Soso-Wolfy : Wow, milles merci à toi, je suis contente que ma fanfiction te plaise au point de la lire ainsi en entière ! J'affectionne particulièrement les Embry/OC aussi, donc tant mieux si j'ai pu réussir à écrire une jolie histoire sur ce pairing là :)
noour : Mille merci également à toi, ton petit commentaire m'a fait très plaisir, je suis chaque fois heureuse de découvrir de nouveaux lecteurs sur cette histoire ! :) Quant à ta question sur les pages déchirés des carnets, leur contenu est malheureusement (ou heureusement, selon le point de vue) à jamais perdu, c'était des souvenirs que Aina ne souhaitait manifestement pas conservé, et on peut la comprendre...
Bonne lecture à tous !
27. Feu de camp
Quand Embry m'a annoncé que j'étais conviée à une soirée feu de camp, je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Il n'a pas voulu m'en dire plus et je n'ai pas insisté. Je savais que je finirais par découvrir de quoi il en retournait.
Le soir en question venu, Embry me guide jusqu'à la falaise où nous découvrons un feu déjà crépitant. En plus de tous les loups quileutes qui occupent déjà le cercle — Jacob, Quil, Paul, Jared, Sam, Seth, Leah, Brady, Collin, et d'autres jeunes dont j'ignore le nom — je découvre Billy Black, le père de Jacob, le vieux Quil, le grand-père de Quil, mais également Sue Clearwater, la mère de Leah et Seth. Se trouvent également là Rachel, la petite amie de Paul, Kim, celle de Jared, et Emily, le petit Levi dans ses bras.
Alors que nous approchons, Embry m'explique que Billy, le vieux Quil et Sue font partie du conseil Quileute, et que tous les présents ont connaissance du secret de l'existence des loups, notamment parce qu'une bonne moitié des participants sont directement concernés par ce dit secret.
Même si Embry m'assure que j'ai toute ma place ici, je ne peux m'empêcher de me sentir comme une étrangère. Je semble effectivement être la seule parmi tous les présents à ne pas être d'origine quileute. Avec mes cheveux blonds vénitiens et mes tâches de rousseurs, je fais d'ailleurs tâche au milieu de toutes ces peaux bronzées et de ces cheveux noirs.
Pourtant, si je ne me sens pas à ma place au départ, les loups viennent vite changer cette impression. Ils m'accueillent tous si chaleureusement que bientôt le doute n'est plus permis.
— Comment va ton poignet ? m'enquis-je auprès de Rachel en passant à côté d'elle.
— Bien mieux ! me rassure-t-elle. Paul n'arrête pas d'en faire tout un foin pour rien.
Le concerné lui adresse une grimace puérile auquel Rachel répond par un éclat de rire puis un baiser plein de tendresse.
Embry m'entraîne un peu plus loin et Seth nous fait signe de nous installer à côté de lui. A ses côtés, je découvre Leah avec qui j'échange un coup d'œil que je veux complice mais pour lequel je ne reçois qu'un regard froid. Manifestement, nous n'en sommes pas encore à démontrer publiquement un semblant d'entente, ne serait-ce que cordial.
Embry s'installant à côté de Seth, je n'ai d'autre choix que de me glisser auprès de Leah qui s'écarte un peu plus que de raison, montrant par là qu'elle ne désire absolument pas profiter de cette proximité pour discuter.
Seth, ignorant volontairement le comportement de sa sœur, entame une conversation chaleureuse tandis que Quil nous fait passer des sandwiches. Embry entame le sien avec gourmandise et je ne tarde pas à l'imiter, écoutant d'une oreille distraite les logorrhées de Seth.
— Au fait, on est juste ici pour manger ? demandé-je au bout d'un moment, curieuse de la présence des trois membres du conseil quileute à cette petite sauterie.
— Tu ne lui as pas dit ? s'étonne Seth.
— Dit quoi ? relevé-je.
— Tu vas entendre les légendes quileutes ce soir ! m'apprend le jeune homme avec enthousiasme.
— Je voulais te faire la surprise, c'est pour ça que je n'ai rien dis, s'explique Embry.
— Oh !
— C'est une tradition secrète de la tribu, réservé seulement à l'élite, poursuit Seth avec un air de conspirateur. Si tu veux tout savoir, nous avons tous entendu les légendes au moins une fois ici ! Tu es la seule à les découvrir pour la première fois.
— Mais vous êtes certains que j'ai ma place ici ?
— Bien sûr ! s'empresse de répondre Embry comme s'il s'agissait là d'une parfaite évidence. Tu es des nôtres, Aina, tu le sais bien.
