71 | Apparences, Bombabouses et Quidditch

o lundi les préparatifs

Gin et Brune enlèvent Defné le lundi à l'aube pour l'emmener essayer sa robe de mariée confectionnée à Paris. Je crois qu'elle m'avait tenu au courant, mais que je n'avais pas retenu ce détail. Je comprends aussi seulement à ce moment-là que mes belles-sœurs offrent la robe. Je me retrouve donc avec mes frères à devoir organiser la journée de tous nos enfants. C'est comme une promotion éclair. Il ne faut pas très longtemps pour décider d'aller faire un pique-nique là où ils pourront courir et voler sur des balais. Finalement, sans Ginny.

Sibel et Zefir sont légitimement intimidés quand ils se retrouvent face aux balais offerts par Severus et Susan. Mais tous leurs cousins sont autour d'eux, plus excités que clairs dans leurs explications. Ils finissent par s'enhardir et les imiter et les deux balais arrivent dans leur main respective. Sibel est la première à oser l'enfourcher. Avec une grande inspiration, elle finit par s'élever du sol dans une série de bonds heurtés. Je confie Zefir à Cyrus pour courir à ses côtés, mais elle arrive seule à réguler sa vitesse. Aelys est d'assez bonne composition pour se mettre à son niveau et elles survolent le champ toutes les deux à moins de cinquante centimètres du sol. Je me dis que Menininha aimerait leur courir après si elle était là. Mis en confiance par les résultats de sa sœur, Zefir finit, après plusieurs essais, à arriver à rester dans l'air, puis à avancer régulièrement. Tout le monde applaudit. Quand ils arrêtent, les enfants jouent à une version simplifiée du Quidditch avec Harry comme arbitre. Sibel prétend vouloir essayer, Zefir ne dit prudemment rien, mais c'est heureusement l'heure du pique-nique.

Entre deux sandwiches, la totalité des enfants oublient les balais au profit de la capture de jeunes grenouilles découvertes près du ruisseau qui coule paresseusement en bas du champ. Un barrage est construit. Un concours de ricochets est lancé. Sans que personne n'ait eu vraiment le temps de s'en rendre compte, il est l'heure de retourner à Londres.

Les filles rentrent après nous. Elles sont passées chez Iris qu'elles trouvent en bonne forme. Elles ne disent rien de la robe. Le dîner se prépare et se prend en commun, et on ne se retrouve avec Defné qu'une fois que les enfants - nos enfants - sont couchés. Sibel a dit qu'elle espérait revoler sur un balai. Zefir a parlé des grenouilles.

"Alors cette robe ?", je m'enquiers parce que je ne voudrais pas avoir l'air de ne pas m'intéresser suffisamment aux préparatifs.

"Tu la verras en temps et en heure. Pour être certaine, Brunissande l'a gardée avec elle. Mais... elle est magnifique... vraiment... Dire que je ne la mettrais qu'une fois ! En même temps, je n'arrive pas à imaginer un autre événement où cette robe serait portable ! À moins de la teinter dans une autre couleur..." Defné a l'air de se poser réellement la question, mais quand elle se tourne vers moi, c'est pour demander assez abruptement : "Brunissande m'a demandé si tu savais ce que tu allais porter... "

"Cyrus a parlé de m'emmener chez son tailleur", je confie. Parce que de fait la question a été soulevée quand on buvait du café en regardant les enfants courir après les rainettes.

"Bon, tu es sans doute entre de bonnes mains", commente Defné, a priori soulagée.

"Toi aussi", je souris.

Defné se laisse tomber à plat dos sur le lit avant de soupirer : "J'ai beaucoup de chance d'avoir les belles-sœurs que tu m'apportes... Ce n'est pas la femme de Altan qui m'accompagnerait avec autant de bonne volonté et de simplicité !"

"Vous n'avez jamais été proches ?"

Le regard de Defné est éloquent. Je ne sais pas quoi répondre.

"Ils ont confirmé leur arrivée mercredi matin. Ils nous demandent de venir en début d'après-midi", elle indique après un silence qui me semble trop long.

"Ok."

"Je crains le pire."

"Ton frère ne va pas se dédire maintenant !"

"Sans doute pas. "

"Je suis désolé que la comparaison entre nos familles soit si pénible...", je commence

"En même temps, si les tiens valaient les miens... on serait bien seuls ", elle me coupe.

"Si ça se trouve, Altan espère autant que toi que ce mariage sera l'occasion de vos retrouvailles", je tente.

