Point de vue : Harry

Je me dépêchais d'interrompre l'alarme de mon réveil pour ne pas réveiller Mia et je m'empressais de la border en notant quelques signes d'éveil.

"Dors, mon ange. Il est tôt. Je vais courir avec ton père"

"Mmh", j'essayais de résister à mon envie de l'étouffer d'amour face à ses mimiques adorables. Je me contentais de lui embrasser délicatement la joue pendant que je me préparais et quittais l'appartement le plus discrètement possible. J'aurai préféré mille fois annuler et rester avec elle mais c'était inenvisageable de faire faux-bond à Pierre en dernière minute. Fiabilité et ponctualité, il n'y avait pas de ligne de conduite plus forte pour cet ancien militaire haut gradé et j'avais pris le pli depuis de nombreuses années. Alors je partais, à reculons, pour le rejoindre dans le bois pour notre séance d'entraînement. Dieu merci, je n'avais eu droit à aucune conversation sur Mia aujourd'hui.

J'avais fini par rentrer ensuite, en me faufilant discrètement dans la douche mais Mia s'était réveillée entre temps et m'avait offert l'honneur et le plaisir immense de sa visite. J'étais encore comblé de bonheur ce matin. Mais j'étais de nouveau contrarié en entendant mon nouveau réveil sonné : j'étais obligé de partir car je m'étais engagé auprès de Philippe pour lui envoyer des vidéos avant la fin de matinée. Je l'avais annoncé à regret à Mia qui s'était empressée de se proposer de m'accompagner.

"Non, c'est une très mauvaise idée", je l'avais dans mes bras. Ma réponse était ferme et définitive mais Mia ne l'entendait pas de cette manière.

"Pourquoi ?!"

"Parce que tu vas m'interdire de respirer ?", je la regardais rire mais de mon côté j'étais sérieux car je savais qu'elle n'aurait jamais le cœur assez accroché pour me suivre en haut de cette tour.

"Je ne me proposerai pas de venir si c'était le cas ! Allez on y va ! Tu vas adorer mes talents de cameraman !", j'avais été obligé de céder face à sa détermination et elle m'avait suivi à la Défense, puis sur cette tour. Elle avait passé la sécurité comme une voleuse avec moi et avait monté tous les niveaux jusqu'au toit.

"Tu es sûre que tu en es capable ? Tu ne vas pas tomber dans les pommes en me regardant ?", je la voyais nettement moins assurée maintenant à cette hauteur. Elle voyait la poutre que je visais et qui était suspendue au-dessus du vide vertigineux. Elle connaissait mes vidéos et elle voyait parfaitement le genre d'acrobatie et de prouesse que j'allais accomplir sous l'optique de sa caméra pour contenter Philippe.

"Oui ! Vas-y ! Qu'on en finisse ! Contente toi d'éviter de mourir sous mes yeux, s'il te plaît", j'étais clairement impressionné. Ce courage et ce trait d'humour sur ce sujet était parfaitement inédit de sa part.

"Ok, dis moi quand tu tournes ?", et j'avais pris plus de soin et de précaution que d'habitude pour ne pas trop malmener ses émotions. Je notais quelques tressautements d'inquiétudes et je percevais par moment quelques cris aigus mais Mia était concentrée à la tâche et ne me bridait pas. Je décidais malgré tout de faire une pause pour lui laisser un temps de récupération et je l'entendais à ce moment là m'interpeller depuis son côté de la plateforme.

"C'est parfaitement inconscient mais je suis obligée d'avouer que tu es terriblement irrésistible. Je ne regrette pas le voyage...", je souriais de plaisir à ce compliment et elle était malheureusement beaucoup trop loin de moi pour que je puisse la récompenser. Mia semblait se faire la même réflexion car je la regardais, en totale impuissance, prendre une initiative terrible et absolument interdite. Je devenais livide en une micro seconde en la voyant s'élancer sur cette poutre sans la moindre hésitation pour me rejoindre.

"QU'EST-CE QUE TU FOUS ? Tu restes où tu es, Mia ! STOP !", elle avançait, malgré ma très vive opposition, elle longeait la poutre avec son équilibre de danseuse, elle était au-dessus de ce vide létal et j'étais dans une peur bleue. Je retenais mon souffle et je palissais dangereusement car il n'y avait absolument rien que je pouvais faire pour la sécuriser. Un poids supplémentaire sur cette poutre l'aurait fait vaciller. J'étais obligé de subir sa lente progression avec la peur au ventre. Mes entrailles détestaient de la voir dans cette situation périlleuse. Je sentais mes jambes flageoler. Je venais de passer du rêve au cauchemar et j'étais à la limite de pleurer en la voyant perdre légèrement l'équilibre à mi-chemin. Je jurais ouvertement et je priais silencieusement.

"Moins vite…", il ne lui restait plus que deux mètres, je tendais la main à m'en arracher l'épaule pour l'attraper le plus tôt possible. Je comptais les centimètres et j'arrêtais de respirer pendant tout ce temps jusqu'à ce que je la tienne enfin dans mes bras sur cette plateforme sécurisée.

"Putain...tu veux ma mort ?", mon ton était dur car j'étais encore sous le coup de la peur et de l'émotion. Elle baissait le regard de déception et répondait timidement en faisant la moue.

"C'était censé te faire plaisir…"

"Tu me faisais plaisir quand tu étais en sécurité de l'autre côté de cette poutre"

"Mais le but de la promenade était de prendre des risques et de faire de belles prises, non ?"

"Prendre des risques avec ma vie. Jamais avec la tienne...Pff...Seigneur et tu as encore le trajet retour à faire…", je me liquéfiais en regardant de nouveau la poutre située derrière elle. Elle n'avait aucun autre moyen de repartir d'ici et je mourrais d'avance à la perspective de cette nouvelle épreuve. Mes jambes étaient encore vacillantes alors je décidais de m'asseoir au bord de la plateforme en les suspendant au dessus du vide pour calmer mes sensations. Je le faisais sans regarder Mia et je me frottais le visage pour essayer de retrouver rapidement mes esprits.

Et c'est à ce moment-là que je la voyais prendre une autre initiative malheureuse. Elle prenait le risque de tourner le dos au vide pour s'asseoir à califourchon sur mes cuisses. Je soupirais d'exaspération très nettement mais je me dépêchais de la serrer dans mes bras dans un geste protecteur instinctif car j'avais au moins la possibilité de la sécuriser cette fois.

"Il va falloir que tu te mettes à obéir, Mia", et je la voyais me fixer malicieusement. Mia avait retrouvé le sourire malgré mon humeur massacrante. Pire encore, je la voyais rire maintenant de mon attitude et de mon teint livide.

"Détends toi !", et je subissais sa pluie de baisers sur mon visage, ses caresses sur ma nuque et dans mes cheveux en réaction. Ces gestes de réconfort étaient efficaces, je sentais mon cœur retrouver une allure normale en sentant ses lèvres délicates sur les miennes. Je me laissais guider par son baiser tendre et apaisant, en l'accompagnant de caresses sur son dos, sur sa taille et en la serrant encore plus dans mes bras. Ce baiser était définitivement en train de me calmer et j'oubliais définitivement le lieu et l'endroit en la sentant glisser sa langue dans ma bouche. C'était divin et interminable et le moment devenait magique car je l'avais dans mes bras, dans ce cadre unique, avec cette vue à couper le souffle sous les yeux. Si son précédent moment sur cette poutre avait été cauchemardesque, je prenais maintenant un plaisir total à l'avoir à mes côtés dans ce contexte. Mia sentait que j'étais redevenu parfaitement détendu. Je la regardais reprendre son rôle de cameraman. Je jouais le jeu pour la laisser immortaliser de beaux clichés et j'étais certain que Philippe serait plus que ravi de son initiative à elle. La présence de Mia était en effet un très beau coup de projecteur après l'explosion de sa popularité du weekend dernier.

Elle en avait maintenant terminé de ses prises de vue. Je la regardais se reconcentrer désormais sur moi.

"Si tu devais choisir une discipline, en termes de sensations fortes et à part le base jump bien sûr, laquelle ce serait ?", sa question était sérieuse, j'adorais la voir s'intéresser à ma passion malgré les cheveux blancs qu'elle lui causait. Cette nouvelle matinée avec elle était encore pleine de surprise. Elle était en train de faire un effort surhumain pour me faire plaisir. Je réfléchissais sérieusement à la question et une seule réponse me venait.

"Te faire l'amour. Je n'ai jamais eu autant de sensations fortes que depuis le weekend dernier, Mia...", la confidence était très intense mais on ne peut plus sincère. Je la regardais se mordre les lèvres de plaisir puis sourire délicieusement. J'en profitais pour l'embrasser une nouvelle fois, très passionnément, et elle s'empressait de rebondir sur ma réplique.