— Mais je ne suis pas une quileute, insisté-je.
— Tu fais partie de notre monde, rétorque-t-il.
— Et tu fais partie de la vie d'Embry ! ajoute Seth avec un clin d'œil. Par extension, tu fais partie de la notre.
Tout cet empressement me touche une nouvelle fois. Inconsciemment, je tourne la tête vers Leah et croise son regard. Je m'attends à ce qu'elle détourne la tête mais elle me surprend en continuant à me fixer pendant un instant. Quand elle rompt le contact visuel, je reste un instant perdue dans mes pensées, curieuse de savoir ce qui a bien pu passer par la tête de Leah pendant ce court échange. A-t-elle voulu me faire passer un quelconque message ?
Un peu plus tard, quand tout le monde a fini de manger et que je ne m'y attends pas, quelque chose change dans l'air et tout le monde se tait comme par enchantement. Les regards se tournent vers les membres du conseil et je remarque qu'ils ont été rejoints par Sam et Jacob. Je devine qu'en leur qualité de chefs de meute, ils ont toute leur place au conseil.
Sans annoncer ni introduire quoi que ce soit, Billy Black commence alors à parler et personne ne songe un instant à l'interrompre. Sa voix grave aux riches intonations énonce un récit qui parait fluide, comme s'il avait été appris par cœur. Dans sa façon de raconter, je perçois également une étrange musicalité qui me laisse profondément fascinée.
Avec un honneur dont j'ai conscience, je prends alors connaissance de la légende des esprits guerriers, puis celle du sacrifice de la troisième épouse. Si après avoir entendues ces légendes empreintes d'une magie lointaines, je me sens dans un état d'abasourdissement profond, ce sont pourtant les dernières paroles que prononce le vieux Quil qui me laissent interrogative.
« Aujourd'hui, plus que jamais auparavant dans notre histoire, les fils de notre peuple sont contraints de supporter à nouveau le fardeau et le sacrifice de leurs pères. »
Un long silence suit cette tirade et c'est uniquement ce silence qui m'empêche de murmurer ma question à Embry.
Après l'instant solennel, la festivité se réinstalle brusquement. Les conversations reprennent, certains se resservent à manger – c'est qu'écouter ces légendes a du stimuler leurs appétits, alors que ça a eu pour ma part l'effet inverse.
— Aina ?
Je lève brusquement la tête en constatant qu'Embry essaie d'attirer mon attention depuis plusieurs secondes.
— Oh, désolée. J'avais la tête ailleurs.
— Je vois ça ! s'esclaffe-t-il. Qu'as-tu pensé des légendes ?
— Passionnantes ! dis-je avec un entrain quelques peu réduit par les interrogations qui me sont restés à l'arrière de la tête.
— Quelque chose te tracasse ? dit-il en touchant du bout des doigts la ride qui a du se former entre mes deux sourcils.
— Disons que quelque chose me questionne, oui, admets-je.
— Quoi donc ?
— Je...
En me rappelant la présence de Leah à mes côtés, je tourne la tête vers elle. Comme je reste silencieuse, Leah prend la parole :
— Moi, je crois deviner, Embry.
Le quileute lui adresse un regard interrogateur, ne comprenant manifestement pas à quoi elle peut bien faire référence. Avec un sourire ironique, Leah entreprend de se lever et de s'éloigner. Après un instant d'hésitation, je l'imite et m'apprête à la suivre.
— Aina ? me lance Embry en commençant à vouloir m'accompagner.
— Je reviens, lui dis-je. Reste ici.
Il s'exécute sans insister. Dans l'obscurité, je peine un instant à me repérer mais, loin, bien plus loin, je finis par retrouver Leah qui m'attend, adossée à un arbre. Je me plante devant elle sans rien oser dire.
— Tu l'as remarqué, toi aussi ? commence-t-elle.
— Quoi donc ? m'enquis-je.
— Qu'allais-tu demander à Embry ?
Après un instant d'hésitation, je décide de me lancer. De toute façon, sujet sensible ou pas, il semblerait que Leah ait cerné mes interrogations.
— J'allais lui demander pourquoi le vieux Quil parle des fils de votre peuple. Pourquoi les fils alors que tu dois aussi supporter le fardeau de vos ancêtres, toi, une fille de votre peuple.
Un rire jaune s'échappe des lèvres de la jeune femme.
— Pourquoi ? C'est une excellente question. Je suis étonnée que tu ais remarqué ce détail, toi aussi. Tu es bien la seule.
— Parce que je me soucie de toi, Leah. Sincèrement.
