Nouveau chapitre ! Bonne lecture, merci à ceux qui sont là, lisent, reviews, follow etc.

Je tiens le rythme de publi depuis 3 chapitres ! Je ne me rappelle plus depuis quand je n'avais pas réussi =="


Le récit de Kreattur

Jeudi 13 juin 1996 : le Phare

La première pensée qui m'est venue quand j'ai ouvert les yeux est : « ah, je ne suis pas morte ». J'avais été lavée, changée, déplacée sans que je ne m'en rende compte. Je ne me suis pas posée plus de question que ça : c'était sans nul doute l'œuvre de mes elfes. Aucun humain n'aurait pu me manipuler de la sorte sans que cela ne me réveille, peu importe la profondeur du sommeil dans lequel je me trouvais.

Je suis restée couchée dans mon lit au Phare, fixant le plafond sans bouger. J'avais l'impression d'avoir dormi pendant dix ans d'affilé. Il était difficile de revenir à la réalité. Ce que j'avais vécu et fait la veille n'était de loin pas oublié mais me paraissait déjà très distant. Je n'ai pas cherché à me pencher à nouveau dessus. Il ne fallait pas. Je craignais ma réaction si je le faisais.

Des spasmes agitaient mes membres et respirer était pénible. En bougeant un peu la tête, la sensation de la taie d'oreiller directement sur mon crâne m'a appris que quelques touffes de cheveux avaient effectivement été arrachées à l'arrière de mon crâne. Mon visage me picotait mais je reconnaissais la sensation d'un baume de soin. Laborieusement, j'ai glissé un bras sur la place vide du matelas à côté de moi. C'était là que Dante dormait avant…

Un crac ! m'a appris qu'un de mes elfes venait d'apparaitre dans la pièce. Je l'ai écouté s'approcher avec empressement et j'ai vu sa tête apparaitre à gauche de mon lit du coin de l'œil. J'ai un moment espéré pouvoir l'ignorer et rester couchée là indéfiniment. Finalement, avec un soupir, j'ai porté mon attention sur Tera qui me regardait nerveusement. Mais elle a souri en voyant que j'étais réveillée.

- Maîtresse, Monsieur Lupin et Monsieur Maugrey sont ici. Je les ai fait attendre dans la cuisine. Ils sont là depuis deux heures déjà. Que doit leur dire Tera ?

J'ai commencé à ouvrir la bouche pour lui demander de les envoyer se faire voir chez les moldus. A quoi bon cela dit ? Il allait bien falloir faire face à la réalité et le plus tôt serait le mieux. La guerre ne s'était pas arrêtée pour moi. Même si je n'en pouvais plus.

- J'arrive.

Ma voix m'a fait sursauter. Elle n'était qu'un murmure rauque à peine audible. Je me suis raclée la gorge, mais ça a juste réussi à me faire mal. Il allait falloir que je la préserve pendant quelques jours.

Une fois l'elfe disparue j'ai pris l'inspiration la plus profonde que j'ai pu sans que ça me fasse mal et je me suis péniblement redressée. Rien de nouveau sous le soleil, mais le Doloris ça fait mal. Je l'avais déjà subi seulement pas de cette manière et pas sur une période si prolongée… Sans compter que Barty était expert en la matière… Il allait me falloir une potion, en espérant qu'il m'en restait en stock car je ne pourrais rien préparer avec des spasmes pareils dans les mains. J'ai essayé d'ignorer leurs tremblements tandis que j'avançais à petits pas dans le couloir. Les escaliers semblaient un obstacle infranchissable et j'ai fini par descendre la majorité des marches sur les fesses plutôt que de tomber dedans.

Les deux sorciers discutaient et se sont tus quand je suis entrée dans la cuisine. Remus a ouvert la bouche sans doute pour me questionner devant mon apparence mais Alastor a levé la main pour l'en empêcher sans me quitter du regard. Je lui en ai été intérieurement reconnaissante. M'approchant d'eux, je me suis assise sur le banc. Prendre la théière et me servir dans la tasse qui venait d'apparaître devant moi a été pénible. Le capuchon de la théière tremblait tandis que mon bras tressautait sous le poids de l'objet pourtant quasiment vide. Après avoir mis la moitié de l'eau à côté de ma tasse feignant de ne pas le voir, j'ai reposé non sans soulagement le tout. J'ai essayé de boire une gorgée de mon thé mais un nouveau spasme m'a fait lâcher la tasse, renversant le peu de liquide que j'avais pu y verser. La tasse a rebondi sur la table puis au sol et s'est brisée. Alors, je me suis contentée de joindre les mains.

