DISCLAIMER : Attention, ce chapitre parle explicitement du deuil et sur toutes ses conséquences. Plusieurs scènes en particulier peuvent vous mettre mal à l'aise si vous y êtes sensibles.
Dix minutes plus tard, Bridgette était de retour au lycée. Contraints de se séparer à cause du temps qui commençait à leur manquer du fait de leur transformation qui prenait fin, Ladybug et Chat Noir s'étaient promis de se retrouver le lendemain pour discuter plus calmement de la situation et des nouvelles attristantes qui n'allaient pas tarder à tomber.
La jeune fille, la boule au ventre, parcourait maintenant les couloirs du lycée en courant, filant droit vers la salle de musique sans se retourner. Elle était passée devant de nombreuses salles de classe dans lesquels certains pompiers étaient restés, tentant d'apporter leurs secours à certaines personnes. Elle avait entraperçu les jambes d'un professeur, mais également celles de certains élèves. Haletante, elle se refusa de s'arrêter, les joues baignées de larmes.
Jehan et Andréa devaient s'en être sortis. Il n'y avait pas d'autres choix. Ils ne pouvaient pas être partis comme ça. Pas aujourd'hui. Pas maintenant.
Pas à cause d'elle.
Enfin, elle arriva au bout du chemin, déboulant dans la salle de musique en ouvrant violemment la porte qui était jusque-là entrouverte. À travers ses larmes, elle put voir ses deux amis, assis sur le sol, en compagnie de Priam et David qui avaient été les premiers à venir les chercher pour s'assurer de leur état.
Essoufflée, elle les regarda tous, sans rien dire. Ils étaient là, bien vivants. En proie à une nouvelle crise de larmes, Bridgette se jeta dans les bras de Jehan, attrapant la main d'Andréa au passage, pour la faire se rapprocher d'elle. En un souffle, le grand métis referma son bras gauche autour de son amie, passant le droit dans le dos d'Andréa tandis que la jeune fille imitait son geste en passant sa main droite dans le dos de Bridgette. Agrippée au pull du jeune homme, cette dernière sanglotait lourdement, le serrant étroitement contre elle. Elle évacuait tout le stress et la peur qu'elle avait accumulé durant cette journée, incapable de se retenir. Sa gorge et son estomac la brûlaient, de soulagement autant de frustration car elle savait que tout n'était pas terminé.
Sans bouger, les jeunes gens entendirent des pas affolés dans les couloirs puis purent voir Félix apparaître dans l'encadrement de la porte, échevelé et haletant. Quand il vit à son tour qu'Andréa et Jehan étaient sortis d'affaire, le garçon s'autorisa à pousser un long soupir de soulagement en passant sa main sur son visage puis dans ses cheveux. Il avança dans la salle avant de se laisser glisser contre le mur, épuisé, se pinçant l'arête du nez en reprenant peu à peu son souffle.
Silencieusement, David et Priam le rejoignirent pour s'assoir à ses côtés, un petit sourire peiné sur les lèvres. Il les regarda en répondant légèrement à leur sourire avant de tourner les yeux vers Andréa et Jehan qui le fixaient, les yeux brillants. Il leur fit un petit hochement de tête puis posa ses yeux sur Bridgette qui continuait de pleurer doucement, ses sanglots emplissant le vide de l'espace. La voir ainsi lui serrait le cœur : il était soulagé de voir que tout le monde allait physiquement bien mais il n'ignorait pas le fait que l'attaque du jour allait laisser des dégâts psychologiques très lourds, surtout que lui aussi avait repéré les personnes qui gisaient encore au sol, même après le Miraculous Ladybug, ce qui n'était définitivement pas une bonne nouvelle.
C'était même une terrible nouvelle.
Après un long moment sans oser bouger, Bridgette avait finalement accepté de se relever et de se diriger vers la sortie, soutenue par ses camarades qui l'avaient entrainé au dehors, l'air tout aussi abattu qu'elle.
La jeune fille, incapable de soutenir les cavalcades des pompiers qui s'affairaient toujours autour des corps inanimés, avait fermé les yeux et placé ses mains sur ses oreilles, de nouvelles larmes inondant son visage, toujours lové contre Jehan qui avait passé son bras autour de ses épaules.
Une fois sur le parvis, la jeune fille se précipita vers ses autres camarades de classe, rassurée de voir que tout le monde allait bien. Félix avait même pris sur lui de s'avancer vers Camille, assise sur un des brancards des camions de pompiers, à côté duquel se tenait Sarah. Les jeunes gens avaient échangé quelques mots, sans se répandre en sentiment, simplement soulagés que tout soit terminé. Félix remarqua que Camille avait perdu l'éclat habituel qui brillait dans ses yeux, cet air de malice qui la poussait toujours à chercher les ennuis.
Elle aussi semblait avoir compris la gravité de la situation.
Alors qu'il commença à s'éloigner, ne tenant pas à rester près de la jeune blonde plus longtemps que nécessaire, un crissement de pneus résonna sur le parvis. Une longue berline venait de s'arrêter le long du parvis, de laquelle s'extirpa précipitamment André Bourgeois qui courut vers l'ambulance dans laquelle était assise sa fille, la prenant dans ses bras en laissant échapper un profond soupir de soulagement.
Félix hocha légèrement la tête avec un petit sourire avant de s'éloigner, les mains dans les poches de son pantalon. Il se rendit soudain compte qu'il n'avait pas pensé un seul instant à prévenir son père, mais que lui non plus n'avait pas cherché à le joindre. Aucun appel ni message de leur part, ni pour l'un ni pour l'autre. Il soupira doucement : ils s'étaient promis de faire des efforts mais visiblement, la tâche semblait plus ardue qu'il ne l'avait pensé.
Le garçon était plongé dans ses réflexions quand il repéra, en relevant les yeux, la berline noire que conduisait habituellement son chauffeur. Mais, en plissant légèrement les yeux, il remarqua que le gorille n'était pas le seul passager du véhicule et qu'en sortirent aussitôt Nathalie et surtout Gabriel, qui se dépêcha de s'avancer sur le parvis, en évitant consciencieusement toutes les personnes qui gravitaient autour de lui.
Félix resta figé de stupéfaction. Que faisait-il ici ? Était-il venu le chercher ou sa présence était-elle due à une toute autre raison ?
Dès que leur regard se croisèrent, Gabriel pressa le pas dans sa direction. Le jeune homme remarqua aussitôt le regard suspicieux et inquiet de son père, ce qui était très inhabituel chez lui. S'arrêtant à un pas de sa position, il continua de le scanner sans le toucher pour ensuite laisser échapper un petit soupir en fermant les yeux.
-« Tu n'as rien… Bon sang… Quand j'ai appris ce qui était arrivé ici… » murmura Gabriel en se pinçant l'arête du nez.
L'homme d'affaire regarda autour de lui, posant ses yeux gris clair sur les camarades de classe de son fils avec un léger froncement de sourcils tandis que Félix se remettait à peine du choc de le voir ici.
-« P-Père… ? Qu'est-ce que vous… »
-« Nous rentrons Félix, immédiatement. » tonna Gabriel en faisant volte-face.
L'adolescent le regarda s'éloigner quelques instants avant de se tourner vers ses camarades, rassemblés tous ensemble à quelques mètres de là. À son grand soulagement, il put voir que tout le monde était bien présent, ce qui signifiait que personne n'avait succombé à l'attaque d'aujourd'hui. Priam et ses camarades venus prêter main forte étaient toujours là eux aussi, discutant avec les autres jeunes gens. Mais quand il posa ses yeux sur Bridgette, dont le visage était encore baigné de larmes, Félix sentit la nausée lui retourner l'estomac. Il ne savait pas pourquoi voir son amie pleurer ainsi l'atteignait tant, ni pourquoi il avait ressenti le même genre de sensation en réconfortant Ladybug qui avait éclaté en sanglots, mais cela ne lui plaisait pas du tout.
