Chapitre 51
Le bus avait repris sa route vers Osaka au moment de remonter à bord, les Enfants Élus trouvèrent Takeru beaucoup plus détendu et confiant. Lorsque Daisuke s'assit à côté de Ken, il lui demanda à voix basse :
– Eh, qu'est-ce tu lui as dit pour qu'il se sente mieux d'un seul coup?
Ken sourit :
– Qu'il faut continuer de croire en la lumière, même chez nos ennemis.
– Même chez nos ennemis ? répéta Iori.
Le jeune garçon dévisagea Ken, impressionné, puis fronça les sourcils et posa ses mains sur ses genoux, tout en se répétant mentalement les paroles de son ami : pouvait-on réellement croire en l'existence de la lumière, de la bonté, même chez leur ennemi ? Daisuke, lui, hocha la tête et déclara :
– Tu as fait ce qu'il fallait.
Le mouvement régulier du bus, l'atmosphère tiède et l'obscurité étendirent bientôt le voile du sommeil sur les Enfants Élus : ils se calèrent contre leur sac à dos et ne tardèrent pas à s'endormir. Seul Koushiro garda son ordinateur allumé sur ses genoux et continua de travailler. Au milieu de la nuit, Taichi ouvrit les yeux et s'aperçut que la lumière de l'écran de son ami brillait toujours. Le délicat bruit de ses doigts sur les touches était à peine audible avec le ronronnement du moteur du bus. Taichi se pencha vers lui et souffla :
– Eh, Koushiro ? Tu ne dors pas ?
– Ah, Taichi … non, je voudrais avancer sur quelque chose. La lumière te gêne ?
– Non, mais … qu'est-ce que tu fais ?
Le jeune homme pinça les lèvres, comme s'il hésitait à confier à son ami le but du programme qu'il créait.
– Eh bien … je suis peut-être en train de travailler pour rien, donc je préfère ne pas t'en parler tout de suite. Si ça marche, je t'en dirais plus, d'accord ?
– Hum … d'accord. Bonne nuit, alors.
– Bonne nuit.
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Un rayon de soleil traversa le prisme double-vitrage et tomba sur le pelage ocre de Ryudamon. Le digimon battit des cils encore ensommeillé, et regarda à travers la fenêtre. Ses yeux s'écarquillèrent alors d'émerveillement, il sauta sur les genoux de Sakae et s'écria :
– Sakae, Sakae, réveille-toi !
La jeune fille cligna des yeux et se redressa : leur bus traversait un pont sous lequel se déployaient les eaux opalines d'un vaste lac. Une chaîne de montagne ceignait ses rives : l'aube revêtait leurs flancs d'un violet anthracite et une brume presque irréelle les enveloppait. Au-dessus du plus haut des pics rocheux, un soleil rougeoyant se levait, et ses premiers rayons répandirent une traîne tremblante et dorée sur les eaux du lac.
– Comme c'est beau, souffla Sakae. Meiko, dit-il en secouant sa sœur par l'épaule, réveille-toi …
– Réveillez-vous tous ! ajouta Ryudamon en sautant d'un siège à l'autre.
Au son de leurs voix, adolescents et digimons sortirent de leur torpeur et demeurèrent bouche bée devant le spectacle grandiose qui s'offrait à leurs yeux : la lumière pâle du petit matin traversait le bus de part en part.
– Hikari, c'est splendide ! dit Tailmon.
– Oui, c'est vrai, acquiesça sa partenaire.
Patamon, pattes posées sur la vitre, murmura :
– Takeru ?
– Oui ?
– Ton monde est vraiment magnifique. C'est dans un moment comme celui-ci que je suis heureux d'être toujours à tes côtés pour protéger la Terre, car je ressens une immense vague d'espoir. Si le monde peut être si beau, alors je n'ai pas peur des ténèbres.
Takeru fixa son partenaire, bouleversé, et sentit des larmes lui monter aux yeux.
– Takeru, qu'est-ce tu as ? J'ai dit quelque chose de mal ?
Le jeune homme sourit et secoua la tête :
– Non, pas du tout Patamon. Au contraire.
Il le prit dans ses bras et le serra contre lui : Patamon sentit le cœur de Takeru battre et devina qu'il était heureux, aussi heureux qu'il l'était en cet instant. Ken les fixait, puis sourit.
Affalée sur l'accoudoir côté couloir du bus, Miyako était la seule à ne pas s'être réveillée : son sommeil lourd était presque légendaire au sein du groupe. Assis sur la rangée d'en face, Daisuke considéra son visage endormi et le filet de bave qui commençait à s'échapper de la commissure de ses lèvres, et une idée commença soudain à germer dans son esprit. Il se leva, attrapa le sac à dos de la jeune fille dans le coffre au-dessus d'elle et le suspendit à la barre de maintien, bien attaché avec un double nœud … juste au-dessus de sa tête. À cet instant, Ken s'aperçut de ce que Daisuke tramait, ses yeux s'écarquillèrent et s'exclama à voix basse :
– Daisuke, qu'est-ce tu fais ? Arrête tes bêt…
Avant qu'il n'ait pu terminer sa phrase, Daisuke frappa dans ses mains aussi fort qu'il le put juste à côté de la tête de Miyako. La jeune fille bondit en émettant un cri aigu, et comme l'adolescent l'espérait, se cogna contre le sac suspendu.