- Par Merlin, que t'est t-il arrivé ? a fini par craquer Remus.

- Sirius est mort, ai-je chuchoté.

Remus a sursauté.

- Barty Croupton Junior aussi, ai-je continué sans lui laisser le temps de réagir.

Silence. Les deux hommes ont échangé un coup d'œil. Puis se sont à nouveau tournés vers moi.

- Que s'est-il passé ? m'a pressée mon plus vieil ami, plus pâle qu'un Veaudelune.

J'ai secoué la tête. Je n'avais même pas eu à me poser la question : jamais je ne raconterai ce qu'il s'est passé. Ni le réel état de Sirius, ni la torture infligée par Barty, ni la manière dont je l'avais tué et surtout pas la façon dont les détraqueurs se sont écartés devant moi après. Comme devant Voldemort. Je ne comprends pas très bien comment c'était possible, mais ils l'ont fait.

- Alastor, tu as de la potion pour ça ?

Je n'ai pas eu besoin de lui préciser de quoi je parlais. Il a secoué la tête, sans que cela ne me surprenne : on avait eu l'occasion de distribuer le peu de stock que nous avions avec les évènements des derniers jours. J'allais devoir prendre mon mal en patience.

- William nous a dit que tu avais ramené Percy, a doucement dit Remus. Il s'inquiétait pour toi.

J'aurais bien balancé une remarque cinglante à propos de l'endroit où l'aîné Weasley pouvait s'enfoncer sa sollicitude mais je devais préserver le peu de voix qu'il me restait. Je me suis contentée de soupirer.

- Severus s'occupe toujours de Mary, ils sont en transe ensemble depuis plusieurs heures à présent.

Mary… Je l'avais complètement oubliée jusque là. De même que Cameron. Ce qu'il m'était arrivé au cours des dernières 24h était plus grave qu'eux. Je n'étais même pas capable de ressentir une once de culpabilité sur le coup.

J'ai fermé les yeux, lasse. Je n'avais pas l'envie de discuter de ça. Je n'avais l'envie de rien en fait. C'est Tera, qui est apparue dans la cuisine au moment où je pensais ça, qui est intervenue. Elle a chassé Alastor et Remus disant que je donnerais des nouvelles quand je serais rétablie. Mais est ce que j'ai vraiment le temps pour ça ? Cependant, je n'ai émis aucune protestation quand Tera m'a directement transplanée dans mon lit. J'ai même ressenti une certaine forme de soulagement en me couchant. C'était pourtant dangereux de rester au Phare : Voldemort avait déjà essayé de me tuer en envoyant des lycanthropes ici il y a quelques jours. Les défenses que j'avais mises en places étaient en mauvais état. Mais ça m'était égal. Mourir serait vraiment un soulagement. J'ai fermé les yeux et je me suis rendormie.

Vendredi 14 juin 1996 : le Phare

La peau de mon visage était encore un peu rosée, mais allait mieux. Mes tremblements ont commencé à régresser mais j'ai toujours mal dès que je bouge. Mon corps guérit. Comme toujours. C'est plutôt mon esprit qui est à la traine… Ca non plus ce n'est pas nouveau.

Je n'arrive pas à me débarrasser de la profonde lassitude, de l'impression de vide infini qui s'est logée dans ma poitrine depuis la mort de Sirius. Je n'ai pas du mal à le réaliser : je n'ai pas eu ces moments de négations ou cet espoir de recevoir un message de sa part disant que tout cela n'était qu'une vaste blague. J'avais toujours ressenti ça pour les autres proches qui étaient morts autours de moi, mais pas pour lui. Il était mort. Et c'était peut-être pour le mieux étant donné ce qu'était devenue sa vie. Déjà bien avant qu'il ne se fasse capturer il se traînait sans savoir quoi faire ni comment guérir. Je n'avais pas eu la force de le soutenir, alors c'était sans doute en partie de ma faute.