"Merci d'essayer aussi fort, Kane", elle commente d'une voix atone qui me serre le cœur.

"Trop fort ?", je souffle.

Defné se tourne enfin vers moi, et je me rends compte combien je désirais qu'elle le fasse quand ses yeux dorés sont sur moi.

"Kane... je ne suis pas près de me lasser du fait que tu t'inquiètes pour moi, constamment, joliment, fortement...", elle promet.

On s'endort en se serrant dans nos bras et en se promettant qu'on sera là, l'un pour l'autre pendant des siècles et des siècles. Le mardi arrive et je me rends avec Harry, finalement, chez le tailleur conseillé par Cyrus qui doit assurer des cours à l'université. L'homme est affable et poli quand je n'arrive pas une seconde à me projeter dans les modèles qu'il fait apparaître dans une boule de cristal devant moi. Il me demande si je sais comment sera la mariée et je dois lui avouer que je n'en sais rien. Harry sort alors de sa poche une photo sorcière en me demandant de ne pas regarder.

"Un travail... magnifique et inspirant", est le commentaire du tailleur. Il a l'air sincère.

"Vous auriez une idée de quelque chose qui s'accorderait avec la tenue de sa fiancée ?"

"Sobre, épuré, élégant... ", réfléchit le tailleur. Il part et revient avec une étoffe d'un gris irisé qui m'intimide un peu mais que je trouve effectivement chic. "Est-ce que vous me faites confiance, docteur Lupin ?", il me demande. Comme je ne dis rien, il fait apparaître des robes bleu nuit dans la boule de cristal. "Je partirai de cette base, mais en accentuant encore la ligne. Vous êtes un homme mince. Vous serez un couple magnifique !"

Je tente de balbutier quelque chose sur le prix et Harry intervient pour dire que Cyrus et lui comptent bien payer cette tenue.

"Garde ton or pour ta nouvelle famille", il commente.

Je décide de ne pas provoquer de discussion inutile chez le tailleur mais, en sortant sur le chemin de Traverse, qui est spécialement animé par cette journée de printemps, je tente d'avoir une conversation responsable avec Harry sur tout ça.

"Je ne vais pas vous empêcher de payer ce que vous avez envie de payer, mais j'ai un peu l'impression que mon mariage nous échappe... "

"Un peu", sourit Harry.

"Je ne sais même pas combien tout ça coûte et je n'ai aucune visibilité sur les invités... "

"Tes amis seront là, ne t'inquiète pas. Place Grimmaurd sera plein comme il devait l'être au temps des bals Black ! Granny sera contente, je pense", il commente avec bonhommie.

"Vous n'allez pas tout payer !", je proteste.

"Cyrus et moi nous arrêtons à tes robes ; on peut ajouter celle de Defné si tu veux pour simplifier. Mais Papa, Mãe et Grand-Père, notablement Grand-père, s'occupe du reste", il m'apprend.

"Vous avez décidé quand ?"

"Ils ont décidé ça en voyant la tête que prenait la liste des invités. Fallait pas te marier ici, Kane, si tu voulais un pique-nique. Iris a eu raison d'aller au Brésil."

"Ton mariage en France était énorme... je m'en souviens", je le coupe.

"Ça va être du même acabit", il me confirme. "Mais ta future belle-famille sera impressionnée et, avec un peu de chance, laissera Defné tranquille."

Je garde tout ça pour moi alors qu'on part dès mon retour pour aller chercher Iris et faire une chouette promenade au parc avec elle, Defné et les enfants. En rentrant j'appelle mon équipe à Lo Paradiso et je donne mon avis sur des traitements. J'apprends à cette occasion qu'une délégation de Lo Paradiso se prépare à partir pour Londres et assister à notre mariage.

"Ça doit faire plaisir à ton père... plein de garous à un mariage politique international", réfléchit Defné. "Autant que ça serve plusieurs causes."

"Effectivement", je lui concède.

On s'endort sans parler de sa famille qu'on doit voir dès son arrivée le lendemain.

oo mercredi Les Karaman

On retrouve les Karaman et leur surveillant dépêché par le Diwan, Bershank, dans la même maison où nous avions rencontré Aslan il y a quelques mois. Comme la dernière fois, nous arrivons dans une voiture du Ministère et les policiers et les Aurors surveillent les lieux. Mais il y a aussi des différences. C'est l'après-midi, il fait soleil.