– Qu'est-ce qu'il se passe ? marmonna-t-elle, les lunettes en travers de la figure.
Avant qu'elle n'ait pu se ressaisir, Daisuke était déjà parti dans un éclat de rire.
– T'es vraiment irrécupérable, Daisuke, lui dit Ken, exaspéré.
– Mais avoue que c'était drôle !
– Daisuke, t'es vraiment qu'un gamin ! s'écria Miyako. Tu me le paieras !
Daisuke rit de plus belle, sous le regard désespéré de ses amis. Miyako se rencogna dans son fauteuil, bras croisés et maudissant son camarade. Deux heures plus tard, le bus arrivait à Osaka : là, les Enfants Élus se rendirent à l'aéroport où ils devaient prendre l'avion qui les conduirait à Ishigaki, l'île la plus proche de Yonaguni.
L'aéroport d'Osaka se trouvait sur une île artificielle construite sur la mer, à laquelle on accédait par un long pont qui enjambait les eaux. Les Enfants Élus profitèrent de l'heure de battement qu'ils avaient devant eux pour prendre un petit-déjeuner ils avaient convenu avec leurs partenaires que ceux-ci demeureraient dans la salle virtuelle de l'ordinateur de Koushiro le temps du voyage. Après avoir pris leur encas, les adolescents se présentèrent aux contrôles. Alors que Daisuke récupérait son sac à dos, Mimi commença à étaler sur le tapis roulant tous les accessoires et gadgets que contenait son sac à main, sans compter tous les objets métalliques que renfermait sa valise.
– À ce rythme-là, on va rater l'avion, soupira Taichi.
– Franchement, les filles se chargent vraiment de trucs inutiles, lâcha Daisuke.
– Il n'y a pas que les filles, souligna Yamato. Joe aussi a beaucoup trop de bazar dans son sac …
En effet, Joe s'empêtrait dans ses boîtes de médicaments et de mouchoirs la moitié finit par lui échapper et s'éparpilla sur le sol.
– Ah, noon !
Joe s'agenouilla pour récupérer toutes ses boîtes, et M. Nishijima, qui passait les contrôles derrière lui, lui donna un coup de main. Le vigile les observa ramasser ses paquets et les jeter un à un sur le tapis roulant, tandis que Joe en vérifiait le nombre :
– Vingt-cinq, vingt-six, vingt-sept, vingt-huit … le compte est bon !
– Monsieur, vous … vous prenez tous ces médicaments à vous tout seul ?
– Euh … oui, bien-sûr ! mentit Joe avec un sourire forcé.
L'homme le dévisagea, interloqué. Sans doute un dépressif, pensa-t-il. Ou peut-être un bipolaire mieux valait le laisser rapidement passer avant qu'il ne lui fasse une crise. Sur le tapis roulant d'à côté, la valise de Mimi avait été mise de côté pour être examinée.
– Je suis désolée, mademoiselle, mais vous ne pouvez pas emporter plus d'un litre de liquide, et dans des contenants de moins de 50 millilitres. Nous allons devoir retirer cette bouteille de shampoing, ainsi que le démêlant et le vernis à ongle …
– Quoi ? s'exclama Mimi, outrée. Mais ce sont des produits de première nécessité !
– Vous pouvez en racheter dans la zone duty-free après les contrôles.
– À prix d'or ? Jamais de la vie !
– Mimi, dépêche-toi ! lui intima Sora. Il faut aller faire la queue pour l'embarquement !
– J'arrive ! Bon, puisque vous y tenez, gardez-les, ces bouteilles !
Alors qu'elle refermait sa valise, elle vit l'hôtesse jeter son shampoing, son démêlant et son vernis dans une poubelle derrière l'écran de contrôle. Verte, la jeune fille rejoignit ses amis avec une moue d'indignation.
– Quel gâchis !
– Ne t'inquiète pas, il y aura sans doute ce qu'il faut à Yonaguni, voulut la rassurer Meiko.
– Je me le demande … une île à laquelle on n'accède que par bateau n'est-elle pas forcément une île déserte ?
– Voyons, tu exagères, déclara Miyako. Il y aura forcément une supérette !
– On devrait se dépêcher, répéta Iori.
Ils parcourent de longs couloirs au revêtement synthétique et parvinrent aux portes d'embarquement. Alors qu'ils faisaient la queue, Mimi remarqua soudain que les jambes de Joe tremblaient.
– Bah alors … qu'est-ce qui t'arrive ? Ça ne va pas ?
– Si, si, tout va super bien, répondit Joe qui ne semblait pas croire un mot de ce qu'il disait.