"Donc si je trouvais le moyen de me libérer à temps complet, tu arrêterais de faire ta tête brûlée pour Philippe ?", j'étais forcé d'éclater de rire face à sa tentative de corruption. C'était bien essayé mais complètement vain.

"Tu ne pourrais pas m'assumer à temps complet..."

"Oh vraiment ? Teste-moi...", je riais encore et je la regardais avec un frisson terrible agripper mon pull et m'attirer de force vers elle pour un baiser particulièrement endiablé qui me donnait très envie de rentrer. C'était sans compter également le fait que je sentais le vent tourner. Je me dépêchais donc de lui ordonner de partir pour éviter de lui faire courir plus de risque sur cette poutre. Je retenais de nouveau ma respiration en la voyant faire le chemin inverse mais je n'avais pas le temps à l'arrivée de me remettre de mes émotions cette fois car j'entendais les agents de sécurité arriver. Je me contentais de prendre sa main et de l'obliger à courir comme une dératée pour nous éviter d'avoir à passer un moment désagréable avec la police.

Nous avions pris le temps ensemble ensuite de regarder les prises autour d'un déjeuner au restaurant. J'avais sélectionné avec elle les meilleures pour Philippe. Je regardais avec elle le succès encore fulgurant de ces nouveaux buzz et je finissais l'après-midi dans les rues de Paris pour répondre à son envie pressante de profiter de nouveau des quais de Seine et des boutiques.

La balade était maintenant terminée et j'étais allongé sur mon canapé avec Mia dans mes bras quand je voyais mon téléphone vibrer. C'était son père. Je décrochais sans lui préciser, avec un sourire sadique et avec l'intention de m'amuser. Je savais qu'elle n'était pas du tout prête à officialiser notre couple devant nos parents alors que j'étais de mon côté très serein à cette idée. Notamment puisque le secret était particulièrement dur à tenir pour moi avec le temps que je passais en ce moment avec le père de Mia pour nous préparer au prochain marathon. Je l'avais vu tous les jours de la semaine, ce matin inclus, mais le plus dur avait été mardi soir, quand la mère de Mia m'avait invité à dîner après l'entraînement. Ça avait été terrible de leur donner des nouvelles de Mia et de leur raconter mon dernier weekend à Londres sans jamais parler de nous.

"Oui, mon Général ?", j'avais toute l'attention de Mia à l'entente de ce surnom qu'elle reconnaissait immédiatement. Je la voyais se décomposer et j'en profitais pour lui déposer un baiser taquin sur la bouche qu'elle s'empressait de rejeter par peur d'être entendue. La situation était cocasse, j'en riais et j'étais déterminé à la pousser dans ses retranchements.

"Ahein. Oui...Non...Vraiment ? Mia est à Paris ce weekend là…? Non, je pensais que c'était le suivant. J'ai dû confondre", j'essayais de retenir mon rire face aux gros yeux que me faisaient Mia à ce mensonge éhonté. Je lui glissais un nouveau baiser forcé dans son cou mais je me régalais de la voir sourire cette fois.

"Vraiment ? Super...Quand ?...Mmh...Oui bien sûr. On fait ça...Bise", et je raccrochais maintenant avec un sourire très large car j'avais hâte de voir la réaction de Mia. Je prenais la parole le premier car je ne m'attendais pas à ce qu'elle me demande ce que me voulait mon père car ce coup de fil était un événement d'une affligeante banalité.

"Tu as prévu de dîner avec tes parents ce soir ?"

"Oui", je l'écoutais me répondre très naïvement pendant qu'elle se réinstallait confortablement sur moi.

"Tu savais qu'il y avait aussi les miens ?"

"Non ?...Seigneur...Mon père vient de t'inviter aussi…?", j'hochais la tête en continuant de sourire et en essayant de retenir mon rire moqueur face à sa moue sceptique.

"Pourquoi est-ce que tu as dit oui, Harry ?", la vérité était que je mourrais d'envie de nous faire sortir du placard ce soir mais je ne pouvais pas lui avouer mon projet, alors je la caressais plutôt dans le sens du poil avec un nouveau mensonge à son attention.

"Parce que ça aurait été louche de refuser, "jeune fille"", j'utilisais sur le ton de l'humour ce surnom que lui donnait régulièrement son père pour essayer de la dérider mais ça ne suffisait pas. Je la voyais encore plus se liquéfier.

"Je vais devoir mentir à ta mère...!? ", je la regardais maintenant devenir très soucieuse et j'étais complètement attendri car Mia était profondément attachée à elle et je comprenais son dilemme de ne pas vouloir la blesser. Ma mère était une femme particulièrement attachée aux principes et cela faisait partie des raisons pour lesquelles je n'avais pas envie de nous cacher. J'étais donc obligé de craquer de tendresse à sa réplique et sa grimace.

"Ou on leur dit la vérité...Pourquoi est-ce que tu angoisses autant à l'idée qu'ils l'apprennent ?"

"Parce que ça fait une semaine..."

"Et quoi ? Je suis en période d'essai, c'est ça ?", je la regardais de façon taquine mais j'avais le cœur qui se serrait malgré moi face à son refus obstiné. J'aurai adoré qu'elle vive les choses aussi facilement que moi.

"C'est un peu tôt pour l'épreuve des parents", son refus catégorique et réitéré me blessait définitivement mais j'essayais de faire bonne figure et de conserver mon ton joueur pour essayer de la convaincre.

"Oh donc c'est ça, tu as peur de rencontrer mes parents ? Tu verras, ce sont des gens vraiment sympas et adorables, tu devrais bien t'entendre avec eux...", et j'étais ravi cette fois de l'entendre rire et se dérider très nettement. Je profitais donc de ce revirement de situation pour placer un peu plus mon argumentaire.

"La situation est atypique, Mia. Arrête de chercher à entrer dans une case. Laisse les choses venir. On va passer une excellente soirée, comme d'habitude...", je la regardais beaucoup plus tendrement et sérieusement cette fois en lui taquinant le bout du nez. J'étais plus que sincère puisque oui ça ne faisait qu'une semaine entre nous mais l'étape de présentation aux familles avait eu lieu neufs années plus tôt. C'était la maison du bonheur depuis et il ne pouvait pas y avoir meilleure situation que la nôtre. C'était le grand amour à tous les niveaux, entre moi et ses parents, entre elle et mes parents et entre nos parents également qui étaient devenus deux couples inséparables de meilleurs amis. Nous étions une famille élargie à nous six depuis bientôt une décennie et j'avais eu à ce titre beaucoup de difficultés à intégrer Victoria dans ma famille. Elle avait nécessairement pris la place de Mia aux repas et aux événements et la pilule avait eu du mal à passer auprès de ma mère. Et même si ma mère avait intégré et apprécié Victoria, elle n'avait jamais créé le lien de cœur qu'elle avait avec Mia depuis toujours. J'avais mis un frein à la roue du bonheur familial avec mon mariage et c'est sûrement pour cette raison que j'étais aussi déterminé à la relancer sans délai aujourd'hui.

"C'est vrai...Je n'ai aucune raison de stresser avec tes parents. Ils sont doux comme des agneaux...J'espère vraiment que mon père arrivera à se contrôler quand il apprendra que tu couches avec sa fille chérie…", et c'était à mon tour de pâlir maintenant. Je me figeais sur ses lèvres pendant son baiser en méditant sur ses propos. Je croisais son sourire et son regard très malicieux et je comprenais qu'elle était en train de retourner très habilement la situation. Et ça marchait parce qu'il n'y avait pas beaucoup d'hommes que je craignais sur cette terre mais son père en faisait définitivement partie. Je l'aimais sincèrement, comme un père d'adoption, j'adorais sa personnalité détonante et son caractère de feu. Il était responsable en première ligne de la force de caractère de sa fille, l'entente était parfaite entre nous mais je le craignais aussi. Je le redoutais, comme n'importe quel homme sensé, car il avait pour lui sa carrure imposante, son statut de général à la retraite mais surtout son amour incommensurable et ses instincts surprotecteurs pour sa fille. Il avait toujours refusé de rencontrer les petits-amis de Mia, il n'avait même pas rencontré Charlie alors c'était normal que je redoute la confrontation après ce changement de statut.

"Tu as gagné… Soyons discrets...On a tout notre temps, on est pas pressés…", et je riais aux éclats, comme elle, à cette conclusion. Je rejoignais définitivement son clan après ces dernières réflexions. Je repensais au même moment avec beaucoup de nostalgie à notre tout premier repas de famille.

