Sur la route du retour, Shaporo ne pouvait s'empêcher de regarder la lettre sous tous les angles, essayant de deviner ce qu'il se trouvait à l'intérieur. L'enveloppe était vierge de tout écrit ou sceau particulier, rien qui n'aurait pu permettre alliés ou ennemis de remonter à Asakie, et aucun indice sur sa contenance.
- Ce ne sont probablement que des instructions sur ce qu'elle nous a déjà dit. remarqua Khēlā. Elle n'a sans doute que peu d'occasions de sortir sans se faire remarquer, alors elle a planifié tout ce qu'elle devait faire.
Tout était parfaitement rodé, elle s'était présentée, avait dissipé les quelques doutes, et leur avait remis les instructions tout en s'occupant de Danir et Eimer elle-même. A ce propos, Eleyon était devenu curieux. Il avait toujours vu Khēlā comme quelqu'un de presque inhumain, incapable du moindre vice. Il ne l'aurait pas imaginé capable de montrer un tel dédain pour quelqu'un, ou alors n'était-ce qu'un air qu'il se donnait ?
- Le vieux monsieur était à ce point un monstre pour que vous refusiez de l'aider ?
Khēlā se tourna vers le mage de feu.
- Il a aidé à la mise à mort de la plupart des personnes que j'aime. Il ne me reste que les cinq jeunes gens qui sont avec moi. Tu pardonneras mon manque de charité.
Eleyon comprenait en effet, il n'avait pas été si généreux en retrouvant ceux qui avaient enlevé Lyra et il était étonné de la retenue dont avait su faire part le vieil homme.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé pendant l'Inquisition ? demanda Shaporo, lassé d'inspecter l'enveloppe.
Khēlā prit une grande inspiration, ses souvenirs se rassemblant dans sa tête.
- Avant que l'Empereur ne prenne le pouvoir, les guildes étaient déjà interdites, mais les mages pouvaient continuer à vivre sans soucis tant qu'ils n'utilisaient pas de magie. Ce qui comptait c'était que nous puissions être ensemble. — Un mirage de sourire apparut sur le visage du vieil homme — Mais quand l'Empereur est arrivé, avec ses mages personnels, nous pensions que notre heure était venue. Nous avons pris les armes et nous nous sommes battus contre lui. — Le Maître prit une profonde inspiration, son regard errant dans le ciel.
Nous avons perdu.
Mais le ban était levé, nous pensions que tant qu'il y aurait des mages noirs au pouvoir, des mages blancs seraient requis et voulus pour se dresser contre eux. Mais l'Empereur a créé l'Inquisition. L'homme que tu as rencontré en a été un des meilleurs éléments si j'ose dire. Ils ont chassé les mages comme tu n'as pas idée. Peu importe ce qu'ils faisaient de leur vie, certains n'étaient même pas au courant de leur condition, ils ont été arrêtés tout de même. Alors ceux qui se sont battus… n'ont pas eu cette chance. Et maintenant, qu'il domine, qu'il pense avoir gagné, il veut nous faire cesser le combat. On ne peut l'accepter. dit Khēlā en se tenant le ventre.
- Ça vous fait mal ? demanda Eleyon, inquiet.
- Non, c'est la sensation qui reste. Je me demande ce que c'était, mais ce que je sais, c'est que ce ne s'est pas passé comme l'Empereur l'avait prévu.
De retour à Tempesta, Eleyon déglutit. Il avait oublié les conditions de son départ, et sans doute qu'étant le premier à revenir, il prendrait le plus la foudre.
- Vous pouvez nous laisser seuls s'il vous plaît ?
A peine Laudriz eut terminé sa phrase que Shaporo et Khēlā abandonnèrent un Eleyon au regard suppliant à son sort, prenant tout juste le temps de déposer la lettre sur le bureau du Directeur.
- Pourquoi partez-vous toujours à l'assaut sans me consulter ? Vous ne croyez pas qu'il y a eu assez de drames comme ça ? dit le vieil homme d'un ton calme en faisant les cent pas derrière sa chaise.
- Parce que vous refusez constamment, et on ne peut pas toujours rester sans rien faire, je ne peux pas.
- Tu devrais pourtant me comprendre Eleyon. Nous avons tous les deux perdu Lyra, je ne veux pas que quelque chose comme ça se reproduise. dit Laudriz en s'appuyant sur son bureau.