"Altan Bey", commence Defné en tendant la main vers sa main - répétition du geste que je l'avais vue faire avec son oncle. Presque hier et, en même temps, ça me paraît des siècles.

Altan la relève assez brusquement. "Une comédie inutile, Defné Kunçui", il estime les dents serrées. "Nous savons tous les deux que tu ne nous aides pas par fidélité familiale. Tu as choisi une nouvelle famille et je leur souhaite d'être satisfait de tes services."

Defné vacille presque et je ne sais pas où je trouve la ressource de serrer les dents. Je reste donc en retrait de la scène, les mains de Sibel et Zefir dans les miennes.

"Altan", proteste Bershank. "Vous oubliez ce que vous lui devez !"

"Je n'oublie rien. Je pense juste plus objectif de dire clairement que je donne ma bénédiction à cette union sans espérer en retour une quelconque loyauté. Le contraire serait soit de l'aveuglement, soit de l'hypocrisie."

Bershank a l'air ennuyé par cette position. Moi, qui n'ai que si peu de goût pour la politique et, de l'avis général, moins de sens stratégique que ma fille de huit ans, je me demande si Altan est bien malin de faire de telles sorties. Sa femme et ses enfants sont aussi immobiles et silencieux que des statues moldues. La plus jeune fille lance des regards dérobés vers moi et les enfants.

"Altan, tu as raison de dire que mes ambitions sont éloignées des tiennes", finit par articuler Defné. Il y a de la douleur dans sa voix. "Mais je ne te veux aucun mal. Ni à toi, ni à ta famille, ni à notre clan... Je pensais que... nous avions un accord."

"Je bénirai ton union et tes adoptions. Je ferai de ton mari un membre du conseil du clan. J'ai apporté le diadème. J'espère que c'est un tribut suffisant et que tu tiendras ta propre promesse."

Defné secoue la tête, désolée, je le vois bien. Trop de chagrin pour être en colère, je décide, le cœur serré.

"Albus Dumbledore et Nymphadora Lupin seront disponibles pendant la soirée. Ils ont... mis d'autres personnes sur la liste des invités... des personnes qui représentent la coopération européenne à différents titres... "

"Il nous faut la liste", intervient Bershank. "Pour nous préparer, Defné Kunçui", il rajoute avec davantage de déférence.

"Je vous l'enverrai dès qu'elle sera stabilisée. Ils attendent des confirmations", répond Defné atone et distante.

Altan signale d'un coup de menton qu'il a entendu l'engagement. Bershank remercie.

"Tu veux que je te les présente ?", tente Defné, trouvant je ne sais où le courage de briser le silence tendu qui a suivi. "Sibel et Zefir."

"J'ai lu leur dossier", commente Altan avant de s'adoucir légèrement et de se tourner vers moi et les enfants qui serrent chacun de leur côté une de mes mains avec inquiétude. "Mais ce sont des sangs-purs et j'imagine combien... tu as pu... avoir envie de les aider. Notre clan a eu une tradition de protection des victimes de conflit... Je peux l'honorer."

oo Jeudi. Finchley. Un thé chez Albus

"Ne vous frappez pas, chère Defné. Votre frère est dans une position sans doute difficile, sans doute humiliante, dont nous ne connaissons pas tous les tenants et aboutissants. Nous n'attendons qu'une chose de lui : qu'il tienne sa parole sur votre mariage et l'adoption des enfants", précise grand-père, chaque phrase étant ponctuée par une bouchée de gâteau au citron. Les fenêtres sont ouvertes sur le parc dehors. On entend les cris des enfants que nous avons amenés en nombre - Harry, Cyrus et moi. L'air est étonnamment doux et parfumé. On oublierait qu'on est à Londres. "Pour le reste, ça fait des années que nous regrettons qu'il n'y ait pas d'accord de coopération avec le Diwan. Nous devrions en avoir un. Grâce à vous, Defné. Nous espérons qu'il sera mutuellement profitable - les autres types d'accords sont moins intéressants de mon point de vue. Mais même un mauvais accord serait mieux que l'absence de relations qui caractérise la situation présente."

Defné lui fait un pauvre sourire perdu. Brunissande se penche pour lui presser la main et je m'en veux de m'être retenu.

"Et avez-vous décidé qui seront vos témoins ?", l'entreprend Grand-Père.

"Ginny et Harry ont accepté", elle annonce, et je me rends compte que la conversation était restée à mon "Je ne vois pas pourquoi ils refuseraient, mais tu n'as qu'à leur demander."
"Tu avais d'autres choses en tête", elle me souffle ayant, sans doute, bien interprété ma surprise.