**Début du flashback**

C'était l'année de nos 22 ans. Ça faisait deux ans que je connaissais Mia et deux ans que j'avais commencé la danse avec elle. Nos vidéos rencontraient un énorme succès et nous venions d'être approchés pour concourir officiellement à l'échelle européenne. Je venais de terminer une répétition avec elle ce jour-là quand elle m'avait fait part de l'invitation.

"Je déjeune chez mes parents dimanche midi. On va devoir annuler le brunch"

"Ok. Pas de soucis"

"Et il faut que tu viennes aussi...Et avec tes parents…", je m'étais figé face à cette invitation totalement imprévue et sortie de nulle part. Mia avait un air presque gêné en me l'annonçant.

"C'est quoi ce traquenard ? Je ne suis pas ton mec..."

"Oui, je suis au courant mais mon père n'en démord pas. Il refuse de me laisser partir à Prague la semaine prochaine avant de vous avoir rencontré…", je me souviens lui avoir ri au nez malgré son air indigné.

"Il est au courant que tu as 22 ans ? Il va falloir qu'il te donne de l'air un jour..."

"Peut-être mais pour l'instant il faut que tu joues le jeu si tu veux que je vienne. Je n'ai pas l'intention de le contrarier sur ce coup-ci", et j'avais pris le temps de méditer à sa proposition face à son air redevenu sérieux.

"C'est un guet-apens ? Si je rate le test, je finis en brochette sur son barbecue, c'est ça ?", j'avais commencé à grincer des dents et Mia avait commencé à rire. J'appréhendais un peu en effet car j'avais eu l'occasion de le croiser une fois et de très loin et j'en avais vu assez de cette armoire à glace depuis mon côté de trottoir. Mia m'en avait raconté des belles sur son éducation et sur la carrière de cet homme et j'étais moyennement impatient d'être pris à parti.

"Quoi ? Tu te fais dessus, Harry ?", j'avais croisé son regard provoquant et il avait terminé de me convaincre. Mes parents avaient été plutôt amusés aussi et surtout ma mère qui était à des années lumières de me couver de cette façon mais ils avaient joué le jeu et m'avaient accompagné chez les parents de Mia.

Le déjeuner s'était déroulé dans une ambiance très conviviale et rieuse contre toute attente. Nos parents avaient l'air de s'entendre à merveille et de se trouver beaucoup de points communs. Je m'étais contenté de les observer et de m'en amuser avec Mia en restant en retrait jusqu'à ce que Pierre ouvre les hostilités.

"Suis-moi, Harry, tu veux bien ?", j'avais entendu Mia pouffer de rire face à ma mine déconfite. Je m'étais dépêché de me ressaisir, j'avais croisé le regard encourageant de ma mère qui m'incitait encore à faire preuve de courage et je le suivais. Je l'avais accompagné un peu plus loin sur la terrasse en attendant qu'il ouvre le bal et j'étais resté sans voix dès son entrée en matière.

"Est-ce que tu couches avec ma fille, jeune homme ?", j'avais avalé de travers ma bière, j'avais ri et j'avais répondu très rapidement pour éviter qu'il ne remette en doute ma sincérité.

"Non, Monsieur, je ne couche pas avec votre fille", j'avais soutenu son regard sans ciller pour appuyer mes propos et le convaincre de cette vérité.

"Mais tu vas essayer de le faire ?", j'avais ri d'embarras à sa question très déplacée et j'avais beaucoup hésité avant de répondre car c'était potentiellement une question piège. Si je répondais que oui, il pouvait être tenté m'arracher la tête et si je répondais que non, j'allais peut-être insulter Mia sans le vouloir et l'offenser dans sa fierté de père. Je ne savais vraiment pas trop comment répondre mais j'y allais avec le plus d'habileté possible.

"Mia est ma meilleure amie. La situation me va très bien comme ça", je regardais Pierre réagir avec des rictus de réflexion. Il marquait un temps de pause et j'étais soulagé de le voir changer de sujet aussi subtilement.

"Tu n'a pas la carrure d'un danseur. Tu fais un sport de combat ?"

"De la boxe"

"Et tu es bagarreur ?", ça sonnait aussi comme une question piège une nouvelle fois car je ne devais pas montrer que j'étais une fillette mais pas non plus montrer que j'étais une tête brûlée qui pouvait attirer des problèmes à sa fille.

"Quand il le faut..?.", il plissait des yeux, il avait l'air de comprendre que j'étais rusé et il réfléchissait à la suite de son interrogatoire.

"A quand remonte la dernière fois que tu t'es battu ?", je levais les yeux au ciel face à son acharnement mais je le voyais sourire pour m'inciter à la confidence. Je décidais donc de jouer la carte de la sincérité.

"Le weekend dernier..."

"Tu t'es fait latté ?"

"Non, je l'ai latté", et je trouvais très drôle de pouvoir rire avec légèreté de ce sujet avec lui. Il était à des années lumières de mon père pour ça. Il semblait avoir le vice, comme moi, il était tout sauf pacifiste.

"Mmh. Et quel était le motif de la bagarre ?", il me servait l'occasion rêvée de peut-être clôturer l'échange et mettre un terme à l'interrogatoire.

"Il avait posé sa main sur Mia sans autorisation...", j'avais croisé son regard satisfait mais j'avais feint l'indifférence en reprenant une gorgée de ma bière très naturellement.

"Donc je peux compter sur toi pour veiller sur ma fille pendant vos voyages ?"

"Affirmatif. Je veille au grain. Vous pouvez compter là-dessus. Je ne retiens pas mes coups quand il s'agit de Mia"

"Tu en as une grosse paire, gamin, j'aime bien ça", j'avais éclaté de rire encore à cette nouvelle vulgarité inattendue.

"Bon. Maintenant que la messe est dite, tu peux arrêter avec les "monsieur". Appelle-moi Pierre et tutoies-moi à partir d'aujourd'hui, s'il te plaît".

"Entendu, Pierre"

J'étais ressorti avec un sourire sincère de cet échange. Mia m'avait largement décrit le personnage et je m'étais préparé à bien m'entendre avec lui mais la réalité avait été encore au dessus. Je m'étais retrouvé rapidement dans sa franchise, son impulsivité et son côté protecteur. J'avais vite accroché avec lui sur nos passions communes pour le sport et la course notamment. J'étais devenu rapidement le fils qu'il n'avait jamais eu et il avait aussi complété l'amour paternel en m'apportant tout un pan de complicité que je n'avais pas nécessairement avec mon père à cause de nos caractères diamétralement opposés. Mon père était un homme discret, pacifiste et très peu sportif alors que le père de Mia était complètement à mon image.

Les trois années qui avaient suivi avait été très riches en évènement. Les réunions de famille étaient quasiment hebdomadaires, tous les anniversaires, les fêtes et les Noëls se célébraient aussi ensemble, sans compter les vacances parfois. J'avais sifflé le coup d'arrêt ensuite avec Victoria. Les grands rendez-vous familiaux s'étaient raréfiés, nos parents n'avaient jamais cessé de se fréquenter et Mia avait pris l'habitude de voir ma mère sans moi.

**Fin du Flashback**

Je venais de nous garer en bas de chez ses parents. J'étais sur ma moto à mendier un dernier baiser à Mia avant qu'il ne soit trop tard. Je la regardais jeter des coups d'œil frénétiques autour de nous et sur le bâtiment pour s'assurer que la voie était libre. Je souriais comme elle de toute cette clandestinité et je savourais un dernier baiser langoureux. L'attente allait être interminable et j'étais à peu près sûr que j'allais être tenté d'écourter ce repas de famille pour la première fois de ma vie, pour pouvoir retrouver rapidement ses bras. Mon temps avec elle ce weekend était précieux et je n'avais pas la force de la gâcher.

J'étais maintenant sur le pas de porte, je retirais ma main de sa taille, je me concentrais pour entrer dans la peau du personnage et pour me remettre dans mon rôle de meilleur ami. J'essayais mais je réalisais que je ne savais plus comment faire. Je ne comprenais pas comment j'avais été capable un jour de passer du temps auprès d'elle sans avoir l'envie irrésistible de la toucher, de l'embrasser et de la dévorer. J'avais beaucoup de mal mais j'étais traîné de force dans le jeu de rôle en voyant Monica ouvrir la porte et se jeter dans les bras de sa fille.

"Oh ma chérie, tu m'as tellement manqué"

"Toi aussi, ma petite maman", je souriais à leurs retrouvailles débordantes d'affection et je taquinais ensuite Monica qui m'avait rendu une étreinte et une bise beaucoup plus contenus.

