Le lendemain, alors que Kakashi conduisait péniblement son char depuis quelques minutes, à Rome, la terre avait arrêté de trembler. Les oiseaux avaient repris leurs chants, accueillant les rayons du soleil. Les chiens avaient repris leur course derrière les chats errants, interrompant leur chasse au rat au milieu des ruines. Oui, des ruines qui étaient parcourues par des citoyens survivants, sortant de leurs logis et de leur refuge, l'air complètement hébété et ahuri. Traînant des pieds, ils regardaient tout autour d'eux. Les femmes et les hommes commencèrent à courir vers les débris, à les dégager et à pleurer en serrant contre eux un époux, une épouse, un enfant, un père, une mère, un frère ou une sœur, décédé sous les écroulements des murs ou par un bloc de pierre. Ainsi, petit à petit, les clameurs se mirent à s'élever de plus en plus nombreuses, et de plus en plus fortes dans toute la ville. Elles arrivèrent jusqu'à la demeure des Hyuga où le silence y résidait encore. La dernière secousse avait été si forte qu'elle avait projeté tout le monde à terre, cognant des têtes contre le sol, des dos contre le mur, des mères se transformant en bouclier pour leurs enfants, et prenant les coups à leur place. A l'intérieur d'un des deux salons, le premier à reprendre ses esprits fut Neji. Papillonnant péniblement des yeux, le visage recouvert de la poussière provenant surement du plafond fissuré au-dessus de lui, il se sentit subitement très lourd. Sa poitrine était comme comprimée par un poids énorme. Réussissant finalement à entrouvrir les paupières, la vision du jeune Hyuga était étonnamment nette, sans aucun nuage la perturbant.

Toutefois, ce ne fut pas ce qui le perturba le plus. Sa surprise fut grande quand il réalisa qu'un morceau du mur se trouvait au-dessus de lui. Pourtant, il ne ressentait aucune douleur. Son corps semblait intact. Et pour cause, au-dessus de lui, entre le débris et lui, sa tante s'était interposée. Inconsciente, elle était complètement affalée sur lui, mais pas seulement lui. En effet, Neji réalisa qu'entre ses bras, Hinata y était endormie ou inconsciente. Il ne saurait pas le dire. Comment ? Quand soudain les souvenirs lui revinrent à la mémoire. Une onde de choc venait de toucher la maison, avec une telle force, que tous furent projetés de dessous les tables. Dans la panique, il n'avait pas pensé à une seconde à lui. Non, il s'était jeté sur sa petite cousine et la prenant contre lui, avait préféré se sacrifier plutôt que de la voir être blessée. Mais pourquoi ? Pourquoi avoir risqué sa vie pour une petite fille dont il se souciait si peu ? Pour ne pas que ses nouveaux parents ne soient anéantis par la perte de leur unique enfant ? Pour se faire passer pour un héro ? En fait, il n'avait écouté que son instinct, un instinct qui lui avait crié de protéger sa famille. Et Hitomi ? Que faisait-elle au dessus d'eux ? A peine se posait-il la question que l'image de sa tante s'interposant à son tour pour les protéger le submergea. Alors c'était cela. Elle aussi était prête à se sacrifier pour lui, ou juste parce qu'il y avait Hinata avec lui. Oui, c'était surement pour sa fille qu'elle s'était transformée en véritable bouclier. Ne pouvant pas croire qu'il pouvait attirer autant de sacrifice, Neji resta tout de même un instant interdit, ne sachant pas trop comment réagir. Quand soudain, une voix le sortit de sa torpeur.

« - Neji, tu as repris conscience.

-Mon… mon père. »

C'était, en effet, bien Hiashi, son père adoptif, qui venait de l'appeler. Les mains de part et d'autre de son épouse, faisant attention de ne pas l'écraser, ainsi que ceux qu'elle protégeait, il supportait tout le poids du débris qui avait failli les écraser. La moitié du visage marquée par le sang, les cernes marqués, il montrait qu'il venait de vivre des heures pénibles à lutter contre l'inconscience et le poids de sa charge. Le chef de famille venait de risquer sa propre vie pour son épouse et ses enfants. Face à un tel spectacle, les yeux de Neji s'écarquillèrent, tout en se remplissant de larmes. Ceux pour qui il refusait d'ouvrir son cœur, de peur de souffrir à nouveau, venaient de lui sauver la vie, et il ne savait pas comment y faire face. Déboussolé, il ne put que voir le débris se mettre à bouger et à s'écrouler dans un grand fracas sur le sol. Soufflant enfin, Hiashi s'écroula, mais avant qu'il ne touche Hitomi, il fut rattrapé par des bras vigoureux, mais surtout salis de poussière. Tournant son regard, le jeune Hyuga reconnut alors ceux de Senji. Ce dernier dégagea son père adoptif et l'installa non loin, contre les rares coussins encore intacts. Ainsi posé, il fut vite pris en charge par un esclave qui commença à le nettoyer et à le rafraîchir pour l'aider à reprendre ses esprits. Pendant ce temps, l'Inuzuka s'occupa d'Hitomi qu'il allongea, la confiant à une de ses suivantes.

Ainsi, libéré, Neji put s'asseoir en grognant un peu, toujours avec Hinata dans les bras, pendant qu'une nourrice s'empressa à leur côté, pour prendre soin d'eux. Pendant qu'il lui confiait sa cousine, l'époux de Tsume s'enquit de sa santé. Lui assurant qu'il était à peine sonné, sans blessure grave apparente, Neji le vit rejoindre sa propre petite famille. Cette dernière semblait ne souffrir d'aucunes plaies, bien qu'un peu secouée. Dans les bras de sa mère, Anna l'accompagnait dans ses pleurs, mais le Hyuga comprit tout de suite que c'était plus dû à la peur qu'à la douleur. Accroupi à leur côté, Senji les enlaça doucement entre ses bras pour les rassurer et qu'elles se laissent aller complètement. La tête contre son torse, Tsume ne se fit pas prier, en suivant le bercement que son époux engendra pour les calmer. En cet instant, malgré la crainte de la mort ressentie plus tôt, elle était heureuse d'être ainsi. C'était un spectacle touchant, surtout au vu de leur passé. Toutefois, ce qui étonna le plus Neji, était la tunique de Senji. Cette dernière était totalement déchirée, et des débris parsemaient sa peau, mais sans la blesser. Comment était-ce possible ? Il se rappelait très bien l'avoir vu se jeter entre Tsume, Anna et un bloc du plafond tombant sur elles, alors que lui-même le faisait pour Hinata. La pierre s'était brisée sur son dos, avant qu'un autre s'y fût logé, le bloquant tout comme Hiashi s'était retrouvé. En fait, pratiquement, tous les hommes s'étaient transformés en bouclier pour les êtres qu'ils aimaient. Néanmoins, contrairement aux autres, qui s'étaient retrouvés avec des blessures, l'Inuzuka était indemne, comme si sa peau était impénétrable. Il respirait la santé, comme si rien n'était arrivé. Et que dire de sa force. Il avait bougé le bloc de pierre qui emprisonnait Hiashi avait une telle habilité, une telle facilité, que c'était miraculeux. Avait-il hérité d'Hercule ?

Parsemant la pièce d'un regard un peu perdu, Neji continua à s'enquérir des autres. Ce fut ainsi qu'il tomba sur Itachi. Lui-aussi venait de sortir de l'inconscience, son ami essayant de rassurer sa mère sur son état. A part quelques égratignures, il allait bien, contrairement à son père. Ce dernier, la tête sur les genoux de son épouse, avait perdu connaissance, la tête en sang, et totalement inconscient de l'inquiétude qu'il engendrait à sa famille. Après avoir vécu la peur de perdre son fils, Mikoto priait tous les Dieux de ne pas lui enlever son époux. Il ne l'aimait peut-être pas, mais il restait le centre de son univers. En cet instant, elle regrettait de s'être disputé avec lui et d'avoir mis de la distance entre eux depuis le récit de la chasse. Elle était juste en colère, et elle refusait qu'il rejoigne les Enfers en restant en mauvais terme avec elle. Se mettant à pleurer, elle supplia Fugaku de rester avec eux, alors qu'Itachi fit tout pour la rassurer. Son père respirait encore, et ne souffrait pas de blessures graves. Il leur fallait juste rester patient. Ce fut à ce moment précis que Hiashi trouva assez de force pour se lever et reprendre les choses en main. Faisant signe à plusieurs esclaves indemnes, il leur ordonna d'aller chercher les meilleurs médecins de la capitale, et de préparer des chambres pour les blessés. Le voir s'affairer ainsi, rassura le cœur de Neji. Il le fut tellement que toute la tension qui le maintenait debout le quitta et l'énergie lui manqua. Fermant les yeux, son corps lourd vacilla sur le côté, et il s'écroula, sans connaissance. Le bruit sourd qu'il fit attira l'attention de Hiashi. Le souffle court et l'inquiétude lui donnant assez de force, il se précipita vers lui et le prit dans ses bras, priant pour la sauvegarde de sa famille.