Il n'avait même pas eu l'occasion de discuter avec sa camarade depuis la fin de l'attaque, avoir une chance de la réconforter, du mieux qu'il le pouvait. Mais le regard impatient de son père le dissuada de désobéir. Il regarda Jehan quelques instants, qui hocha la tête avec un signe de main, lui signifiant silencieusement qu'il avait bien compris la situation.
Félix lui répondit puis suivit son père, non sans un dernier regard à Bridgette qui ne l'avait même pas remarqué.
De retour chez elle après une longue discussion et des embrassades qui n'en avaient plus fini, Bridgette s'était jeté dans les bras de ses parents, sanglotant en les serrant contre elle, cherchant l'étreinte réconfortante qui lui avait manqué tout l'après-midi. Mais une fois remontée dans sa chambre, Sabine et Tom lui ayant vivement recommandés de se reposer après cette éreintante journée, la jeune fille sentit monter en elle un malaise incontrôlable.
Tikki, s'envolant de la sacoche de sa porteuse, la vit s'engouffrer avec précipitation dans la salle de bain et se pencher au-dessus des toilettes pour vomir ce qui lui restait de son déjeuner et des gâteaux que Roxane l'avait forcé à manger au sortir du lycée, la trouvant trop pâle.
La jeune fille se laissa ensuite tomber sur le sol de la salle de bain, pleurant en cachant son visage. La kwami, avec une mine contrite, s'approcha de l'adolescente pour se presser contre sa joue.
-« C'est de ma faute Tikki… murmura la jeune fille d'une voix rauque, abîmée par les cris et les pleurs. Tout est de ma faute… Ils sont tous morts à cause de moi… »
-« Non Bridgette, rien n'est de ta faute. Pense à toutes les personnes que tu as aidées aujourd'hui. Pense aux centaines de civils que tu as sauvé ! »
-« Ils avaient mon âge… Ils avaient toute la vie devant eux, c'est tellement injuste… » souffla-t-elle d'une voix étranglée en se recroquevillant sur elle-même.
Même si elle n'avait pas voulu y croire au début, elle savait maintenant de source sûre qu'au moins trois de leurs camarades et un de leur professeur avaient été tués au lycée Françoise Dupont, et dans toute la capitale, le bilan continuait de s'alourdir de minutes en minutes.
Longtemps, la jeune fille resta là, asséchant ses yeux des dernières larmes qui leur restaient. Mais assez vite, Bridgette se mit à frissonner entre ses larmes.
-« Bridgette, tu ne peux pas rester là, insista Tikki, tu vas attraper mal si tu restes allongée sur le carrelage froid. Tu devrais aller prendre une douche, ça te fera du bien. »
Après quelques protestations de la jeune fille qui n'avait même plus la force de se lever, elle se résigna à suivre les conseils de sa petite camarade. Lentement, elle retira ses vêtements puis les élastiques qui retenaient ses cheveux avant d'entrer dans la baignoire et faire couler l'eau. Elle laissa l'eau ruisseler sur sa peau sans bouger, de nouvelles larmes se mélangeant avec les gouttes qui lui tombaient dessus.
Tikki l'aida silencieusement à se laver avant de lui apporter une serviette. Une fois séchée, l'adolescente passa ses habits de nuit puis s'assit devant sa coiffeuse. Les cheveux encore humides cascadant sur ses épaules, elle osa se regarder quelques instants dans le miroir. Elle était pâle, ses yeux cernés et sa peau tirée. En quelques heures, elle avait pris dix ans d'âge. Alors que Tikki tentait maladroitement de lui peigner les cheveux, manipulant une brosse bien trop grande pour elle, Bridgette éclata de nouveau en sanglots. La kwami s'empressa de venir se frotter contre sa joue, tentant de la réconforter du mieux qu'elle le pouvait.
Un long quart d'heure s'écoula sans que la jeune fille ne puisse se relever. Puis, tout doucement, elle réussit enfin à gravir les escaliers de sa mezzanine pour s'effondrer sur son lit, éreintée. La fatigue la terrassa presqu'immédiatement et alors que le soleil se couchait à peine derrière l'horizon, Bridgette sombra dans un sommeil noir, sans rêve.
Tikki s'appliqua à recouvrir sa porteuse des draps qu'elle avait à peine soulevé en s'allongeant avant de se poser sur l'oreiller juste à côté d'elle, l'observant quelques instants avant de fermer à son tour les yeux.
Si Bridgette s'était endormie à peine une fois dans son lit, ce ne fut pas le cas de Félix qui passa sa nuit à se retourner, incapable de trouver le sommeil. Après une longue discussion avec son père, qui avait initialement prévu de le retirer du lycée, les événements d'aujourd'hui étayant sa thèse comme quoi il ne serait jamais plus en sécurité que chez lui, Félix avait réussi à le raisonner en lui répondant qu'il ne pourrait accepter une telle situation.
La discussion avait été mouvementée et le ton était monté plusieurs fois, mais l'adolescent avait refusé de se laisser faire. Il s'était retrouvé en danger de mort, il ne pouvait le nier, mais il ne pouvait pas se résoudre à abandonner ses camarades à un moment où la solidarité était de mise. Félix s'était par la suite enfermé dans sa chambre pour ne plus en sortir, faisant les cents pas, sous l'œil vigilant de Plagg qui n'avait pas osé dire quoi que ce soit depuis leur retour à la maison.
Jehan l'avait contacté, plus tard dans la soirée, les deux jeunes hommes échangeant sur leurs ressentis. Félix avait pu entendre la voix de son camarade trembler, bien qu'il lui ait assuré plusieurs fois qu'il allait bien, et qu'il aurait simplement besoin de quelques jours pour s'en remettre.
« Je suis vivant, et rien que pour ça déjà, je suis reconnaissant. » avait-il dit.
Cependant, il n'avait pas eu le courage d'écrire à Bridgette sur son téléphone portable. Félix avait attendu un signe de sa part, un appel, un message peut-être mais rien. Et comme un lâche, il n'avait pas osé faire le premier pas. Qu'aurait-il pu lui dire de toute façon ? Lui aurait-elle répondu ? Dans l'état dans lequel elle était quand il l'avait quitté, elle n'en n'aurait certainement pas eu la force.
Le garçon s'était ensuite couché, pensant que le sommeil parviendrait à l'apaiser quelque peu mais cette nuit-là, Morphée ne voulut pas de lui. Ses pensées se mirent donc à vagabonder, pensant beaucoup à tous ces gens au dehors qui devaient pleurer les leurs, vers ses camarades qu'il avait quittés un peu trop brutalement, à l'appréhension de la journée du lendemain qui allait être sans nul doute tout autant chargée en émotion, à Bridgette qu'il imaginait effondrée dans sa chambre, et souvent à Ladybug.
En revoyant le visage de sa coéquipière en larmes, le cœur de l'adolescent se serra un peu plus. Il s'en voulait terriblement de ne pas avoir pu en faire plus. Elle souffrait tout comme lui de la situation, peut-être encore plus, et il s'en voulait amèrement pour cela.
-« Comment avons-nous pu en arriver là… ? » murmura le jeune homme avant de passer sa main sur son visage.
-« Ce n'est pas de votre faute, répliqua Plagg, roulé en boule sur l'autre oreiller du grand lit. Vous avez fait de votre mieux. Pour le reste, vous n'y pouvez rien. »
-« Jamais je n'aurais pensé que nous allions un jour nous retrouver dans une telle situation… » soupira Félix en se tournant vers son compagnon.