"Je t'ai beaucoup moins manqué"

"Parce que je t'ai vu mardi et pas le mois dernier, idiot ! Allez entre, tes parents sont arrivés aussi", et j'essayais de rendre un sourire bienveillant à Mia à cette information pour qu'elle ne cède pas à la panique. Je la regardais entrer dans le séjour et sourire largement en voyant ma mère bondir vers elle et l'étouffer de tendresse sans aucune retenue. J'essayais de contenir mon émotion. Je les avais toujours trouvé particulièrement mignonnes ensemble mais la sensation était vraiment différente et particulière aujourd'hui. Mia n'avait pas revu mes parents depuis son départ à Londres et c'était évident qu'elle leur avait beaucoup manqué. Et ma mère ne la laissait pas respirer, elle l'obligeait à s'asseoir à ses côtés dans le canapé pendant que je me faisais violence pour prendre place un peu plus loin à côté de nos pères. Je détestais de l'avoir aussi loin mais le deal était scellé pour ce soir. J'allais faire l'effort et j'allais essayer de m'amuser et de profiter en toute amitié.

J'étais rapidement mis dans le bain ensuite en entendant la mère de Mia ouvrir les festivités à l'apéritif.

"Tu as des nouvelles de Charlie, ma chérie ?", je souriais discrètement en regardant le fond de mon verre et je me redressais ensuite en toisant Mia pour voir comment elle allait se dépêtrer de ce moment embarrassant. Elle me regardait avec insolence et se lançait en gardant contenance.

"Oui je le vois de temps en temps pour les affaires du studio. Et ça va à merveille avec Catherine"

"Merveilleux ! Et qu'est-ce qu'on en a à foutre de ce gros con, Monica ?", je retenais au maximum mon rire à cette réaction spontanée de Pierre. Il avait pesté un nombre incalculable de fois auprès de moi concernant Charlie et j'étais à peu près sûr qu'il n'allait pas retenir ses mots après cette première réplique cinglante.

"Tu es obligé d'être vulgaire ?", je regardais avec beaucoup d'intérêt la remontrance de Monica pour son mari en attendant avec impatience la réponse de Pierre.

"Oui. Puisqu'il n'y a pas d'autre mot pour décrire un homme suffisamment stupide pour laisser filer une perle comme ma fille et surtout après l'avoir trainé en dehors du pays", je souriais encore face à ce soutien plus que bienvenu. Pierre avait encore moins bien digéré que moi l'expatriation de Mia. Il avait refusé à ce titre toutes les invitations à Londres et il s'était entêté à ne jamais rencontrer Charlie. Il avait passé ces mois à prier lui aussi pour que leur couple prenne fin et pour pouvoir retrouver sa fille.

"Je t'ai expliqué que ça ne s'était pas passé de cette façon, Papa"

"Je m'en fou. Et d'ailleurs, je crois que je te dois une branlée, Harry"

"Hein ? Moi ? Pourquoi ?!", je levais subitement la tête car je ne comprenais pas pourquoi j'étais pris à partie par mon meilleur allié.

"C'est un de tes meilleurs amis, non ? C'est toi le débile qui l'a présenté à Mia ?", je n'avais vraiment pas vu venir ce coup arriver. C'était la première fois qu'il présentait le sujet sous cet angle et j'étais plutôt déstabilisé. C'est à ce moment là que j'entendais Mia éclater de rire.

"Tiens. C'est vrai ça, Harry", et je serrais la mâchoire face à cette réplique taquine de Mia. Elle était très amusée maintenant et était suspendue à mes lèvres aussi.

"Était, Pierre. Ce n'est plus le cas et crois-moi si je te dis que je me suis mordu les doigts de l'avoir fait...", ma confidence était sincère, j'avais répondu en appuyant mon regard sur Mia et je ne manquais pas une miette de son sourire très discret.

"Oui. Et bien je t'informe que la famille se passera de tes services d'entremetteur à l'avenir"

"Crois-moi, ça n'arrivera plus", j'avais baissé de nouveau les yeux cette fois pour éviter de me perdre dans ceux de Mia.

"Parfait et notez le bien tous les deux. J'en ai officiellement marre du défilé de tocard. Le prochain aura intérêt de filer très droit. Je ne me contenterai plus de regarder. Ce sera l'hôpital ou le cimetière au premier faux pas", je déglutissais péniblement à cette menace indirecte et très imagée. J'avais toutes les peines du monde pour masquer mon expression de panique et Mia était en train de s'en délecter en riant ouvertement.

"C'est bien noté, Papa ! Bon, on peut arrêter de parler de moi maintenant ?"

"Tout à fait ! Tu as raison ma chérie. Et c'est très bien que tu changes de sujet puisque j'ai quelqu'un à te présenter, Harry", et j'avalais encore de travers à ce changement de conversation très subite de ma mère. Le ciel avait décidé de me mettre à l'épreuve ce soir. C'était terrible, elle allait parler de ça, devant Mia et j'allais devoir gérer encore le plus habilement possible.

"Comment ça ?"

"J'ai changé de kiné et je pense qu'elle serait tout à fait ton style de femme"

"Merci, mais ça va aller, Maman", j'avais osé un regard rapide à Mia et j'étais rassuré de la voir sourire. Elle le faisait d'ailleurs très sadiquement.

"Pourquoi ? Elle est vraiment très jolie, intelligente et sympathique, tu n'as rien à perdre à la rencontrer", je soupirais, je marquais un temps de pause en la regardant tendrement pour essayer de lui faire abandonner l'idée mais je la savais coriace.

"C'est très attentionné de ta part, Maman, mais je n'ai pas besoin de ton aide pour ce genre de choses. Je préfère gérer ma vie sentimentale en toute modernité"

"Parce que tu n'as pas confiance en mon jugement ou parce que tu me caches une nouvelle copine ?", et je bloquais cette fois, je ne savais pas quoi répondre, car si je répondais oui, j'allais devoir m'enfoncer dans le mensonge et si je répondais non, elle risquait de s'obstiner encore plus avec cette femme. Je gardais donc le silence mais ma mère s'impatientait et se retournait vers Mia.

"Ma puce ?"

"Hein ?", et je me mordais les joues de toutes mes forces pour ne pas rire. Ma mère la prenait directement à partie pour avoir sa réponse. Je voyais Mia se décomposer car elle était face au même dilemme que moi. Elle ne voulait surtout pas lui mentir.

"Mon fils me cache une fille ou pas ? Ne me dis surtout pas que tu n'es pas au courant, vous n'avez aucun secret l'un pour l'autre", Mia était complètement immobilisée et je me dépêchais de venir à la rescousse.

"Laisse Mia en dehors de ça, Maman. Elle ne te dira rien !", mais ma mère s'obstinait, elle me faisait un signe de main agacé pour m'ordonner de me taire.

"Ma chérie ? Tu peux me le dire. On s'est toujours tout dit, non ?", ma mère la prenait par les sentiments et je voyais que le moment était très cruel pour Mia. Elle me regardait péniblement et je lui faisais comprendre que c'était à elle de décider de la suite. J'en étais là de mon échange silencieux avec elle quand je voyais Monica se relever et prendre la parole subitement.

"Venez m'aider en cuisine les filles ! Vous continuerez votre conversation là-bas", je regardais Mia se lever avec le même air livide. Je compatissais pour elle face à ce guet-apens exclusivement féminin.

"Bon, tu peux me le dire au moins ? Ça reste entre nous", et je levais les yeux au ciel d'exaspération en voyant mon père en ajouter une couche après le départ de ma mère. Il était beaucoup plus raisonnable et moins curieux qu'elle alors je prenais la peine de répondre un minimum pour évacuer le sujet.

"C'est très récent, Papa. Ce n'est pas encore le moment de vous en parler"

"Récent depuis quand ?", j'essayais de me reposer sur la vérité pour lui répondre et conclure le sujet.

"Le weekend dernier"

"Celui que tu as passé à Londres avec Mia ? Oh, tu sors avec une de ses danseuses ?", je regardais son sourire malicieux. En temps normal, j'aurai commenté mais ce n'était définitivement plus envisageable maintenant avec les oreilles de Pierre qui traînaient.

"Tu en sais suffisamment pour aujourd'hui. On change de sujet maintenant", et je les regardais échanger un rire et un regard complice avant de continuer sur nos thèmes de prédilection habituels. Je le faisais pendant un moment et avec beaucoup de plaisir jusqu'à ce que je finisse par m'ennuyer de l'absence de Mia et ne décide de rejoindre les femmes de ma vie en cuisine.