Une famille qui mit toute la matinée pour remettre une grande partie de la demeure en ordre, mais surtout à soigner ses blessés. Malgré un bandage qui lui barrait tout le tour de la tête, et après un bon bain aux thermes de la maison, Hiashi s'affairait à remplir son rôle de chef. Il organisait tout, planifiait déjà les différents travaux, s'enquérait de l'état de ses gens et de ses invités. Il avait déjà renvoyé chez eux, avec l'aide de transport hippomobile, ceux qui pouvaient se déplacer et qui ne demandaient pas de lourds soins. Ainsi, les Sarutobi étaient déjà partis, ainsi que les Aburame et les Yamanaka. Par contre, dans une des chambres se reposait Fugaku, toujours inconscient et laisser aux mains délicates de son épouse et aux prières de son fils. Bien qu'en bonne santé, Senji avait tenu à ce que Tsume et Anna prennent un peu de repos et avait ainsi usé un peu plus longtemps de l'hospitalité de son hôte. Les deux femmes de sa vie étaient tombées dans un profond sommeil après la consultation des médecins. En remerciement, et profitant de sa bonne condition physique, il entreprit de le seconder. Le Hyuga lui en fut reconnaissant, car il était vrai qu'il avait vraiment besoin d'une assistance dans ces moments difficiles. Pris souvent de vertiges, il s'était trouvé, plus d'une fois, être soutenu par les bras musclés de son ami. Et à chaque fois, Hiashi était impressionné par l'absence de blessure sur ce dernier.

Ainsi, préoccupé à tout gérer, sans aucune pause, l'après-midi arriva plus vite qu'il l'aurait envisagé. Epuisé, il s'affala sur un des rares banquettes encore en état. Regardant encore un peu autour, il souffla quelque peu découragé. Il avait encore tellement à faire. Alors qu'il se demandait comment il allait procéder, Senji fit son entrée, accompagné de son épouse et de leur fille. Il était temps pour eux de rentrer dans leur propre domaine et de gérer leur propre affaire. Se levant, le père d'Hinata comprit tout à fait et les reconduit, tout en remerciant son compagnon de son aide. Sur le chemin qui les reconduisait chez eux, Tsume, installée avec Anna dans un carrura à deux roues, tiré par deux équidés et surplombé d'un toit, ne quittait pas son époux du regard. A cheval, il cheminait à leur côté, faisant attention aux aspérités de la route pour éviter que les deux femmes de sa vie ne soient trop secouées. A chacun de ses mouvements, sa femme appréciait de voir toutes les fibres musculaires se mouvoir à chaque pas de sa monture.

Ses yeux suivirent même une goutte de sueur danser sur le chemin dessiné par les muscles de celui pour qui elle avait libéré son cœur. En fait, une partie d'elle l'enviait de glisser ainsi sur cette peau, et aurait voulu être à sa place. Déglutissant, le cœur emballé dans un rythme fou, Tsume expérimentait pour la première fois la sensation provenant du désir sensuel, le désir de se sentir aimer, et d'imaginer sa peau contre la sienne. De son côté, se sentant observer et de ce fait quelque peu mal à l'aise, Senji tourna son visage vers le carrura, curieux d'en connaître l'origine. Il tomba sur les yeux de son épouse qui s'enfuirent au moment où ils comprirent qu'ils furent découverts dans leur espionnage. Détournant rapidement la tête, la mère d'Anna la baissa, toute gênée et se triturant sa tunique de ses doigts, comme une petite fille prise en faute. La surprise fut énorme pour l'époux qui n'arrivait pas à croire ce qu'il voyait. Les joues de Tsume ne seraient-elles pas entrain de rougir à l'instant ? Ne serait-elle pas entrain de lui jeter des coins d'œil rapide avant de revenir vers le spectacle fascinant de ses jambes qui n'arrivaient pas à rester en place ?

Vu son tempérament de feu, ce n'était vraiment pas dans ses habitudes. Elle avait vraiment l'air d'une midinette en face de son béguin. Non, il devait se tromper. C'était impossible, de toute manière. Oui totalement impossible. Comme un boomerang, l'image de Tsume se posant sur son ventre comme si elle était enceinte lui revint à l'esprit. L'hypothèse qu'elle se soit donnée à un autre le tortura encore une fois. Cette douleur, autant pour son amour que pour son état d'époux et d'homme, le conforta dans l'idée d'avoir été victime d'un mirage. Toutefois, oubliant sa peine et son orgueil, ses propres sentiments et l'inquiétude pour son bien-être prirent le dessus.

« - Tsume, allez-vous bien ? Demanda-t-il. Avez-vous mal quelque part ?

-N… non, non, je vais bien. Le carrura est juste quelque peu inconfortable et réveille un peu la douleur de mes blessures, bien que superficielles.

- J'en suis navré, croyez-le bien, s'excusa Senji, désolé d'avoir encore échoué à prendre soin d'elle.

- Ce n'est rien, lui sourit-elle. Je vous assure. Je peux le supporter. »

Hochant la tête comme seule réponse, Senji ralentit le pas et obligea ainsi le cortège à en faire de même. Attendrie et heureuse d'être l'objet de tant d'attention, Tsume en ressentit une douce chaleur qui l'aida à faire face aux chaos de la route. Ainsi, elle continua à le regarder à la dérobée, tout en prenant soin d'Anna qui avait hâte de rentrer. Son souhait, d'ailleurs, fut exaucé plusieurs minutes plus tard quand le carrura fit son entrée dans la cour de la villa des Inuzuka. Quittant son véhicule, la maîtresse des lieux en découvrit la désolation. Tout comme chez leurs amis, les murs étaient fissurés par endroit. Des murets s'étaient écroulés. Des arbres avaient été arrachés à la terre. Des traces de sang témoignaient qu'il y avait eu des victimes. Le souffle court, Tsume ressentit toute la douleur de sa famille et culpabilisa de ne pas avoir été présente pour partager cette épreuve avec elle. Elle se sentait si coupable que les sanglots faillirent la déborder. Toutefois, elle mit toute sa volonté pour y résister. Elle était la cheffe, celle qui portait le fardeau. Elle n'avait pas le droit de montrer la moindre faiblesse. Réprimant sa tristesse, elle se redressa et s'avança dans le domaine où les survivants commençaient à s'agglutiner autour de leur couple alpha. En effet, Senji se mit à ses côtés, et comme toujours se montra son plus grand soutien. Ressentant toute la force qui émanait de lui, Tsume s'en empreignit pour tenir son rôle. Elle allait prononcer quelques mots qu'une personne le devança, sa voix chaleureuse et soulagée provenant de derrière elle.

« - Dame Tsume, vous êtes saine et sauve. Nous en sommes tous soulagés, croyez-le bien. Nous avions envisagé le pire.

- Lucius, mon cousin, se tourna-t-elle, voyant un homme de son âge se fayer un chemin dans l'attroupement. Je vois que vous-même, vous vous en êtes sortis vivant, bien qu'un peu blessé à ce que je vois.»