"C'est un honneur", ponctue Gin avec chaleur. "Je travaille déjà mon discours !"

"Et toi, Kane ?", veut savoir Grand-Père et, au sourire de tout le monde autour de moi, je vois bien que peu pensent que j'aie déjà réfléchi à la question. Ils n'ont pas tort.

"J'imagine qu'Iris me tuerait à petit feu si elle n'était pas mon témoin. Donc même pas besoin de vérifier", je leur oppose. Et tous les présents rient leur approbation alors que je réfléchis à toute vitesse. "Après... Cristo aurait eu du sens pour moi, mais je crois que notre avocate a été assez claire : mon témoin doit être Britannique. Est-ce que Virgil ne serait pas... une bonne idée ?"

Un silence étonné mais pas désapprobateur me répond.

"Virgil serait un choix... très politique", remarque lentement Mãe. Presque elle s'excuse, je dirais.

"Vu la liste de vos invités à mon mariage...", je commence. Puis, je me ravise. Ce n'est pas leur décision mais la mienne. "Oui, ça le serait. Mais au point où j'en suis, je trouve ça cohérent et bienvenu."

"Il sera honoré", ponctue Papa comme une confirmation. Il y a toujours une note de surprise dans sa voix, note mon égo.

"J'ai hâte de voir tout cela", se félicite Grand-père avec chaleur avant de lancer sa nouvelle Bombabouse : "Vous avez prévu des activités avec la famille de Defné ?"

"Ils étaient pris aujourd'hui", s'excuse ma fiancée. "Mais de toute façon, je ne sais pas ce que j'aurais pu leur proposer ? Une promenade au parc ?"

"Je ne peux que donner raison à Defné", j'indique sincèrement.

"Je peux avoir des places pour des matches pour les qualifications de la coupe européenne de Quidditch. Demain après-midi, il y a un match intéressant entre l'équipe de Bulgarie à l'équipe d'Irlande. Du très grand jeu en perspective." Cyrus a l'air d'accord, mais ils concentrent une grande partie de l'expertise familiale en la matière. "Invitez-les. J'ai autant de place que je veux !"

L'idée prend une place physique dans la pièce.

"Tu crois qu'ils vont être intéressés ?", je vérifie auprès de Defné.

"Je ne sais pas !"

"L'important est de proposer quelque chose", estime Grand-père, et tout le monde - je veux dire, tous les autres sauf Defné et moi - semble se ranger à son avis.

Defné lui emprunte donc un hibou pour envoyer un message à son frère. La réponse nous parvient même pas une demi-heure plus tard : Beren Karaman viendra voir le match avec leurs trois enfants. Altan, lui, a d'autres engagements.

"J'imagine qu'il n'a pas osé refusé totalement et qu'il n'a pas laissé le choix à Beren", soupire Defné en laissant le rouleau s'enrouler.

Sa déception est palpable et rien ne semble totalement la tirer de sa mélancolie toute la soirée. Quand nous allons nous coucher, je ne sais rien faire d'autre que la serrer dans mes bras. Elle se laisse faire.

oooo Vendredi. Londres

Le vendredi matin, j'appelle Virgil avant qu'il ne parte travailler à la Fondation. Il est ému aux larmes quand je lui demande s'il veut bien être mon témoin en m'excusant de ne pas l'avoir prévenu plus tôt.

"Tu me connais, je fais tout au dernier moment, et mal."

"C'est pas parce que tes frères ont refusé ?", il se moque brièvement avant de demander comme je m'y attendais : "Ton père...?"

"... approuve", je confirme patiemment.

"Merlin... Il va me falloir un discours ! - J'imagine qu'Iris est l'autre témoin ?"

"Je ne compte pas rendre Defné veuve trop vite", je confirme.

Je rapporte la confirmation de l'accord à une Brunissande, entourée de listes d'invités et de menus. Elle voit sans doute la panique dans mes yeux.

"Les mariés n'ont pas à s'occuper d'autre chose que de s'aimer très fort, Kane", elle me propose "Ou en tout cas, c'est comme ça que ça devrait être, à mon avis".

On part en début d'après midi dans trois taxis moldus pour Wembley. Toute la tribu y va ou presque - Brunissande s'occupe de notre mariage. À l'entrée du stade, Beren et ses trois enfants sont au rendez-vous. Ils ont visiblement dévalisé le Chemin de Traverse, mais si leurs vêtements sont britanniques, sorciers et de bonne coupe, ils détonnent un peu. Sans doute trop habillés.