-« Je sais, mais ça ne sera peut-être pas la dernière fois malheureusement, répondit Plagg d'un ton morne en venant se poser sur l'épaule de son porteur. Vous ne pouvez pas prévoir ce genre de chose. C'est arrivé c'est tout. C'est triste, mais c'est comme ça. Vous n'auriez rien pu faire d'autre de toute façon. »
-« … C'est tellement injuste. » souffla Félix en regardant vers la grande baie vitrée de sa chambre.
-« Bien sûr que ça l'est, argua Plagg sans agressivité. Crois-moi, ce n'est pas la première fois que je vois ce genre de drames se produire, et c'est souvent les innocents qui trinquent le plus. »
-« Tu as déjà vécu des situation similaires ? »
-« J'ai plus de 5 000 ans gamin, tu crois vraiment que j'aurais pu vivre aussi longtemps sans affronter le moindre conflit ? C'est votre activité préférée à vous les humains de vous faire la guerre je te rappelle. »
-« C'est vrai, j'oubliais… Pardonne-moi. »
Le kwami releva les yeux, intrigué. Habituellement, Félix se serait défendu de cette pique, mais là, rien. Et le jeune homme s'était même excusé. Sans qu'il ne le verbalise, Plagg pouvait sentir le profond malaise de son porteur. Et bien qu'il essayait de le faire relativiser du mieux qu'il le pouvait, le kwami savait que la conversation n'était pas son point fort.
-« Il faut dormir, déclara-t-il en se posant sur le ventre de Félix pour se rouler de nouveau sur lui-même. Tu auras tout le temps de ruminer demain, et tu vas avoir besoin d'énergie pour ça. Alors maintenant, tu dors. » tonna Plagg en regardant son porteur de ses yeux vert perçants avant de les refermer.
Félix regarda son petit camarade d'un air étonné avant d'esquisser un léger sourire. Ce genre de proximité n'était pas habituelle chez eux, mais elle était loin d'être désagréable. Le jeune homme avait bien remarqué les efforts qu'avait fait son kwami depuis la fin de l'attaque, renonçant à lui demander sa ration de camembert dès sa détransformation et ne se fendant d'aucune remarque désobligeante durant toute la soirée. Il osa caresser du bout de son index la tête de son petit compagnon avant de soupirer.
-« Bonne nuit Plagg. » murmura le jeune homme en fixant le plafond, les mains croisées sur son abdomen.
Le lendemain matin, le soleil était resté timidement caché derrière les nuages. Comme à son habitude, Bridgette s'était levée, lavée, coiffée, habillée, mais sans son entrain habituel. Elle n'avait pas effectué sa routine matinale avec sa gaieté qui éclairait normalement son visage.
En descendant prendre son petit-déjeuner, croquant à peine dans le croissant que lui avait apporté sa mère, Sabine avait essayé de la convaincre de rester à la maison, lui faisant remarquer qu'elle n'était pas dans son état normal et qu'une journée supplémentaire de repos ne serait pas de trop.
Mais tâchant de se montrer convaincante et rassurante, Bridgette insista pour se rendre au lycée. Elle appréhendait ce qui allait arriver, ignorant ce qu'elle allait trouver en arrivant sur les lieux, mais elle tenait à le faire. Elle voulait être présente, manifester son soutien, même si elle ne faisait qu'acte de présence.
C'est donc d'un pas lent mais déterminé que la jeune fille s'était dirigée vers son établissement scolaire.
En pénétrant dans la cour, tout était étrangement calme, comme figé dans le temps. Elle pouvait voir ses camarades autour d'elle, comme d'habitude, mais les traits étaient tirés, les mines graves et on parlait à voix basse, comme pour accentuer la gravité de la situation.
Bridgette continua d'avancer avant de repérer, dans un coin de la cour, les élèves de l'autre classe de terminale du lycée, ceux qui étaient en sortie la veille. Elle ne les connaissait pas très bien, elle avait simplement sympathisé avec les trois camarades de Jehan qui faisaient partie de son club de musique. Et après quelques pas justement, elle reconnut les visages de Sasha, Anatole et Nina, au milieu de leurs camarades de classe.
Mais en s'approchant, elle comprit que quelque chose n'allait pas. Sasha était assis le long du mur, replié sur lui-même, ses bras entourant sa tête et ses genoux tandis que Nina et Anatole, ainsi que les autres jeunes gens, tentaient de le rassurer en discutant vivement.
Bridgette fronça légèrement les sourcils, se sentant trop fébrile pour aller demander ce qu'il se passait, quand elle sentit un bras entourer ses épaules. Elle releva les yeux vers Jehan qui venait de se positionner à sa gauche, la serrant contre lui. Le garçon avait le regard rivé sur ses camarades, l'air grave.
-« L'akumatisé d'hier… C'était leur guide au musée. Sasha… a fait l'imbécile et a attisé sa colère. »
-« Oh… murmura Bridgette en se tournant vers le rouquin qui sanglotait. Je vois. C'est… Je ne sais pas ce qu'il a fait exactement, mais ce qui est arrivé… Ce n'est pas de sa faute. »
-« Bien sûr que non, acquiesça Jehan. Mais il se sent responsable, ce qui peut se comprendre en un sens. »
Bridgette baissa les yeux. En tant que Ladybug, elle se sentait déjà responsable de ce qui était arrivé à tous les parisiens qu'elle n'avait pas pu sauver avec le Miraculous Ladybug, alors elle ne pouvait pas imaginer ce que devait ressentir ce jeune homme s'il était effectivement à l'origine de la colère du guide du musée qui avait permis au Papillon de l'akumatiser.
Elle savait que le seul véritable responsable du malheur qui frappait la capitale était le super vilain, mais il était pourtant difficile de s'en convaincre.
Le grand métis serra davantage sa camarade contre lui, taisant le fait qu'il avait appris hier soir, par Nina, que Sasha avait tenté de se tuer lorsque la nouvelle de la mort de certains de leurs camarades au lycée s'était mise à circuler. Il voulait la protéger, à tout prix.
Les deux amis se regardèrent avant que Jehan n'entraîne Bridgette à sa suite, ne tenant pas à la laisser seule. Ils furent bientôt rejoints par Roxane, Johana et Kilian, puis par Lila, David, Sullivan et Myriam et enfin par Andréa.
Bridgette était si profondément plongée dans ses pensées qu'elle ne remarqua même pas le regard timide mais gorgé d'émotion qu'échangèrent Jehan et Andréa, se regardant de longues secondes avant de tourner les yeux.
Félix arriva à son tour dans la cour au moment où ses camarades commençaient à grimper les marches pour rejoindre leur classe. Le garçon avait de nouveau longuement parlé avec son père, insistant sur le fait qu'il se tenait à être présent aujourd'hui, malgré le fait que Gabriel voulait qu'il reste se reposer et se remettre de ses émotions.
Mais le jeune homme savait que sa place n'était pas chez lui. Trop longtemps il avait enduré la peur, le chagrin et le deuil, seul. Aujourd'hui, il voulait être là pour les autres. Inspirant longuement en serrant la hanse de son sac dans son poing, il put voir Camille arriver puis se placer à côté de lui. Les deux jeunes gens échangèrent un regard avant que l'adolescent ne désigne leur salle de classe d'un mouvement de menton. Camille baissa les yeux avant de suivre son camarade, dans un silence très inhabituel chez elle.
La sonnerie annonçant le début de la journée n'avait pas encore retenti et pourtant, tout le monde était déjà là. Inclinant légèrement la tête, Félix salua ses camarades avant de rejoindre son pupitre, non sans un regard vers Bridgette. Assise à sa place, elle semblait hors de son corps, son esprit flottant loin d'ici. Elle était pâle et les cernes sous ses yeux lui donnaient un air maladif. Elle tenta de lui sourire malgré tout, quand leurs regards se croisèrent, de manière la plus convaincante.