Bientôt il se mit à claquer des dents et gardait le regard rivé sur la porte d'embarquement, qui semblait lui inspirer une terreur plus grande encore que les Sept Seigneurs Démoniaques réunis. Mimi, mains sur les hanches et un sourire aux lèvres, lui demanda d'un ton narquois :
– Ne me dis pas que tu as peur de monter dans l'avion ?
– Ben … en fait, ça va être la première fois, alors …
Ses dents s'entrechoquèrent avec plus de force. Ses amis s'étaient retournés et l'observèrent pendant quelques secondes, entre l'incrédulité et le rire, et finalement ce fut ce dernier qui l'emporta sur le reste. Pliée en deux, des larmes dans les yeux, Mimi s'exclama :
– Tu as peur de monter dans un avion ? Avec tout ce qu'on a affronté dans le monde digital ? J'y crois pas !
– C'est facile pour toi, tu as souvent pris l'avion entre les Etats-Unis et le Japon !
– Justement, je suis toujours en un seul morceau, ça devrait te rassurer, non ?
– Mais imagine que le pilote perde connaissance ? Que l'on soit victime d'une attaque terroriste ? Qu'on rate le décollage ? Ou pire, l'atterrissage ?
– C'est sûr que notre risque de s'écraser dans le monde digital est beaucoup plus faible, je te l'accorde. Surtout quand tu es tombé dans le vide tête la première depuis le Mont de l'Infini …
– Mais je n'ai pas de digimon volant, au cas vous l'auriez oublié ! Je suis habitué à la terre ferme, moi !
– Ne t'inquiète pas, lui dit Takeru en posant une main rassurante sur son épaule, j'ai lu sur un blog qu'il n'existe qu'une chance sur dix milliards de mourir en avion.
– Ah, je savais que le risque n'était pas nul !
Ses amis s'esclaffèrent de nouveau et à cet instant on les invita à embarquer. Leurs sièges se trouvaient tout au fond de l'avion, sur cinq rangées de trois fauteuils chacune. Ils déposèrent leur sac à dos dans les coffres et prirent place, mais Koushiro garda son ordinateur sur ses genoux : même s'il savait qu'il n'aurait pas de réseau pour travailler, il voulait pouvoir montrer le décollage aux digimons qui se trouvaient dans la salle virtuelle. Lorsque l'avion fut plein, la voix d'une hôtesse résonna :
– Madame, Monsieur bonjour, je suis votre cheffe de cabine. Le commandant de bord et l'ensemble de l'équipage ont le plaisir de vous accueillir à bord. Nous vous rappelons que ce vol est non-fumeur et qu'il est strictement interdit de fumer dans les toilettes. Les démonstrations de sécurité vont vous être présentées par nos hôtesses, accordez nous quelques instants d'attention, merci.
– Ah, la sécurité, regardons-bien ! s'exclama Joe en s'agrippant au dossier du siège devant lui.
– Eh ! s'exclama Mimi. Arrière de me tirer en arrière !
Les hôtesses présentèrent le fonctionnement des ceintures de sécurité, puis des gilets de sauvetage et de la conduite à adopter en cas de dépressurisation de la cabine. Joe fixait les gestes des jeunes femmes avec attention, sous le regard amusé de ses amis.
– T'es incroyable, soupira Daisuke, on t'a dit que tu ne risquais rien …
– C'est toujours ce qu'on dit avant qu'ait lieu l'accident !
– Nous allons bientôt décoller, termina l'hôtesse. Votre tablette doit être rangée, et votre dossier redressé. Nous vous remercions d'avoir choisi notre compagnie et nous vous souhaitons un bon vol.
L'avion se mit en mouvement et se dirigea en roulant vers la piste de décollage. Soudain, il accéléra brusquement et le paysage se mit à défiler à toute vitesse à travers les hublots. Joe ferma les yeux, serra les accoudoirs et se répéta :
– Il n'y qu'une chance sur un milliard de mourir en avion … il n'y a qu'une chance sur un milliard de …
À cet instant, l'avion quitta le sol et Joe étouffa un cri d'orfraie. Tous les Enfants Élus se penchèrent vers les fenêtres, Koushiro ouvrit discrètement son ordinateur et l'approcha de la vitre pour que les digimons puissent voir leur ascension. Pendant quelques secondes, l'avion frôla de si près la mer qu'on aurait pu penser qu'il roulait sur l'eau, puis, il prit de l'altitude et ils surplombèrent le pont qui reliait la terre ferme à l'île artificielle de l'aéroport. Le soleil irisait le bleu profond de la mer.
– Whouah ! s'exclama Veemon.
– La vue est vraiment splendide, dit Gabumon.
Daisuke se tourna vers Joe, à sa gauche, qui était toujours agrippé aux accoudoirs. Il le secoua par le bras :
– C'est bon, tu peux ouvrir les yeux. On n'est pas morts.
Joe ouvrit un œil, puis un autre, et laissa glisser son regard vers le hublot : l'effroi de voir à quelle hauteur ils se situaient fut rapidement surpassé par l'émerveillement qu'il ressentit face à la vue. Bouche bée, il se détendit et observa à son tour le paysage. Les digimons, scotchés à l'écran de la salle virtuelle, ne perdaient pas une miette du spectacle.