Leah parait surprise par mes mots mais elle ne fait pas mine de s'en émouvoir. En tout cas, si c'est effectivement le cas, elle ne le montre pas. L'air de rien, elle reprend :
— Tu sais, j'essaie parfois de comprendre pourquoi on persiste à ne pas mentionner l'existence de louves quileutes, alors même que j'ai muté depuis plusieurs années maintenant. Est-ce un simple oubli de leur part ? Est-ce par respect pour les légendes qu'on leur a enseigné et qui ne concernaient que les fils quileutes ? Ou bien, est-ce parce qu'ils me considèrent comme une anomalie, et donc comme indigne d'être seulement citée ? Pourtant, je porte le même fardeau que les autres. Peut-être même avec plus de force encore, parce que je suis la seule dans mon genre. Je ne sais pas laquelle de ces explications est la bonne, Aina, mais ça ne change finalement pas grand-chose.
Je suis secouée par la résignation qui empreint les paroles de Leah. Je décèle aussi beaucoup de colère, de tristesse, mais surtout de la résignation, et je ne comprends pas pourquoi.
— C'est injuste… soufflé-je.
— Je m'en fiche pas mal, tu sais. Je suis la seule femme à jamais avoir muté. Pourquoi s'embêteraient-ils à me mentionner ? Je déjoue leurs légendes. Ce qu'ils ne peuvent pas expliquer, ils préfèrent l'oublier. Je les comprends dans le fond. Je suis le vilain petit canard.
— Tu n'as pas demandé à être ce vilain petit canard.
— Demande-t-on jamais à l'être ? Tu n'as pas demandé non plus à être ce que tu es.
Je ne trouve rien à redire à ça. Elle n'a pas tort. D'ailleurs, c'est sûrement l'une des rares fois où Leah reconnait que nous avons un point commun : nous sommes toutes les deux des vilains petits canards.
— C'est vrai, admets-je à voix haute. Nous sommes des anomalies parmi les anomalies. Je suis immortelle mais, même parmi les autres immortels, je n'ai aucun équivalent. Tu es une louve, un modificateur, mais même parmi les tiens, toi aussi tu es différente.
— Mais toi, au moins, tu es acceptée par les autres. Les buveurs de sang t'ont pratiquement adoptée. Et les gars te considèrent comme appartenant à la tribu, plus encore que moi ces derniers temps.
Même si Leah a prononcé cette phrase avec calme, sans rien laisser transparaître, je ressens la rancœur derrière ces mots. Et plus que tout, je la comprends.
— Ne me fais pas dire ce que je n'ai pas dis : je ne veux pas de leur attention à tous. Je me fiche de tout ça. Ma solitude, je l'ai voulue et je l'apprécie. Mais je t'envie beaucoup pour la facilité avec laquelle tu t'es fondue parmi les Cullen, ou parmi nous. Je ne serais jamais capable d'en faire autant. Où que j'aille, je ne suis pas certaine de pouvoir trouver un endroit où je pourrais être vraiment moi. Je ne sais même pas qui je suis censée être.
— Tu trouveras, Leah. Je suis certaine que tu trouveras. En arrivant ici, je ne pensais vraiment pas vous trouver tous. Ça faisait de si longues années que j'étais seule. C'était mon choix, d'ailleurs. Comme toi. Mais sans prévenir, tout a changé. Tout arrive toujours sans prévenir. Ce ne sera pas une exception pour toi.
— Je ne suis même pas certaine de vouloir que ça arrive.
J'ai envie de lui dire qu'elle ne peut pas penser ça, qu'elle ne peut pas désirer rester seule pour toujours, mais qui serais-je pour insinuer ça ? Leah est la seule à pouvoir découvrir ce qu'elle désire en ce monde, quand bien même elle n'en sait encore rien.
— Quoi que tu veuilles en ce monde, cette tribu reste la tienne. Tu es des leurs, Leah. Que tu le veuilles ou non. Qu'ils te le montrent ou non. Vous partagez le même sang, la même magie. Tu n'es pas seule, même si tu en as parfois l'impression. N'oublie pas que Seth ferait n'importe quoi pour t'aider, même s'il s'y prend comme un manche…
Ma tentative d'humour fait mouche pour la première fois. Un sourire éclaire un instant le visage de Leah. Je peux y lire tout l'amour fraternel qu'elle porte à son petit frère.