Et le tableau que j'avais sous les yeux à l'arrivée me serrait vraiment le cœur. Je voyais Monica en train de s'affairer aux fourneaux et je voyais surtout Mia, blottie contre le dos de ma mère avec sa tête sur ses épaules pendant qu'elle la regardait travailler la pâte sur le plan de travail. J'avais le parfait spot d'observation d'où j'étais, je les voyais sourire et je les entendais rire.

"Passe moi la farine, ma puce", et je m'attendrissais face au ton très doux et affectueux de ma mère.

"Tu m'impressionnes, Helen ! Tu t'y prends aussi bien que Maman maintenant. Je suis vraiment fière de toi !", je voyais Mia lui déposer un bisous délicat sur la joue pour appuyer ses félicitations.

"Merci chérie. Après des années d'apprentissage il était temps que j'y arrive", et je fondais littéralement en voyant ma mère lui rendre un énorme bisous et un sourire radieux. J'avais le cœur particulièrement apaisé de les voir ensemble, toujours aussi proches et complices malgré l'éloignement que je leur avais imposé ces dernières années. Et je me maudissais particulièrement en cet instant en y repensant. J'étais pris de regrets de n'avoir jamais écouté nos amis, de n'avoir jamais écouté ma mère pendant toutes ces années quand elle me disait que Mia était faite pour moi. Je décidais de couper court rapidement à toutes ces réflexions négatives en manifestant ma présence auprès des filles.

"C'est vrai Maman, tes raviolis sont très mignons mais je suis sûr que je peux faire mieux que toi", je n'avais pas résisté à l'envie de me rapprocher et de me retrousser les manches pour participer à ce moment de partage. Je me rapprochais en déposant aussi un bisous à ma mère et en luttant de toutes mes forces pour ne pas rendre la même attention à Mia. Je la voyais ensuite se rapprocher de moi pendant ma tâche avec beaucoup d'intérêt. J'étais au supplice de sentir sa tête au-dessus de mon épaule et de l'entendre parler à mon oreille. C'était une terrible source de distraction et j'avais toutes les peines pour ne pas me retourner et l'embrasser.

"Tu pourrais t'appliquer un peu plus…Pour l'instant, les tiens sont très laids...", et je souriais largement de sa provocation. J'avais envie de la punir mais ma marge de manœuvre était réduite. Je me contentais donc de déposer ma main enfarinée sur son nez pour la sanctionner. Je n'avais pas droit à plus, tout comme je n'avais pas le droit de lécher son nez pour la nettoyer, ni de ramener ses bras autour de ma taille pour l'avoir contre moi et pour l'embrasser. Je l'entendais s'offusquer et ses contestations m'encourageaient à la chamailler un peu plus. Nos mères étaient familières de ce genre d'échange alors je me l'autorisais. Je posais mes mains sur son visage pour l'enfariner davantage en évitant de trop regarder ses lèvres. J'entendais les rires de nos mères, je voyais Mia sur le point de sévir mais Monica se mettait à hurler au même moment.

"OH NON CA SUFFIT ! Ce n'est pas vous qui faites le ménage après", et Mia fulminait car elle était obligée d'en rester là et de me laisser vainqueur. Je la regardais s'essuyer docilement et sagement le visage avec un torchon. Elle était dans une humeur délicieuse et je profitais d'avoir le dos tourné à nos mères pour avoir un échange silencieux avec elle. Je grimaçais, je me mordais les lèvres en signe d'envie et de frustration pour lui faire comprendre à quel point j'avais envie de lui tomber dessus. J'entendais son rire discret en réaction mais surtout je voyais son sourire sadique. Ce sourire me provoquait et j'avais commencé à chercher les problèmes rapidement après ça. Mia m'avait senti venir et elle m'évitait soigneusement en cuisine mais je la prenais de court au moment de nous installer à table, en prenant la place à côté d'elle plutôt que ma place habituelle en face d'elle. Je devenais diabolique, je n'avais plus de courage alors je saisissais chaque occasion pendant ce repas pour la toucher. J'étais plutôt subtile et nos parents ne semblaient pas remarquer notre manège mais Mia, elle, se décomposait un peu plus au fil de mes assauts. J'en devenais fou et je saisissais la première opportunité pour lui tendre un guet-apens.

"Laisse Maman, je m'en occupe", Mia se levait pour débarrasser et je me dépêchais de la suivre en cuisine.

"Sors de cette pièce", mais je m'approchais avec un sourire carnassier malgré son ton autoritaire.

"Recule", Mia me tendait une casserole en signe de menace. Elle était irrésistible et elle m'excitait beaucoup trop avec cette moue craquante et cette résistance. Je m'approchais d'elle de façon très désobéissante, je me débarrassais de son arme, je la coinçais contre ce comptoir et je fondais sur sur ses lèvres la seconde d'après en profitant de ce moment inespéré d'intimité.

"Pitié, arrête ça…", mais c'était encore pire à sa plainte. Les contraintes et l'interdit étaient en train de m'allumer au plus haut point. Mia s'en rendait compte à l'intensité de mon baiser. Il était langoureux, très sexuel et il lui faisait tourner de l'œil. Je profitais d'un de ses soupirs de plaisir pour la caresser et la coller encore plus à moi mais je m'éloignais d'elle ensuite brutalement en entendant la porte s'ouvrir derrière nous.

J'essayais de reprendre mes activités le plus naturellement possible à l'arrivée de son père, je le regardais passer à côté de nous, nous regarder silencieusement, poser les plats et se maintenir dans la pièce. Mia réagissait la première en quittant la cuisine et Pierre en faisait de même après elle. De mon côté, j'essayais de reprendre contenance avant de les rejoindre car j'avais subi une pointe d'adrénaline terrible à son arrivée. Ça aurait été définitivement désastreux de se faire surprendre dans cette situation. J'avais eu très chaud. Mia avait l'air d'avoir vécu un traumatisme encore plus fort car elle était encore plus dure et indifférente à mon retour à table. Ce moment d'adrénaline venait de l'échauder alors qu'il venait à contrario de réveiller tous mes instincts. J'avais repris mes gestes interdits, en frôlant de nouveau ses mains et son corps mais surtout en m'autorisant cette fois un peu plus d'audace en caressant ses cuisses au niveau de ses bas. Je remontais mes mains jusqu'à la partie dénudée de ses cuisses, avec la ferme intention de m'aventurer encore plus loin sur son entrejambe. C'était de la pure bêtise et de l'immaturité totale dans la situation actuelle mais j'étais beaucoup trop encouragé par mes pulsions mais surtout par sa chair de poule que je ressentais sous mes doigts. Mia était aussi très excitée, je le sentais sans l'ombre d'un doute et je le voyais à ce début d'expression discret sur son visage mais elle résistait. Je la sentais resserrer ses cuisses très fermement sur mes mains pour bloquer ma progression. Je luttais pour ne pas sourire à sa rébellion et je me contentais d'attendre sagement qu'elle s'épuise pour poursuivre discrètement vers mon objectif.

Et c'est à ce moment là précisément que je la voyais quitter la table subitement. Elle partait en direction de la salle de bain située tout au bout du couloir et j'attendais un moment d'inattention de nos parents pour la suivre également. J'entrais dans la salle de bain, sans invitation et je la voyais réagir fermement à mon arrivée.

"Putain, tu sors d'ici tout de suite, Harry", mais je me mordais les lèvres de plaisir face à sa vulgarité et son ordre volcanique. J'avais confirmation à sa réaction qu'elle était venue jusqu'ici pour calmer son excitation et ses tensions. Mon goût du risque remontait à la surface malgré le côté très irrévérencieux de la situation. J'étais maintenant complètement obsédé à l'idée de la prendre maintenant et dans cette pièce familière. J'étais déterminé à le faire, je fermais le verrou derrière moi et j'avançais jusqu'à elle sans aucun sourire sur mon visage cette fois. Je n'avais plus envie de rire mais juste envie de me glisser entre ses cuisses. Alors je m'approchais, en cherchant un premier soulagement en me ruant sur sa nuque et en commençant à la peloter très audacieusement.