– Taichi, ton pays est si grand, dit alors Agumon.
– Pas vraiment, dit Taichi avec un sourire. D'ici, ça te semble vaste, mais comparé à des continents comme l'Asie ou l'Amérique, le Japon est plutôt petit …
– C'est vrai, confirma Koushiro, les Etats-Unis sont par exemple vingt-six fois plus grands que le Japon …
– Koushiro, tu sais beaucoup de choses sur la géographie. Peux-tu nous en parler ? lui demanda Tentomon.
– Si tu veux, accepta le jeune homme avec enthousiasme en posant l'ordinateur sur ses genoux. Notre pays est composé de 6852 îles, mais quatre d'entre elles, Hokkaidō, Honshū, Shikoku et Kyūshū représentent à elles seules 95% du territoire national.
– L'île sur laquelle nous nous rendons est assez petite, n'est-ce pas ? demanda Armadillomon.
– Oui, acquiesça Iori qui se trouvait à la gauche de Koushiro. J'ai lu avant de partir qu'elle ne mesure que 28 kilomètres carrés et compte moins de 2000 habitants. C'est aussi l'île la plus à l'ouest du Japon.
– On parle aussi une langue propre à Yonaguni, utilisée par les seuls habitants de l'île, ajouta Ken. C'est une langue qui s'écrit d'ailleurs avec un alphabet propre, différent du nôtre, qui ressemble à des pictogrammes.
– Tu veux dire que l'on ne va pas comprendre les gens ? s'inquiéta Miyako en se penchant vers le couloir de l'avion.
– Ne t'en fais pas, répondit Ken en se penchant à son tour, ils parlent aussi japonais aujourd'hui.
– Ah, ouf …
Les deux heures de voyages s'écoulèrent paisiblement, sans perturbation atmosphériques. Sakae s'était mise à dessiner les nuages qu'elle voyait par la fenêtre, Koushiro travailla en mode hors ligne sur les éléments de son programme qu'il pouvait perfectionner sans connexion. Ken et Iori, lancés sur le thème de la géographie, poursuivirent leur discussion Daisuke et Takeru se retournèrent pour y participer. Sur les rangées les plus avant, Sora, Meiko, Miyako et Hikari se mirent à échanger entre elles. Tout à l'arrière, Taichi, Yamato et M. Nishijima regardaient silencieusement le paysage à travers le hublot.
Bientôt, une île apparut au milieu de la mer et ses cotes semblaient découper une dentelle de végétation luxuriante sur l'eau. L'avion commença à perdre de l'altitude à mesure qu'ils se rapprochaient de la terre ferme, ils distinguèrent toute une frange d'eau plus claire autour de l'île, sous laquelle semblait miroiter des récifs rocheux.
– C'est une barrière de corail ! s'exclama Sora.
– Oui ! acquiesça Iori. J'ai lu que c'est l'une des attractions touristiques de l'île Ishigaki. On dit qu'elle possède le plus grand récif de corail bleu au monde.
L'avion passa alors au-dessus de la terre et survola des champs soigneusement délimités. Quelques minutes plus tard, il toucha le sol avec une douceur qui ne parut pas encore suffisante à Joe quand l'appareil s'immobilisa, il respira à nouveau. Daisuke lui adressa une tape sur l'épaule :
– Tu vois, on s'en est bien sorti, hein ? Je pense que t'es prêt pour affronter Yggdrasil maintenant.
Les adolescents débarquèrent : la fraîcheur des cabines de l'avion les suivit dans l'aéroport, cependant, lorsqu'ils sortirent à l'air libre, ils eurent la sensation d'entrer dans un vivarium. La chaleur s'écrasa sur leurs épaules comme un joug de plusieurs tonnes, auquel vint se rajouter l'humidité tropicale.
– Eh bien, on va sentir bon ce soir, ironisa Takeru.
– Quand je disais que le shampoing était un produit de première nécessité ! râla Mimi.
M. Nishijima retira sa veste, remonta ses manches et déclara :
– De toute façon, le bateau qui fait le trajet jusqu'à Yonaguni ne part qu'une fois par jour, le matin. Il est près de midi, nous devons donc jusqu'à attendre demain pour le prendre. L'Agence nous a réservé un hôtel, je propose donc que nous nous y rendions afin que ceux qui le souhaitent prennent une douche.
– Ça, c'est une bonne idée ! approuva Mimi.
Ils trouvèrent rapidement l'hôtel en centre-ville. À la réception, M. Nishijima récupéra quatre paires de clés.
– Ce sont des chambres de quatre personnes, leur expliqua-t-il. Il faut nous répartir.
Taichi et Yamato décidèrent de prendre la première chambre avec M. Nishijima et Koushiro. Mimi, Sora, Meiko et Sakae prirent la seconde. Quand il fallut attribuer les deux dernières, un problème se posa :
– Il y un garçon de plus que les filles ! constata Miyako.