En effet, devant elle, se dressait un lointain parent de la lignée de son père, dont les bras portaient quelques bandages. C'était un homme à la peau pâle, contrastant énormément avec ses yeux et ses cheveux ébène. D'une allure fière et altière, il était plus imposant que Senji. Certains même, le trouvaient plus séduisant que ce dernier, et il le savait. Cultivant son physique, plus que son esprit, il se croyait supérieur aux autres. Il concentrait énormément d'efforts pour paraître avenant, compréhensif et attaché aux intérêts de la famille, les mettant au-dessus des siens. Toutefois, le prince consort n'était pas dupe et savait pertinemment que ce n'était qu'une façade. Il le savait arrogant, imbu de lui-même, mais surtout égoïste et arriviste, au point qu'il l'avait mis sous surveillance. Ainsi, il avait appris qu'il terrorisait les esclaves, et intimidaient tous ceux qui le défiaient ou qui ne lui étaient pas utiles. Par contre, face à Tsume et aux membres influents du conseil familial, il était tout miel.

Oui, ce cousin, Senji ne l'appréciait pas du tout, surtout depuis qu'il le savait à tourner autour de son épouse. Son espion lui avait rapporté toutes les tentatives de séduction, les attentions qu'il lui portait et les dons de cadeau de ce Lucius, qui s'avéraient plus luxueux que les siens. En plus, le chef des Inuzuka savait pertinemment qu'il réalisait un travail de sape auprès de la famille pour le discréditer et les pousser à envisager de le divorcer de Tsume, afin de lui offrir sa place à ses côtés. Il avait poussé le bouchon jusqu'à tenter de se faire apprécier d'Anna. Toutefois, grâce son intelligence, il avait très bien vu dans son jeu et si ce rival y arrivait, il savait pertinemment que ce genre d'homme mènerait la famille à sa perte. Autant par amour pour Tsume et Anna, que pour son attachement à son clan, le prince consort se promettait de l'en empêcher. Le voir maintenant, debout en face d'elles, à leur sourire et à montrer autant de sollicitude, alors qu'il ne cherchait qu'une seule chose, se glisser dans les draps maritaux pour dominer son monde, le rendait fou.

Toutefois, il se contint et, se redressa de toute sa hauteur pour lui faire face. Il le fit si bien que toutes les personnes présentes crurent souffrir d'hallucination. Senji leur apparut plus grand, plus lumineux, plus… En fait, personne ne pouvait trouver comment le déterminer avec justesse. C'était presque divin. Même Lucius eut un mouvement de recul, impressionné plus qu'il ne le désirait, mais fit tout son possible pour ne pas rien laisser paraître. Malheureusement, bien qu'il fût le seul, l'Inuzuka réussit à le percevoir et en sourit malicieusement en le défiant du regard. Face à ce défi, et à la forte aura qu'il dégageait, le cousin de Tsume eut du mal à le supporter et détourna le premier les yeux, tout en reculant encore d'un pas. De son côté, la mère d'Anna ne comprenait pas trop ce qui se passait entre les deux hommes. Il fallait avouer qu'en réalité, elle était à des années lumières de s'en préoccuper. Tout son corps vibrait, comme s'il rentrait en résonnance avec la puissance qui émanait de son époux. Toutefois, ne voulant pas paraître frivole, elle vit un effort pour se contrôler, surtout au vu de l'événement dramatique des dernières heures.

« - Tsume, l'appela Senji. Vous m'avez informée que le voyage a réveillé vos douleurs. Rentrez vous reposer avec Anna. Je vais visiter les blessés et faire le point avec le Conseil.

-En êtes-vous sûr ? Je ne voudrais pas que vous portiez à vous seul ce fardeau. Vous devez aussi être fatigué après avoir autant aidé Hiashi.

- Je suis en pleine forme, ne vous inquiétez pas, » la rassura son époux, touché qu'elle prenne la peine de se préoccuper de sa santé.

Lui souriant, Senji invita donc les deux femmes de sa vie à franchir le seuil de la villa. Toutefois, à peine les trois avaient fait quelques pas que Lucius, la haine au cœur de constater que Tsume réponde avec autant d'affection et non plus par l'ignorance, revint à l'attaque.

« - Devons-nous comprendre que vous avez préféré vous préoccuper de sauver une autre famille que la nôtre ? Nos intérêts ne sont-ils donc pas vos priorités ?»

A cette question, tout le monde commença à jaser et à se battre entre eux, tirant un sourire malsain à Lucius, heureux de son effet. Bien qu'une partie reste neutre, une minorité critiquait ouvertement Senji, alors que la majorité le défendait, prônant qu'il existait surement une explication et qu'il s'était toujours montré un bon chef. Touché par un tel soutien, ce dernier leur en fut reconnaissant. Malheureusement, une colère sourde grandissait en son cœur face à cette attaque qui divisait la famille, une division qui était dangereuse pour elle. Pourtant, ce ne fut pas lui qui réagit le plus rapidement.

« - Silence ! Dit avec fermeté Tsume en foudroyant tous les détracteurs de son époux d'un regard leur promettant la pire des tortures. Comment osez-vous vous en prendre à votre chef de famille qui a toujours œuvré pour son bien et pour élever sa puissance, ainsi que son influence ?

- Mais dame Tsume…

- Il suffit. Vous savez tous pourquoi nous étions chez les Hyuga.

- Dans les intérêts de notre famille, osa dire un des anciens avec fierté.

- En effet, confirma Tsume. Organiser et financer les jeux du cirque pour remercier et honorer les Dieux. Que celui qui ose défendre que les répercussions d'un tel événement n'auront aucun impact bénéfique sur la réputation de notre famille s'avance ? »

A cette question, personne ne trouva la témérité de la contredire. Etre présenté comme l'un des organisateurs des jeux dans le monde romain ne pouvait qu'être bénéfique pour les affaires. Face à ce silence, Tsume en sourit, satisfaite. Elle allait reprendre sa marche qu'une fois encore, elle en fut empêchée.

« -Il est vrai. Veuillez me pardonner. Je suis allé trop loin, fit mine de reconnaître Lucius avant de faire un signe discret à un homme se trouvant derrière le couple.

- Mais, ce n'est pas le seul problème, dame Tsume, attaqua ce dernier. Comment expliquez-vous qu'il ne présente aucune blessure, alors que vous-même êtes blessée. Tout prouve qu'il a joué au couard en se trouvant un abri au lieu de vous protéger. Comment peut-on accepter un tel froussard à la tête du clan ?

- C'est faux, s'insurgea Anna, du haut de son jeune âge, et en colère. Je vous interdits de penser ainsi du mal de mon père. Il a été un véritable héro, et je vais vous le prouver. »

Avant même que ses parents puissent l'en empêcher, leur fille avait couru vers le carrura et y monta. Elle en sortit d'une malle l'ancienne tunique de Senji. S'étant changé chez les Hyuga, il l'avait rangée soigneusement dans leurs affaires. Toujours debout sur le véhicule, elle la tendit devant toute l'assemblée. Tous virent alors de leurs yeux le tissu déchiré de toute part et les traces de sang. Elle était bonne à mettre à la poubelle ou de la transformer en chiffons. L'assemblée des Inuzuka commença à de nouveau jaser, et tous reconnurent que seul un événement grave avait pu la mettre dans un tel état de délabrement. La plus douée des couturières n'arriverait même pas à la récupérer.

« - Mon père s'est jeté sur ma mère et moi, pour nous protéger du mieux qu'il pouvait. Il a même empêché deux blocs de pierre de nous atteindre en les prenant sur son dos à notre place. Il a ensuite libéré de dessous les débris tous les autres. Mon père possède une force hors du commun. Mère et moi avions besoin de nous reposer avant de rentrer. Il est normal que mon père ait aidé les Hyuga et les Uchiwa… et

-Anna, voyons, c'est impossible, ricana un des détracteurs de Senji, en la fixant du regard, et l'interrompant. Vu la tunique, où sont les blessures ? C'est votre père, c'est normal que vous le défendiez, mais vous ne devriez pas inventer des mensonges. »

A cette nouvelle attaque, Anna en resta sans voix. Se mordant la lèvre, pour résister à son envi de baisser les yeux, la jeune femme ne flancha pas et accepta le défi. Elle montra alors une force de caractère face à un adulte qui fit honneur à ses parents. Toutefois, le fait que Lucius mette à mal la crédulité de sa fille, Senji ne se retint plus. Sa colère à son summum, il allait se jeter sur lui qu'il fut interrompu dans son élan par la voix forte et autoritaire de Lucius.