"Non, non. Arrête, je suis très sérieuse", j'essayais de la faire taire et de la convaincre en enfonçant profondément ma langue dans la sienne mais Mia était déterminée à me résister. Je la sentais repousser ma langue, mon corps et mes mains et c'était, malheureusement pour elle, en train de me faire vriller. Elle réveillait mon instinct de prédateur avec ses refus et ses supplications. Elle ne faisait qu'aggraver mon érection avec ses signes sincères d'opposition. Alors j'employais les grands moyens pour la convaincre. Je la soulevais de terre, je la posais sur ce meuble vasque et je l'immobilisais avec le poids de mon corps pendant que je glissais ma main autoritairement sous sa jupe et que je lui retirais son sous-vêtement. Je la sentais encore résister malgré ma détermination et ma supériorité. Je l'entendais même paniquer et encore une fois se révolter mais je choisissais de déployer mon dernier atout. Je quittais sa bouche, je me baissais jusqu'au niveau de sa jupe et j'écartais de force ses cuisses pour pouvoir poser ma bouche sur ses lèvres très chaudes et déjà bien humides. Je la sentais réagir très fortement à mon initiative mais Mia tenait sa ligne de conduite. Elle tirait sur mes cheveux et empoignait mon visage pour me dissuader et m'ordonner d'arrêter mais je refusais d'obéir. Je me maintenais avec autorité entre ses cuisses et je lui donnais le coup de grâce en glissant ma langue très savoureusement entre ses plis, sans jamais la quitter du regard. Je comprenais à sa réaction violente de désir la seconde suivante que j'allais obtenir ce que je voulais.

Point de vue : Mia

C'était terrible. Cet homme était terrible. J'étais au maximum de la panique et de l'angoisse en ce moment en comprenant ses intentions. Il m'obligeait à faire ça, ici, chez mes parents et dans cette salle de bain à seulement un couloir de toute notre famille. Je luttais mais je lisais un niveau de détermination aussi excitant qu'inquiétant dans son regard et ses gestes. J'étais en grand danger et je le voyais sortir son plus lourd arsenal pour me faire plier.

L'enchaînement de gestes avait été beaucoup trop obscène et viril. Je mouillais terriblement face à son regard de braise, face à ses gestes fermes et autoritaires et encore plus en le voyant écarter de force mes cuisses et visiter mon entrejambe sans jamais me quitter des yeux. C'était terrible, mon corps s'embrasait malgré moi et malgré l'interdiction absolue. J'avais commencé pourtant à résister en gardant l'image effrayante de mon père en tête mais Harry venait de le chasser de mon esprit en déposant sa langue sur mon clitoris. C'était terriblement bon et je me retrouvais malgré moi en train de l'encourager de mes mains alors que j'étais censée le repousser.

Je savais qu'il était trop tard, que j'étais fichue et que je n'avais plus d'autre échappatoire que de consommer mon désir brûlant après son agression. Harry l'avait parfaitement compris. Je le regardais revenir à ma hauteur et se jeter sur ma bouche pour me rendre un baiser hautement sexuel qui achevait de m'allumer. Je précipitais mes mains après ça sur son pantalon pour l'aider à nous libérer très rapidement.

"Tu as intérêt à battre ton record de vitesse", j'étais déjà convaincue mais Harry continuait de m'allumer avec un nouvel enchaînement redoutable. J'étais bouche bée et je suffoquais de le voir me fixer encore avec ce regard fiévreux, de le voir saliver dans sa main puis de le voir la redescendre sur son sexe pour l'humidifier. Je trouvais le mouvement atrocement excitant, j'avais des palpitations puissantes entre les cuisses en le regardant faire et j'étais au maximum de l'excitation en le voyant me fixer, en le voyant me tirer fermement contre lui pendant qu'il me pénétrait franchement et très sensuellement. J'avais le souffle et la voix coupés devant ce comportement terriblement libidineux de Harry. Je subissais délicieusement ses premières pénétrations, je me cramponnais à lui et à tout ce que je pouvais en faisant mon possible pour retenir les cris de plaisir qui ne demandaient qu'à sortir de ma bouche. J'avais pris la peine d'ouvrir à la hâte sa chemise pour pouvoir le sentir encore plus et le caresser. Il avait de son côté fait tomber les bretelles de ma robe pour libérer ma poitrine et la lécher. Je haletais. Comme lui, je gémissais péniblement dans sa bouche, et comme lui, je me sentais partir très vite dans un orgasme puissant et redoutablement efficace. Je n'avais plus conscience ni de la date, ni du lieu après ce moment. L'union venait encore d'être sublime mais je réalisais bien vite le bourbier dans lequel nous étions après un dernier baiser enivrant.

Je le voyais me sourire beaucoup trop malicieusement maintenant et je lui rendais un regard faussement sévère en descendant du comptoir et en me dirigeant vers mon sous-vêtement. Je me rhabillais et me recoiffais maintenant à la même vitesse que lui. Harry avait une tête de vainqueur et d'imbécile heureux qui me faisait sourire malgré moi et malgré la pointe de stress qui était de nouveau en train de s'installer. Je souriais aussi en le voyant insister pour avoir un dernier baiser pendant que j'ouvrais la porte de la salle de bain pour sortir. Mais je le sentais ensuite s'immobiliser sur mes lèvres, je le sentais retirer très lentement sa langue de ma bouche et se décoller en prenant la parole de façon très précautionneuse.

"Ce n'est pas ce que tu crois, Pierre…", je fermais les yeux d'horreur et je me décomposais. C'était peut-être une mauvaise blague de Harry mais je lisais une crainte beaucoup trop convaincante dans ses yeux. Je me retournais donc lentement pour en avoir le cœur net et mon père était bien là, devant cette porte. J'aurai pu me défendre en prétextant comme Harry qu'il ne s'agissait que d'un simple baiser mais j'avais ouvert cette porte avant que Harry n'ait eu le temps de reboutonner tous les boutons de sa chambre. C'était un flagrant délit donc j'étais au maximum de la panique de m'être faite surprendre dans cette situation des plus interdite avec lui. J'étais incapable de prendre la parole, j'étais tétanisée mais mon père le faisait le premier.

"Qu'est ce que tu as fait à ma fille dans cette salle de bain, Harry ?", j'évaluais la situation et j'étais en train de la qualifier comme très dangereuse au ton employé par mon père.

"Papa, reste tranquille...", je m'adressais à lui comme un agneau en pleine négociation avec son loup en essayant de le contourner. Je prenais la main de Harry très discrètement pendant cette tentative de diversion mais mon père n'avait d'yeux que pour lui. Je voyais son regard se durcir et j'en profitais pour tirer brutalement sur la main de Harry pour lui signifier de partir le premier. Il était malin et il connaissait mon père alors il comprenait mon invitation. Je le regardais partir rapidement pendant que je tentais de calmer mon père mais il m'ignorait royalement et se lançait à la suite de Harry à pas déterminé. Je m'empressais de les suivre, je me rongeais les sangs et je voyais Harry trouver refuge derrière ma mère. Il avait eu l'intelligence d'aller chercher sa meilleure alliée car il n'y avait pas mieux qu'elle pour calmer les pulsions meurtrières de mon père.

"Monica, ne le laisse pas me tuer, s'il te plait", ma mère ne comprenait pas. Elle subissait cette invasion inopinée, elle se laissait faire et regardait mon père curieusement en le voyant débarquer.

"Chérie, pousse-toi, je dois casser la gueule de ce morveux", et je regardais Harry murmurer je ne sais quoi à l'oreille de ma mère. ll était en train de négocier avec elle et il y arrivait car lle se maintenait entre eux deux et temporisait.

"Qu'est ce que vous avez encore tous les deux ? Qu'est-ce que Harry a fait cette fois ?", j'étais à la limite de sourire puisque ce n'était en effet pas la première fois que je me retrouvais dans cette situation. J'avais vécu plus ou moins la même scène un 1er avril, l'année de nos 24 ans. Harry s'était mis en tête de faire une farce à mon père, il m'avait obligé à me mettre en scène dans une situation très interdite dans mon lit de jeune fille et mon père avait failli le démolir jusqu'à ce qu'il découvre le pot aux roses. Le fou rire avait été généralisé, au détriment de mon père qui était passé par toutes les couleurs de l'arc en ciel ce jour là. Alors j'essayais de contenir mon rire malgré ce souvenir délicieux car la situation aujourd'hui était bien réelle. Harry courrait de vrais risques et il continuait d'en prendre de façon suicidaire à sa prochaine réplique.

"Dis-lui, Pierre", j'étais estomaquée. Harry avait osé, il venait de regarder mon père en prononçant cette phrase avec un sourire malicieux, totalement décomplexé. C'était dans leurs habitudes de se provoquer pour s'amuser mais Harry était inconscient à ce moment présent. Il n'y avait aucune chance pour que mon père s'amuse de ce sujet et je voyais en effet de la fumée s'échapper de ses narines.

"Petit con... Dis-moi que c'est encore une de tes blagues pourries et que tu n'as pas osé faire ÇA, à ma fille, sous mon propre toit ? ", j'avais les yeux exorbités de peur, je craignais la réponse de Harry mais son silence, ce sourire très large et ce sourire moqueur étaient pire que tout. Mon père virait rouge tomate et il s'avançait dangereusement vers lui alors je courrais pour m'interposer aussi.