– Mais on ne peut pas faire une chambre de cinq, répliqua Joe.
– Dans ce cas, il faut qu'un garçon aille avec les filles, décréta Yamato. Hikari, Miyako, c'est vous qui prenez la dernière chambre. À vous de voir qui vous acceptez d'accueillir avec vous. Vous avez le choix entre Joe, Iori, Daisuke, Ken ou Takeru.
– Moi, ça ne me dérange pas de me sacrifier, déclara Daisuke en jetant un œil à Hikari.
– Ben voyons ! s'exclama Miyako, mains sur les hanches. Il n'en est pas question ! Je ne tiens pas à subir encore une de tes blagues débiles !
– Oh, tu penses encore à cette histoire ? dit Daisuke. Ce que tu peux être susceptible !
– Et puis en plus, tu ronfles.
– Comment tu peux savoir ça ? Même un tremblement de terre ne te réveillerait pas !
– Qu'est-ce que tu en sais ? De toute façon, je ne veux pas que tu partages notre chambre ! Pourquoi ce ne serait pas Ken qui viendrait, d'abord ?
– Qu… quoi ? bégaya ce dernier en rougissant. Je … je ne sais pas si ce serait très convenable …
– Bon, eh bien, dans ce cas, Takeru ?
Le jeune homme dévisagea Miyako, puis Hikari.
– Vous êtes sûres que ça ne vous embêterait pas ? demanda-t-il calmement.
– Non ! confirma Miyako avec un grand sourire.
– Moi non plus, acquiesça Hikari d'une voix douce.
– Attendez une minute ! l'interrompit Daisuke. Pourquoi Takeru et pas moi ? Je ne vois pas ce qu'on a de différent.
– La grande différence, martela Miyako, c'est qu'il ne suspend pas de sac au-dessus de la tête des gens lorsqu'ils dorment !
Les Enfants Élus partirent d'un grand éclat de rire et prirent possession de leur chambre. Mimi passa dans la salle de bain et s'exclama, soulagée :
– Il y a du gel douche et du shampoing ! Bon, il n'y a pas de crème démêlante, mais au moins je vais pouvoir me laver !
Tandis que Sora déballait ses quelques affaires, Sakae s'approcha de la fenêtre et écarta l'un des rideaux de voile fin. Dehors, on devinait la mer claire et ses plages. Le soleil à son zénith exaltait les couleurs vives de l'eau et du sable blanc.
– Sakae, ça va ? lui demanda Sora.
– Oui, acquiesça-t-elle. Je me disais juste que l'on pourrait peut-être … aller se baigner ?
– Hein ? firent Sora et Meiko en chœur.
Meiko baissa les yeux et dit :
– Nous ne sommes pas en vacances, Sakae. Nous devons accomplir une mission pour empêcher qu'Yggdrasil n'attaque la Terre, je te le rappelle.
– Je sais, mais de toute manière nous sommes bloqués ici jusqu'à demain. Alors pourquoi devrait-on rester à se ronger les sangs ? Ça ne nous aidera pas quand nous devrons nous battre contre Yggdrasil. Au contraire, je crois qu'aller nous baigner nous ferait passer un bon moment et que cela resserrerait nos liens.
Sora médita quelques instants les paroles de Sakae, puis sourit.
– Je crois que tu as raison, nous avons besoin de rester unis. Comme tu le dis, de toute façon nous n'avons rien à faire. Et puis, nous avons tous pris un maillot de bain puisque nous savons que la capitale des Jomon a été submergée sous les eaux et que nous pouvons potentiellement être amenés à chercher la qualcorite sous la mer. Avec les serviettes de l'hôtel, on a tout ce qu'il nous faut pour piquer une petite tête !
– Alors, on propose aux autres ? s'enthousiasma Sakae.
– Oui !
– Attendez une minute ! s'exclama soudain Meiko. Vous voulez qu'on aille à plage … avec les garçons aussi ?
La jeune fille était devenue rouge comme une pivoine à l'idée que Taichi la voit en maillot de bain. Sakae vint passer un bras sur les épaules de sa sœur :
– Je ne vois pas pourquoi tu t'inquiètes, sœurette. Jolie comme tu es, tu n'as aucune raison d'avoir honte de quoi que ce soit.
– Mais, ce n'est … ce n'est pas le problème …
– Sakae a raison, lui dit Sora. Nager un peu nous fera du bien à tous. Mimi ? Tu veux aller à la plage avec nous ? lança-t-elle à travers la porte de la salle de bain.
– À la plage ? Mais je suis sur le point de prendre ma douche !
– Tu peux la prendre après.
La tête de Mimi apparut alors dans l'embrasure de la porte de la salle de bain.
– Alors, ok ! On va chercher les autres aussi ?