- A ce propos, l'Empereur prétend qu'il a un moyen de ramener les morts.
- Non il n'en a pas. coupa Laudriz, écartant la possibilité d'un geste de la main et reprenant sa marche nerveuse.
Confiant, Eleyon s'avança vers le vieil homme.
- Mais s'il y a la moindre chance de ramener Lyra, on doit pouvoir essayer de—
- Tu ne crois pas que j'ai déjà essayé ? hurla Laudriz, balançant ce qui se trouvait sur son bureau au sol. Tu crois être le seul à avoir perdu quelqu'un que tu aimes. J'étais dans ton cas que tu n'étais même pas né, qu'est-ce que tu crois ? Que moi je ne veux pas la revoir, et bien détrompes-toi. Mais il n'y a aucun dieu, aucune magie, aucun rituel qui pourra y changer quoi que ce soit. Elle est partie Eleyon, et il n'y a rien que l'on puisse faire. Rien. J'ai gâché la moitié de ma vie à essayer de changer ça et c'est grâce à Lyra que j'en suis sorti, alors je ne te laisserai pas en faire de même pour elle. dit Laudriz en finissant par s'écrouler sur sa chaise.
Il jeta un regard à Eleyon qui avait baissé les yeux et niait de la tête.
- Tu es comme mon fils Eleyon, mais parfois je… j'ai… Sors d'ici. dit le vieil homme en se relevant pour ramasser les fruits de sa colère.
Défait, Eleyon s'exécuta et disparut dans l'embrasure de la porte. Il vit que Shaporo se tenait dans le couloir.
- Ça va ? demanda le jeune blond.
- Il faut que j'y aille. Il faut que j'en ai le cœur net.répondit le mage de Tempesta.
- Tu comptes aller voir l'Empe— Shaporo fut interrompu lorsqu'Eleyon lui mit la main sur la bouche en lui faisant signe de se taire.
- Oui, mais pour ça, je vais avoir besoin de Yasha, j'espère qu'il a suffisamment avancer avec Falcon, ça va faire trois semaines.
Dans les montagnes de Seven, un corps noir s'écrasait dans la neige, soulevant un nuage de poudreuse dans un craquement étouffé. Avant que le nuage ne se dissipe, il fut parcouru d'un arc électrique bleu puis soufflé par une tornade noire s'élevant dans le ciel. Du cœur de ce tourbillon jaillit un éclair qui se propagea jusqu'à une autre silhouette venait d'atterrir à quelques mètres de là. Des arcs électriques lèchaient le sol, avant que la foudre ne tombe, soulevant un nuage de vapeur.
- Tu es sur le bon chemin. dit Yasha, la paume en avant, encore fumante.
Comme un boulet de canon, Falcon fonça, poing en avant sur le mage de Tempesta. Le choc entre les deux souffla la neige, ne laissant que la roche nue en dessous. Falcon prit appui sur le bras de Yasha et s'envola. Le bras vers le ciel, il y fit apparaître un cercle magique, chargeant le ciel de nuages d'orages. Toute la zone du Mont de Cristal fut bientôt emplie de ces nuages qui commençaient à luire par endroits. Un unique, immense éclair se déversa sur la plaine, aveuglant les deux mages et illuminant à perte de vue. Peu à peu, le nuage et les étincelles se dissipèrent, ne laissant que le silence.
La cécité de Falcon estompée, il put discerner la silhouette sombre de Yasha, debout la main vers le haut. Au dessus de lui se trouvait un large disque noir, craquelé et fumant par endroits. Il s'aperçut ensuite que l'épée rouge de Yasha se tenait sous sa gorge et ne put s'empêcher de déglutir alors qu'il reculait.
- C'est mieux, je pense qu'on pourra s'approcher encore dès demain. dit Yasha en rangeant son sabre.
Falcon se tourna vers la montagne, elle était maintenant si proche qu'il devait se tordre le cou pour en voir le sommet, bientôt il pourrait se battre directement sur ses flancs, à ce moment-là, son entraînement serait achevé.
- Tu penses qu'on aura terminé bientôt ? demanda Falcon.
- Au rythme où tu vas, on devrait en avoir fini d'ici deux semaines. répondit l'homme aux sabres.