"Pitié, Papa, pitié !", je lui rendais ma moue la plus attendrissante possible en posant mes mains sur son torse. Il n'était pas indifférent mais il hésitait terriblement. Je lui laissais tout le temps qu'il lui fallait en continuant de m'interposer entre lui, ma mère et Harry. Je le regardais soupirer bruyamment puis abandonner le projet. Mais il reprenait ensuite très sévèrement la parole en s'adressant à Harry.

"Assis", je comprenais comme Harry la directive en voyant mon père lui pointer sa chaise du doigt. Je le regardais avec la même méfiance que Harry car ça avait l'air trop simple mais Harry s'exécutait très docilement en attendant. Je me dirigeais mécaniquement vers la mienne aussi mais je sentais la poigne ferme de mon père sur mon bras. Je le regardais avec une légère crainte, il me regardait durement, comme il ne l'avait plus fait depuis l'adolescence et il me désignait du doigt la chaise située à côté de lui, en m'interdisant de reprendre ma place initiale à côté de Harry.

"Tu es sérieux, Papa ?"

"Très sérieux, jeune fille"

"Je n'ai plus 15 ans", je me rebellais effectivement comme une enfant et la situation faisait beaucoup rire Harry .

"Oui tu en as 31, tu aurais dû avoir passé l'âge de faire de grosses conneries mais ce n'est pas le cas visiblement donc tu t'assois où je te le dis et en silence. Sauf si tu préfères que je m'en tienne au plan de départ en détruisant la belle gueule de Harry ?", c'était à mon tour maintenant de sourire moqueusement en voyant les yeux exorbités d'appréhension de Harry. Il me suppliait du regard d'obéir et je décidais sagement et amoureusement d'aller m'asseoir à côté de mon père. Tout le monde nous rejoignait ensuite à table pour le règlement de compte. Le blanc qui suivait était particulièrement gênant et Thierry se décidait à prendre la parole le premier, très sévèrement, pour soutenir mon père.

"Ton comportement est inadmissible, Harry..."

"C'était l'idée de Mia. C'est elle qui m'a forcé", il avait son visage dans ses mains pour s'empêcher de rire. J'étais sidérée qu'il ose me jeter injustement sous le bus et qu'il arrive à rire de cette situation tragique. Le problème, c'était que je trouvais sa façon d'assumer parfaitement irrésistible. Il m'avait presque supplié de leur avouer, il avait accepté de me laisser décider et il assumait maintenant parfaitement de nous exposer. Pour des raisons incompréhensibles, j'étais en train de devenir aussi à l'aise que lui et j'étais aussi en train d'en rire.

"Je suppose du coup que je dois annuler le rendez-vous que je t'avais pris avec ma kiné ?"

"Tu avais pris rendez-vous..?", j'éclatais de rire cette fois à cet échange entre Harry et sa mère et je me figeais en attendant la réponse très inattendue de Helen.

"Non, Harry. Je n'ai pas pris rendez-vous. Mon kiné fait 1m80 et il pèse au moins 110 kilos. Ce n'est définitivement pas ton genre", je croisais le regard dubitatif de Harry. Helen ne ménageait pas plus le suspense, je l'écoutais très attentivement confirmer sa réplique.

"On est au courant que vous êtes ensemble depuis le weekend dernier ! Et toi mon fils et toi ma fille de cœur, vous avez osé nous mentir" , j'étais sciée à cette révélation choc. Je repensais à la soirée et tous ces sujets sensibles abordés. Ils s'étaient joués de nous, tous les quatre, depuis le début du repas, très sadiquement et sournoisement. Ils nous avaient malmené et tendu un nombre incalculable de perches pour nous pousser à la confidence. Ils avaient été mis au courant, comme tout le monde certainement à cause des photos des soirées et je le devais surement à ce cours de rattrapage aux réseaux sociaux que j'avais donné à ma mère lors de sa dernière venue à Londres.

"C'est de toi qu'il tient tout son vice...", ma réaction était spontanée, j'étais choquée et aussi admirative face à autant de malice de leur part. Et j'entendais tout le monde rire, mon père inclus. Je croisais le visage de Harry et il avait l'air de son côté vraiment heureux et satisfait de ce dernier revirement. Il me regardait avec malice pendant qu'il osait encore une provocation en répondant à sa mère.

"Dommage pour la kiné, ça aurait pu être utile", je lui rendais mon air faussement outré face à l'affront, Harry était content de lui mais c'était sans compter le soutien totalement inattendu de mon père.

"Ah…je t'aimais bien jusqu'à présent. Lève-toi, fiston, on va discuter", et je pouffais de rire comme tout le monde en entendant le cri de douleur de Harry. Mon père venait de se lever et de presser son épaule à un point visiblement très douloureux car Harry n'était pas un homme qui criait facilement. J'avais un peu de peine pour lui à l'idée qu'il se fasse prendre en corner mais j'essayais de l'encourager du regard du mieux que je pouvais. C'était une étape incontournable. Il en avait conscience et se levait docilement en tentant de se donner une allure et de l'assurance malgré la très forte intimidation de mon père.

"C'est incroyable que ça arrive aujourd'hui", je souriais en baissant la tête en entendant la réplique de ma mère après le départ de Harry et de mon père. Je ne savais plus où me mettre ni quoi répondre, je n'avais pas prévu d'en débattre aujourd'hui avec eux.

"Je sais. J'ai du mal à le croire aussi ? Je suppose que c'est pour ça qu'on a voulu attendre. Pour prendre un peu plus de temps pour le réaliser...", je prenais la peine de relever la tête et j'étais chamboulée de croiser les sourires heureux et les regards bienveillants de nos mères.

"Je crois que c'est le plus beau jour de ma vie. Après la naissance de Harry",

"Tu n'as pas l'impression de surréagir, Helen ?", je la regardais s'approcher de moi au même moment. Elle posait ses bras maternels autour de mon cou en baissant sa tête à ma hauteur.

"Non ! Je rêve de ce moment depuis presque dix ans, ma chérie", sa confidence discrète à l'oreille me bouleversait. J'étais à la limite d'en pleurer mais je tenais le choc, je me contentais de lui caresser le bras en signe d'affection et je reprenais comme je le pouvais.

"Alors j'espère que Papa va te le rendre vivant pour que cela ne vire pas en pire jour de ta vie", et j'adorais son rire franc à mon oreille et encore plus l'intervention rassurante de ma mère.

"Ne t'inquiète pas. S'il y en a un bien un qui peut survivre à la colère de ton père, c'est Harry"

"Thierry, va vérifier quand même au cas où...", j'éclatais de rire à cette dernière réplique faussement inquiète de Helen. J'étais infiniment bien dans les bras de ces deux mamans et j'adorai ce moment. Je regardais quand même très attentivement Harry et mon père à travers la baie vitrée pour m'assurer que la situation ne tournait pas au vinaigre entre ces deux tempéraments de feu.

Point de vue : Harry

J'arrivais en terrasse avec Pierre. J'avais choisi de garder le silence et d'arrêter de rire. Il me regardait de façon indescriptible mais je soutenais son regard en attendant ma punition. J'attendais un très gros sermon après mon moment prohibé avec Mia dans sa salle de bain mais il me prenait au dépourvu en allant sur un tout autre terrain pour entamer la conversation.

"J'ai eu toute la semaine pour y réfléchir mais je ne sais toujours pas si je dois sourire ou pleurer de cette nouvelle"

"Comment ça ?", j'avais posé la question avec beaucoup de méfiance et d'incompréhension car c'était une nouvelle qui ne pouvait être que positive pour eux, de mon point de vue. Il sous-entendait le contraire et son entrée en matière me déstabilisait.

"Une partie de moi est heureuse. C'est tout ce que veut la famille depuis dix ans. Si ça marche entre vous, ce serait le schéma parfait. Et je suis forcément content à l'idée de t'avoir pour gendre"

"...Et l'autre partie ?", j'étais inquiet car le regard de Pierre devenait beaucoup trop sérieux et intense. Il avait l'air de choisir avec beaucoup de soin ses mots.

"L'autre partie déteste ça et aussi précisément parce que c'est toi, Harry. Parce que je sais que tu es le seul homme à avoir le pouvoir de briser ma fille. Et tu es aussi le seul qui puisse faire voler en éclat toute la famille. Je pensais ce que j'ai dit en début de repas sur le ton de l'humour. S'il y en a un qui n'a pas le droit à l'erreur avec Mia, c'est toi", j'étais surement très pâle en ce moment. Je ne m'étais pas préparé à une analyse aussi glaçante. Je fixais le sol sans savoir quoi répondre face à toute cette nouvelle pression mais j'inspirais discrètement pour me redonner contenance et trouver le courage de tenir cette conversation importante avec lui.