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La proposition d'une baignade plut immédiatement à Takeru, Miyako et Hikari. Dans la chambre suivante, Daisuke se montra d'autant plus partant qu'il savait qu'Hikari avait accepté. Convaincre Joe, Ken et Iori, qui étaient d'une nature plus réservée, fut plus délicat, cependant ils finirent par céder. Mimi remonta le couloir et alla frapper à la porte de la dernière chambre :
– Taichi, Yamato, Koushiro ! Ça vous dit d'aller vous baigner ?
– Quoi ? s'exclama Koushiro en sursautant tandis que ses joues s'empourpraient.
– Hum … pourquoi pas, acquiesça Taichi. De toute façon, on n'a rien à faire.
– C'est exactement ce qu'a dit Sakae !
– Tout le monde y va ? demanda Yamato.
– Oui !
Koushiro essaya vainement de se cacher derrière l'ordinateur qu'il tenait sur ses genoux et déclara :
– Je … je vais rester ici.
– Oh, Koushiro, allez ! s'exclama Mimi. Tu ne vas pas rester ici tout seul …
– J'ai quelque chose d'important à faire. Et ici, j'ai de la connexion.
– Bon, c'est comme tu veux, répondit Taichi.
À cet instant, M. Nishijima sortit de la salle de bain et haussa les sourcils, surpris de cette agitation soudaine dans la chambre. Taichi se retourna et lui demanda :
– Monsieur, on va aller se baigner à la plage avec les autres. Vous voulez venir ?
Il s'attendait à ce que son professeur refuse et préfère demeurer à l'hôtel. Cependant, après une microseconde de réflexion, M. Nishijima sourit comme un enfant à qui l'on aurait proposé une part de gâteau.
– Avec plaisir !
Joe entra alors dans la chambre et lança :
– Koushiro, peux-tu faire sortir les digimons de l'ordinateur ? Je pense que Gomamon sera content de se rafraîchir les pattes !
– Ah oui, bien-sûr ! acquiesça vivement le jeune homme.
– Tu ne viens pas avec nous ?
– Non, je travaille sur un programme important.
– Ah bon …
Quinze minutes plus tard, tous les Enfants Élus et leurs digimons arrivaient sur la plage principale d'Ishigaki. L'air tropical charriait un goût salé d'embruns et un vent chaud soulevait des volutes de sable crème. Une butte recouverte d'arbustes dominait la plage et leur feuillage éclatant de vert tranchait avec la pâleur de l'eau : un paysage de carte postale, qui fit comprendre aux adolescents pourquoi tant de Japonais venaient passer leurs vacances sur l'une des îles de l'archipel sur lequel ils se trouvaient. Ils retirèrent leurs chaussures et enfoncèrent leurs pieds dans le sable chaud.
– Whouah, la mer est magnifique ici ! s'exclama Gomamon.
– On fait la course jusqu'à l'eau ? proposa Agumon.
– C'est moi qui vais gagner ! assura Veemon.
– Pas si je participe aussi à la course ! les prévint Ryudamon.
Tandis que les quatre digimons s'élançaient, les adolescents étalèrent leurs serviettes et se dévêtirent. Sakae laissa tomber son short et son tee-shirt et courut la première vers la mer où nageaient déjà Agumon, Gomamon, Veemon et Ryudamon.
– Attention, j'arrive !
Elle piqua tête la première, créant des vagues autour des digimons qui se mirent à rire et qui l'entourèrent pour l'arroser.
– C'est impressionnant comme Sakae ne manque jamais d'enthousiasme, lâcha Hikari, impressionnée.
– Elle a raison ! déclara Mimi en rejetant ses longs cheveux de la main. À l'eau tout le monde !
Et elle courut rejoindre son amie. Sora sourit et enleva son tee-shirt à son tour. Elle remarqua alors que Meiko ne s'était pas encore déshabillée.
– Meiko, ça va ?
– Ou … oui, acquiesça-t-elle en rougissant.
Elle jeta un œil à Taichi qui avait déjà retiré sa chemise. Elle rougit de plus belle et détourna le regard.
– Heu, en fait … non. Je ne pourrai jamais me mettre en maillot de bain devant tout le monde !
– Pourquoi ? lui dit doucement Sora. On est bien allés ensemble aux sources d'eau chaude.
– Mais dans les bains nous étions séparées des garçons !
– C'est à toi de le faire comme tu le sens. Mais avec cette chaleur, tu te sentirais mieux dans l'eau.
– Hum … je verrai, dit-elle en s'asseyant sur sa serviette.
Quand Hikari retira son chemisier et sa jupe, Daisuke ne put s'empêcher de lorgner le joli maillot de bain jaune qu'elle portait en-dessous. Miyako passa derrière lui et lui donna une tape dans le dos.
– Tu pourrais être un peu plus discret !
Ils se dirigèrent vers l'eau en se chamaillant, jusqu'à ce que Daisuke pousse Miyako dans les vagues. Ken resta en retrait, tout en observant la jeune fille : il ne s'était presque pas aperçu, jusqu'alors, combien Miyako avait changé. Malgré ses manières encore un peu brusques, elle devenait réellement une femme. Il rougit en se rendant compte de la direction que prenaient ses pensées et secoua la tête pour refroidir ses sens. Wormon avança alors vers lui et demanda :
– Ken ? Tu ne vas pas te baigner ?