Félix la regarda faire sans rien dire avant de s'assoir, frustré. Il ignorait quel était ce sentiment d'avoir besoin de l'aider, de lui remonter le moral. Pourquoi est-ce que ne plus la voir sourire l'énervait tant ? Il se pinça l'arête du nez en soupirant. Il devait être fatigué, voilà tout.
Camille entra à son tour dans la salle de classe, ce qui fit retourner ses camarades, cessant leurs bavardages pour scanner la jeune fille. Sarah, assise à sa place, se leva aussitôt mais Camille lui fit un signe de main, lui sommant de ne pas avancer. Avec un soupir, elle se plaça devant le bureau de Mlle Bustier, le regard toujours baissé avant de soupirer une dernière fois.
-« Je ne vais le dire qu'une seule fois, alors vous avez intérêt à bien écouter. » somma la jeune Bourgeois en posant son regard bleu ciel sur l'assemblée devant elle.
Un petit silence tendu s'en suivit. Kilian et Sullivan avaient froncé leurs sourcils, prêts à bondir à la moindre remarque désobligeant tandis que les autres se contentaient de regarder Camille avec une certaine surprise. La jeune blonde serra les poings et les dents, comme si ce qu'elle s'apprêtait à dire la faisait physiquement souffrir.
-« … Merci… de m'avoir secouru hier… et… de ne pas m'avoir abandonné à mon sort. » murmura-t-elle d'une voix à peine audible.
Puis, le visage légèrement rouge, la jeune fille se redressa pour filer à sa place avant de croiser bras et jambes, les yeux clos. Ses camarades se regardèrent, surpris, avant de se tourner de nouveau Camille avec un sourire. Ils savaient que la jeune Bourgeois ne se retiendrait pas très longtemps, mais ses remerciements indiquaient qu'ils allaient être tranquille pendant un petit moment.
La sonnerie retentit et Mlle Bustier apparu à son tour dans la salle. Alors que tout le monde rejoignait sa place, un lourd silence tomba dans la pièce. La professeure regarda ses élèves quelques instants, un sourire triste sur le visage, avant de prendre la parole.
-« … Pour commencer, je veux vous dire que je suis soulagée et heureuse de tous vous retrouver aujourd'hui. Vous n'étiez pas obligés de venir, mais vous êtes tous là, merci. Le… murmura Mlle Bustier avant de s'arrêter, la voix coupée par l'émotion. Une importante réunion d'administration s'est tenue tôt ce matin et M. Damoclès nous a demandé d'être le plus transparent possible sur ce qui est arrivé et… des personnes qui… nous ont quitté hier. »
En prenant une profonde inspiration, la jeune professeure récupéra une feuille volante de son sac. Bridgette ferma aussitôt les yeux, les mains crispées sur le bureau. Elle n'avait pas besoin de lire ce document pour savoir ce qu'il contenait.
Lentement, Mlle Bustier se mit à lire, énonçant les noms des six victimes de l'attaque d'hier, cinq élèves d'une même classe de première et leur professeur de science. En entendant Roxane éclater en sanglots à l'annonce du nom d'une camarade qu'elle connaissait bien, Bridgette ne put retenir ses larmes elle non plus. Andréa s'approcha d'elle pour la prendre dans ses bras tandis que Félix et Jehan échangeait un regard triste. Mlle Bustier laissa ensuite passer un petit moment de silence, essuyant ses joues en essayant de rester la plus humble possible avant de reprendre d'une voix tremblante.
-« Ce qui est arrivé hier est une véritable tragédie et j'aimerais qu'aujourd'hui, nous puissions en parler librement. Nous sommes tous attristés, certains d'entre vous seront sûrement en colère. Mais nous devons rester soudés et surtout ne pas céder à la haine et c'est pourquoi je souhaiterais que vous exprimiez tout ce que vous avez sur le cœur, si vous en avez envie. »
L'heure qui suivie fut accompagnée de quelques discussions, de grands silences et surtout de beaucoup de larmes qui ne cessaient pas de couler. Repliée sur son banc entre Andréa et Jehan qui avait décidé de se déplacer pour soutenir sa camarade, Bridgette n'arrivait plus à s'arrêter de pleurer. Elle avait essayé d'être forte. Elle avait essayé de tenir bon. Mais entendre que 5 personnes de son âge avaient péris dans son école et que dans toute la capitale, le bilan s'élevait à 126 personnes, dont une trentaine de jeunes gens, avait fait s'envoler ses résolutions.
La peine lui brûlait l'intérieur de la cage thoracique et les pleurs la fatiguait énormément, mais c'était plus fort qu'elle.
En outre, Bridgette n'avait jamais eu à ressentir la solitude que pouvait entraîner son rôle de Ladybug. Bien sûr, elle avait Chat Noir avec qui elle pouvait partager ses ressentis, mais rien de sa vie privée. Et ses camarades ne pouvaient pas savoir qu'elle était l'héroïne de Paris, ce qui l'empêchait de communiquer totalement sur ses peurs et ses appréhensions.
Mais malgré ces inconvénients, la jeune fille n'avait jamais vraiment souffert des secrets qu'elle devait absolument garder en tant que Ladybug.
Sauf aujourd'hui. L'adolescente se sentait brûler de l'intérieur tant l'interdit de dire à Jehan, à Andréa, à Félix, à tout le monde ici à quel point elle se sentait responsable de ce qui était arrivé la terrassait bien plus violemment qu'elle ne l'aurait jamais cru. Elle ne savait pas quoi faire, elle ne savait même pas si elle aurait un jour le courage de repasser son costume.
Et même s'il ne le montrait pas, à cet instant, Félix faisait le même constat qu'elle. Habitué à toujours être très discret sur sa vie privée, il en souffrait moins que sa camarade, mais c'était tout de même une peine non négligeable. Et si la partie rationnelle de son cerveau ainsi que les paroles de Plagg lui avaient assuré qu'il n'aurait rien pu faire d'autres pour ces personnes, il ne pouvait s'empêcher de se sentir responsable dans une certaine mesure.
-« Les akumatisés peuvent surgir de n'importe où et à n'importe quel moment, déclara Myriam. Il faut absolument trouver un moyen de prévenir tout le monde, et rapidement, afin qu'on puisse réagir en conséquence. »
-« Ouais comme un système d'alarme, murmura Kilian. Genre un son qu'on entendrait dans toute la ville. »
-« Comme les alarmes d'alerte à la bombe par exemple. » suggéra Maxence.
-« Mon père compte prendre des mesures très fortes, tonna soudain Camille depuis sa place sans se tourner vers ses camarades. Il fera une conférence de presse demain où il compte annoncer ses projets. Il compte même convier Ladybug pour lui demander ses conseils et qu'elle prenne la parole pour rassurer les parisiens. »
Bridgette tressaillit en entendant cela. Elle ? Prendre la parole devant tout Paris alors qu'elle était incapable d'ouvrir la bouche sans éclater en sanglots avec ses camarade ?. Félix fronça légèrement les sourcils en se tournant vers Camille. Il n'était pas vraiment surpris par le choix du maire de prendre des mesures face aux incidents de la veille mais le fait que Ladybug soit conviée elle aussi était déroutant.
Le jeune homme ferma les yeux en repensant à sa coéquipière. Ils s'étaient promis de se retrouver ce soir pour faire un point sur la situation. Tenait-elle le choc ? Il la savait forte mais le combat d'hier l'avait totalement découragée, il pouvait en témoigner. Il l'avait vu fondre en larmes, et s'éloigner de lui en continuant de pleurer, murmurant sans cesse qu'elle avait échoué, qu'elle était désolée… Il serra les poings. Qu'allaient être les conséquences de cet événement sur leur collaboration ?
Allait-elle pouvait reprendre son rôle ? Si elle décidait d'abandonner, qu'allait-il advenir de lui ? Pourrait-il la revoir un jour ?