— C'est vrai, cette tribu est la mienne, reprend Leah tandis que sa figure s'assombrit à nouveau. Pourtant, je m'y sens prise au piège. De plus en plus chaque jour. Appartenir à cette tribu, je ne vois pas ça comme une bénédiction. C'est vrai, j'ai Seth, j'ai ma mère, ils sont ma famille. Mais ça ne me suffit pas. Plus depuis que j'ai muté, en tout cas. Plus depuis que j'ai tout perdu.
Je retiens mon souffle, consciente que Leah est en train de se dévoiler à moi comme elle ne l'a encore jamais fait.
— Et je t'envie, Aina, parce que toi, tu peux aller où bon te semble. Tu n'es pas rongé par cette affreuse colère qui te consume et qui te rend aussi instable. Tu n'es pas condamnée à rester ici. Si tu es là, c'est par choix. Tu as le beurre et l'argent du beurre. Moi, je n'ai pas tout ça.
— Je peux aller où bon me semble ? ne puis-je m'empêcher de la reprendre, piquée au vif. Mais je ne veux pas aller où bon me semble. Tu sais ce que je veux moi, dans le fond ? Pouvoir m'installer quelque part pour de vrai, pouvoir y demeurer autant de temps que je le veux, y être heureuse, ne pas avoir à m'inquiéter qu'on remarque que je ne vieillis pas. Nos situations sont opposées, et je peux comprendre en quoi la mienne peut te sembler enviable, mais crois-moi sur parole, elle ne l'est pas. Pas à mes yeux en tout cas. Tout comme tu ne vois pas ton appartenance à la tribu comme une bénédiction, je ne considère pas mon existence nomade comme telle non plus.
Leah ne parait pas convaincue.
— Je crois que je me satisferais d'une telle vie, insiste-t-elle. Tout comme tu pourrais peut-être te satisfaire de ma vie et de mes problématiques. Nous sommes différentes, nous avons des problématiques différentes, mais si nous échangions nos vies, alors peut-être serions-nous plus heureuses.
— Ce qui est impossible, remarqué-je.
— Malheureusement.
— Tu souhaiterais vraiment abandonner tout ce que tu as si tu en avais l'opportunité ?
— Je n'en sais rien, admet-elle en haussant les épaules. Je ne sais plus rien.
— Moi, non, rétorqué-je. Ma vie n'est certainement pas celle que j'aurais voulu qu'elle soit. Si je pouvais revenir en arrière, avant que toute cette folie commence, peut-être que je le ferais, c'est vrai. C'est pourtant ma vie, et je ne serais pas qui je suis aujourd'hui si ma vie n'avait pas été celle qu'elle a été. Et tu sais quoi ? Après deux siècles de vie, j'aime celle que je suis devenue. Et je ne voudrais pas la voir changer pour rien au monde. Je viens seulement de m'en rendre compte. Comme moi, tu sortiras plus forte de ces épreuves, Leah. La situation te semble sans issue aujourd'hui, mais ça ne sera pas toujours comme ça.
A la faible lueur de la lune, je vois Leah lever les yeux au ciel.
— Tu sembles toujours si positive. Pourtant, tu n'en sais pas plus que moi sur ce qui nous attend.
— Que veux-tu que je te dise ? Que rien ne changera jamais ? En voilà des paroles rassurantes ! ironisé-je.
— Peut-être pas rassurantes, mais possiblement plus réalistes.
— Tu n'en sais rien. Qu'il soit positif ou pas, tu ne découvriras ton avenir qu'en le vivant. C'est notre lot à tous, humains ou pas. On doit s'en contenter. Alors qu'attends-tu de moi, Leah ?
— Je n'attends rien de toi.
— Ce n'est pas l'impression que tu me donnes, ces derniers temps.
La louve croise les bras sur sa poitrine, comme pour se défendre de telles intentions envers moi. Je soupire.
— Peu importe, finis-je par éluder.
Le silence s'installe entre nous deux, jusqu'à ce que je me dise qu'il serait temps que je retourne auprès des autres. Il semblerait que Leah et moi n'ayons plus rien à nous dire ce soir. Pourtant, notre conversation me laisse un drôle de goût d'inachevé. J'avais l'impression que nous avions avancé toutes les deux, mais je n'en suis plus aussi certaine.
— Je vais retourner au feu de camp, dis-je. Tu viens ?
Elle secoue la tête.
— Je vais rentrer. Je ne voulais même pas venir ce soir. Je les connais par cœur, ces légendes. Ma mère et Seth ont insisté pour que je ne me défile pas, c'est tout.
— Je suis contente de t'avoir vue ce soir, et que nous ayons pu discuter, même si nous ne sommes manifestement pas d'accord sur tout.
Leah lâche un petit rire.
— C'est le cas de le dire.
Je souris à mon tour.