– Si, si, j'arrive !
– Je viens avec toi !
M. Nishijima contemplait, amusé, le groupe d'adolescents se taquiner et s'observer à la dérobée comme on le fait à leur âge. Il se dévêtit à son tour, révélant un short de bain rose qui laissa perplexe les autres garçons du groupe. Pendant ce temps, Iori s'approcha de Joe qui farfouillait dans son sac, à genoux sur le sable.
– Joe ? Qu'est-ce tu fais ?
Le jeune homme brandit un petit tube de crème solaire avec un air triomphant.
– Il faut se protéger du soleil ! Mais … mais où sont les autres ?
– Déjà dans l'eau.
– Sans protection ? s'étrangla-t-il. Ils vont avoir des coups de soleil !
– Tu sais, ils sont assez grands pour s'occuper d'eux-mêmes.
– Bon, alors, autant que cette crème me serve ! décréta Joe en appuyant sur le tube avec détermination.
Il commença à étaler une bonne couche sur ses avant-bras et sur son visage. Iori sourit, en mit un peu sur ses joues et ses épaules, puis rejoignit les autres dans l'eau. Taichi s'avança pour le suivre quand il se rendit compte que Meiko n'avait pas bougé de sa serviette.
– Sora, Meiko ne vient pas ?
– Je crois qu'elle n'ose pas !
Taichi écarquilla les yeux : il aurait dû s'en douter. Il jeta un œil par-dessus son épaule en direction de la jeune fille, hésita, puis remonta la plage jusqu'à elle. Quand elle le vit arriver, Meiko sentit de nouvelles joues s'empourprer Taichi s'arrêta pile devant elle, si près qu'elle ne pouvait plus l'ignorer. La nuit où il l'avait prise contre lui, dans la forêt du digital, lui paraissait si loin qu'elle avait l'impression d'avoir retrouvé toute sa timidité face au jeune homme.
– Mei, tu es sûr que tu ne veux pas te baigner ? Je ne veux pas te forcer, mais … ça m'embêterait que tu souffres d'une insolation parce que tu es restée sur la plage.
Meiko rougit de plus belle, touchée par sa sollicitude. Elle se sentit soudain stupide : Taichi venait lui tendre la main avec une naturalité qui masquait toute la timidité qu'il aurait pu éprouver en son for intérieur. Meiko saisit son courage à deux mains et se leva.
– D'accord, j'arrive.
Elle enleva ses lunettes, retira sa jupe puis son chemisier. Cette fois, ce fut au tour de Taichi de rougir légèrement et il détourna le regard.
– On y va ? demanda-t-il.
– Oui …
Ils se dirigèrent vers la mer. Sur le sable clair, l'eau qui caressait le rivage était cristalline, et elle se dégradait en nuances de turquoise à mesure que la profondeur s'accentuait. Quand le reflux mouilla les pieds de Meiko, elle se sentit extrêmement bien. Taichi s'était déjà élancé et nageait à toute vitesse. Meiko cilla, sans réussir à détacher son regard du jeune homme. Ce fut une exclamation de Sakae qui la tira de sa torpeur :
– Ah, Mei, tu t'es décidée à venir ! C'est super !
– Et Joe, qu'est-ce qu'il fabrique, encore ? s'exaspéra Mimi.
– Je crois qu'il n'a pas fini de mettre sa crème solaire, dit Iori.
En effet, Joe achevait un tartinage soigneux qui le faisait paraître plus blanc qu'un tee-shirt passé à l'eau de javel. Il retira ses lunettes et les posa sur la serviette.
– Joe, dépêche-toi un peu ! lui lança Gomamon.
– Voilà, voilà, j'arrive !
– Et Gabumon, où est-il ? demanda alors Palmon.
– Bah, comme d'habitude, il ne veut pas se baigner pour ne pas avoir à enlever sa fourrure, fit Patamon.
– Ah, ce qu'il est bête ! dit Agumon. Si même Meiko vient se baigner, il pourrait faire un effort …
– Que veux-tu, il est aussi têtu que son partenaire, fit Taichi.
– Qu'est-ce que tu viens de dire ? gronda Yamato.
– Rien, rien …
Dès que Joe fut dans l'eau, Takeru arriva avec un ballon.
– Ils en prêtaient à l'hôtel, les informa-t-il. On se met en équipe et on se fait des passes ?
– Ah oui, bonne idée ! approuva Taichi.
– Nous aussi, on peut jouer ? demanda Ryudamon.
– Bien-sûr ! acquiesça Sakae.
– Et les passes depuis les airs, ça compte ? demanda Hawkmon. Piyomon, Tentomon et moi on peut jouer en volant ?
– D'accord, ça compte, accepta Takeru.
– Les filles contre les garçons ? proposa alors Mimi.
– Vous êtes une de moins que nous, lui fit remarquer Daisuke. Tu n'as pas peur de perdre ?
