, parlons-nous de la même personne ? De souvenir, vous l'aviez envoyé en repérage pendant de nombreuses années avant de rejoindre vous-même le gouvernement hylien. Après l'explosion, nous avons perdu sa trace et nous l'avons considéré comme mort. Doit-on comprendre que ce n'est pas le cas ?

L'impératrice se pencha en arrière en replaçant ses cheveux ondulés en laissait planer le doute dans les esprits. Elle en apprécia toute la saveur.

– Vous êtes perspicaces ! Fit-elle enfin. J'ai effectivement ordonné à ce cher Frederick de fuir Hyrule juste après la catastrophe. Ce n'était pas bien compliqué de le trouver. Il venait tout juste de sauver la princesse Laura d'une explosion meurtrière. J'ai eu juste à m'introduire en secret dans le château, profitant de la confusion générale et le tour était joué. Au cas où vous ne le sauriez pas, à défaut d'avoir eu un hébergement qui sied à mon rang, j'ai passé des mois à surveiller la famille royale depuis une taverne de la citadelle. Il était donc très simple d'entrer entre les murs du palais…

– Je ne le savais pas…, répondit Yon en donnant de l'assurance à sa voix. Tout le monde pensait que vous étiez resté en retrait. Bien à l'abris pour donner vos directives.

Nausicaa eut un sourire en jouant avec son arme.

– Un pur cliché du chef de guerre, même si pas éloigné de la vérité. Toutefois, vous avez compris avec le temps que je ne fais jamais rien comme les autres… On ne devient pas une bonne dirigeante en laissant ses subordonnés faire le sale boulot, déclara-t-elle avant d'ajouter sur un ton sombre Peut-être que si j'avais pris les choses en main dès le début au lieu de me ranger dans une vie oisive, ma fille n'aurait jamais été enlevé à cause d'une erreur d'inattention !

Personne n'avait oublié ce jour tragique et entendre la souveraine en parler était étrangement douloureux, même si cela ne l'était bien plus pour la première concernée.

– Majesté…

– Je m'égare, fit-elle en effectuait un geste de la main. Oubliez ce que je viens de dire. Pour en revenir à notre cher Frederick, si je lui ait demandé de quitter le royaume, c'était pour éviter un désagrément futur. J'avais cru comprendre qu'il avait tissé des liens forts avec le roi… Placer tous mes pions en sa présence aurait posé des problèmes à cause de sa relation amicale avec ce très cher Link. Frederick est certes loyal envers la famille impériale de Lyranyann, mais il est néanmoins une personne honnête et le garder ici revenait à prendre le risque qu'il révèle mes intentions. Chose que je ne pouvais pas accepter !

– Et à présent ?

– À présent ? Fit-elle avec amusement. Eh bien, nous aurons l'occasion de l'accueillir ce soir même. Il n'aura pas la tentation de l'honnête envers un ami puisque cet ami n'est plus dans le château. Sachant qu'il m'est fidèle et que je ne doute pas de son dévouement. Il fera un allié supplémentaire de choix malgré son âge. De plus, cela fait un moment que je ne l'ai pas vu…

Elle ne put dire quel effet cette annonce venait d'avoir sur ses subordonnés. Et si cela les gênait d'une manière ou d'une autre, ils ne laissaient rien paraître.

– Il est vrai qu'il fut votre mentor à l'époque où vous êtes entré à l'académie impériale. Vous aviez été sa première élève il me semble… commenta Yon en omettant de répondre au fait que Frederick allait débarquer le soir-même.

Après tout, l'impératrice n'était pas du genre à prévenir en avance des invités qu'elle allait recevoir.

– C'est exact.

Yon se tourna vers ses paires pour s'assurer de leur participation. La tension était retombée mais malgré tout, personne n'affichait un air serein. Les visages étaient toujours crispés.

– Donc si je comprends bien Majesté, l'arrivé proche de votre ancien maître d'arme signifie qu'on passe à la prochaine étape de Sanglance ? Fit-il. Vous n'êtes pas sans savoir que la précédente expédition de notre groupe s'est soldée par un échec total et que le moral s'affaibli de plus en plus. Nos troupes commencent à se demander pourquoi engager des combats alors qu'aucune avancée ne tend à montrer que nous sommes aptes à battre les Chevaliers Célestes et…

Elle n'attendit pas qu'il finisse sa phrase. Nausicaa posa son couteau et fit soudain briller sa main droite avec tellement d'intensité que Yon, ainsi que ses collègues, sentirent la lumière les bruler. La stupéfaction fut totale.

– Attendez ?! Vous avez déjà réussi à…, demanda Yon en ne feignant absolument pas la surprise.

– Exactement ! Déclara l'Impératrice avec un sourire carnassier. Maitriser le pouvoir que j'ai dérobé à la princesse Laura ne m'aura pas demandé beaucoup de temps. À vrai dire, avoir fréquenté l'académie de magie de Lyphalie fut une aide formidable. J'ai entendu dire que toutes les princesses d'Hyrule avaient au moins eu quelques difficultés à dompter un pouvoir aussi fort… ça ne serait pas arrivé si elles avaient privilégiés un apprentissage magique solide à la méditation mais passons… À présent que cette magie est mienne, les choses vont être bien plus simple et la prochaine attaque de Sanglance sur le quartier général des Chevaliers Célestes se passera bien différemment dès fois précédentes.

– Et pour quelle raison ?

– Parce que j'interviendrai en personne et en première ligne ! Pourquoi croyez-vous que j'aie arraché cette magie à sa propriétaire ? C'est la clé qui me permettra d'entrer sans risque dans le complexe. Chose que je ne pourrai pas faire avant. Tuer Reiyan Arlaurhys nous libèrera d'un poids et nous pourrons ensuite nous concentrer sur la renaissance de notre pays… et éventuellement en cohabitant avec Hyrule pour changer…, marmonna-t-elle à voix basse pour qu'on ne l'entende pas.