« - Comment pouvez-vous mettre la parole de notre héritière en doute ? Si elle affirme que les choses se sont produites ainsi, c'est qu'elles le sont comme elle vient de le relater… Et je suis heureux de compter parmi nous un homme d'une telle stature et béni par… la chance. »

A ces mots, tous approuvèrent et blâmèrent ceux qui voulaient casser des œufs sur le dos de leur chef. Ce dernier, pourtant, serrait les poings autant de rage que de frustration. Il s'en voulait de ne pas être celui qui avait défendu l'honneur de sa fille. Il en voulait à ce Lucius d'en récolter tous les honneurs. Il lui en voulait encore plus d'avoir sous-entendu qu'en réalité, il mettait en doute les paroles d'Anna. Cet homme avait bien joué pour le dissimuler, mais il l'avait bien compris. Par contre, il eut mal d'entendre Tsume remercier Lucius de son intervention, prenant la reconnaissance pour de l'affection dans le ton de sa voix. Se pourrait-il que ce soit… lui… l'amant ? Non, il refusait de le croire. Jamais il n'avait vu son épouse proche de cet homme, et encore moins lui témoigner de l'intérêt. Elle restait toujours polie,…, à moins que cette politesse cachait ses réels sentiments. Non, non, non, se répétait Senji, se traîtant mentalement d'idiot d'imaginer de telle chose. Tsume ne l'aimait peut-être pas, mais elle respectait son statut d'épouse et ne le tromperait pas ainsi. Pourtant, il n'arrivait pas à se sortir cette hypothèse de la tête. Il ne réussit de sortir de ses idées noires qu'au moment où Anna se jeta dans ses bras pour lui faire bénéficier de sa chaleur et de son soutien. Souriant à son enfant, il la conduisit jusqu'à sa chambre où une nourrice prit soin d'elle.

Derrière lui, avait avancé son épouse. Elle avait assisté à la scène, heureuse de voir les deux amours de sa vie ainsi. Elle espérait maintenant trouver assez de courage pour avouer ses sentiments, mais bizarrement, elle ne savait pas trop comment s'y prendre. Elle avait tellement peur d'être rejetée ou de ne pas être crue. Après tout, après tant d'années d'ignorance, de rejets et, il fallait qu'elle se l'avoue, de méchanceté, il était fort possible que Senji ne l'aime plus du tout, restant à ses côtés juste pour honorer ses devoirs de chef. Elle craignait vraiment d'entendre ces mots, et sa détermination lui manquait. Et puis, ce n'était pas le moment. La priorité maintenant était de reconstruire le domaine et de découvrir qui désirait tant mettre à mal le statut de son époux. Contrairement à ce que beaucoup pensait, elle n'était pas dupe. N'ayant pas d'héritier mâle et étant toujours en âge de procréer, elle était presque sûre que certains seraient ravis de prendre la place. Heureusement, il s'avérait que Senji avait rallié beaucoup de soutien. Il n'était pas encore né, celui qui lui fera renoncer à son mariage.

Après un petit baiser sur le front de leur fille, Tsume refusant de prendre du repos, le couple partit s'occuper des blessés et de l'organisation des travaux de reconstruction. Sur le chemin, discrètement, la mère d'Anna glissa sa main sous le bras de Senji et s'en servit comme soutien. Un peu surpris de cette marque d'affection, ce dernier ne s'y opposa pas et la guida derrière le domaine. Le jardin était le lieu où les cadavres des malheureux qui avaient trouvé la mort à cause du tremblement de terre avaient été entreposés. En ligne, les uns à côté des autres, un drap recouvrait entièrement leur corps. Leurs proches, bien souvent recouverts de blessures, pleuraient leur perte, certains posant des pièces d'or sur les paupières, afin que leur mort puisse payer le passage sur le Styx. Attristée par un tel spectacle dont elle aurait pu être l'actrice, Tsume lâcha son mari et commença à réconforter chacun d'eux par des paroles d'encouragement, promettant que le financement des funérailles sera prélevé sur la casette de la famille Inuzuka. Senji en fit de même. Cette initiative fut très bien accueillie par les éplorés qui les bénirent. Puis, après en avoir fini, le couple se dirigea vers la pièce où les survivants avaient trouvé refuge.

Allongés sur des civières et des litières de paille, ils gémissaient à cause de la douleur, à leurs côtés un de leurs proches réalisait les soins conseillés par le médecin. Ce dernier, un peu débordé, faisait de son mieux pour garder les infortunés les plus graves en vie, et pour soigner les plus légers. Il prit tout de même le temps de réaliser son rapport à Senji, pendant que Tsume fit le tour de chaque famille pour s'enquérir de chaque blessé. Non loin d'elle, une jeune femme de dix-huit ans et à la beauté d'un jour de printemps s'affairait à appliquer une compresse fraîche sur le font d'une femme d'un certain âge. En entendant l'arrivée du couple, elle avait levé les yeux, et resta figer à la vue de Senji. Subjuguée par la force qui émanait de lui, lui faisant comme une aréole de lumière, elle ne réussit pas à détourner le regard, à peine si elle entendit l'homme assis prêt d'elle l'appeler.

« - Mysandre ?... Mysandre… »

Ce fut qu'à la troisième tentative que la fameuse Mysandre revint dans le monde de la réalité et à se concentrer à nouveau sur sa tâche. Toutefois, elle continua à jeter des coups d'œil au chef de famille, alors que d'une voix sans émotion, il lui fut présenté par son voisin, ainsi que Tsume. D'ailleurs, cette dernière avait presque fini de faire le tour pour s'enquérir de chacun. Agenouillée auprès de sa servante personnelle, et terminant de prendre de ses nouvelles, elle ressentit le besoin de rejoindre Senji. Levant les yeux, elle le vit toujours en discussion avec le médecin. Visiblement, ils organisaient les soins et la manière de transférer les blessés les plus lourds jusqu'à chez eux. Désireuse d'aller les aider à trouver des solutions, elle entreprit d'aller les rejoindre. Au moment où elle se remit debout, un grand fracas se fit entendre. Traumatisés, et craignant le retour d'un malheur, certains sursautèrent en criant, prêt à s'enfuir. Tout comme eux, Tsume posa les yeux sur l'origine d'un tel chaos. En une seconde, son cœur se figea, ratant un battement, au point qu'il lui fit mal, très mal. Devant elle, une jeune femme beaucoup plus jeune qu'elle se trouvait dans les bras de Senji, sa tête contre son torse, ses bras s'agrippant à lui. Crispant ses doigts sur sa tunique, la mère d'Anna sentit contre cette pimbêche la moutarde lui monter au nez. Furieuse, elle s'avança d'un pas décidé, prête à en découdre et à l'arracher de là.

« - Puis-je savoir ce qui vous prend, cria-t-elle plus qu'elle l'aurait voulu.

-Euh,…, pardon, s'excusa rapidement la jeune femme en se dégageant rapidement et en s'inclinant. Je suis désolée… C'était un accident. Je vous assure, dame Tsume.

- Alors tu sais qui je suis, la prit de haut cette dernière. Mais moi, j'ignore qui tu es… Alors à qui ai-je l'honneur ? Qui dois-je blâmer d'un tel comportement ?

- Tsume, tenta Senji. Voyons calmez-vous. Ce n'était qu'un accident.

- Un accident, un accident, vociféra son épouse. Et bien je n'en suis pas si sûre. Et puis comment osez-vous prendre sa défense ? Vous la connaissez, peut-être.»

Voyant que la situation commençait à dégénérer, le vieil homme de tout à l'heure se leva péniblement, et malgré la douleur dans son dos et ses jambes, s'avança à son tour.

« - Dame Tsume, veuillez excuser ma petite-fille, défendit-il.

- Seigneur Aurélius, reconnut la mère d'Anna. C'est donc votre petite-fille.