Félix se tassa un peu plus dans son siège en soupirant : ce n'était pas le moment de penser à ça.
Quand vint l'heure du déjeuner, la classe de terminale se dirigea avec morosité vers la salle de cantine. Ils avaient décidé de déjeuner tous ensemble, afin de se montrer solidaires à tout moment, s'encourageant les uns et les autres. Mais alors que Jehan attrapait son plateau, précédé de Andréa et suivit de Félix, le jeune homme fit volte-face, regarda tout autour de lui avant de s'adresser à ses deux camarades.
-« Où est Bridgette ? » questionna-t-il, les sourcils froncés.
Félix et Andréa imitèrent ses gestes avant de se regarder, perdus.
-« Pourtant elle nous suivait, elle était juste derrière nous. » murmura Andréa.
-« Elle a dû faire demi-tour quand personne ne faisait attention. » expliqua Félix en regardant derrière lui.
-« Je n'aime pas ça, il ne faut pas qu'elle reste seule, dans l'état où elle est… »
Jehan commença à reposer son plateau mais Félix l'arrêta, faisant un pas de côté pour se mettre dans son chemin.
-« Allez-y, nous allons vous rejoindre. J'ai une petite idée de là où elle est allée. »
-« Tu es sûr ? » demanda Jehan, surpris par cette initiative tandis qu'Andréa le regardait, les yeux ronds.
-« Faites-moi confiance. » insista Félix avant de s'éloigner.
Andréa et Jehan le regardèrent partir avant de se regarder en haussant les épaules, un léger sourire sur le visage. Il ne savait pas vraiment comment interpréter ce geste, mais dans la situation actuelle, ils ne souhaitaient pas tirer de conclusion hâtive.
Félix sorti du bâtiment pour traverser la cour d'un pas soutenu. Si elle n'était pas sortie du lycée, il savait exactement où retrouver Bridgette. Il était parti droit comme une flèche, sans se poser la moindre question, sans même relever les regards surpris de ses amis. Et ce ne fut qu'une fois dans l'autre bâtiment qu'il se rendit compte de ce qu'il était en train de faire. Pourquoi avait-il fait ça ? Après tout, il aurait très bien pu laisser Jehan y aller, sachant qu'il savait parfaitement bien où la retrouver lui aussi.
Alors pourquoi avait-il insisté ?
Depuis quelques temps, le jeune homme avait remarqué qu'il agissait bizarrement, se rendant compte de son comportement souvent trop tard. Ce drôle de sentiment qu'il sentait cogner dans sa poitrine lui faisait soulever de plus en plus de questions auxquelles il n'avait pas les réponses, ce qui l'énervait de plus en plus.
Et si jusque-là, il avait réussi à agir plus ou moins normalement, il n'ignorait pas que son nouveau comportement vis-à-vis de Bridgette n'allait pas tarder à soulever, malgré lui, des interrogations.
Le jeune homme soupira. De toute façon, maintenant qu'il était arrivé là, il ne pouvait plus faire demi-tour.
Il s'avança dans un couloir moins éclairé que les autres jusqu'à arriver à un escalier de service. Il se pencha discrètement pour regarder sous les marches et sans surprise, il put apercevoir Bridgette, recroquevillée sur elle-même, la tête dans les bras.
Félix s'accroupit doucement et progressa jusqu'à elle pour s'assoir à ses côtés. Elle tressaillit en le sentant approcher, relevant ses yeux embués de larmes.
-« F-Félix… ? » murmura-t-elle d'une petite voix.
-« Je savais que je te trouverais ici. » acquiesça le jeune homme avec un demi sourire.
Elle le fixa quelques instants, surprise, avant de détourner les yeux, reprenant son air grave. Un petit silence se fit avant que Félix, les avant-bras appuyés sur ses genoux, ne se tourne vers elle pour prendre la parole.
-« Qu'est-ce que tu fais là ? Tout le monde nous attend pour déjeuner. »
-« … Je n'ai pas faim. » répondit la jeune fille en secouant négativement la tête.
Un nouveau silence se fit entre les deux jeunes gens. Félix ne savait pas quoi faire. Il était là, et maintenant ? Que devait-il lui dire ? Que pouvait-il lui dire ? Il aurait été tenté de lui dire que tout finirait par aller mieux, à un moment ou un autre mais il ne connaissait trop bien les sentiments qui se bousculaient dans le cœur de sa camarade : la peur, la tristesse, la perte, le deuil, … Et tout cela ne cicatrisait pas facilement, il le savait.
Il ouvrit la bouche, tentant de se montrer rassurant autant que pragmatique, mais Bridgette le coupa, regardant droit devant elle.
-« Félix… Je ne t'ai pas remercié pour hier… »
-« Remercié… ? De quoi ? » demanda le jeune homme en penchant la tête.
-« Tu m'as sauvé la vie… encore. » déclara sa camarade en plantant son regard dans le sien.
Félix en eut un frisson. Ses yeux bleus reflétaient à la fois toute la peine qu'elle ressentait mais également la reconnaissance qu'elle avait à son égard. Jamais il n'aurait pu douter de ses paroles lorsqu'elle le regardait de cette façon.
-« Tu aurais pu partir, me laisser en arrière, j'aurais pu mourir seule dans ces ruines. Mais tu es resté… Tu m'as rassuré et tu m'as sauvé la vie. »
-« Je n'ai pas fait grand-chose, c'est surtout toi… »
-« Ne dis pas ça. Tu m'as porté quand je ne pouvais plus marcher à cause de ma blessure alors que tu aurais pu suivre les autres sans te retourner. Tu t'es arrêté et tu t'es mis en danger pour moi… Merci. »
Bridgette esquissa un faible, très faible, sourire alors que ses yeux s'embuaient de larmes. Toujours assise, la jeune fille n'avait cependant plus les bras autour de ses genoux, ses mains simplement posées sur le sol, le long de ses jambes. Félix la regarda longuement, incapable de parler. Il ne s'était pas attendu à une telle déclaration. Il était venu la rassurer et il se retrouvait là, incapable de dire un mot.
Bridgette avait détourné le regard, les yeux fermés, les lèvres tremblantes.
Un long moment se passa sans que ni l'un ni l'autre ne bouge ni ne dise quoi que ce soit. Félix, les yeux baissés, se sentait complètement démuni, le regard dans le vide. Le visage de sa camarade était impassible, même si on pouvait aisément comprendre sa tristesse en la regardant. Le silence se faisait écrasant, simplement brisé par les voix de quelques personnes au loin.
-« S'il te plait… murmura soudain Bridgette, des larmes roulant sur ses joues. … Tiens-moi la main, souffla-t-elle en poussant sa main vers lui. Console-moi… »
Félix cligna quelques instants des yeux avant d'avancer sa main vers la sienne. Timidement, il osa toucher un de ses doigts, puis un deuxième. Mais quand Bridgette recommença à sangloter, il posa franchement sa main sur la sienne. Elle retint ses larmes quelques instants avant d'éclater une énième fois en larmes, croisant ses phalanges avec les siennes, le corps secoué de soubresauts.
Le jeune homme la regarda faire avant de baisser la tête, augmentant légèrement la pression sur la main de sa camarade, la gorge nouée.
La fin de journée se déroula dans la même morosité. Après le discours de M. Damoclès qui s'était tenu à la fin de la pause déjeuner en présence des professeurs et des élèves qui avaient tenu à être là, tout le monde s'en était retourné à ses activités sans grand entrain. Les différents professeurs de la classe de terminale de Bridgette et les autres étaient venus leur affirmer leur soutien, se tenant à leur disposition en cas de besoin dans cette épreuve difficile.