– Pourquoi aurait-on peur ? répliqua Miyako. On va vous montrer ce qu'on vaut, pas vrai les filles ?
– Absolument ! acquiesça Sora.
– Dans ce cas, déclara Taichi, que le meilleur gagne !
La partie fut acharnée : les deux équipes cherchaient à faire le plus de passes possibles à leurs membres sans se faire voler la balle par leurs adversaires, et chacun se prit au jeu. Si Taichi, Daisuke et Ken démontrèrent de l'endurance physique grâce à leur pratique du football, Iori et Takeru firent preuve de bons réflexes. Joe, enfin concentré, avait l'avantage de sa grande taille, tout comme M. Nishijima, ce qui leur permit d'intercepter plus facilement la balle. Les filles n'étaient pas en reste : Sora et Sakae étaient sportives et leur résistance fut à l'épreuve de celle des garçons. Si Miyako manquait parfois d'adresse, elle démontra une détermination presque féroce pour conserver la balle dans son équipe. Hikari et Meiko, stratégiques, surent s'interposer au bon moment. Leurs digimons, exaltés, relayèrent la chaîne avec entrain. Les deux équipes furent à jeu égal pendant plus de vingt minutes, mais les garçons l'emportèrent finalement.
Quand ils quittèrent la plage, un soleil vermillon déclinait sur l'île d'Ishigaki. Ils remontèrent la rue en direction de l'hôtel, la tête vidée et le cœur regonflé d'énergie et d'optimisme.
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En cette nuit sans lune, la frontière entre la mer et la terre d'Ishigaki s'effaçait dans un néant sans profondeur ni relief. Sans le reflux marin qui murmurait au loin, les Enfants Élus auraient pu oublier qu'ils se trouvaient sur une île. Ils avaient dîné au restaurant de l'hôtel puis s'étaient retirés dans leur chambre respective pour prendre du repos. Koushiro avait travaillé d'arrache-pied toute l'après-midi et afin de poursuivre ses recherches, il avait sorti une table basse et un coussin sur la terrasse de la chambre qu'il partageait avec Taichi, Yamato et M. Nishijima pour s'y installer. Yamato alla prendre sa douche et Taichi s'étendit sur son lit, mains derrière la tête. Il coula un regard vers la porte vitrée de la terrasse : le front de Koushiro trahissait une intense concentration. M. Nishijima, assis en tailleur sur un autre lit, suivit le regard de l'adolescent.
– Je me demande bien sur quoi il est en train de travailler.
– Je n'en sais rien, répondit Taichi. Il refuse de m'en parler, mais vue la détermination avec laquelle il bosse, ça doit être quelque chose d'important.
Yamato sortit à ce moment de la salle de bain. Taichi se leva et fit coulissa la baie vitrée :
– Koushiro, tu veux aller te doucher ?
– Merci, j'irai plus tard.
– Il faut que tu te reposes, Koushiro.
– Je me suis reposé dans l'avion, ne t'en fais pas pour moi.
Taichi fronça les sourcils mais n'insista pas. Il referma la fenêtre et glissa dans son lit Yamato et M. Nishijima étaient déjà couchés. Il éteignit la lumière et tâcha de dormir, cependant il ne parvint cependant pas à trouver le sommeil. Les deux derniers jours avaient été mouvementés et les révélations de l'historique troublaient encore ses nuits il tomba dans une somnolence où des images confuses, sans cohérence et violentes l'assaillirent. Il finit par rouvrir les yeux avec la sensation de ne pas s'être reposé, et un mal de tête lui vrillait les tempes. La chambre respirait pourtant le silence et la paix : seule la climatisation perturbait le calme absolu par un ronronnement qui rappelait le grincement de coque des anciens navires. Taichi entendit alors des bribes de voix. Il se retourna et vit que Koushiro, toujours sur la terrasse, passait un coup de fil : en prêtant plus d'attention, Taichi comprit ce qu'il disait.
– Oui, je sais, disait le jeune homme. D'accord, je continue de chercher dans cette direction. Hum … oui, je lui poserai la question, mais j'ignore si elle acceptera. Et sinon, il faudra le faire par nous-mêmes. Oui, c'est le même principe, mais je ne sais pas si nous en avons la capacité. Je le sais bien, mais étant donné qu'il est impossible de la contacter, il faudra nous débrouiller. Hum … oui, bonne nuit, M. Tagaya.
Il raccrocha, tandis que Taichi se levait et faisait coulisser la porte-vitrée. Koushiro, surpris, releva la tête :
– Taichi ? Tu n'arrives pas à dormir ?
– Pas vraiment. C'était au père de Sakae que tu parlais, à l'instant ?
Koushiro pinça les lèvres.
– Oui. Le directeur de l'Agence et moi travaillons à distance sur le même programme.
– Mais enfin, qu'est-ce que c'est que ce programme qui vous prend tant de temps ?
Koushiro fronça les sourcils, hésitant. Finalement, il releva la tête vers Taichi et planta son regard dans le sien :
– Il s'agirait d'un programme … pour ressusciter Meicoomon.