- Oui. Je vous présente Mysandre, la fille de ma défunte Octavie. Elle est arrivée ce matin, après le tremblement de terre. Elle a pris soin de sa grand-mère et de moi-même depuis lors. Elle désirait juste aller nous chercher de l'eau, mais son pied s'est pris dans une couverture et la menaça de la faire tomber. Sans l'intervention de votre époux, elle se serait certainement blessée, expliqua ce membre du Conseil familial avant de s'adresser à Senji. Je vous prie donc d'accepter également mes remerciements. »

L'Inuzuka lui assura que ce n'était pas nécessaire, et qu'il n'avait fait que ce qu'il devait faire. De toute façon, la situation ne lui avait pas vraiment laissé le choix, vu qu'elle était littéralement dans les bras. De son côté, Tsume observa un peu la scène. Jetant un regard sur la salle, elle constata, en effet, la présence d'une amphore brisée sur le sol et d'un peu d'eau éparpillée au sol. Se trouvant bête sur le coup d'avoir fait une telle scène de jalousie, car ce n'était rien d'autre que de la jalousie, elle ne prononça aucun mot pendant une petite minute. Puis, elle clôtura le sujet en les invitant de ne plus en parler. Désirant tout de même cacher son embarras, elle alla saluer l'épouse d'Aurélius. Certes, il était le plus fervent de ses opposants, il ne restait pas moins un membre de sa famille. Il lui incombait donc de prendre des nouvelles.

Quand ce fut fait, Tsume eut la désagréable surprise de voir Mysandre toujours auprès de Senji. Visiblement, la jeune femme cherchait à se faire pardonner et continuait à présenter ses plus plates excuses. Pour se faire, elle n'arrêtait pas de lui proposé un verre d'eau, un fruit, ou un peu de pain. En gros, quelque chose pour se racheter auprès de lui. Finalement, cédant face à autant de détermination, le chef de famille se décida à lui accorder une faveur en acceptant un verre de vin. Heureuse, et sous les yeux de Tsume, Mysandre s'empressa de s'exécuter dans la seconde, une risette embellissant son visage. Alors qu'elle le servait, Senji alla jusqu'à lui sourire à son tour, amusé par ce comportement enfantin. Face à ce spectacle, le cœur de Tsume n'était que tempête et rage. Elle avait l'impression de n'avoir jamais connu son époux avec une telle réaction. Oui, c'était la première fois qu'elle voyait une expression si douce sur son visage, lui qui avait l'habitude de lui sourire avec de la tristesse et de la culpabilité dans les yeux. Cette jeune femme lui plaisait-il ? Etait-elle sa maîtresse ? Comme elle voulait se jeter entre eux et les séparer, mais réprimant ce désir, elle se retint, refusant de faire un nouveau scandale. Peinée à son tour, elle préféra détourner les yeux, priant pour qu'elle ait mal interpréter les choses et qu'elle n'ait pas à regretter d'avoir ouvert son cœur.

Alors que Tsume expérimentait la jalousie, et le doute, le soir était arrivé. Chez les Hyuga, Hiashi avait continué à s'affairer. Après avoir accompli une énième tâche, au moment où il franchit de nouveau le seuil du salon et s'était rassis, il eut la surprise de voir entrer Fugaku, soutenu par Mikoto et Itachi.

« - Mon ami, quel soulagement de vous voir réveiller, se leva-t-il pour les saluer. Comment vous sentez-vous ?

-Encore un peu sonner, mais je n'ai pas de blessures graves. Nous devons revenir en notre demeure… Le clan a besoin de son chef.

- Est-ce vraiment prudent, s'inquiéta un peu Hiashi. Ne devriez-vous vous reposer encore ici, et ne rentrer que demain ? Vous me semblez encore un peu faible.

- Non, refusa l'Uchiwa. Je ne peux pas me permettre de faire preuve de faiblesse, sinon, mes ennemis risquent d'en profiter pour comploter et revendiquer ma place. Elle a déjà été mise à mal quand nous avons failli perdre Itachi, notre unique héritier. Ce tremblement de terre peut être une bénédiction pour asseoir mon autorité, et la place de mon fils, comme il peut représenter une malédiction si je fais une seule erreur… Nous devons rentrer. C'est une obligation. De plus, il vous faut prendre soin de votre épouse et de vos enfants. Je crois savoir que Neji est toujours inconscient et qu'Hitomi le veille malgré ses propres blessures. J'ai bien peur qu'Hinata soit quelque peu traumatisée. Il vous faut y veiller.

- C'est vrai. Vous avez raison, se résigna Hiashi. Laissez-moi au moins vous faire escorter par quelques esclaves et mon intendant. Le voir à vos côtés montra à vos détracteurs que vous avez le soutien plein et entier de la famille Hyuga.»

Fugaku se rangea à cet avis et prit congé de son ami. Mikoto, dans un palanquin avec Itachi, pria ce dernier à transmettre à Hitomi ses remerciements et ses excuses de ne l'avoir saluée avant de partir. Lui assurant de ne pas s'inquiéter à ce sujet, le chef Hyuga lui promit de faire diligence en la matière. Ses derniers invités partis, il se résolut à accomplir sa mission et se trouva bien vite au sein de la chambre de Neji. A l'intérieur, il y vit son épouse toujours au chevet de ce dernier. Constatant qu'elle n'avait pas remarqué son entrée, il marqua un arrêt, prenant ainsi la liberté de la scruter de la tête au pied. Ses yeux se perdirent ainsi dans les plis de la nouvelle tunique qu'elle avait enfilé après une brève toilette. Son cœur lui fit mal quand il vit que sa peau d'albâtre avait été meurtrie. Le bandage qu'elle avait sur son bras en était le témoignage. Désolé, mais surtout culpabilisant de ne pas avoir su correctement la protéger, il se noya dans ses pupilles quand, poussée par l'impression d'être observée, Hitomi avait tourné son visage vers lui.

Les yeux rougis à force d'avoir pleuré et de s'inquiéter, sa chère épouse trouva quand même assez de sollicitude pour lui offrir un léger sourire. Surement pour le rassurer et ne pas l'accabler plus qu'il ne l'était déjà. Reconnaissant, il le lui rendit, bien que ce ne fût pas dans ses habitudes. Toujours un peu taciturne, elle était la seule à réussir à le lui soutirer. La seule ? Pas tout à fait. Depuis sa naissance, Hinata en était aussi l'instigatrice. D'ailleurs, pensant à sa fille, il la vit sur les genoux de sa mère, à fixer son cousin. Elle patientait gentiment pour son réveil, le pouce dans la bouche, la tête appuyée contre le torse de sa mère. Son père voyait bien qu'elle résistait au sommeil, surement bercée par les battements du cœur maternel contre son réveil. Cette résistance enfantine accentua la risette paternelle, alors que Hiashi s'avança enfin vers sa femme. Prenant un siège, il murmura une question.

« - Comment allez-vous ?

-Je… je vais bien. Merci de m'avoir protégée des débris.

- C'est moi qui devrais vous remercier pour avoir protégé Hinata et Neji. Vous vous êtes montrée des plus courageuses.

- Je n'ai pas réfléchi sur le moment… Je voulais juste les savoir en sécurité… Mais, j'ai eu tellement peur,…, tellement peur de les perdre,…, de vous perdre. »

A peine avait-elle prononcé ces mots, qu'Hitomi se remit à pleurer de plus belle, se jetant littéralement dans les bras de son époux qui l'accueillit et la serra contre lui, tout en faisant attention à ne pas écraser Hinata, heureuse de se retrouver entre ses deux parents. Il ne voulait pas l'avouer publiquement, mais lui aussi avait eu très peur de ne plus jamais les revoir. Lui aussi avait préféré se sacrifier plutôt que de continuer à vivre sans eux. Tout en lui faisant bénéficier de sa chaleur, il préféra tout de même garder ses pensées pour lui, autant par pudeur que pour ne pas l'alarmer encore plus. Il ne sut combien de temps il garda son aimée et leur fille ainsi, contre lui, à les bercer, mais bientôt, un nouveau souci lui revint à la mémoire.

« - Comment va Neji ? Demanda Hiashi.

-Il dort pour le moment, lui répondit Hitomi dans un murmure, en s'essuyant les yeux.

- A-t-il repris connaissance ?

- Oui, pendant que le médecin l'auscultait. Il n'a rien de grave. Juste quelques égratignures. L'opium qu'il lui a été administré pour la douleur l'a endormi.

- Et notre petite princesse ?

- Elle n'a rien du tout physiquement. Elle me semble tout de même perturber.