– Et pour l'objectif principal Votre Majesté ? Demanda Yon sur un ton qui démontrait qu'il avait compris qu'elle n'avait pas tout dit.

Le regard de l'impératrice se fit soudain acérer.

– Vous le savez très bien : récupérez MA fille par tous les moyens possibles ! Je veux reprendre MON enfant à cet enfoiré quoi qu'il en coute ! Je n'ai jamais réussi à cause de son putain de contrôle mental mais cette fois…

Nausicaa leva sa lame vers elle avec une expression cruelle.

– Les choses seront différentes… très différentes.

OoOoO

– Votre Majesté ?

Un homme approchant sagement son soixantième anniversaire entra calmement dans les appartements de sa Majesté Nausicaa, comme si c'était parfaitement normal. Les gardes l'avaient laissé passer de toute façon.

Le soleil venait de se coucher, la journée avait été longue et épuisante et il n'avait pas été fâché d'arriver à destination. Cela lui avait fait bizarre de remettre les pieds dans cet endroit qui contenait tellement de souvenir. La réception organisée pour son retour avait été sommaire mais malgré tout pourvu de chaleur… Une chaleur qui avait cependant manqué de sincérité.

Pas mal de choses avaient changé depuis son départ précipité et il se demandait si Link ainsi que Zelda allaient lui pardonner ces mensonges. Il était Lyranienn d'origine et n'avait en réalité jamais fait partie de la garde d'Haphorya. Tout avait été falsifié pour faciliter son « infiltration » même si ce terme le dérangeait au plus haut point. Cela le mettait mal à l'aise… car il avait pris gout à se lier d'amitié avec le roi et la reine ainsi qu'avec les enfants de ceux-ci… Mais il savait d'où il venait et lorsque Nausicaa était réapparu devant lui, sa loyauté avait repris le dessus et il avait accepté l'ordre qu'elle lui avait donné, à savoir quitter Hyrule, non sans s'être assuré que la princesse Laura était hors de danger.

Et il était aussi conscient de ce qu'avait vécu sa souveraine légitime pour être l'un des rares à savoir exactement ce qui s'était produit ce « soir-là », nuit tragique où la fille de l'impératrice lui fut arraché. C'était la raison pour laquelle il avait suivi cette femme et lui avait juré une fidélité totale…et il attendait une loyauté de sa part, raison pour laquelle il vérifia que l'arme qu'il avait emmené à la barbe de tous était toujours en place car il avait quelque chose à vérifier avant d'accepter quoique ce soit venant de l'impératrice.

L'activité au château déclinait progressivement et avec lui, le bruit ambiant. Malgré le havre de paix qui prenait place entre les murs épais, il y avait toujours ce sentiment d'appréhension forgé par plusieurs années de surveillance. Pour le coup, ce n'était pas une possible présence d'espion ou d'assassin qui lui donnait cet état de vigilance… c'était cette femme !

Les appartements de Sa Majesté étaient pour le moment vides de sa présence. L'agacement et la décoration mêlait l'hylien au lyranien, très peu de dorure et de richesse exposé mais beaucoup de confort. Un léger parfum de vanille émanait dans l'air, chose qui n'étonna pas Frederick car il savait l'impératrice friande de gourmandises à la vanille.

La suite semblait normale… ce qui n'était pas à l'image de sa propriétaire. Frederick avait remarqué que sa souveraine avait fait très attention à ne pas montrer ses mains et ses bras... il en avait tiré les conclusions qui s'imposaient car il n'ignorait pas que Nausicaa était sujette à des crises de démence assez violente. La douleur et le chagrin la consumait depuis bien des années.

L'homme ferma la double porte avec beaucoup de soin et alla se positionner au centre de la pièce. Un grand salon garni de meubles, de fauteuils et de coussins en tout genre. D'une propreté irréprochable, tout était placé de sorte à ne rien laissé au hasard, en d'autres termes, il n'y avait aucunes fausses notes dans le placement des divers objets. Une harmonie certaine régnait en ces lieux. On pourrait croire que l'impératrice était quelqu'un de très précautionneux au niveau de la propreté, pourtant, l'homme savait de source sûre que ce n'était pas le cas. Il la connaissait bien et notamment ses penchants pour les relations charnelles.

C'était pour cette raison que l'homme ne souhaitait pas prendre place sur les banquettes et autres coussins duveteux, lieux propices à des ébats passionnés... C'était, d'une certaine manière, gênant et malsain.

– Frederick ?

La voix fut elle une caresse alliant le chaud et le froid. Agréable et désagréable à la fois.

Nausicaa apparue à l'embrasure d'une porte au fond. Habillée d'un simple peignoir bleu, ses longs cheveux blonds encore humide, l'impératrice dégageait une prestance impériale mêlée à une naïveté enfantine et une folie sauvage. Chose étonnante et particulièrement contrastée. Le dénommé Frederick, ne resta pas longtemps accroché à son regard. Elle était divinement belle et extrêmement séduisante, même entouré d'un peignoir banal et de toute façon, il savait que l'impératrice ne laissait personne indifférent… c'était humainement impossible et elle n'avait en plus physiquement pas tant vieillie que ça.

Nausicaa ne se servait jamais de ses atouts physiques dans des situations sérieuses. Elle aimait plaire et charmer des hommes mais jamais quand quelque chose de réellement important était en jeu. Il ne fallait pas s'y méprendre, l'impératrice était une personne mature et sacrément intelligente qui savait faire la différence entre le plaisir et son rôle de dirigeante.

À cet instant, elle était juste une très belle femme qui semblait surprise de la présence aussi tardive d'un homme qu'elle considérait comme un membre de sa famille. Une sorte de père de substitution.