- Plus que deux semaines alors. pensa Falcon à voix haute en souriant, avant que son ventre ne gargouille, lui indiquant qu'il était temps de faire une vraie pause.
- C'est à ton tour d'y aller. s'empressa de dire Yasha.
Toute la bonne humeur du jeune brun s'évapora, le trajet vers la ville la plus proche était de plusieurs heures, magie ou non. Il devait cependant s'y résoudre, car s'il attendait que Yasha commence à avoir faim et soit forcé d'y aller lui-même, il dépérirait certainement avant.
Enfin seul et libéré et son élève, Yasha pouvait lui aussi se mettre au travail. Il laissa quelques affaires sur place ainsi qu'un petit monstre de ténèbres, pour montrer qu'il serait vite de retour, et escalada la montagne blanche.
Au sommet du pic tremblant, on entendait l'air hurler, tordu par la chaleur, la neige s'évaporait, plongeant le cristal dans la brume. Enveloppé par l'opaque nuage, Yasha avait les bras tendus devant lui, et entre ses mains se trouvait une sphère noire, parfaitement lisse et immobile. Peu à peu, les ongles de Yasha se firent griffes et sa peau se recouvrit d'écailles bleues jusqu'au coude. Plus la transformation progressait, plus la sphère tremblait et s'entourait de volutes d'air chaud. Des éclairs noirs jaillissaient de l'orbe et parcouraient les bras de Yasha, les faisant trembler malgré lui.
S'effondrant sur elle-même, la sphère noire explosa, laissant la place à des flammes violettes qui engloutirent Yasha et tout ce qui se trouvait au sommet du Mont de Cristal. Le feu fut ensuite aspiré par la montagne avant de disparaître, rapidement suivi par les écailles bleues du mage de Tempesta. Le poing serré autour de son poignet, Yasha tenta d'arrêter les tremblements de sa main droite.
Sans que cela ne soit fait, des fils de fumée apparurent au creux des mains de Yasha et formèrent une nouvelle sphère noire. A nouveau, la peau de Yasha devint bleue et écailleuse, lui rendant impossible de contrôler l'orbe noir. Une lueur brillait au cœur de la sphère, et des flammes violettes remplacèrent vite les ténèbres. Une boule de feu en main, Yasha poussa un profond soupir et l'envoya au loin où elle alla s'évanouir. Toujours impossible pour lui d'utiliser la Magie des Ténèbres en se transformant.
Pendant des heures il avait essayé, les flammes violettes avaient pris leur tribut et leur effet se faisaient sentir sur les paumes brûlées du mage. Alors qu'il s'apprêtait à retenter l'exercice, Yasha fut déconcentré par une détonation au loin. Cherchant la source de l'explosion, il vit au cœur de la forêt une source lumineuse agitée de pulsations. D'un rapide regard, il chercha quelle aurait pu en être la cause, mais de si haut, impossible de voir.
Sous la canopée, Falcon portait le fruit de ses emplettes sur le dos. Sur le retour, le jeune mage s'était égaré, et, dans son errance, il était arrivé jusqu'à une pierre étrange, recouverte de mousse. Aussi grande que Falcon, le sommet de la pierre était un visage, décoré de fils de métal bleus, dont la bouche et les yeux étaient de simple fente. A l'approche de la pierre, tout avait cessé, fût-ce le vent ou les bruits sylvains, même la neige craignait de se faire entendre sous le poids du mage.
Dès qu'il l'eut effleurée, la pierre s'illumina et expulsa tout ce qui se trouvait à proximité, y compris le mage. Pris dans un nuage de débris, Falcon était perdu et ne savait dans quel sens il se trouvait, il tenta de se propulser hors de danger, mais n'y parvint pas et s'écrasa un peu plus loin aux limites de la zone dévastée. Sonné, le mage de Fairy Tail se croyait hors du temps, devant lui volaient des branches et des troncs, même les cristaux de glace restaient immobiles dans les airs. Une fois debout, il pu voir que la pierre s'était brisée et que ses fragments orbitaient autour d'une lueur bleutée palpitante.
Atterrissant auprès du mage de Fairy Tail, Yasha se mit entre lui et la lueur, l'observant, décontenancé.
- Qu'as-tu fait ?