Puis après une nouvelle heure et demie d'intense discussion avec ses élèves, leur expliquant comment allait se présenter les prochains jours, Mlle Bustier avait finalement décidé de laisser partir ses élèves, les remerciant une nouvelle fois de leur présence.
Une fois sur le parvis, les jeunes gens retrouvèrent Priam, qui avait tenu à être là lui aussi, d'une certaine manière. N'étant pas élève au lycée, il n'avait pas eu l'autorisation de pénétrer dans l'établissement, ce qui ne l'avait pas empêché de rejoindre ses camarades à leur sortie pour leur affirmer son soutien et retrouver David avec qui il avait prévu de passer la soirée.
Après avoir longuement pris ce dernier dans ses bras, Bridgette commença à tourner les talons, affirmant qu'elle allait rentrer chez elle pour se reposer.
-« Tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne ? On peut passer une partie de l'aprèm ensemble si tu en as besoin. » déclara Jehan en posant ses mains sur ses épaules pour l'arrêter.
-« Non… Ça va aller, merci… déclina Bridgette avec un faible sourire. J'ai besoin d'être un peu seule… Et toi… Tu as besoin de te préparer… C'est le grand soir aujourd'hui. » affirma-t-elle en relevant les yeux vers lui.
Afin d'essayer de lui remonter le moral, le grand métis avait avoué à sa meilleure amie qu'il avait enfin proposé un rendez-vous à Andréa, prévu pour ce vendredi soir, qu'elle avait volontiers accepté. Mais au vu de la situation, le jeune homme n'était plus aussi sûr de lui.
-« Oui, c'est vrai, acquiesça Jehan en essayant de se montrer convaincant. Tu m'enverras de bonnes ondes, hein ? »
-« Elles seront toutes pour toi, c'est promis. » affirma la jeune fille en se reculant doucement.
Elle tint les mains de Jehan dans les siennes quelques instants avant de faire volte-face, non sans un dernier signe à ses camarades.
Les mains dans les poches de son jean, le grand métis regarda son amie s'éloigner. Lui aussi se sentait démuni, et ne savait pas comment s'y prendre pour lui remonter le moral. Il savait que le temps ferait le plus gros du travail mais ne pas pouvoir la faire sourire le mettait vraiment mal à l'aise. Du coin de l'œil, il vit Andréa se placer à côté de lui. Elle aussi avait été profondément affectée par les évènements d'hier mais reflétait également une grande sérénité, et parvenait à voir les choses avec une grande philosophie, tout comme l'avait fait Félix. Jehan la savait forte, et elle le montrait une fois de plus
Elle se tourna soudain vers lui, inclinant la tête. Il prit une profonde inspiration avant de lui prendre les mains en se raclant la gorge.
-« Andréa, je… Euh… … Ah… Je ne sais pas comment te dire ça… Tu sais pour… Pour notre rendez-vous, je… »
-« … Tu n'en as plus envie ? » questionna-t-elle en fronçant les sourcils.
-« Quoi ?! Si ! Bien sûr que si ! Tu peux pas savoir combien j'en ai envie… ! C'est juste que… Enfin… Peut-être que ce n'est pas le moment pour ça… Avec tout ce qu'il s'est passé, je comprendrais que tu n'aies pas la tête à… ce genre de choses, tu comprends… ? »
Andréa le regarda quelques instants avant d'esquisser un sourire qui fit littéralement fondre son cœur.
-« Je comprends, merci de ta sollicitude. Mais… Je pense qu'on devrait maintenir ce rendez-vous, si tu es d'accord. Je veux dire… Je crois qu'on a le droit de s'accorder une pause dans tout ça. Et… Ce n'est pas parce qu'on se donne le droit de faire autre chose qu'on les oublie. » murmura Andréa en serrant les mains de son camarade.
Jehan resta incrédule quelques instants, réfléchissant aux paroles de la jeune fille avant d'acquiescer doucement.
-« C'est vrai… Tu as raison. Alors… On se dit à ce soir… ? Dix-huit heures ? »
-« Dix-huit heures c'est parfait. » murmura Andréa avec un petit rire.
Ladybug, assise sur un toit en ardoise, regardait le soleil se coucher au loin. Elle savait qu'elle était en avance sur l'heure du rendez-vous fixée avec Chat Noir, mais la jeune fille avait eu besoin de quitter sa chambre plus tôt. Là-bas, à force de tourner en rond, elle avait eu l'impression d'étouffer.
Épuisée par ses pleurs et la peine qui ne décroissait pas dans sa poitrine, l'héroïne trouvait, en regardant l'astre solaire décroitre dans le ciel, un instant de sérénité. Elle avait hésité un long moment avant de repasser son costume, craignant ce qu'elle ressentirait en se transformant. Elle avait longuement discuté avec Tikki et, suivant les mots réconfortants de sa petite camarade, elle avait eu le courage de prononcer sa phrase de transformation.
Elle s'était ensuite regardée dans le grand miroir de sa chambre. Elle se souvenait parfaitement bien de ce qu'elle avait ressenti le premier jour où elle avait passé son costume : de la fierté, de l'excitation, de la joie, de la détermination. Elle était Ladybug, et elle allait protéger Paris.
Mais à cet instant, elle n'avait rien ressenti de tout cela, si ce n'est de la honte et de la tristesse. Incapable de regarder son reflet plus longtemps, la jeune fille avait disparu par la trappe de sa chambre puis s'était élancée sur les toits. Son partenaire et elle n'avaient pas conclus de point de rendez-vous précis et la jeune fille avait donc choisi un toit suffisamment haut à la vue dégagée, attendant que son partenaire apparaisse.
Qu'avait-il pensé tout au long de cette journée ? Avait-il perdu quelqu'un ? Dans sa miséricorde, la jeune fille avait été profondément reconnaissante de n'avoir perdu aucun proche durant cette violente attaque, remerciant encore et encore, ignorant si quelqu'un pourrait l'entendre.
Mais qu'en était-il pour son coéquipier ? Elle priait de tout son cœur que son partenaire s'en soit aussi bien sorti qu'elle.
Le soleil avait maintenant complètement disparu et l'héroïne regardait les lumières des habitations alentours s'allumer les unes après les autres. Le cœur gros, elle observa le spectacle, le menton sur ses avant-bras : tout était d'une banalité effrayante. Des centaines et des centaines de parisiens étaient en ce moment en deuil et pourtant, rien ne semblait sortir de l'ordinaire, la vie continuait comme à son habitude.
Lasse, Ladybug n'avait même plus assez de larmes pour pleurer. Elle se sentait vide, triste, fatiguée et seule.
La jeune fille était si profondément plongée dans ses pensées qu'elle ne remarqua pas tout de suite qu'une silhouette familière venait de se poser près d'elle. Aussitôt transformé, Chat Noir avait activé le GPS de son arme pour retrouver sa partenaire et s'était empressée de la rejoindre. Le garçon s'approcha prudemment et esquissa un léger sourire lorsque Ladybug fit volte-face vers lui, les yeux écarquillés.
-« Pardon, je ne voulais pas te faire peur. » s'excusa le jeune homme en faisant un nouveau pas vers elle.
-« Non… C'est moi… Ce n'est rien… » murmura Ladybug en se tournant vers lui.
Ils se regardèrent quelques instants avant que la jeune fille ne montre l'ardoise près d'elle, invitant silencieusement son partenaire à prendre place à ses côtés. Chat Noir obtempéra, rassuré. Sans vraiment savoir pourquoi, il avait craint une dispute avec sa coéquipière : dans son chagrin, elle aurait pu lui reprocher mille choses, à tort ou à raison, ou simplement par envie de passer ses nerfs sur quelqu'un. Mais non, elle était calme. Peut-être même un peu trop.