Frederick remarqua alors l'état de ses mains mais ne fit aucun commentaire, conscient que le moment n'était pas propice à cela.

– Je vois que vous semblez avoir profiter d'un bain…

– C'est l'une des rares choses qui arrive à me faire sentir bien.

– Rien n'a changé à ce que je vois…

Soudain Frederick dégaina l'épée courte cachée dans son dos et la pointa vers la souveraine qui recula d'un pas en arrière par réflexe, toutefois, elle ne semblait pas surprise.

– Avant tout chose Nausicaa, j'ai besoin de m'assurer d'une chose… As-tu respecté la promesse que tu m'as faite il y a huit ans ?!

La concernée plaça ses mains dans son dos, dans une posture non agressive.

– J'ai récupéré le pouvoir de Laura et comme convenu j'ai également procédé à son extraction, non sans mal…, fit-elle comme si elle récitait un paragraphe appris à l'avance. La faire passer sous le nez de mes soldats sans qu'il ne se doute de rien ne fut pas une partie de plaisir. Tu ne voulais pas que la princesse décède des suites de mon opération magique et c'est chose faite, elle n'a pas succombé grâce à ce que je lui ait administré à son insu en plus du poison. Link et Zelda ont pu s'enfuir aussi. Les gens auquel tu tenais ne sont pas morts. Je crois que c'était sa la promesse que je t'ai faite non ?

Frederick abaissa son arme.

– C'est cela ! Merci…

– Je suis une femme de parole Frederick, tu le sais ! Reprit-elle en s'avançant en direction de sa chambre. Je savais aussi que tu n'aurais pas hésité à tenter de me pourfendre si j'avais failli à ma promesse. J'ai respecté notre accord, non pas par peur de ce que tu aurais pu faire, mais parce que je ne pouvais pas me résoudre de toute façon à tuer la s… fille de Link. Déjà que ses cris de souffrance ont été une torture pour moi… Bref, jamais je ne me serai permis d'attenter à sa vie même si j'ai fait croire le contraire à l'ensemble de mes sujets. D'ailleurs, tout le monde pense que Laura s'est échappée d'elle-même. Il ne savent pas que j'y suis pour quelque chose.

Frederick fut satisfait de cette réponse et, profitant d'un instant pour ranger son arme dans son fourreau avec minutie, il posa une question.

– Tu comptes rester dans cette « tenue » encore longtemps ? Ce n'est pas très protocolaire de recevoir quelqu'un ainsi jeune fille.

Nausicaa le regarda avec des yeux ronds avant de s'exclamer.

– Justement non, c'est toi qui m'a surprise à arriver en avance ! J'allais pour enfiler ma robe de nuit quand tu es arrivé, « grand-père ».

L'appellation fit sourire Frederick, qui indiqua qu'il n'allait pas retenir sa souveraine dans sa route jusqu'à sa garde-robe.

Nausicaa revint quelques minutes plus tard dans une robe qui n'avait, mais alors, rien à voir avec ce qu'elle portait habituellement puisqu'elle était vêtue d'une robe ample grise ne laissant que faiblement entrevoir ses formes féminines. S'il y avait bien une chose qui pouvait surprendre, c'était le contraste évident entre les habits de jour de l'impératrice et ses habits de nuit. À son avantage et glacialement séduisante en journée, parfaitement quelconque la nuit. Nausicaa avait toujours détesté dormir dans des nuisettes qui en dévoilait trop et préférait être à l'aise. Une façon de dire : « Je vous ai tous charmé la journée, maintenant, foutez moi la paix ».

Lorsqu'elle se cala dans un de ses fauteuils en embarquant avec elle un large coussin rouge, Frederick nota que ses manières ressemblait davantage à ceux d'une enfant qu'à ceux d'une adulte affectée par la vie. Si elle était capable de se comporter ainsi, c'était qu'elle ne s'était pas encore totalement perdue. À moins que cela ne soit un réflexe d'avoir quelque chose contre elle… Quelque chose ou quelqu'un d'ailleurs…

– Tu ne t'assied pas Frederick ? Demanda Nausicaa innocemment.

Le concerné regarda les fauteuils qui lui faisait face.

– Tu n'as pas à t'en faire, reprit-elle en serrant fortement le coussin contre elle, cachant la partie basse de son visage, chose qui n'échappa pas à son invité. J'ai détruit l'ensemble du mobilier la nuit dernière. Mes servantes se sont occupées de tout changer avec ce qu'il y avait dans la réserve du château. Pas d'inquiétude, tu ne vas pas t'asseoir à un endroit où j'ai fait l'amour avec un homme. De toute façon, depuis le jour où j'ai pris le pouvoir, je suis resté seul dans mon lit chaque nuit…

– Venant de toi, c'est assez rare.

– Comme tu dis.

Frederick prit place sur un fauteuil moelleux et embraya sur ce sujet de conversation pour éviter un moment de silence gênant.

– Déjà à l'époque, tu avais pris cette habitude que la cour trouvait indécente. Je n'ai jamais compris ce besoin que tu avais et que tu as visiblement toujours de coucher avec tout ce qui passe devant tes yeux. Les mœurs ont changé et ont évolués, je le conçois, mais ce n'est pas quelque chose d'accepté, encore moins pour une jeune femme destinée à prendre le pouvoir et à diriger un peuple. Ton ascendance noble aurait dû te contraindre à une certaine bienséance et pourtant, tu n'en a fait qu'à tête du début à la fin.

La concernée haussa les épaules, indifférente.

– Je suis toujours au sommet de la hiérarchie lyranienne pourtant, preuve qu'on m'a accepté malgré mes envies… spéciales. Si tu m'a autant observé que ça Frederick, tu as du remarqué que je ne visais que des personnes ayant un minimum d'éthique et de valeurs. Chose particulière car il s'agissait rarement d'être à l'appartenance noble. Cela en dit long sur les modes de pensés actuels. Je n'ai jamais profité d'une étreinte torride avec quelqu'un que je considérais comme fermé d'esprit.

