Mariage il y aura

Catelyn regarda le barral à bonne distance. Elle était arrivée hier, le mariage serait célébré aujourd'hui au coucher du soleil, dans le bois sacré de Winterfell. La jeune femme était inquiète à l'idée d'être aussi loin des siens.

Sa famille n'était pas présente, seule sa grand-mère Thyerda l'accompagnait. Pourquoi elle ? Elle tombait peu à peu dans la sénilité et pouvait se montrer particulièrement impolie. Mais sa présence n'était pas essentielle au Conflans. De la même manière, sa sœur était accompagnée de leur jeune frère Edmure et de Lady Nerbosc.

Leur famille ne pouvait pas être réunie pour cette étape capitale de leur vie ; à cause de la guerre. Cette fichue guerre entre les Targaryen et les Baratheon. Le Conflans, le Val et le Nord soutenaient la rébellion contre le Roi fou et ces mariages venaient à point nommé renforcer leurs liens diplomatiques. Et peu importe que l'ainé des Stark soit mort, mariage il y aurait.

Alors la population de Winterfell s'activait pour offrir des noces corrects au cadet Stark qui venait de perdre son frère et son père. C'était un geste de soutien et de dévotion d'un peuple à son souverain. Et Catelyn était une poussière sur cet évènement.

— Cat-cat, comment trouves-tu ta nouvelle demeure ? Trop accueillante et trop chaleureuse !

Grand-mère faisait souvent les questions-réponses. La jeune fille prit son mal en patience. Elle n'était pas si mal lotie : son futur mari n'avait pas mauvaise réputation et était de son âge. Bien sûr elle devrait s'adapter à la culture du Nord mais elle le savait depuis plusieurs mois.

— Ça ne sert à rien de rester là à regarder les feuilles pousser. Allons te préparer.

Catelyn se mit en branle et retrouva la chambre qu'on lui avait attribué. Il y avait deux lits : un pour sa grand-mère, un pour elle. Le soir-même, elle devrait rejoindre la chambre seigneuriale. Les Nordiens avaient préparé sa mise : elle ne ressemblerait pas à une fille du Sud ainsi. C'était un cadeau de bienvenu si sobre...

Sa vie serait ainsi faite désormais.

Une chambrière l'habilla sous le regard critique de sa grand-mère.

— Auriez-vous vu mon promis ? questionna la jeune Tully à la servante.

— Lord Eddard est parti chasser tôt ce matin, accompagné du jeune seigneur Benjen. Je suis certaine qu'ils reviendront à temps ; vous épousez un homme d'honneur.

Catelyn retint une remarque malheureuse, sa grand-mère n'eut pas la même politesse :

— Ses servantes lui mangent déjà dans la main: c'est pour ça que ton jeunot s'en va en guerre. C'est la conquête des courtisanes.

À ses mots, la servante écarquilla ses yeux bruns. Elle se tourna vers elle vivement :

— Je vous assure qu'il n'en a rien ! Jamais quelque chose d'aussi... inconvenant ne s'est produit ici !

La voix était forte d'engagement et le regard exigeant et pourtant, Catelyn y décelait une peur. Pas celle de voir un méfait révélé. Plutôt celle de voir un futur possible détruit.

— Je vous crois et j'ai confiance en mon promis.

Catelyn calma les battements erratiques de son cœur. Elle avait peur de se marier, se raisonna-t-elle. Rien de plus. Et cet instant s'approchait de plus en plus. Bientôt elle remonterait l'allée. Dans cette robe en lin avec une ceinture en cuire. Elle trouvait cette tenue... malavisée. Elle n'avait pas l'air d'une jeune mariée. Elle avait l'air de vouloir attiser les désirs masculins.

Sa grand-mère rouspéta pour qu'elle mette les bijoux de la famille Tully : un long collier qui caressait sa ceinture et une parure pour cheveux courue d'éclats d'émeraude et de saphir. Le bruit s'accentua. L'heure approchait.

— Quelqu'un t'a dit ce qu'il se passerait ce soir ?

— Je serai mariée et j'appartiendrais à la famille Stark.

— Sotte, souffla l'ailleurs. Je te parle du partage de la couche, du corps d'homme, du corps de femme.

L'inquiétude de la promise grimpa en flèche devant cette annonce. Elle ne savait pas si elle voulait en parler ; aucune discussion précédente ne l'avait éclairée. C'était une autre de ses peurs, magnifiée à cause de la part mystérieuse qui s'ajoutait.

Mais sa grand-mère n'avait que faire de ses états d'âmes alors elle en parla. Ce qu'elle devait s'attendre à voir, à faire, à ressentir.

— Ne te laisse pas berner, la peur trace tes questions comme la douleur tes limites. Ne laisse ni l'une ni l'autre s'inviter dans ta couche.

Avant de partir, Catelyn s'agenouilla et pria les nouveaux dieux. Elle avait peur que son union ne soit pas correctement bénie sous le barral. Puis vint le temps de sortir et de rejoindre son futur mari.


Prompt : 411. Mot – Chasse

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