Il s'assit lentement à sa gauche sans la lâcher des yeux. Ses traits étaient tirés, et malgré la pénombre et son masque qui recouvrait une bonne partie de son visage, il pouvait voir son teint pâle.
-« … Comment s'est passé ta journée ? osa-t-il demander après un silence. Enfin… Je veux dire… Tu sais… »
-« C'était horrible, triste et fatigant, répondit Ladybug en continuant de regarder au loin. Et toi ? »
-« La même chose… » souffla Chat Noir avec un léger mouvement d'épaules.
Les mots étaient maladroits mais au moins, ils discutaient.
-« Tu as vu le message du maire ? demanda Ladybug d'une petite voix. Tu as entendu ce qu'il demandait ? »
-« Oui, je sais. Je voulais t'en parler justement. » acquiesça Chat Noir.
Comme l'avait annoncé Camille, André Bourgeois avait pris la parole en début d'après-midi, présentant ses condoléances à l'ensemble des citoyens et en expliquant que rien ne serait plus laisser au hasard après cette attaque. Le maire avait décidé d'employer les grands moyens pour prévenir les prochaines attaques du Papillon afin qu'une telle catastrophe ne puisse plus jamais se reproduire.
Et comme l'avait évoqué Camille, M. Bourgeois avait effectivement convié Ladybug à se joindre à la conférence qui se tiendrait le lendemain dans la matinée, afin qu'elle puisse l'assister.
-« Tu comptes t'y rendre ? demanda Chat Noir. Le maire avait l'air d'y tenir. »
-« Je n'en sais rien… souffla Ladybug en prenant sa tête entre ses mains. Je ne sais même pas pourquoi il m'a demandé de venir. »
-« Ils auront peut-être des questions vis-à-vis du Miraculous Ladybug et pourquoi certaines victimes de l'attaque sont… »
Chat Noir ne termina pas sa phrase, remarquant l'air peiné de sa partenaire. Il se mordit la langue. Il allait devoir choisir ses mots avec plus de soin s'il ne voulait pas lui faire inutilement de la peine.
-« Ils te réclament parce qu'ils ont peur et que tu es leur lueur d'espoir, reprit le garçon avec un sourire. C'est toi qui les as sauvés. Ils ont besoin de toi. »
-« Je n'ai pas pu tous les secourir, et pourtant ils veulent quand même me féliciter ? ironisa Ladybug d'un ton acerbe. Et puis, pourquoi ils ne t'ont pas demandé à toi de venir ? Sans toi, je serai morte à l'heure qu'il est ! C'est toi le héros de l'histoire, pas moi. »
Se rendant compte qu'elle avait haussé le ton, Ladybug se tassa un peu plus sur elle-même avec un soupir. Chat Noir laissa passer un petit moment avant de poser sa main sur l'épaule de la jeune fille.
-« Ce n'est pas vrai, et tu le sais. Nous avons tous les deux eu notre rôle à jouer, et nous avons fait de notre mieux. »
-« J'aurais dû faire mieux. » insista l'héroïne d'une voix tremblante.
Chat Noir prit une profonde inspiration avant de prendre sa partenaire par les épaules, la tournant doucement vers lui afin de pouvoir la regarder dans les yeux.
-« Pense à toutes les personnes que tu as sauvé. Aux personnes que tu as soignées. Et ce bébé… Si tu n'avais pas insisté pour aller le chercher, il ne serait plus là. Mais à l'heure qu'il est, je te parie qu'il est dans son lit, bien au chaud, avec sa mère près de lui pour lui lire une histoire. Et je peux t'assurer que cette maman te sera reconnaissante pour le reste de son existence. Parce que tu as sauvé son fils ! Tu l'as secouru quand personne d'autre ne le pouvait. »
À cet instant, le jeune homme put voir une petite lueur s'allumer dans les yeux de sa coéquipière. Ce fut bref, faible et presqu'invisible, mais il l'avait vu. Il lui adressa un petit sourire, comme pour appuyer ses paroles. Elle tressaillit légèrement, une larme coula sur sa joue droite mais elle ne bougea pas. Ils restèrent ainsi l'espace de quelques secondes avant que Ladybug ne fasse un mouvement en avant. Chat Noir écarquilla les yeux quand il vit la jeune fille approcher son visage près du sien et poser ses mains sur ses bras.
-« Viens avec moi demain, je t'en prie. » souffla-t-elle à mi-mots.
-« J-Je… Je ne suis pas sûr q-que… » bredouilla Chat Noir en s'empourprant violemment.
-« J'y arriverai pas sans toi. J'ai besoin de toi, s'il te plait. » insista Ladybug en plantant son regard bleu dans le sien.
Il se sentit presque aspiré par ses yeux. Ils étaient si bleus, si profonds, étincelants, absorbant toute la lumière, pourtant faible, pour la refléter au centième. C'était comme regarder le ciel étoilé d'un soir d'été. Aurait-il pu lui refuser quoi que ce soit ? Certainement pas.
-« … D'accord, je viendrai. Je te le promets. » déclara Chat Noir avec un hochement de tête, parlant sans même réfléchir.
Il put la voir sourire légèrement avant de prendre ses mains dans les siennes. Chat Noir la regarda faire, incapable de bouger, figé par ce sentiment presqu'intimidant qu'il sentait grandir dans sa poitrine sans savoir d'où il provenait. Ladybug baissa les yeux, ses doigts entrelacés avec les siens.
-« Je suis tellement triste de ce qui est arrivé, je me sens responsable. Des gens sont morts, certains n'avaient encore rien vécu, et je ne pourrais jamais vraiment me pardonner pour ça. Mais tu as raison. Nous ne pouvons pas oublier toutes les personnes que nous avons sauvés. »
-« Nous allons devenir plus forts, et nous vaincrons Papillon, nous lui ferons payer ce qu'il a fait, tu verras. »
Ladybug hocha doucement la tête avant de replacer aux côtés de Chat Noir, sa main gauche tenant la droite de son coéquipier. Elle se rapprocha de lui jusqu'à ce que son genou touche le sien. Puis, de manière machinale, elle posa sa tête sur l'épaule du garçon, en serrant davantage sa main dans la sienne.
-« Merci Chat Noir, je me sens un peu mieux. … Je suis vraiment heureuse que tu sois mon coéquipier tu sais ? Je suis contente de t'avoir rencontré. »
Le cœur du héros enfla davantage, prêt à exploser. Mais ce n'était pas douloureux, ou plutôt si : c'était délicieusement douloureux. La chaleur qui partait de sa poitrine s'infiltrait partout dans son corps, de la pointe de ses cheveux jusqu'au bout de ses membres et continuait de se répandre à chaque mot qu'elle prononçait. Il resta interdit quelques instants, surpris par la puissance de ce sentiment qu'il n'arrivait toujours pas à identifier.
Puis, après un moment d'hésitation, il osa poser sa joue sur le haut de la tête de sa partenaire, augmentant la pression sur les doigts de la jeune fille.
-« Moi aussi ma lady. Je suis heureux d'avoir croisé ta route. »
De retour chez elle, allongée sur son lit, Bridgette froissait ses draps en baladant ses doigts dessus, le regard dans le vide.
Elle se sentait un peu mieux qu'en début de journée, même si elle était encore loin de vouloir sourire à pleines dents. Sa colère et sa tristesse s'étaient transformés en lassitude : elle n'avait pas la force de pleurer. Elle avait envie de s'endormir pour se réveiller plusieurs mois plus tard, afin de calmer et de reposer son esprit embrumé par la haine, la peur et les larmes.
Tikki était posée à côté d'elle, surveillant étroitement sa porteuse en ne la lâchant pas des yeux. Bridgette n'avait de cesse de se rejouer la journée d'hier, sans pouvoir rien y faire. Elle revivait les explosions autour d'elle, elle ressentait la douleur qu'elle avait subi tout au long de sa mission, de la peur qu'elle avait ressentie quand elle s'était retrouvée prisonnière du poing du vilain.
