Chapitre 54 : Le carnet

Driiiing, driiing.

Le bruit strident d'une sonnette me surprit. C'était étrange, ma tête était lourde, le bruit ne correspondait pas à ma sonnette… l'odeur des draps dans lequel j'étais installée me rappelait…

Driiiing, driiiiing.

« Merde ! »

Le corps allongé à mes côtés se leva rapidement et je sentis ses mouvements frénétiques lorsqu'il chercha quelque chose à se mettre.

J'ouvris grand les yeux et trouvais Edward, complètement nu devant sa garde-robe. Il choisit rapidement un t-shirt et un jeans.

« Je suis désolé, j'avais complètement oublié qu'Esmé et Carlisle venaient ! »

Il enfila rapidement un sous-vêtement et ses vêtements. Je rougis en me souvenant de la veille et de ce que j'avais osé faire.

Oh mon dieu ! Ce que j'avais osé faire…

Driiiing, driiiiing.

« J'y vais, prends ton temps. »

Il se dirigea vers la porte mais au lieu de l'ouvrir il se retourna vers moi.

Il sourit.

« Heum… Sers-toi dans mon armoire, si tu le souhaite. Prends ce dont tu as besoin, je suppose que tu n'as pas très envie de les voir avec ta robe d'hier soir. »

Il ouvrit et claqua la porte.

J'étais à présent seule dans son lit et les souvenirs, la culpabilité m'envahirent. Comment j'avais osé faire ça à Sasha ? Lui qui m'aimait, qui était là pour moi… que j'aimais.

Cet… incident ne doit plus se produire. Je dois être claire avec Edward, il fait partie de mon passé, de l'ancienne Bella…

Je suis une personne affreusement égoïste. Comment pourrais-je imaginer un avenir avec Edward alors que Sasha m'attend.

C'était une grosse erreur, je me sens tellement coupable. Je sais que tout est ma faute et que je vais devoir détruire les espoirs de mon amant.

J'entends les voix venant d'en bas et je sais qu'ils s'agitent. Des bruits de casserole et d'assiette se mélangent aux discussions et la politesse voudrait que j'aille les salués.

Je sortis donc, complètement nue, de son lit. Ma culpabilité augmenta davantage. Je me sentais affreusement mal…

Je regardais mon téléphone, aucun message et aucun appel manqués – léger soulagement. Je fus ahurie par l'heure – presque onze heures trente !

Comme il me l'avait proposé, je pris donc soin de choisir des vêtements appropriés dans son armoire. Je trouvais rapidement un jeans style boy-friend qui passait bien, quoique le pantalon soit un peu trop long. Je pris également un t-shirt Levis qui trainait au fond du placard. Il m'allait plutôt bien, il devait être trop petit pour lui. Je rentrais le t-shirt dans le pantalon. J'empruntais également une ceinture afin de tenir le pantalon sur mes hanches.

Heureusement que j'avais pensé à apporter mes indispensables converses avec moi, je ne tiens pas très longtemps en talons. Je cherchais donc une paire de chaussette dans un tiroir.

Au moment où je cherchais de quoi me mettre aux pieds, je tombai sur un carnet. Il était noir et les pages épaisses et jaunies par le temps.

Curieuse, je le pris en main et l'ouvrit. Sur la première page, deux dates y figuraient.

17/06/2003 – 17/06/2013.

Intéressée, je tournais la page. Une date était écrite ainsi qu'un long texte suivait.

17 juin 2004

Voilà maintenant un an que je me pose cette question fatidique, décidant de mon destin. Qui de mieux placer que moi-même pour répondre à cette fichue question, de toute façon ? Ce que je deviendrais dans à présent neuf ans me terrifie. Je ne sais plus quoi penser, à vrai dire.

Des bruits de pas montant les escaliers m'alertèrent et je rangeais rapidement ce cahier dans mon sac à main, sans vraiment y réfléchir je l'avoue.

Quelqu'un toqua à la porte et l'ouvrit.

« Tout va bien ? » me demanda Edward.

« Oui, j'arrive ! »

Il sourit et hocha la tête avant de fermer la porte.

Je soupirais. Il avait dû prévenir de ma présence ici.

J'étais étrangement nerveuse, même si ce n'était pas la première fois que je les rencontrais. Je ne savais pas comment réagir, quoi leur dire et ce qu'ils allaient me poser comme questions.

De toute façon, je suis avec Sasha, je vais leur dire ça. Ouais, comme ça ils ne croiront pas que quelque chose se passe entre Edward et moi. Lui et moi c'est du passé, c'était sympa hier (sympa ? c'était le meilleur coup de ma vie !) mais… c'est fini.

Je mis mes chaussures. Je rangeais toutes mes affaires (robe, escarpins) dans mon sac et sortis de la chambre. Heureusement que j'avais prévu un sac assez grand !