– C'est pour cela que tu as couché avec Link il y a vingt ans ! Déclara subitement et volontairement Frederick sur un ton indiquant un chemin plus sérieux dans la discussion.

Nausicaa se stoppa net, incrédule puis fronça les sourcils. Elle ne s'attendait pas à devoir parler de ça. Chose qu'elle évitait de faire en temps normal.

– C'est vrai même si j'étais à moitié bourré et que je n'avais pas du tout la même assurance qu'habituellement, répondit-elle avec moins d'entrain. C'était très différent de toute mes aventures passées et de surcroit, personne n'a forcé l'autre… Pourquoi parles-tu de ça ?

La souveraine était méfiante. Frederick le sentit. Il n'était pas né de la dernière pluie. Il savait le sujet sensible.

– Tu l'as aimé pas vrai ?

Nouvelle surprise pour Nausicaa qui abaissa le coussin qu'elle tenait pour le poser sur ses jambes. Son expression enfantine avait disparu, laissant place à nouveau à une carapace de protection. Sa posture indiquait qu'elle était sur la défensive. Frederick sentit qu'il s'aventurait prêt d'une limite à ne pas franchir…

– Qu'est-ce qui te fait dire ça ? Fit-elle sèchement. J'ai sympathisé avec lui, nous avons eu une aventure, nous nous sommes retrouvés lorsque j'ai posé ma candidature pour le poste de chancelière ici, j'ai joué le jeu pendant quelques années et je lui est révélé mes intentions en le chassant de son château ! Point à la ligne !

Frederick regarda son ancienne élève avec l'expression de quelqu'un qui ne croyait pas un traitre mot de ce qu'il venait d'entendre.

– Quelque chose avait changé lorsqu'on t'avais ramené de force à Lyranyann ! Se lança-t-il sans répondre directement à la réponse froide de sa souveraine. On t'a arraché à cette terre et à ce lien naissant entre vous deux. Tout cela pour te remettre sur le droit chemin. Ton père, qu'on ne regrettera pas, n'avait pas du tout apprécié ton escapade en territoire « ennemi ». Sans parler de toute l'énergie utilisée pour ouvrir le portail vers Hyrule… Néanmoins, à ton retour, tu étais différente. Je m'en souviens très bien Nausicaa, de ton attitude face à la cour, en réception, en visite, tu étais moins renfermé sur toi-même. Tu étais hautaine, cynique et vulgaire avant de t'enfuir à Hyrule et à ton retour, tu étais plus douce, plus confiante et moins sujette à la violence. Link avait eu assez confiance en moi pour me révéler des détails quant à votre rencontre et…

– Ou veux-tu en venir bon sang ?! Cria l'impératrice dont le visage indiquait une colère naissante. Je te préviens, si tu es venu jusqu'à moi pour me faire revivre des souvenirs désagréables, je n'hésiterais pas à te dégager de cette pièce. J'ai tout sauf besoin de ça en ce moment.

– Tu n'acceptes pas la vérité ?

– Quelle vérité ?! La seule vérité c'est que je me suis servi de lui parce qu'une putain de destiné à la con est entrée dans ma vie pour la réduire en miette !

La colère de l'impératrice était compréhensible et Frederick préféra ne pas continuer sur sa lancée.

– Très bien… désolé de t'avoir embêté avec ça.

Nausicaa bouillonnait mais elle resta digne et se contenta de décaler son fauteuil sur le côté pour ne plus être face à face avec son invité.

– Nausicaa, je suis plutôt au fait de tout ce qu'il s'est passé depuis cette fameuse nuit tragique, reprit-il tranquillement en se redressant en avant. J'ai arpenté un nombre élevé de routes pendant les huit dernières années. J'ai découvert beaucoup de cultures et d'idéologies de vie. J'ai pu pas mal me renseigner également. J'ai cherché Aram et Aurore aussi mais sans succès même si j'avais des doutes quant à la culpabilité des Chevaliers Célestes à ce sujet. Bref, j'ai vécu en falsifiant mon identité partout où j'allais, en posant des questions, tentant de comprendre le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui. Une soif de connaissance qu'un vieil homme comme moi n'aurait pu ignorer, pourtant, il y a une chose qui reste mystérieux pour moi… Nausicaa, pourquoi est-ce que ça a foiré cette nuit-là ? Pourquoi une bombe ? Pourquoi ces victimes ?

L'impératrice soupira sans se retenir. La soirée ne se déroulait pas comme elle le souhaitait. À vrai dire, c'était presque un interrogatoire et elle détestait ça.

– Mon objectif était de capturer Aram, Aurore et Laura profitant de leur statut d'enfant pour leur montrer tout ce que nous avons traversé, nous Lyranien, expliqua-t-elle avec lassitude. Je voulais qu'ils voient de leurs yeux innocents ce qu'il se passe réellement avec les forces démoniaques qui s'attaquent à la fois à Hyrule et à Lyranyann… C'était ça que je souhaitais. Un stratagème sans effusion de sang, un enlèvement discret. Sauf que bien sûr, rien ne s'est passé comme prévu…

Frederick écouta calmement. Il était curieux bien sûr de savoir ce qu'il s'était passé ce soir-là mais il voulait aller plus loin dans les détails.

– Le groupe qui avait été désigné pour cette mission était digne de confiance… en apparence, continua la souveraine sans se douter un seul instant des pensées de son ancien mentor. Nous avions organisé des attaques dans les plaines pour que la sécurité soit renforcée au sein du château, permettant ainsi à nos troupes de pouvoir plus facilement se fondre dans la masse. Les gardes, n'étant pas géré par Link et son épouse de façon direct, recevaient leurs ordres de leurs supérieurs, or avec tout ce que nous avons mis en place, ils étaient débordés. Résultat, l'infiltration de nos mercenaires via le miroir de téléportation, qu'on nous a volé après-coup, s'était déroulée sans encombre. Tout était paré sauf que…

Elle chercha ses mots, mal à l'aise tout d'un coup.