— Bon, salut, Leah. Passe une bonne nuit.
— Toi aussi.
Alors que je me détourne, m'apprêtant à remonter le sentier menant vers le feu de camp, Leah me hèle soudain. Je me retourne. Ses traits me sont invisibles maintenant que je me suis éloignée, mais sa voix, elle, me parvient parfaitement.
— Merci de te soucier de moi, Aina.
Et sur ces mots, Leah disparait. Je reste donc seule, une étrange chaleur se propageant dans mon cœur. Ainsi donc, Leah n'a pas été insensible aux mots que j'ai eus au début de notre conversation. Mots qui étaient d'ailleurs parfaitement sincères. Je me soucie vraiment d'elle.
C'est le sourire aux lèvres que je remonte ensuite le sentier. Je ne m'étais pas rendue compte de la distance à laquelle Leah m'avait conduite. Je devine qu'elle voulait éviter que certaines oreilles indiscrètes traînent.
Lorsque je commence enfin à entendre le bruit des conversations, et à percevoir au loin la lueur du feu qui crépite, je suis rassurée. J'ai un instant eu peur de m'être égarée, quand bien même j'avais juste à suivre le sentier. Dans l'obscurité, il est facile de douter.
C'est alors que j'accélère le pas, déjà contente de retrouver la chaleur du feu et la bonne ambiance du cercle quileute, qu'une masse sombre surgit et que deux bras se referment avec force autour de moi. Sous la surprise, je ne peux empêcher un cri de s'échapper de mes lèvres tandis que je commence à me débattre.
Pendant un court instant, deux yeux rouges viennent hanter mon esprit. Et puis, l'évidence me frappe : les bras qui me retiennent sont chauds. Je cesse alors de m'agiter dans tous les sens. Un rire ravi retentit derrière moi.
— PAUL ! m'offusqué-je.
Au moment même où Paul me relâche, Embry surgit. Comme pour se dédouaner de toute responsabilité, Paul lève les mains en l'air.
— J'avais un défi à relever ! se justifie-t-il. C'était une opportunité rêvée.
— Aina, tu vas bien ? s'enquit Embry auprès de moi.
— Moi, avoir peur de Paul ? ironisé-je. C'est mal me connaître.
— Ne mens pas, tu as eu peur ! s'empresse de répliquer le quileute.
Embry se retourne vers Paul, apparemment en colère.
— Après ce qu'elle a vécu à Seattle, tu oses faire ça ? Je vais te faire passer l'envie de recommencer !
Comme je sens qu'Embry est vraiment remonté contre Paul, je décide de calmer tout de suite le jeu.
— Embry, ça va ! rétorqué-je. Je t'assure que ça va. C'est de bonne guerre. Paul a su saisir l'instant. Je saurais me venger. Tu auras même le droit de m'aider si tu le souhaites…
— Tu vois qu'elle va bien ! se défend à nouveau Paul, saisissant la perche. Elle n'est pas aussi fragile que tu le penses ta copine.
Embry le fusille à nouveau du regard.
— Aller… Où est passé ton humour, Em ?
Le concerné reste renfrogné mais mon sourire finit par vraiment le rassurer et le dérider.
— Tu payes rien pour attendre, prévient-il Paul d'un ton qui lui ressemble déjà plus, empli de défiance fraternelle.
— On verra ça, ouais, répond Paul sur le même ton. Mais tu sais, je crois que je crains plus Aina que toi. Tu es tellement prévisible, pas elle.
J'adresse un clin d'œil au quileute.
— Tu as bien raison de te méfier, Paul. Je ne te laisserais pas m'avoir de nouveau par surprise.
— Est-ce un nouveau défi que tu me lances ?
— Non ! nous empressons-nous de répondre en même temps Embry et moi, ce qui déclenche notre hilarité commune.
— Qu'est-ce qui se passe ici ? s'enquit Seth en débarquant à son tour.
— Rien qui ne te concerne, gamin, réplique Paul.
Seth tique évidemment sur le surnom de « gamin », comme Paul l'avait certainement prévu, et ils se mettent à leur tour à se chamailler comme des gamins, sous mon regard exaspéré. Pourtant, en dépit de leurs comportements puérils, je sais que l'affection que je leur porte à tous est bien réelle.
Et je repense à ce qu'Embry et Seth m'ont dit un peu plus tôt, et Leah après eux. Ils avaient raison. Je suis des leurs et j'ai eu tort d'en douter. J'ai beau ne pas être une quileute, je suis à ma place ici aux côtés de tous ces gens. Plus que nulle part ailleurs.