Dans la cohue de la tribu, je me trouve séparé de Defné restée à discuter avec sa belle-sœur. Quand on s'assoit, de fait, je suis loin d'elle avec, à ma droite, les neveux de Defné et à ma gauche nos enfants et leurs cousins. Mes frères sont côte à côte au bout du rang. Ginny est restée parler avec des gens en haut des gradins. Je regrette l'absence d'Iris alors que c'est moi qui lui ai dit qu'elle ferait mieux de continuer de se reposer.

Le match commence et je le passe à commenter chaque geste et chaque décision de l'arbitre à Zefir, qui a rapidement migré pour s'installer sur mes genoux, et à Sibel d'un côté et aux neveux de Defné qui se mettent à écouter quand ils m'entendent parler turc avec Zef. C'est un bon exercice linguistique pour moi. De loin en loin, entre deux feintes de Wronski et l'exclusion d'une joueuse bulgare, je réalise que Defné et Beren sont en grande conversation et qu'elles ne regardent pas le match.

Il faut pourtant attendre qu'on ait eu les autographes de l'équipe vainqueuse, signés en main propre grâce à Gin comme dans tous mes souvenirs ; qu'on ait pris le thé dans au club du stade parmi une foule bien trop nombreuse pour avoir une vraie conversation et qu'on soit rentrés au "Village Wesley-Lupin", comme l'appellent leurs habitants, pour que 'j'arrive à isoler Defné.

Quand elle s'en rend compte, je vois bien qu'elle hésite, et je ne sais pas comment lui donner le courage de se lancer.

"Tu as dû remarquer que ma belle-sœur m'avait beaucoup parlé pendant le match", elle finit par articuler. J'opine. "Je ne m'attendais pas à ce qu'elle m'a dit." On se regarde de nouveau et elle reprend : "Elle prétend que mon frère fait semblant quand il est hautain et agressif avec moi. Selon elle, il pense que si on a l'air trop proches, les réformateurs ne vont pas lui faire confiance alors il préfère avoir l'air fâché avec moi."

"C'est ce qu'elle t'a dit ?", je vérifie sans cacher ma surprise.

"C'est ce qu'elle m'a dit. En fait, Altan lui a demandé de m'assurer qu'il était reconnaissant de les avoir sauvés."

Je tente de mesurer la plausibilité de toutes ces informations sans beaucoup de succès.

"Les Réformateurs ont besoin d'être sûr qu'il est de leur côté. Si ça a l'air trop facile avec ta mère et ton grand-père, ils vont penser qu'il y a un accord entre nous", elle reformule presque elle plaide. Je mesure qu'elle aimerait que tout cela soit vrai. Évidemment.

"Il y a un accord entre vous ?", je questionne avec sincérité. On va se marier demain, j'ai le droit de poser la question, non ?

Elle hausse les épaules.

"Je me dis que survivre à tout ce bazar est finalement notre ambition à tous les deux. Protéger ceux qu'on aime aussi. Rien de bien héroïque... Tu es déçu ?"

Je prends le temps avant de me répondre : "Je t'aime. Si tu peux avoir de bonnes relations avec ton frère, moi je suis pour." Defné pose sa tête sur mon épaule comme un remerciement. C'est un peu tôt à mon avis. Merlin, donnez-moi le courage. "Je n'ai pas compris quand il a parlé de mon entrée dans le conseil du clan, que je devais en être membre."

"Tu es mon mari. Tu rentres de fait dans le clan. Et tu es un homme", elle énonce d'une voix plate.

"Ça veut dire quoi ? Qu'est-ce que ça implique ?", j'insiste.

"Rien. Si tu n'en as pas envie. Sinon tu pourras avoir de jolies réunions avec mon frère et mon cousin. Changer la face du monde... Qui sait ?"

"Defné... "

"Je suis désolée, Kane. Juste... ne te mets pas à douter maintenant", elle lâche avant de cacher son visage dans ses mains.

"Je ne doute pas, Defné. Je... je ne crois pas que ton frère et moi ayons les mêmes idées sur la face du monde... Je vais lui laisser la diplomatie et me contenter d'être un médicomage acceptable... Tu n'es pas trop déçue ?"

"Non", elle promet en se jetant dans mes bras. "Vivement demain que je puisse l'avoir dit à la face du monde !"