"Je sais. Il n'y a rien ni personne qui compte plus à mes yeux que ta fille et notre famille. Je comprends ce que tu me dis mais je n'ai aucune intention de me rater. Je suis très sérieux avec elle, Pierre"

"Qu'est-ce que tu attends de Mia…?", son approche était frontale. C'était un sujet que je n'avais pas encore abordé avec elle et Pierre m'obligeait à me livrer en avant première devant lui. Je le remerciais silencieusement de ne pas citer directement Victoria mais je devinais que c'était sa crainte sous-jacente. J'y avais réfléchi le premier et je savais qu'il avait besoin d'être rassuré sur ma capacité à aller de l'avant et à apporter à Mia tout ce qu'elle méritait malgré mon passé lourd.

"Tout...Ça aurait dû être elle, depuis longtemps...", je ne pouvais pas faire plus sincère. Je le devinais en train de méditer et surtout de me dévisager pour analyser ma sincérité. Pierre comprenait très bien la référence indirecte. Je fixais en ce moment les pavés de cette terrasse avec un intérêt démesuré. La gêne était totale et j'espérais qu'il n'avait pas pour projet de me cuisiner encore trop longtemps. Et dieu merci, ma prière était entendue.

"Monica va se remettre à brûler des cierges à cause de toi. Ça vous a pris comme ça ? Pourquoi est-ce que vous vous réveillez aujourd'hui ? ", j'essayais de lui répondre très simplement en lui évitant tous les détails inutiles à son niveau.

"Le naufrage ?", et je l'entendais soupirer fortement et je le voyais fermer les yeux de douleur à ce souvenir.

"Oui..Ne parlons plus jamais de ça, tu veux bien ?", j'hochais la tête docilement et silencieusement. Je n'avais pas eu l'intention de remuer ces souvenirs particulièrement douloureux pour moi et pour lui. Nos familles avaient vécu l'enfer ensemble pendant dix jours aussi. Leur amitié était ressortie plus forte également, à l'image de celle de Charlie, Théo, Mia et moi. Ils avaient vécu ensemble pendant cette période pour se serrer les coudes. Pierre avait soulevé des montagnes et tous ses contacts pour prolonger les recherches au-delà du raisonnable et c'était à lui que l'on devait le sauvetage.

"J'accepte de fermer les yeux pour aujourd'hui, Harry, mais on est d'accord sur le fait que votre petit moment de tout à l'heure ne se reproduira plus jamais ?", je souriais faiblement et je soupirais lourdement de soulagement à cet acte de bonté inattendu. Je me sentais pousser des ailes à un point de poursuivre avec mon niveau de familiarité habituelle avec lui.

"Tu veux dire faire l'amour à ta fille ? Parce que pour le coup, j'ai prévu de recommencer. C'est ce que font les couples, mon Général..."

"Ce n'est plus mon Général, ni Pierre. A partir d'aujourd'hui, tu vas te contenter de Monsieur Gautier. Et tu n'as plus le droit non plus à ce genre de blague avec ma fille", je riais franchement cette fois car je devinais son second degré en le voyant sourire subtilement à mon trait d'humour. Je me dépêchais malgré tout de traiter sérieusement le fond du problème car je n'avais pas l'intention de fuir mes responsabilités.

"Je suis vraiment désolé pour ça...Ça n'aurait jamais dû se produire. Tu as ma parole que ça n'arrivera plus", j'avais trouvé le courage de le regarder dans les yeux. Il me toisait, il soupirait mais abdiquait car il savait que j'étais un homme de parole. Je savais aussi qu'il avait fait bien pire avec Monica et le sexe n'était pas un tabou dans leur famille. Mais j'allais vraiment devoir garder ma queue précieusement dans mon pantalon à l'avenir, malgré toutes les mises à l'épreuve éventuelles de Mia.

"N'importe quel autre tocard serait mort pour beaucoup moins que ça...", j'éclatais de rire bruyamment cette fois et j'avais le cœur en fête de le voir me prendre par l'épaule malgré la claque et le léger coup de poing que je recevais dans mon ventre au même moment.

J'avais croisé ensuite le regard soulagé de Mia en nous voyant revenir dans l'appartement bras dessus, bras dessous. J'étais effectivement sauvé. J'avais ensuite subi comme elle le flux interminable de questions de nos mères jusqu'à ce que Monica ne prenne l'initiative habituelle de mettre la musique et de pousser les meubles. C'était l'heure de la fête. Les chiens ne faisaient pas des chats. C'était de nos parents que nous venait cette passion commune pour la danse.

Je respectais la tradition en regardant Pierre ouvrir le bal avec sa fille et en invitant de mon côté ma mère. Je me contentais ensuite de tous les regarder. Je m'émerveillais toujours de voir mes parents danser ensemble aussi amoureusement et j'adorais regarder Mia danser avec mon père. J'étais plongée dans mes pensées tendres quand j'entendais Monica me glisser une idée diabolique à l'oreille.

"Invite la à danser, s'il te plaît !" , je voyais ma mère revenir au même moment. Elle prenait la conversation au vol en écoutant attentivement la campagne de Monica. De mon côté, je méditais sur sa demande en regardant Mia danser un rock dans les bras de son père qui était aux anges de la retrouver et qui était le plus heureux des hommes en ce moment.

"Et aller priver ton ogre de mari de sa poupée ? Tu as perdu la tête ? Après le drame que je viens d'éviter…",

"Vas-y Harry. Qu'est ce que je te répète tout le temps… sois ...COURAGEUX"

"COURAGEUX ! Je sais, Maman" , j'avais tablé qu'elle me rabâcherait ce leitmotiv. C'était à cause d'elle si j'étais un véritable casse-cou. Ma mère me poussait à tous les actes de bravoure depuis mon plus jeune âge. Elle était tout sauf une mère poule, elle me poussait toujours au-delà de mes limites tout en veillant très attentivement au grain. C'était cette dernière directive et mon goût du challenge qui me faisaient céder.

"Qu'est ce que je ne ferai pas pour la femme de ma vie ?", je répondais en soupirant et en me levant.

"Oh ? Ce n'est pas Mia maintenant ?", elle était en train de prêcher le faux pour avoir le vrai et je décidais de lui en donner pour son argent avec un résumé très explicite de mon niveau d'engagement.

"J'ai le droit d'en avoir deux, non...?", je ne regrettais rien de ma confidence en voyant leurs visages comblés de bonheur. J'inspirais ensuite bruyamment, je gonflais le torse avant d'aller au devant de tous les dangers. Je m'approchais prudemment et j'essayai de me blinder d'avance face aux tentatives d'intimidation de son père.

"Pierre ? Tu permets que je danse avec ta fille ?", je regardais Mia sourire précautionneusement en le suppliant de ses yeux. Pierre s'interrompait subitement et m'adressait une réponse toujours aussi aiguisée.

"Tu en as vraiment une grosse paire, toi…", je me pinçais les lèvres pour ne pas rire mais je le regardais sans ciller en restant sur mes appuis pour le faire céder. Je l'entendais soupirer d'exaspération une dernière fois avant d'abdiquer.

"Fais très attention à l'endroit où tu poses tes mains...si tu y tiens", je souriais en hochant la tête docilement à la menace pendant que je me dépêchais de prendre entre mes bras Mia, avec douceur et chasteté.

"Et à moi, tu ne me demandes pas mon avis ?", je souriais de ravissement à la prise de parole de Mia. Je répondais très sagement à sa protestation.

"Est-ce que tu veux bien m'accorder cette danse ?", Mia me rendait un sourire délicieux.

"Seulement si tu promets de rester sage et de ne plus provoquer mon père pour le reste de la soirée…"

"C'est promis...Je suis casse-cou, pas suicidaire...", je fondais comme un marshmallow en la voyant sourire et rire avec cette lueur particulièrement pétillante dans les yeux. La soirée était encore plus parfaite que je ne l'avais imaginé. J'étais aux anges de la voir réaliser ce nouveau pas aussi sereinement avec moi. Je restais sage comme prévu malgré mon envie très forte de l'embrasser. Je me contentais de la garder précieusement dans mes bras et je me contentais de quelques baisers doux sur son visage et dans ses cheveux pendant ces danses et pour tout le reste de la soirée. Je m'étais tenu à carreau pour plus grand bonheur de Pierre qui avait eu tout le loisir de se détendre et de profiter aussi de son côté.