Je me traîne dans le Phare, passant de pièce en pièce, y voyant les fantômes des belles années que j'ai pu y vivre. Mais rien ne m'arrache ne serait-ce qu'un sourire.

J'ai l'impression que le bonheur a totalement disparu. Comme si, finalement, c'était un détraqueur plutôt que du vide qui était niché dans ma poitrine.

Samedi 15 juin 1996 : manoir Black Square Grimmaurd

Je ne sais pas très bien ce que je fiche ici. Soudainement, prise d'une impulsion, j'ai transplané à Londres. Mauvaise idée : j'étais encore faible et je n'ai pas très bien supporté le voyage. J'ai vomis dans une poubelle et un moldu qui passait par là m'a jeté un regard de travers. Un instant, j'ai voulu lui lancer une invective mais j'ai renoncé. A quoi bon ?

Quand mon estomac s'est remis en place et que j'ai cessé de trembler, même si mes doigts sursautaient encore occasionnellement suite à l'exposition prolongée au Doloris, j'ai traversé la rue jusque devant le Manoir des Black. Pourquoi ici plutôt que dans la maison où nous avions habité ensemble et où il vivait depuis sa sortie de prison ? Je ne sais pas.

Tout y était silencieux. Est-ce que Kreattur était mort du choc ?

Je me suis trainée jusqu'à la chambre de Sirius. Même si le manoir avait été remis en état, l'endroit n'avait pas bougé : même des elfes ne peuvent venir à bout d'un sort de Glue Perpétuelle visiblement. Les posters moldus de fille, l'écharpe de Gryffondor… Heureusement, le matelas n'était pas poussiéreux quand je me suis laissée tomber dessus. Je suis restée un moment immobile, puis j'ai commencé à fouiller. Il avait laissé pas mal de choses dans les tiroirs en partant. Des trucs débiles d'adolescents. Quand la vie ne l'avait pas encore trop abimé.

Les larmes se sont mises à couler le long de mes joues toutes seules. Il n'y avait pas de sanglot, juste un flot de larmes qui coulaient, coulaient, coulaient toutes seules sans sembler se tarir. Ca ne me faisait pas me sentir mieux mais je n'arrivais pas à les stopper.

La porte s'est ouverte en grinçant et un Kreattur maigrelet et affaissé s'est présenté devant moi, un plateau sur lequel se trouvaient une tasse et une théière à la main. Ainsi donc il avait survécu.

Péniblement, il a posé le tout sur la petite table de chevet et m'a servi non sans s'être incliné. Au lieu de partir, il est ensuite resté debout contre le mur. Sans doute voulait-il me dire quelque chose… Et je pensais deviner ce que c'était.

- Qui hérite des biens de la famille Black ? ai-je demandé.

- Personne n'est en mesure d'Hériter, Maîtresse.

- Que veux-tu dire ?

- Le Nom des Black ne peut disparaître : héritera l'enfant qui pourra porter le Nom.

- Cela ne devrait-il pas être Drago Malefoy ?

- Drago Malefoy porte le nom de Malefoy qu'il transmettra à son fils. Si Drago Malefoy a un deuxième fils qui abandonne le nom de Malefoy pour celui de Black, alors Drago Malefoy obtiendra l'Intendance de la Maison Black en attendant la majorité de son fils.

Voilà un concept intéressant. Et ancien. Pas que ce soit une surprise. Le nouveau chef de la Maison Black ne serait personne d'autre qu'un homme qui a renoncé à son nom de naissance pour prendre celui de Black, avec qui il devait bien entendu être apparenté de près ou de loin.

- Sirius pensait que Mary pourrait hériter.

- Le défunt Maître connaissait bien peu de choses de sa propre Maison.

Il avait essayé de parler d'un ton égal, sans doute par égard pour moi, mais je sentais le dédain dans ses mots. Je n'ai même pas réussi à lui en vouloir.

- Concrètement, qui a la gestion de la Maison Black à cet instant ?