– Il s'est avéré, que ces hommes-là avaient autre chose en tête. Dans notre dos, il se sont associés au Chevalier Célestes qui voulaient eux aussi capturer Aram Aurore et Laura. J'en ignore les raisons. Ces soldats là, ce sont qui ont placé cette bombe avaient très bien dissimulé leur haine pour le peuple hylien… Ils ont dû se dire que l'heure de la vengeance était arrivée. Ils nous pris par surprise et je sais, de source sûre, que les Chevaliers Célestes, malgré toute la haine que je leur voue, ne s'étaient pas attendu à un pareil massacre non plus. Au final, notre mission a lamentablement échoué, nous avions perdu les trois héritiers et comble du cauchemar, celle que je considérais comme mon amie s'est révélé être de mèche avec Reiyan. Je ne pardonnerais jamais à Laecia cette trahison ! Elle s'est emparée d'Aram et d'Aurore sous mon nez, profitant de ces capacités magiques lui permettant de s'isoler dans une dimension où je n'ai pas accès et sur laquelle elle exerce un contrôle absolu. Filtrant ceux qu'elle désire voir et ceux qu'elle refuse. En bref, un raté total qui m'a forcé à emprunter une autre route pour arriver à mes fins, quelques soient les obstacles se dressant sur ma route. Et tout cela nous mène à ce moment, où nous nous retrouvons en face à face comme avant. Je pense avoir tout dit.

Effectivement, Frederick avait compris trop tard qu'il y avait des traitres dans le château. Lui aussi ne s'était pas attendu à ce retournement de situation. Par contre, le fait que Laecia trahisse son « amie », ça il l'ignorait. C'était intriguant… quoique non pas tant que ça en fin de compte. Il avait bien une petite idée en tête mais en l'absence de preuve concrète, difficile d'établir un scénario précis sur les actes passés de cette femme, première de sa classe en termes de magie. Laecia aussi, avait sans doute quelque chose de précis en tête.

Toutefois, Frederick préféra éviter le sujet pour le moment.

– « Pour arriver à tes fins »… tu parles de ta fille n'est-ce pas ? Fit-il.

Nausicaa acquiesça faiblement et n'essaya même pas d'éviter le sujet.

– Je n'ai jamais réussi à l'atteindre ! Jamais ! Je la sais vivante, je sais où elle est, je sais ce qu'elle a fait mais je ne peux rien faire ! Rien ! Quelle mère indigne je suis, même pas capable de sauver sa fille au bout de dix-huit putain d'années !

Frederick accusa le coup. L'autoflagellation de l'impératrice était sidérante. Preuve néanmoins que l'amour qu'elle portait à sa fille était intact. Mais tout de même…

– J'ai lu la lettre qui explique tout ce que Makeela Riju a fait pour se défendre de nous. Je suppose que la description qu'ils ont faite d'Hyst…, d'Harmonie pardon, corrigea Frederick en voyant le regard mauvais de Nausicaa, ne t'a pas laissé indifférente…

– Frederick, s'il te plait, arrete !

Le concerné ignora purement et simplement sa souveraine.

– Si j'ai bien tout compris Nausicaa, Aram ainsi qu'Aurore ont fréquenté ta fille… Ça veut dire qu'eux sont au courant de ce qu'il se passe dans le complexe. Réfléchie deux secondes ma grande, ne serait-il pas utile que l'on coopère avec ces deux-là… ? Dit-il en effectuant un geste d'arrêt de la main devant Nausicaa qui s'était redressé, choqué qu'on lui suggère pareille chose.

Frederick reprit.

– Ils sont un intermédiaire d'accès à ta fille et s'ils ont développé des liens avec elle, pourquoi ne chercheraient-ils pas à la sauver également ? D'autant plus si les hypothèses que j'ai imaginées sont vraies… ça ferai une double raison pour eux de…

– Tais-toi ! Ordonna froidement l'impératrice.

Le mentor fronça les sourcils.

– Je n'ai rien dit de concret pourtant, qu'est-ce qui te gêne ?

Décidément, dès que quelque chose entrait en rapport avec la famille royale hylienne, Nausicaa se montrait aussi bavarde qu'une statue de marbre.

– Sors ! S'il te plait sors ! Fit-elle presque en le suppliant. Laisse-moi tranquille pour le moment !

Frederick la regarda un instant et nota que ses yeux commençaient à briller. Il n'osa pas faire la forte tête. Il venait de toucher une corde sensible. L'impératrice se recroquevillait sur elle-même à vue d'œil. Elle ne faisait jamais ça devant quelqu'un. La si inébranlable Nausicaa n'était, à cet instant, plus si inébranlable que ça.

– Je vois que tu n'es plus d'humeur… très bien, je vais partir…

Il se leva lentement, sans se montrer agressif, réajusta sa cape et recula jusqu'à la porte sans quitter l'impératrice du regard. Cette dernière n'étant plus que l'ombre d'elle-même.

– Bonne nuit Nausicaa…, ajouta-t-il pour conclure en faisait un signe discret des doigts.

Sur ces mots, il quitta ensuite la pièce en laissant derrière lui la femme qui dirigeait à la fois Hyrule et Lyrannyan. Il avait été trop audacieux à vouloir lui soutirer des informations pareilles à cette heure tardive. Le moment avait été mal choisi. Cependant, il y avait des choses d'étranges dans le comportement de son ancienne élève et cette séance de discussion l'avait prouvé.