Je descendais les escaliers, timide. Je profitais pour la première fois des décorations et de la belle maison. Tout était tellement beau, de grands tableaux décoraient les murs, tantôt bleu pétrole, tantôt gris galet. Très esthétique.

L'escalier était en bois blanc.

Arrivée en bas, je fus frappée par la grandeur de la pièce. Tout était ouvert et éclairé. J'arrivais directement dans la cuisine où se trouvaient Edward, Esmé et Carlisle. Je pouvais sentir les œufs et le bacon grillé. Il préparait le petit déjeuné.

Il s'agissait d'une belle cuisine moderne en noir et bois. Ses parents étaient installés au bar qui séparait la cuisine de la salle à manger, également noire et marron.

En face, se trouvait le salon. Le fauteuil rouge contrastait bien avec la couleur sombre des deux pièces précédentes et donnait du charme, de la douceur et de la vivacité. Les murs étaient gris perle.

Esmé et Carlisle, installés sur le bar de la cuisine, buvaient un café. Ils avaient tellement changé, j'en fus étonnée. Des rides avaient pris place sur leurs fronts et leurs yeux, ils semblaient plus fatigués et étrangement plus fragile.

Je m'arrêtais en bas des escaliers et les saluaient maladroitement. Lorsqu'Edward me vit, il me fit un énorme sourire et ma culpabilité l'emporta encore une fois.

« Bella ! Tu as tellement changé, tu es si belle ! » me dit Esmé en me prenant dans ses bras.

Cette proximité me rappelait des souvenirs heureux et je lui rendis son embrassade, sans aucune gêne.

« Merci, ça me fait tellement plaisir de vous revoir après tout ce temps. »

« Alors, que deviens-tu ? »

J'expliquais donc brièvement mes aventures des dernières années, expliquant également comment j'étais tombé sur Edward totalement par hasard.

Ce dernier me proposa une assiette d'œuf brouillé avec deux tranches de bacon, que j'acceptais avec grâce.

Je mangeais et parlais avec Esmé et Carlisle. Ces derniers vivaient toujours à Concord dans leur grande maison. Esmé avait pris sa retraite mais Carlisle voulait encore travailler en tant que médecin traitant. Il prenait des rendez-vous à domicile.

« Tu habites loin d'ici, Bella ? » me questionna Esmé.

« Seulement à trente minutes de voiture, je pense. S'il n'y a pas de bouchons, évidemment. »

« Tu es dans un bon quartier ? » s'enquit Carlisle.

C'était adorable la manière dont ils faisaient toujours attention à moi, comme si jamais je n'avais quitté leur famille.

« Assez bon. J'y vis avec mon petit-ami depuis un moment donc… »

Au moment où je prononçais le mot « petit-ami » un bruit strident d'un verre se fracassant sur le sol résonna dans la pièce, suivit immédiatement d'un juron étouffé.

« Ton petit-ami ? » répéta Esmé.

« Je… »

« Merde, non, Sox, ne reste pas là ! »

« Miaou. »

Tout à coup, un chat noir avec deux tâches blanches sur les pattes avant fit son apparition dans la cuisine. Je ne m'y attendais pas, jamais Edward ne m'avait dit qu'il avait un chat.

« C'est ton chat ? » demandais-je.

« Oui. » me répondit-il, froid, tout sourire envoler.

Edward se dépêcha de ramasser les morceaux de verres avant que son chat ne se blesse avec. Pendant ce temps, j'expliquais à Esmé ma situation.

Sasha et moi sommes ensemble depuis trois ans, nous habitons ensemble, il travaille comme professeur à l'université et est actuellement en pleine recherche pour l'un de ses cours.

Edward et Sox étaient très engagé dans une conversation (ou plutôt monologue) murmurée. Ce chat faisait d'étranges câlins à son maitre, cachant sa petite tête dans son cou. J'aperçu également que le bout de sa queue était blanc.

« Tiens, Edward, tu as adopté ce chat ? » demanda soudainement Esmé.

Il rit franchement.

« C'est elle qui m'a adoptée ! »

« Comment tu l'as eue ? » demandais-je.

Il soupira.

« Je venais d'emménager dans cette maison. Ça faisait vraiment deux ou trois jours que j'y habitait, pas plus. J'ai entendu un miaulement étrange venant des égouts dans la rue en face. C'est là que je l'aie vue, toute petite et apeurée. Je l'ai attrapée – non sans mal – et l'ai rentrée ici pour la nourrir. Elle n'a jamais voulu partir, je crois. Pourtant, je lui laisse toute la liberté qu'elle veut ! » sourit-il. « Elle adore dormir sur le piano, » finit-il.

Je contemplais le piano, le même que chez les Cullen je présumais, désormais sous les escaliers dans une petite alcôve de cette maison.

Les minutes passaient rapidement. Je sentais Edward plus froid et tendu que d'ordinaire depuis que j'avais parlé de Sasha. Je m'en voulais encore, je voulais qu'il sache que ce n'était rien, que hier soir ne valait rien pour moi mais je ne voulais pas lui faire de mal.