- Pourquoi dites-vous cela ?

- Hinata refuse de dormir dans sa chambre. Dès qu'elle s'y trouve seule, elle se met à pleurer et à nous réclamer… Je pense que nous devrions la faire dormir avec nous pendant quelques jours.

- Très bien. Je vais donner des ordres dans ce sens pour qu'on transfert son lit près du nôtre. »

Aussitôt dit, Hiashi se leva avec la ferme intention d'exécuter son plan. Alors qu'il venait de faire un pas, une main lui saisit le poignet, le stoppant net. Baissant les yeux, il reconnut celle d'Hitomi. Elle était ferme, mais restait douce.

« - Je vous en prie, restez avec nous… Je n'ai pas envi d'être seule.

- Rassurez-vous, lui sourit encore une fois Hiashi, touché par sa supplique. Je ne serais pas long. Je reviens vers vous dès que j'en ai fini.

- D'accord, le lâcha son épouse. Faites-vite. »

Hochant la tête pour le lui assurer, le chef de famille partit d'un pas décidé vers le quartier des esclaves et fit ce qu'il avait à faire. Ainsi, il ne tarda pas à revenir auprès d'Hitomi qui en fut des plus heureuses, ainsi qu'Hinata. Voir son père près d'elle fut d'une telle joie pour la petite fille, qu'elle finit par s'endormir entre ses deux parents. Plusieurs heures passèrent ainsi, rythmées par le bruit de la respiration régulière des deux enfants. Petit à petit, la fatigue envahit chaque cellule de leur mère qui avait de plus en plus de mal à garder les yeux ouverts. Le réalisant, Hiashi l'invita à regagner leur propre chambre. Au début réticente de laisser Neji seule, la maîtresse de maison se laissa convaincre de s'installer dans la chambre avoisinant la sienne. Ainsi, marchant vers la sortie, le couple ne put voir le jeune adolescent entrouvrir légèrement les yeux et fixer leur dos. Sa vue fut très étrange. Etait-ce dû à l'opium, ou au choc, mais il avait l'impression de voir une aura argentée entourée le corps de ses parents adoptifs. Trop épuisé pour y réfléchir, il referma les paupières et se laissa de nouveau aller dans les bras du dieu des Songes.

Pendant ce temps au sein de l'Olympe, une mère faisait les cent pas devant les portes d'une chambre. Elle en donnait même le tournis à ses deux compagnons, installés dans deux chaises de velours rouges et de bois doré. Voilà, de longues heures, qu'elle se faisait un sang d'encre pour la personne se trouvant derrière les portants. Toutes les hypothèses les plus terribles du monde lui passaient par la tête, et elle se promettait de faire connaître mille morts aux responsables de son malheur. Elle était encore entrain d'imaginer les pires tourments qu'elle leur réservait qu'enfin, l'ouverture vers sa paix de l'esprit se présenta. Courant plus qu'elle marcha, elle finit par se trouver à quelques millimètres du visage de celle qu'elle attendait depuis plusieurs minutes et qu'elle ne réussit qu'à la faire sursauter. Ne lui laissant pas le temps de placer un seul mot, elle l'assomma à la seconde de milliard de questions.

« - Alors, Tsunade. Qu'en pensez-vous avec Shikamaru ? Que se passe-t-il ? Il va se réveiller, n'est-ce pas ?

-…

- Mais répondez-moi ! Oblige-les Minato !

- Euh, c'est-à-dire que…

- Kushina, soupira la Mère des Dieux en lui saisissant les épaules, la faisant reculer d'un pas. Déjà, tu vas me laisser un peu respirer. Ensuite, allons dans une autre pièce pour en parler. Rester planter devant sa chambre ne changera rien. »

Ne désirant pas lui laisser le temps de répliquer ou de rentrer dans la salle qu'elle venait de quitter, l'épouse de Jiraya lui prit fermement le bras et l'entraîna à sa suite. Derrière les deux déesses, suivirent le Nara, ainsi que Minato et Sasuke, bien que ce dernier marqua un temps devant la porte désormais fermée. Baissant la tête, des questions pleines la tête, l'Antéros s'empressa de rattraper le petit groupe. Arrivé à destination, il assista encore au spectacle de sa mère dans un état de panique, ne réussissant pas à rester en place. Elle vociférait contre le silence de Tsunade et de Shikamaru. Même Minato commençait à se demander pourquoi leurs langues ne se déliaient pas. Malgré son aguerrissement aux combats, le stress l'envahissait peu à peu et la peur d'une mauvaise nouvelle grandissait en lui. En général, le silence n'annonçait rien de bon. Peut-être que sa mère et leur ami essayaient de savoir comment formuler la chose. Le Dieu Chronos ne lui donna pas tord quand dans la minute qui suivit la parole se libéra.

« - Assis-toi, Kushina, conseilla Shikamaru.

-Je ne peux pas m'asseoir. En tout cas, pas tant que vous ne m'auriez pas dit pourquoi Naruto ne s'est toujours pas réveillé et pourquoi il est aussi pâle que notre cher dieu des Enfers.

- Maintenant, il suffit, Kushina, » s'énerva Tsunade en se levant.

Son énervement était si intense que les murs du palais commencèrent à trembler. L'eau des bassins ondulèrent. Les lampes à huiles vacillèrent au point que certaines s'éteignirent, rendant l'atmosphère sombre. L'air s'alourdit au risque d'asphyxier la pièce. La peur tordit le ventre de la mère de l'Eros, si peur qu'elle s'assit dans la seconde, droite comme un i. Elle avait rarement vu la déesse des Déesses dans une telle colère, et quand cela arrivait, il ne fallait surtout pas en être la cible. La majorité des maîtresses de Jiraya en avait fait les frais. Hercule, lui-même, avait dû accomplir douze travaux titanesques pour que Tsunade daigne pardonner son existence, et lui accorder la main de sa propre fille au moment où sa vie de mortel avait pris fin. Kushina ne désirait en aucune façon réveiller le volcan qui sommeillait. Les larmes aux yeux à fixer sans pouvoir les détourner la terrifiante magnificence de la reine des Dieux, elle avait le souffle court. Comprenant alors qu'elle était en tord, l'épouse de Minato finit par baisser le regard, se triturant les doigts, témoignages de sa grande nervosité. La voir si mal fit mal à son époux qui se décida à intervenir.

« - Mère, je t'en prie, calme-toi. N'abat pas ton courroux sur Kushina. Elle s'inquiète juste pour son fils… Tu es aussi mère. Tu réagirais de la même manière dans la même situation.

-Si ce n'est pire, intervint le dieu du Sommeil, désireux de détendre l'atmosphère. L'Olympe s'écroulerait si son équilibre venait à en être perturbé… Déjà qu'il est mis à mal par notre cher dieu des Dieux à chacune de ses infidélités. Qu'est-ce qu'on deviendrait si Tsunade ne supportait pas le poids du pilier du monde sur ses épaules ?

- Euh, Shikamaru, tu ne nous aides pas, là, sua un peu Minato.

- Non, il a raison, se calma la déesse protectrice des naissances en se rasseyant. En fait, vous avez raison tous les deux. Excusez-moi, mais parfois, il est lourd de porter un tel poids,…, sans vraiment l'aide de sa moitié.

- Ce n'est pas grave. Ce n'est pas à toi de t'excuser, mais à moi, se désola Kushina. Mais je suis si inquiète pour Naruto. Je vous en prie, tous les deux. Qu'avez-vous découvert ? Dites-nous. »

A cette supplique qui venait d'un cœur maternel meurtri, celui de Tsunade finit par s'adoucir complètement. Elle plongea ses yeux dans ceux de Shikamaru et après une brève concertation silencieuse, se décida à révéler une terrible nouvelle mélangée à une autre plus douce.

« - Naruto n'est pas plongé dans le grand Sommeil Eternel. J'ai tout de même demandé à Shikamaru de me donner son avis, et de s'en assurer à son tour. Il me l'a confirmé tout à l'heure.

-Oh, quel soulagement, souffla la mère de l'Eros, qui espionna le même soulagement chez Minato qui se détendit d'un coup.

- Mais…

- Mais, se tendirent de nouveau les deux parents, restant fixés aux lèvres de Tsunade.