Songeur, Frederick parcourut les couloirs silencieux, éclairé par la lueur bleutée des torches. Il croisa quelques gardes sur sa route qui le saluèrent avec tout le respect qu'il avait pour « un ancien ». On le reconnaissait et cela lui faisait quelque part chaud au cœur.

A détour d'un couloir, il passa devant le chemin qui menait, entre autres, à ses appartements. Il continua cependant tout droit, descendit des escaliers, passa devant la cuisine déserte et embraya ensuite par des coursives qui allait le mener droit vers un endroit qu'il avait chéri pendant de nombreuses années.

Retrouver son terrain de jeu favori ainsi que tous ses équipements d'entrainement allait être un délice, d'autant plus qu'il ne sera pas seul pour faire vibrer les lames. « Elle » viendrait, malgré ses douleurs, ses peurs et ses chagrins. Elle viendrait…

Il connaissait très bien son élève…

Arrivé dans ladite salle, Frederick fit tomber sa cape, alla déposer son équipement dans les racks métalliques et s'empara ensuite d'une arme d'entrainement en bambou posé non loin. Il avait agi par réflexe et était satisfait de voir que rien n'avait bougé.

Finalement, ces huit années n'avaient été qu'une période creuse à passer. Frederick n'était pas perdu dans ce château et chaque élément le composant lui renvoyait d'innombrables souvenirs. Cette salle d'entrainement en faisait partie. Des odeurs diverses flottaient dans l'air, du métal, de la paille, du bois… Décidément, cet endroit avait son petit charme et il n'était pas fâché de s'y retrouver.

Frederick se mit alors en position du tailleur au beau milieu de l'air de combat. Fermant les yeux, il se concentra sur les sons et uniquement les sons pendant bien vingt ou trente minutes. Il apprécia de visualiser son environnement ainsi et de travailler sa concentration.

Soudain, ses oreilles captèrent des bruits de pas qui se rapprochaient inexorablement. Lorsque le bruit changea de sonorité, les pas cessèrent. Frederick ouvrit les yeux en sachant très bien à qui il avait à faire.

– Tu as pris ton temps à ce que je vois. Es-tu prête pour cette petite séance de défoulement nocturne Nausicaa ?

La concernée fit tourner ses poignets et ses chevilles en guise d'échauffement final. Son regard était toujours marqué par les souvenirs qui hantaient son esprit mais sa posture démontrait une attitude de guerrière qui avait soif de duel.

– Tu m'as tellement retourné la tête que je ne pouvais aller dormir…, fit-elle en attachant ses cheveux dorés pour ne pas être gênée. J'en ai conclu que le seul moyen d'avoir la paix était de te rendre visite pour échanger quelques coups… comme à l'époque.

Frederick lui sourit puis se redressa sur ses deux jambes. Il prit son épée en bois, plaqua l'extrémité contre le sol et plaça ses mains sur la partie supérieur de celui-ci, comme un chevalier faisait barrage de sa lame.

– Sais-tu que, jadis, j'ai entrainé le fils de Link : Aram, dans cette même pièce ? Lança-t-il alors en scrutant attentivement sa future adversaire alors habillée d'un kimono d'entrainement beige.

Tenue qu'elle ne sortait qu'à de rare occasion avait-il appris.

– Intéressant…, se contenta de répondre Nausicaa dont l'évocation du prénom du roi d'Hyrule ne lui faisait, à cet instant, rien du tout.

– N'est-ce pas ? Un garçon intelligent, joyeux, obnubilé par ce que représentait les chevaliers à ses yeux. Le digne héritier d'un guerrier considéré légendaire par beaucoup et d'une femme au pouvoir divin, elle-même héritière d'une dynastie puissante et bienveillante. Mais un jour, continua Frederick sur le ton de l'explication, Sa Majesté Zelda me fit une demande bien particulière, celle de faire méditer son fils. Une demande bien étrange mais qui avait du sens, car précédant une atroce attaque. Sa Majesté avait compris à force de devoir rassurer Aram, que ce dernier possédait un don n'ayant jamais existé à Hyrule, et pour cause, car il s'agit d'un pouvoir Lyrannien.

Nausicaa haussa les sourcils, intriguée.

– Un pouvoir Lyranien dis-tu ? Pour un enfant né de deux parents hyliens ? Cela semble improbable.

– Effectivement, répondit Frederick avec un discret rictus sur ses lèvres. Toutefois, de ce que Sa Majesté m'a fait part, il s'agirai d'un pouvoir permettant de visualiser un univers en trois dimensions via d'autres sens. En d'autres termes, déjà à cet époque, Aram était capable de voir les auras émanant de chacun… Un pouvoir puissant qui pourtant n'apparait que dans la famille impériale Lyranienne n'est-ce pas ? Un pouvoir que tu possèdes Nausicaa et que ta fille possède surement également.

L'impératrice semblait perplexe.

– C'est exact oui, cependant, je suis plutôt étonné que ce garçon a engendré une magie qu'il n'aurait jamais dû posséder. Son père a été élu et sa mère est une descendante d'Hylia, rien à voir avec nous et notre déesse Lythia.

–Je suis d'accord Nausicaa, affirma Frederick en donnant raison à sa souveraine. C'est pourquoi j'ai organisé des recherches de mon côté. J'ai une hypothèse qui me semble tout à fait plausible mais avant de t'en faire part, à moins que ce soit toi qui me donne tout de suite raison, j'ai autre chose à te raconter… Le pouvoir d'Aram a commencé à se manifester lorsqu'une étrange âme fit son apparition non loin du château, et ce, à intervalle régulier. Tu n'es pas sans savoir que ce pouvoir de l'aura ne se manifeste chez quelqu'un que lorsqu'il rentre en résonnance avec celui d'une personne le maitrisant déjà. Il s'est avéré que cette apparition régulière n'était autre que ta fille Nausicaa… Les rapports de l'équipe engagé par Link et Zelda ainsi que les tiens se rejoignent à ce niveau-là… Il n'y a pas de doute possible.