Je suppose que le dire ainsi à Esmé lui a fait autant de mal que si je lui avais dit clairement qu'il n'était qu'un coup d'un soir sans intérêts. Mais, au fond de moi je sais que c'est un mensonge.

Vers treize heures, je dis devoir partir pour travailler. Mon patron était d'accord pour que je travaille à la maison finir les corrections de ce livre mais il veut absolument que j'aie fini demain donc j'ai encore du travail.

« Je te ramène, » me dit Edward.

« Pas la peine, je peux prendre le métro et… »

« Bella, j'insiste. »

J'abdiquais. Lui, il ne changera jamais. Il méritait une fille bien, pas une fille qui se joue de lui comme moi…

Cependant, il restait froid et particulièrement distant avec moi.

Je saluais Esmé et Carlisle, promettant de les voir dès que possible. J'essayais de caresser Sox mais elle m'évitait. Edward haussa simplement les épaules, me disant qu'elle était étrange parfois.

Personnellement, je pense qu'elle a simplement lu dans mes pensées et qu'elle a su que j'allais faire du mal à son maitre.

Arrivée dans la voiture, j'indiquais mon adresse à mon ex petit-ami. Son visage neutre me terrifiait, je ne savais pas ce qu'il pensait et ça me rendait nerveuse.

A la manière dont ses mains tenaient le volant et dont sa mâchoire se contractait, je savais qu'il était en colère. Furieux, peut-être même.

Arrivés devant ma porte, je voulus sortir rapidement mais il m'arrêta avant même que j'aie bougé.

« C'était quoi, ça ?! » exigea-t-il.

Je le contemplais, pantoise. Comme il ne continuait pas, je répétais, timide.

« Quoi, ça ? »

Il prit une longue inspiration, regardait droit devant lui. Ses yeux étaient électriques, il était vraiment furibond.

« Tu vas rester avec lui ? Après ce qu'il s'est passé hier ? Entre nous ? » s'énerva-t-il.

Je voulu protester mais il reprit la parole.

« Ne me dit pas que tu ne te souviens pas, ou que ce n'est pas toi qui l'as voulu ! »

« Je… non, je… »

« Alors quoi ! »

« C'était juste une fois, pour s'amuser. »

« Ah oui ? Tu fais souvent des coups d'un soir comme ça, pour t'amuser ? »

« Parfois… je… » répondis-je, troublée.

« Tu trompes souvent ton copain alors ? Ah ! L'amour fou entre vous, je vois ! »

« Ne dit pas ça ! Non, je ne l'ai jamais trompé » m'énervais-je également.

« Alors pourquoi ? Merde, Bella, je t'ai dit qu'on faisait une grosse erreur et Tu. Ne. M'a. Pas Arrêter ! » cria-t-il.

« Je ne voulais pas que tu arrêtes ! » criais-je à mon tour.

« Ca ne signifie donc absolument rien pour toi ? »

J'expirais bruyamment, je n'étais pas si crédule. Je savais très bien qu'il ne parlait pas que de hier soir – il parlait de notre relation en générale. Comme si je ne l'avais jamais aimé !

C'est bien ce qu'il m'avait dit, le soir de notre rupture, non ? Ne m'as-tu jamais aimé ?

Edward… tu as donc toujours douté de mon amour ?

« Et comment tu veux que je le sache, hein ? Ce n'est pas moi qui aie eu une relation de sept ans après toi ! Tu es sortie avec cette fille, absolument sublime, tandis que moi, maintenant, j'ai un copain et tu veux tout foutre en l'air ! »

« Elyanna et moi, c'est terminé ! Je ne l'ai jamais trompée, je ne me suis jamais amusé comme toi apparemment ! Et, tu as déjà tout foutu en l'air dans ton propre couple. Toute seule, comme une grande ! »

« Et si tu avais encore été avec Elyanna ? Tu vas me dire que tu n'aurais pas réagis de la même manière ? Que tu m'aurais quitté pour elle ? »

« Si tu savais tout ce que j'aurai fait pour toi ! » argumenta-t-il tandis que je claquais la porte de sa voiture.

Je ne voulais pas en entendre davantage. Une fois la porte fermée, il partit en un grincement de pneus.

Tremblante, j'essayais d'entrer dans mon immeuble, d'ouvrir la porte de mon appartement. Une fois à l'intérieur, je m'écroulais sur le fauteuil.

J'étais en pleur.

Ma dispute avec Edward avait été violente. Je lui avais fait tellement de peine, je m'en voulais terriblement. J'avais tout détruit, il avait raison. J'avais trompé Sasha, il m'avait demandé d'arrêter, il m'avait dit que nous faisons une erreur !

J'avais été têtue et je l'avais perdu. A nouveau. A jamais.

J'étais anéantie.