- Nous ignorons quand il va se réveiller… Il est tombé dans un coma dont on ignore l'origine, avoua-t-elle.

- Co… comment ça ?

- J'ai sondé son esprit, intervint Shikamaru. Comme je le fais lors de ses crises. Normalement, j'arrive toujours à rentrer en contact avec lui pour l'aider à surmonter ses blessures. Malheureusement, cette fois-ci, je me suis heurté à un véritable mur. Il a cadenassé son âme à l'intérieur, sans laisser une seule possibilité pour y pénétrer. J'ai essayé, mais à chaque fois, je me suis fait repousser et…

- Tu aurais dû persévérer, l'attaqua Kushina. Quitte à le briser.

- Et risquer d'endommager son esprit et de l'entraîner dans le Sommeil Eternel, se défendit Shikamaru d'un ton si sévère qu'il cloua les deux parents dans la stupéfaction, avant de se détendre. Minato, Kushina, il faut que vous réalisiez que l'état de Naruto est plus que sérieux. Le mur qui était devant moi est relié directement à son âme. Il agit comme le fil de vie des mortels. Si on a le malheur de le rompre, c'en est fini.

- Mais comment est-ce possible ?

- Pour dire la vérité… »

Ainsi, le Nara raconta à des parents angoissés ce qu'il avait découvert lors de son voyage mental au sein de l'esprit de l'Amour. Au moment même où il avait posé son front sur celui de Naruto, il s'était retrouvé dans un esprit sujet au chaos le plus total. Des vents violents venaient de l'accueillir pour tenter de le rejeter, mais tout comme Sasuke, il avait persévéré et avait réussi à passer cette première barrière, mais une autre se présenta. Celle-ci était constituée de ronces aussi grandes qu'une montagne et aux épines aussi acérées qu'un glaive. De plus, elles se mouvaient tels des serpents, se serrant les unes contres les autres. Comment allait-il se débrouiller pour les passer ? Quand une légère lumière, quelque peu lointaine lui titilla le coin de l'œil. Pensant que c'était peut-être une issue, un signe de Naruto pour qu'on vienne l'aider, tel un phare dans la tempête, Shikamaru avait suivi le chemin qu'elle guidait. Il s'était mis ainsi à errer dans un labyrinthe à multiples impasses, mais jamais il ne s'était perdu le chemin grâce à la lumière qui était devenue de plus en plus forte. Puis, sortant enfin de son errance, une porte mélangeant bois et marbre s'était dressée devant lui. Chacun de ses portants s'ouvrait visiblement grâce à la présence de grands anneaux en orichalque en leur centre. A travers les quelques interstices et tout autour d'elle, une forte lumière y émanait, une lumière qui avait rempli le corps et le cœur de Shikamaru d'une douce chaleur, une chaleur qu'il ne ressentait qu'au contact de Temari. La source du pouvoir du dieu de l'Amour se trouvait-elle derrière cette porte ? Etait-ce vraiment l'issue qu'il cherchait ?

Il avait été tellement dans sa réflexion qu'il ne s'était pas rendu compte qu'il avait fait quelques pas en direction de cette porte mystérieuse. Il n'était plus qu'à quelques mètres, que les jambes du dieu des Songes s'étaient dérobées soudainement sous lui. Comme s'il venait de franchir une frontière, tout l'environnement s'était mis à tanguer tel un navire en perdition. Derrière lui, un horrible cri venait de se faire entendre, lui broyant les entrailles. Les ronces, qu'il pensait loin de lui, s'étaient ruées sur lui, comme des flèches désirant le transpercer. D'autres avaient voulu le pourfendre. Ainsi, pour éviter que son esprit ne soit déchiqueté, Shikamaru avait dû user de toutes ses habilités pour les éviter, mais sans pour autant s'éloigner de ce qu'il pensait être l'accès aux tourments de Naruto. Il avait été déterminé à y entrer pour lui permettre de revenir vers ceux qui l'attendaient. D'ailleurs, sa détermination avait été payante. A force de se courber, de sauter, et d'esquiver intelligemment, il avait réussi à mettre sa main sur un des anneaux, près à tirer dessus. Toutefois, dès que ces doigts avaient touché le métal, une voix caverneuse et remplie d'une rage qui lui avait glacé les os avait empli l'air.

« - N'y touche pas ! Va-t-en ! Va-t-en ! »

A peine proférer, ses paroles avaient laissé place à une force si énorme que Shikamaru s'était vu soulever de terre et dans un cri, se faire expulser de l'esprit de Naruto. L'énergie émise fut d'une telle puissance que le corps du dieu du Sommeil s'était envolé et s'était écroulé sous les yeux médusés de Tsunade contre le mur de la chambre de l'Eros. Crachant un peu de sang sous le choc, il avait eu du mal à se relever. Il n'y était parvenu que grâce à l'aide de la mère des Dieux. L'interrogeant sur ce qui s'était passé, cette dernière n'avait eu aucune réponse satisfaisante. La seule chose qu'elle avait reçue avait été une demande d'assistance. Il lui avait juste prié avec insistance de se tenir prête à lui fournir un peu de son énergie vitale. Quand elle avait compris ce qu'il comptait faire, elle avait essayé de le dissuader d'y retourner, mais en vain. En effet, cette expérience désastreuse avait révélé une chose importante au Nara. Il s'était passé quelque chose d'anormal et de grave. Il lui était impératif de savoir ce que c'était et de sortir son ami de son inconscience. Sans attendre que Tsunade ne le lui empêche, Shikamaru s'était remis en place auprès de Naruto, et fermant les yeux, avait replongé dans les méandres de son esprit.

Encore une fois, un vent violent l'avait accueilli, mais forgé de sa première expérience, il l'avait passé avec aisance. Il s'était donc rapidement retrouvé devant les ronces. Ce fut à cet instant qu'il avait sollicité l'aide de Tsunade. La main sur son dos, elle avait ainsi insufflé son énergie dans le Nara, englobant son esprit d'une couche protectrice et meurtrière. Face à une puissance qui les dépassait surement, les plantes vengeresses s'étaient ainsi écartées devant l'avancer du dieu des Songes. Ce dernier avait fini par faire face au fameux mur, ce mur derrière lequel l'âme de Naruto se réfugiait ou était tourmentée. Bizarrement, l'environnement était devenu blanc comme la neige, et aussi calme que la Mort. Aucun bruit, aucun mouvement autour de lui. Toutefois, ce qui l'avait subjugué furent les fissures qui le parsemaient sur toute sa hauteur. C'était comme des cicatrices indélébiles et douloureuses. Mais comment était-ce possible ? Shikamaru avait déjà vu ce mur endommagé lors des crises de Naruto, mais jamais dans cet état de délabrement. Par le passé, il s'était toujours reconstitué à une vitesse folle, et c'était toujours un spectacle qui le laissait sans voix. Cependant, cette fois-ci, rien ne semblait vouloir se réparer. S'approchant d'un peu plus près, le dieu des Songes avait levé la main dans l'intention d'y toucher la surface. Néanmoins, une intuition lui avait soufflé de s'abstenir. Il avait donc stoppé son geste à quelques millimètres. Il n'avait pas su pourquoi, mais son instinct lui avait crié que s'il avait tenté de rentrer de force, le mur s'écroulerait comme un château de carte, emmenant avec lui l'âme de l'Eros.

C'était pourquoi qu'il avait finalement abandonné sa tentative et était revenu donner la mauvaise nouvelle à Tsunade et aux parents de Naruto. Ce fut ainsi que son récit prit fin laissant toute la pièce dans le silence le plus total. Minato et Kushina n'arrivaient pas à en croire leurs oreilles. Alors leur fils allait aussi mal. Mais qu'était-il donc passé ? Les mots de son père et son attitude l'avaient-ils atteint à ce point ? Les poings serrés sur ses genoux à s'en faire souffrir, le dieu de la Guerre était rongé par la culpabilité, sans savoir qu'une plus grande touchait une autre personne. Se dissimulant dans une des alcôves qui supportait une des vitres du palais, Sasuke se faisait le plus petit possible, ses ailes le recouvrant par réflexe de protection. Il ne cessait de se poser des questions. Etait-ce sa faute ? Ses tentatives avaient-elles blessées l'esprit de son frère au point de le faire sombrer dans une folie destructrice et dans le coma ? Car oui, tout l'Olympe avait ressenti l'énergie qu'il avait dégagée et qui avait détruite une grande partie de la ville de Rome. En fait, pour dire la vérité, il était certain d'être l'agresseur et celui qui avait plongé l'Eros dans la tourmente.