Falcon ne trouvait que répondre, hochant la tête pour dire non. Peu à peu, les battements s'estompèrent et la lueur fut emprisonnée dans un cocon de pierre. Autour, les rochers s'arrangèrent jusqu'à avoir une silhouette humaine, des espaces manquant çà et là donnaient l'impression que les membres flottaient dans les airs, retenus par une force invisible. La transformation achevée, des fils de lumière se mirent à parcourir chaque rocher; depuis le cocon, jusqu'aux yeux qui se mirent à luire, mettant en mouvement la roche.
- Humains. En quelle année sommes-nous ?
La voix avait un écho cristallin qui se propageait dans la forêt entière, entendue de la même façon par tous ceux qui pouvaient s'y trouver. L'être de roches brisées était immobile et dans sa voix ne transparaissait aucune animosité.
- En 983. répondit Yasha.
La créature de roche regarda autour d'elle puis observa longuement Yasha et Falcon. Un drap se matérialisa autour de la créature, cachant son cœur de lumière et ne laissant apparaître que ses mains et son visage.
- Il est anormal que j'ai été réveillé si tôt. Toi qui est le gardien de ces terres — dit-il en se tournant vers Yasha — le Roi Ishgar est-il toujours sur le trône ?
- De quoi parlez-vous ? Qui êtes-vous ? demanda le mage de Tempesta.
- Je ne dois être éveillé que lors de grands troubles. Je dois voir celui qui dirige ces contrées pour lui demander des explications. Est-ce toujours le Roi Ishgar ? répondit le Morcelé dans un ton monotone sans esquisser un geste.
Falcon s'avança alors, prenant place aux côtés de Yasha.
- Le Roi Ishgar est mort il y a plus de cinq mille ans…
Un court silence fut rapidement rompu par la créature de roche.
- Quel est l'ininyme de ce millénaire ?
Yasha fixa Falcon, il n'avait aucune idée de quoi répondre.
- X. Nous sommes en X983.
Le Morcelé se tut. Le manque d'expression ne pouvait laisser deviner s'il réfléchissait ou ce qu'il ressentait.
- Quelque chose a empêché mon réveil. Le temps nous presse. Je ne peux pas vous remercier convenablement. Tout ce que je peux vous dire, c'est que vous devrez vous préparer à affronter ce qui vient.
- Qu'est-ce qui vient ? demanda Yasha.
- Je l'ignore, mais il ne s'agit pas de vos puériles querelles humaines. J'ai besoin d'en apprendre plus.
Le cœur lumineux du Morcelé implosa, l'absorbant entièrement avant de disparaître, ne laissant aucun signe de sa présence. Tout ce qu'il maintenant en lévitation s'effondra autour des deux mages, laissant l'impression d'une explosion.
Les deux mages se regardèrent décontenancés.
- Qu'est-ce que c'était que ça ? demanda Falcon.
- Absolument aucune idée. répondit Yasha. Mais ça ne change rien à nos plans, on reprendra une fois qu'on aura mangé.
De retour sur les lieux de leur camp, Yasha reçut un message d'Eleyon sur sa lacrima en forme de micro.
- J'aurai besoin de toi, on a quelqu'un à aller voir, c'est urgent.
- C'est tout ? demanda Yasha en secouant la lacrima, comme si le reste du message était resté coincé à l'intérieur.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Falcon.
- Eleyon me demande un service, ça m'inquiète. dit Yasha. On va devoir rentrer.
Falcon ne savait pas quoi ressentir, d'un côté, il était heureux d'en finir, de l'autre, il n'avait pas terminé et allait traîner ce sentiment d'inachevé pendant un long moment. Mais encore une fois, la décision avait été prise pour lui.
A Sæmbiod, le groupe de mage s'était dispersé, attendre deux journées dans la même pièce était bien trop long pour eux, Ryuu et Nathaël étaient resté chez ceux qui les hébergeait, tandis que Tsura, Evan et Nephilim étaient partis en ville. La ville était entièrement à flanc de colline, aussi était-il plus fatiguant que prévu de simplement marcher dans les rues.
- On rentre, c'est bon, on a fait le tour là ? demanda Nephilim qui voulait se faire passer pour plus fatiguée qu'elle ne l'était réellement.
- Ça fait à peine un quart d'heure qu'on marche, et c'est toi qui ne supportait plus de rester enfermée. répondit Tsura, fatigué pour d'autres raisons.