Son esprit vagabondait dans tous les sens quand elle se mit à penser au moment où elle avait dû sauter par-dessus cette crevasse et que Félix l'avait réceptionné. Là encore, elle avait été terrifiée. Mais lorsqu'elle avait senti les bras de son camarade se refermer autour d'elle, elle avait tout de suite été moins effrayée, comme si le simple fait qu'il puisse la serrer contre lui avait chassé toute la peur, ne serait-ce qu'un bref instant.
Et lorsqu'il l'avait portée sur son dos pour ne pas la laisser en arrière, là aussi, elle s'était sentie plus sereine. Elle avait passé ses mains sur ses épaules, sa peau effleurant ses mèches blondes sans vraiment sans rendre compte.
En prenant conscience de ses propres pensées, Bridgette s'empourpra soudainement. Elle enfonça son visage dans un des oreillers de son lit en se recroquevillant sur elle-même. Elle n'avait pas osé l'avouer à qui que ce soit mais elle devait maintenant être au moins honnête avec elle-même : Félix ne la laissait pas indifférente, maintenant elle en était sûre.
Était-ce réciproque ? Elle en doutait. Ses amis lui avaient plusieurs fois assuré que Félix regardait souvent dans sa direction, mais était-ce vraiment signifiant ? Elle se repassait les différents moments passés avec lui, en tirait des conclusions avant de se rétracter : la fatigue devait fausser son jugement.
Il était 19h30 passé quand le téléphone de Bridgette émit une petite musique. L'adolescente, qui avait laissé de côté l'appareil une bonne partie de l'après-midi, le saisit pour le déverrouiller.
Son cœur s'emballa quand elle se rendit compte que le message provenait de Jehan : il avait promis de la tenir au courant de comment s'était passé son rendez-vous.
Après un petit instant, Bridgette, émue, laissa échapper un léger cri de victoire qui fit relever les yeux de Tikki. L'adolescente s'empressa de lui montrer l'écran de son téléphone avant de se laisser retomber sur son lit avec un petit rire d'excitation.
Elle était heureuse pour eux, elle l'était vraiment.
Pour la première fois depuis la veille, elle souriait vraiment. Cette nouvelle lui réchauffait le cœur et l'espace d'un instant, elle put mettre de côté sa peine, caressant doucement la tête de Tikki du bout des doigts avant de fermer les yeux, apaisée.
-« Je suis étonné que vous me rappeliez aussi vite, les évènements d'hier vous ont-ils décidé ? » ricana le jeune homme au téléphone.
-« Nous pouvons dire ça, oui. »
-« Vous avez tué 126 personnes, vous le savez n'est-ce pas ? »
Gabriel se contenta de garder le silence en pinçant ses lèvres.
-« Cela change-t-il quelque chose à votre décision ? »
-« Pas du tout ! répondit son interlocuteur. J'étais sérieux quand je suis venu vous voir, je suis sûr que nous pouvons faire de grandes choses ensemble. »
Nouveau silence. Gabriel était toujours extrêmement méfiant. Mais la peur de perdre son fils unique la veille lui avait fait réfléchir à cette étrange proposition. Après tout, s'il pouvait avoir à sa disposition une seconde personne qui pourrait lui permettre de récupérer plus facilement les miraculous qu'il convoitait et en plus de garder un œil sur son fils, tout n'était qu'avantage.
-« Soyons clairs, JE serai celui qui décidera ou non de vos interventions. Je vous appellerai quand j'estimerai cela nécessaire ou utile, sans négociation possible. »
-« Aha, bien sûr. Tant que vous ne vous avisez pas à me mettre trop longtemps sur la touche, je me plierai à vos exigences. Sachez que je ne compte pas me mettre inutilement en danger et rester relativement libre dans mes actions. »
-« Je ne suis pa- »
-« Donnons-nous rendez-vous un de ces jours pour discuter de cela plus tranquillement, autour d'une tasse de thé par exemple. Les vrais hommes d'affaire ne règlent leurs accords qu'en face à face n'est-ce pas ? Une bonne poignée de main, il n'y a que ça de vrai. »
Gabriel se crispa avant que ses lèvres ne s'étirent d'un petit rictus amusé teinté d'amertume.
-« Bien, je vous recontacte plus tard. »
-« Très bien, je vous souhaite une bonne soirée Gabriel. »
Puis l'appel pris fin. L'homme haussa un sourcil surpris avant de baisser son bras, regardant son téléphone. Il prit le temps d'effacer consciencieusement cette discussion de son journal d'appel avant de se tourner vers Nathalie. L'assistante n'avait rien osé dire à son employeur, mais elle masquait difficilement son inquiétude.
-« Je vous sens nerveuse Nathalie. » déclara Gabriel en la regardant.
-« Monsieur, êtes-vous sûr de prendre la bonne décision ? Vous prenez beaucoup de risques… »
-« J'aime son assurance et son culot. Cela ne pourrait être qu'un coup de bluff, mais il semble sûr de lui. Et… avoir quelqu'un sur le terrain pourrait s'avérer utile. »
-« Vous allez vraiment accepter de céder à ce chantage ridicule ? » s'offusqua Nathalie avant de se reprendre, remarquant qu'elle avait élevé le ton.
-« Que craignez-vous ? Ne vous en faites pas, je sais ce que je fais. Mettons-le à l'essai quelques temps. Il finira peut-être par se décourager. Et s'il finit par faire du zèle, il ne sera pas difficile de se débarrasser de lui. Nous ne sommes plus à une vie près n'est-ce pas ? »
Nathalie écarquilla légèrement les yeux en comprenant où il voulait en venir. L'homme d'affaire se contenta de plisser légèrement les yeux avant de se détourner, les mains dans son dos.
-« Je ne laisserai personne se mettre en travers de ma route Nathalie, toute menace sera écrasée. » tonna-t-il en regardant le portrait de sa femme, le seul resté en place dans toute la maison.
Eh bien ! J'en aurai mis des disclaimers pour cet arc ! Mais je vous rassure, c'est enfin fini (pour l'instant) !
Qu'en avez-vous pensé ? J'espère que vous m'en voulez pas trop de vous avoir un peu secoué pendant ces 7 chapitres. C'était nécessaire pour lancer de nouveaux enjeux dans cette histoire.
Et oui ! Oui je sais ! Vous êtes frustrés de ne pas avoir pas eu la scène de confession entre Jehan et Andréa. ne vous inquiétez pas, je ne vous ai pas fait le coup d'occulter cela. Cette scène n'avait simplement pas sa place dans la trame principale (j'ai essayé mais c'était trop forcé pour ce que je voulais faire).
Donc ! Voici le programme ! La scène de confession entre Jehan et Andréa fera l'objet d'un one-shot qui sera publié le 9 mai, après une semaine de pause. Ensuite ! Comme je l'ai déjà dit, je suis en pleine période d'examen donc je n'ai pas trop le temps d'écrire en ce moment.
La suite de la trame principale arrivera donc le 30 mai, 2 semaines après le one-shot donc, pour me laisser le temps de reprendre de l'avance dans mes écrits après mes partiels. Je voulais initialement faire l'inverse, vous faire attendre deux semaines pour la scène de confession, puis une seule pour la reprise de la trame principale, mais je tiens à ma vie et à votre santé mentale, donc je n'ai pas fait ça finalement xD
On se retrouve donc dans deux semaines pour la publication du one-shot, qui sera donc une histoire à part, comme "Des pas dans la nuit" et "Maman" (que je vous encourage à aller lire si vous ne l'avez pas fait).
Merci de votre soutien et de vos retours, je vous en suis très reconnaissante. On se retrouve bientôt pour la suite, restez connectés...