Ainsi, que devait-il faire maintenant ? Avouer à ses parents, à Tsunade et Shikamaru son intrusion ? Cependant, s'il le faisait, c'était comme s'accuser d'être responsable de l'état de leur fils aîné. Comment réagiraient-ils ? Ils le blâmeraient à coup sûr. Mine de rien, il avait passé son temps à leur désobéir depuis que Naruto avait disparu. Fermant les yeux, il s'imaginait déjà les pires tortures qu'ils lui feraient subir pour le punir, mais surtout il avait peur que sa famille lui tourne le dos. Oui, il avait une peur panique d'être renié, de ne plus compter pour tout ceux qu'il aimait. Frissonnant à l'idée de se retrouver seul au monde, à errer entre l'Olympe et la Terre des Mortels, Sasuke décida de ne rien dire pour le moment. Peut-être que si l'état de son frère se dégradait, se résignera-t-il à tout leur avouer, mais pas maintenant. Non pas maintenant. Quand même un peu honteux et fatigué, il se recroquevilla sur lui-même, et garda les paupières closes, refusant de regarder soit son père, soit sa mère.

De toute façon, ces derniers étaient beaucoup trop préoccupés pour faire attention aux tourments intérieurs de Sasuke. De ce côté-là, ce dernier n'avait pas trop à s'en faire. Toutefois, son cœur lui fit mal quand le silence fut brisé par les sanglots d'une mère sujette à la plus profonde douleur, la peur de perdre un de ses enfants. Kushina venait de lâcher toute la tension et ses émotions. Ses mains contre sa bouche, elle tentait par tous les moyens d'étouffer ses sanglots, mais ses larmes ruisselantes contrecarraient tous ses efforts. Se précipitant à ses côtés, Minato mit genoux à terre et la prenant contre lui, la berça en tentant de trouver des mots de réconfort. Cependant, comment les trouver alors que lui-même était désespéré par ce qu'il venait d'entendre ? Il était déchiré de ne pas savoir ce que son ainé avait dû endurer pour se trouver au bord du Sommeil Eternel. Toutefois, il se devait de faire face, de se montrer fort pour son épouse. Ne supportant pas ce spectacle qui augmentait encore plus sa culpabilité, l'Antéros craqua. Se levant avec fracas, il ouvrit précipitamment la fenêtre, et déployant ses ailes, s'enfuit dans le ciel, loin, très loin de toute cette souffrance.

« - Sasuke ! Où vas-tu ? Reviens, l'appela Minato, se levant à sa suite et qui ne comprenait pas ce comportement.

-Laisse-le, l'invita Tsunade, en lui mettant la main sur l'épaule. Il a besoin d'être un peu seul et de prendre l'air… Ce qui arrive à Naruto doit le secouer plus que nous le croyons. Tu lui parleras quand il se sera calmé.

- J'espère, oui, j'espère, se désola le dieu de la Guerre. Je ne voudrais pas perdre mon second fils.

- Naruto n'est pas encore perdu, Minato, essaya de le consoler sa mère.

- Mais…

- Nous ignorons ce qui a mis l'esprit de Naruto dans un tel état de délabrement. Il est vraiment mal en point, mais, intervint, Shikamaru. Il est aussi tout à fait possible que ce soit lui-même qui se soit mis dans cette transe pour se préserver et récupérer d'une attaque dont nous ne connaissons pas l'origine. Au vu de ce que j'ai pu observer lors de l'assemblée divine, je le soupçonne d'avoir, sans le savoir, réussi à rentrer en communication avec l'essence de la nature. Il l'a fait par instinct et je pense que cette capacité pourrait le sauver. J'ai également le sentiment que ce qui se trouve derrière cette mystérieuse porte l'aidera à trouver l'énergie pour se reconstruire et se réveiller.

- Comment ça ?

- Vu la force qu'il a mis pour m'extraire de son esprit au moment où j'ai désiré la franchir, il y cache quelque chose de précieux, quelque chose qu'il désire préserver à tout prix. Bien sûr ce n'est qu'une supposition de ma part…

- Quoi que ce soit, l'interrompit Tsunade, un peu fatiguée de tout ça. Si tu penses que cela aidera Naruto, nous ne pouvons que te faire confiance… Il nous faut attendre qu'il se décide à se réveiller. Nous ne pouvons rien faire de plus. Tout dépend de lui maintenant. »

Après ces paroles, toutes les divinités présentes se regardèrent sans savoir quoi dire, quoi faire. Ils se sentaient tous tellement impuissants qu'ils détournèrent vite les yeux des uns et des autres, se morfondant dans leur incapacité à aider le dieu de l'Amour. Les deux hommes serraient leurs poings à s'en faire saigner les jointures. Les deus femmes retenaient leurs larmes, enfin, jusqu'à ce qu'une mère ne tint plus et éclata à nouveau en pleurs. Lui caressant le dos et en la serrant encore plus contre lui, Minato faisait son possible pour réconforter Kushina. Se sentant soudain de trop et mal à l'aise, Shikamaru préféra prendre congé et rejoindre les bras réconfortant de Temari. Tsunade en profita pour également partir, permettant à son fils d'éviter la corvée de les raccompagner.

Par contre, à la différence du dieu des Songes, elle ne savait pas trop où trouver du réconfort. Pourtant, elle en avait bien besoin, son cœur à la limite d'exploser de tristesse. Auprès de ses autres enfants et de ses amis ? Non, elle refusait de les inquiéter. Auprès de Jiraya ? Non plus. Le connaissant, il était surement entrain de séduire une de ses amantes. Il le faisait toujours de toute manière, dès qu'il avait l'esprit préoccupé. Cela lui permettait de ne pas trop y penser. Tsunade refusait de lui courir après et de vivre encore une désillusion, alors qu'elle-même avait besoin de se sentir aimer et réconforter. Retenant ses propres pleurs, elle erra donc dans l'Olympe, mais aussi sur la terre des Mortels, déguisé en vieille dame. S'arrêtant près du ruisseau Almon, elle s'écroula et regarda son triste reflet. Sortant des eaux dont elle était la naïade, Lara, inquiète, se précipita à ses côtés pour la soutenir comme elle le pouvait. Sentant l'attachement de sa plus fidèle suivante, la mère des Dieux laissa enfin cours à tout son désespoir et éclata en sanglot, déclenchant une pluie diluvienne sur toute la région de Rome.

Pourtant, contrairement aux prédictions de Tsunade, son divin époux était loin de courir la gueuse. Ayant croisé Shikamaru, Jiraya s'était tenu au courant de l'état de son petit-fils. Après avoir appris la terrible nouvelle, son premier sentiment fut la rage, au point qu'un éclair faillit foudroyer le dieu des Songes qui en sursauta et s'enfuit loin du courroux divin. Puis, l'image de son épouse éplorée par une telle perspective et son impuissance lui permit de retrouver un peu de sobriété. Sa priorité était de se calmer et de réfléchir à quoi faire. Et contre entente, ce ne fut pas de se rendre auprès de Naruto, mais de partir là où son cœur l'appelait, tirant quelques sourires à des nymphes qui se préparèrent à recevoir l'attention du dieu des Dieux. Pendant qu'il fouillait chaque recoin de l'Olympe, au sein du palais de Minato et Kushina, le couple était revenu au chevet de Naruto. Assisse sur son matelas, sa mère lui caressait le front et les cheveux, alors qu'au pied du lit, debout, son père essayait de réprimer son inquiétude et sa colère. Une colère dirigée contre lui-même. Allongé, rien ne laissait supposer qu'un drame était survenu à son fils. Sa respiration calme et ses traits détendus, ce dernier semblait dormir paisiblement. Pourtant, derrière les paupières closes, un véritable combat avait lieu, un combat dont un rire caverneux et maudit couvrait des cris douloureux et torturés.