Moment de silence. Les traits de Nausicaa se firent plus dur. Mais ce n'est pas les propos de son ancien mentor qu'elle avait capté.

– Elle s'est approché du château dis-tu ? Tu es en train de me dire que j'avais potentiellement Harmonie à ma portée ? Fit-elle avec une voix faible. Elle était peut-être seulement quelques mètres de moi ? Pourtant mon pouvoir ne m'a jamais averti ! Si c'est vrai alors je suis vraiment la pire des mères qui existe…

Frederick fit pivoter sa tête de gauche à droite en signe de mécontentement en voyant l'air soudain abattu de l'impératrice.

– Comment aurais-tu pu le savoir Nausicaa ? Dit-il pour tenter de réconforter cette femme qui avait déjà beaucoup trop subie. Je ne peux t'apporter des réponses Nausicaa, j'ignore encore moi-même beaucoup de chose. Néanmoins, il y a une certitude, c'est que ta fille à participer activement à la capture d'Aram et Aurore.

Décidément, Frederick devait bien se l'avouer, il en faisait vivre de toutes les couleurs à sa souveraine depuis son retour. L'air qu'afficha Nausicaa à cet instant n'était pas de la comédie.

– Pardon ?

– Tu as bien entendu, toutefois là n'est pas le sujet. Ce que je veux dire par là, c'est que si mes intuitions sont bonnes alors…

– Par tous les dieux possibles, quelle ironie, déclara Nausicaa en se mettant à rire nerveusement.

Frederick laissa l'impératrice évacuer sa nervosité pendant au moins une bonne minute.

– Tu ne le savais pas n'est-ce pas ? Link a veillé à ce que ces informations restent confidentielles et mes recherches ont permis de faire le lien avec les échos que j'avais eu de cette petite fille capable de se transformer en louve.

Le visage de l'impératrice se décomposa au point de devenir fantomatique. Elle était horrifiée par ce que cela signifiait.

– Elle peut… ? Il a… ? Balbutia-t-elle, les yeux écarquillés.

– Tu as de la peine à évacuer ma grande ! Enchaina Frederick sans laisser le temps à Nausicaa d'exprimer ce qu'elle pensait surement dans sa tête à cet instant. Tu traine en toi du ressentiment, des espoirs brisés, des rêves volés, un chagrin immense et une perte que tu n'as jamais accepté. Tu as de la haine en toi, une colère si sourde qu'elle te fait faire des choses que l'adolescente et jeune adulte que j'avais eu il y a plus de vingt ans, n'aurait jamais fait.

Sur ces mots, Frederick attrapa son arme en bambou et la pointa droit sur son ancienne élève avec une posture et une expression invitant au défi.

– Viens te défouler Nausicaa, viens me montrer que tu as conservé ce que je t'avais appris. Viens me montrer que je ne fais pas face à une morte-vivante ! Tu sais ce que cela implique d'octroyer un pouvoir de transformation à quelqu'un. Tu le sais très bien car tu en es toi-même capable. Tu veux sauver ta fille Nausicaa ? Tu veux la sauver de cette souffrance infernale ? Alors viens me montrer que tu as la volonté noble de le faire et pas une pulsion destructrice qui te transforme en tueuse de sang froid que tu n'as jamais été ! C'est pour ça que tu es venu ici en pleine nuit n'est-ce pas ?

Il sentit une tension énorme envahir l'espace.

– Je ne lui pardonnerai jamais d'avoir fait ça…, déclara-t-elle d'une voix d'outre-tombe. Il a osé faire ça à ma… L'enfoiré ! Je vais le tuer, le trucider, le massacrer le…

– Te rends tu comptes que la colère te manipule depuis des années ? Fit Frederick d'une voix forte en s'approchant de l'impératrice. À titre personnel Nausicaa, tu aurais dû expliquer la situation à Link et Zelda dès le départ ! Tu aurais dû éviter de créer une situation où tu deviens l'ennemi de tout le monde !

– JE N'AVAIS PAS LE CHOIX !

– Bien sûr que si tu avais le choix Nausicaa ! Contra l'ancien mentor. Tu ne l'a jamais fait par peur qu'on te rejette, tu as eu peur des conséquences que cela pouvait engendrer ! Mais aujourd'hui regarde où cela t'a emmené ! Tu vas avoir les quatre peuplades aux fesses en plus d'un puissant chevalier et d'une magicienne qui ne se contente plus de parlementer. Tu vas aller te jeter dans la gueule du loup et peut-être que tu réussiras effectivement à faire sortir Harmonie de sa prison mais après ? Tu n'auras nulle part où aller et personne ne t'acceptera sans arrière-pensée malsaine ! Tu seras une paria…

– Et qu'est-ce que je devrais faire selon toi ?!

– Je te l'ai dit Nausicaa ! Aram ainsi qu'Aurore connaissent ta fille. Après ce que tu as fait, sans compter ton armée, tu n'auras jamais le soutien de qui que ce soit à Hyrule excepté ces deux-là. Il y a une chance pour qu'il te donne des indications primordiales. Et je ne parle même pas de leur dire ce qu'ils doivent également savoir sur ta fille…

–Tu m'énerves…

Frederick la regarda avec intensité.

–Tu m'énerves parce que tu as peut-être raison… T'es chiant.

Cela le fit ricaner. Son stratagème donnait enfin le résultat escompté.

– Si tu veux sauver les meubles Nausicaa, il n'y a plus trop le choix, fit-il avec sérieux. Il va falloir retourner ta veste et tout faire pour ne pas passer pour la méchante de l'histoire. Tu as suffisamment marqué tes mains de traces sanglantes inutiles. Mais là, tu es encore en proie à un sentiment qui va te freiner, alors je viens je t'attends ! Viens te défouler et viens évacuer ce que tu as gardé pour toi durant toutes ces années ! Tu y verra beaucoup plus clair après ça je te l'assure…

– Tu l'auras voulu… Frederick !