- J'espère au moins que tu reconnais quelque chose. dit la jeune femme aux bulles en s'asseyant sur l'une d'elle.
- Il y a bien une odeur bizarre qui me dérange, mais j'ai l'impression que ça n'a rien à voir. dit-il la mine grave.
A quelques mètres de là, Dhole ne pouvait s'empêcher de rire. Ce qui irritait profondément Yukihyô qui finit par lui frapper le crâne. Calmé, Dhole reprit la filature.
- Tu veux aller le voir maintenant ? dit-il en se frottant la tête.
- Oui, de toute façon je ne pourrai pas les arrêter ici, j'aurai aucun moyen de les ramener après. On devra se montrer inoffensif pour leur parler.
Quelques instants plus tard, au détour d'une route, les deux groupes de mages se firent face. Dhole était joyeux, presque excité en faisant face à Tsura, cependant, le fait que le chasseur ne dise rien siphonna peu à peu son entrain.
- Tu ne me reconnais pas ? dit-il, dépité.
- Désolé mais non, qui êtes-vous tous les deux ? demanda le chasseur en se tenant sur ses gardes.
- Tu es bien Haruko ? demanda Yukihyô.
- Oui c'est moi. dit le chasseur de dragon du vent.
La seule chose qui raccrochait Tsura à sa précédente vie était un petit médaillon qu'il avait autour du cou lorsque Conloelio l'avait trouvé. Sur ses conseils, il avait gardé ce nom secret et s'en était trouvé un nouveau. Tusuranis, lui avait-il proposé. Apparemment c'était un très ancien dieu païen, sans doute oublié de tous. Même en tant qu'enfant, ce nom ne plaisait pas à Tsura, aussi se décida-t-il à le raccourcir, le rendre plus facile à prononcer.
- Mais mon nom est Tsura. ajouta le mage aux cheveux d'argent. Dit, c'est quoi cette odeur que j'ai dans le nez depuis tout à l'heure, ça vient de toi non ? demanda le mage de Tempesta, naïvement.
Dhole n'eut pas le temps de rire qu'il se retrouva déjà face contre terre, une bosse naissante à l'arrière de son crâne.
- Pourquoi tu fais une fixette là-dessus, je suis sûr que tu lui fais pas autant de réflexions, hein ? dit-elle en pointant Ryuu du doigt.
- Non pourquoi ? dit Tsura sans comprendre en regardant Ryuu qui était aussi perdue que lui.
Yukihyô se prit la tête dans les mains et tira lentement sa peau vers le bas avant de reprendre.
- Donc tu es bien Haruko, mais tu n'as aucune idée de qui nous sommes ?
- Je suis désolé, mais je n'ai aucun souvenir d'avant mes quinze ans. répondit Tsura, l'air triste.
- Est-ce qu'en apprendre plus t'intéresserait ? dit Yukihyô.
Tsura hésita un instant, il ne faisait pas vraiment confiance à ses deux individus, mais c'était sans doute une des seules façons qu'il aurait d'en savoir plus. Une tape dans le dos de Nephilim finit par le décider.
- C'est d'accord, je t'écoute.
- Pas ici, allons nous asseoir quelque part. dit-elle en se retournant et enjambant Dhole.
Arrivé dans son domicile temporaire, Yukihyô montra les quelques chaises à ses invités avant de s'asseoir elle-même. Dhole et Evan arrivèrent en retard, cette dernière s'étant arrêtée pour le remettre sur pied.
- Bien, on a pas mal de choses à se dire. dit la jeune femme.
Au cœur de la ville, les derniers notables arrivaient dans le bâtiment qui allait héberger le Godisamnar. La grande table centrale était pleine, à une personne près, et à en juger par la taille des chaises, c'était la plus importante, celle du Roi. Les participants se tenaient debout, presque immobile, chacun tenant une arme ou un symbole de son statut à sa main droite. Les clercs tenaient un sceptre court, ressemblant à une masse et les nobles un long scramasaxe encore dans son fourreau. Dès lors qu'un puissant cor retentit à travers la salle, tous frappèrent de leur arme sur la table ou le sol et s'assirent à l'unisson. Deux gardes fermèrent les portes, annonçant le réel commencement du Godisamnar.