À peine eut elle terminé de prononcer ces mots qu'elle bondit de sa position pour une attaque verticale aussi dévastatrice que surprenante.

Frederick para l'attaque à temps mais il nota que l'impératrice avait radicalement gagné en force et en vélocité.

Durant bien cinq minutes, les deux combattants échangèrent des coups avec une violence qui ne correspondait pas du tout au lieu. Droite, revers, coup de pieds, esquive… tout y passa. Le lieu devint rapidement une caisse de résonnance sonore. Heureusement que les murs épais jouaient leur rôle, l'impératrice et le mentor auraient facilement réveillé la moitié du château.

Soudain, au moment d'intercepter une rapide attaque horizontale de Nausicaa, Frederick déclara sur le ton de la provocation :

– C'est tout ce que tu as ? Tu n'as rien évacuer là ! Allez, sors tes tripes au lieu de faire de la figuration.

La provocation eut l'effet attendu.

– Si tu veux en arriver-là… T'en pis pour toi.

Nausicaa se dégagea d'un bon en arrière avant de passer sa langue sur ses lèvres. Elle lâcha son arme qui tomba au sol dans un bruit sourd. Dans un chant cristallin, le corps de Nausicaa vel Estelle commença à briller. La silhouette féminine se tordit avant de changer significativement. Prenant une forme allongée vers l'avant, les deux bras et les deux jambes de l'impératrices se changèrent en patte d'animal puis une longue queue apparue. La lumière diminua en intensité et finalement, elle laissa place à la souveraine…

Mais cette dernière avait pris les traits d'une louve adulte aussi blanche que la neige et aux regards rouge sang. Elle grogna avec un sourire carnassier, les griffes sorties et la queue devenu une masse faites d'une centaine de pointe magique.

– Ah, j'ai failli attendre ! Déclara Frederick à cette vue comme si cela faisait une éternité qu'il attendait ce moment tout en pointant à nouveau son arme vers cette louve plus grande que la normale qui le dévisageait avec un regard de prédatrice sûre de sa victoire.

OoOoO

Nausicaa regarda encore une fois la voute céleste. Couverte d'une cape chaude, elle profitait d'une contemplation magnifique. Cela faisait bien deux heures que le combat avait cessé. Elle et Frederick s'étaient bien battus et avaient conclu sur une égalité. Personne n'avait été blessé bien évidemment. L'un comme l'autre, surtout elle, avait fait très attention à ça. Les « armes » qu'elle avait sous sa forme de louve étaient plus facilement mortel qu'une épée d'entrainement.

Il devait bien être deux ou trois heures du matin. À cette heure, elle était sûr d'être tranquille.

Étrangement, elle se sentait apaisée, comme si un poids s'était envolé dans les nombreux coups de pattes ou de queue qu'elle avait assené à son ancien mentor. Elle voyait plus clair à présent et la volonté de son adversaire qui était de coopérer avec Aram et Aurore ne lui paraissait plus si idiote que ça.

Finalement, il avait eu raison de la pousser à tout décharger par le combat. Un nombre incalculable de sentiment l'avait envahi et elle avait compris à quel point elle avait été écrasée par le poids de ses émotions diverses. C'était vrai, elle n'avait jamais pris le temps d'aérer son esprit. Ce n'était que maintenant qu'elle se rendait compte que, depuis, vingt ans, elle vivait dans une négativité omniprésente.

L'idée même de révéler toute la vérité à des personnes à qui elle s'était jurée de ne rien dire, ne lui paraissait également pas si déconnant que ça. Elle redoutait toujours ce moment mais ce n'était plus qu'un stress naturel que chaque humain possédait… normalement. Et elle le possédait à cet instant, preuve qu'elle était comme tout le monde.

En y réfléchissant, elle avait toujours tout vu en noir. Sa fille lui avait été arraché oui, c'était un fait véridique mais peut-être avait-elle vécu des moments joyeux aussi. Peut-être n'avait-elle pas passé les dix huit dernières années dans la souffrance. Peut-être même… qu'elle voulait qu'elle, Nausicaa, soit là. Il y avait tant d'inconnu…

Peut-être… que tout pouvait rentrer dans l'ordre en fin de compte. Ce n'était pas impossible.

Nausicaa ne désespérait plus, elle espérait.

Sous ce ciel noir parsemé d'étoiles, pour la première fois depuis tout ce temps, Nausicaa adressa une prière silencieuse à ces étoiles, puis à sa fille, espérant qu'elle l'entende où qu'elle soit et satisfaite, de ce qu'il venait de se passer durant toute la soirée, l'impératrice se leva et alla rejoindre sa chambre pour, cette fois, aller dormir, l'esprit libéré de toute la souffrance qu'elle s'était elle-même infligée.

Cette nuit-là, rien n'y personne ne vint déranger la quiétude nocturne du château royal d'Hyrule et, à défaut de casser tout ce qui lui passait sous la main, Nausicaa vel Estelle profita au contraire d'un repos qui allait véritablement lui faire du bien.


Ptites précisions si vous êtes paumés ^^

- Haphorya, c'est le nom que j'ai donné à la citadelle d'Hyrule.

- Lyphalie, c'est le nom que j'ai donné à la capitale de Lyrannyann

- Pour parler du peuple hylien, je conserve dans cette fic le terme "hylien/hylienne". Même si normalement je devrais dire Hyrulien/Hyrulienne, je trouve ça moche... mais genre vraiment moche. Du coup dans cette histoire on conserve le terme de base. J'aurai peut-être dû le dire dès le départ non ? Eh bien totalement xD

À bientôt ;)