Les elfes de Maison savaient d'instinct ce genre de chose : ils sont liés par la magie même à la maison qu'ils servent. Ils savent toujours qui est leur Maitre. D'ailleurs, certains sont morts après avoir désigné un nouveau Maître qui ne plaisait pas à tout le monde, alors qu'ils n'y peuvent rien les pauvres.

- La maîtresse a été officiellement désignée comme Intendante par le dernier Lord régnant, a-t-il répondu.

- Cet enfoiré de Sirius a trouvé un moyen de me refiler définitivement le bébé, ai-je dit un micro sourire soulevant un coin de ma lèvre.

Mais c'était une bonne nouvelle. Au moins Lucius et Bellatrix garderaient leurs sales pattes loin des biens des Black. Ils ont déjà assez de moyens.

- Qu'est ce que je dois faire maintenant Kreattur ?

Il ne pouvait pas m'aider, mais malgré moi, je lui ai exposé la situation avec ces histoires de Horcruxes, de Voldemort, de Mary et de toute cette merde noire qui était ma charge sans que j'en ai jamais voulu. Ca m'a fait du bien, cela dit.

Quand j'ai terminé de parler j'avais la gorge sèche et l'elfe de Maison se dandinait sur place. Il avait les lèvres convulsées en une moue torturée.

- Qu'y a-t-il ? Parle Kreattur.

- Kreattur est un mauvais elfe, a-t-il commencé. Le Maître Regulus lui a ordonné de ne jamais parler et de détruire l'objet. Mais Kreattur n'a jamais réussi à le détruire.

- De quoi parles –tu ? Quel objet ?

- L'objet que le Maître Regulus a dérobé au Seigneur des Ténèbres en y laissant la vie.

Il a poussé de petits gémissements pitoyables en pleurant. Je me suis redressée comme si on venait de me mettre un violent coup de pied aux fesses. Serait-il possible ? Non… Un horcruxe ici ? Ca correspondait à la description, mais c'était impossible ! Regulus était mort depuis tellement d'année ! Il…

Je me suis alors rappelée quelque chose. C'était un souvenir quasi effacé de ma mémoire, mais Regulus était venu me trouver juste avant sa mort. J'ai fouillé dans mon journal pendant plusieurs minutes –je me souvenais vaguement de la date, fin 1978, et j'ai trouvé ce que je voulais. Béni soit le jour où j'ai commencé à consigner tous les faits insignifiants de ma vie par écrit !

Ce jour là, il m'avait dit « Il l'a fait, le Seigneur des Ténèbres l'a fait. Kreattur a vu le médaillon. Il est immortel ! Il s'est mutilé ! La magie noire… »

Incrédule, j'ai éclaté d'un rire nerveux qui n'avait rien de joyeux. Regulus savait. Il savait en 1978 ce qu'avait fait Voldemort. Il était venu m'avertir, peut-être me demander de l'aide, mais il était pourchassé et je ne l'avais pas écouté. Il savait… Il y avait quelqu'un qui avait découvert la vérité il y a 18 ans et avait essayé de régler le problème… Regulus avait changé d'avis ? Il s'était retourné contre Voldemort et ça avait causé sa mort.

- Merlin, ai-je chuchoté. Sirius, pourquoi a-t-il fallu que tu meurs sans apprendre la vérité ?

Sirius avait toujours aimé son frère malgré ce qu'il affirmait. Il avait vécu son entrée chez les Mangemorts comme une trahison. Bordel.

- Kreattur, raconte-moi absolument tout. Et après, si ce médaillon que Regulus a volé à Voldemort est un Horcruxe, je vais le détruire.

Cette histoire avait pour mérite de me faire sortir de mon état de torpeur. Elle rallumait le feu en moi. Si on en avait encore un de moins… Qu'avait dit Zilphya déjà ?

« Parmi les Trésors de Tom deux ont été détruis, trois sont trouvés mais l'un perdu, un est protégé par un dragon et le dernier se trouve à l'endroit de sa défaite. »

Nous avons détruit la bague et le serpent, ce médaillon serait-il l'un des trois trouvé ? Celui qui a été perdu ? Et attends un moment… elle a dit à l'endroit de sa défaite ? Pourtant elle avait dit que rien n'était joué avant juin prochain ? Avait-elle prédit sa défaite ? Etait-ce un moyen supplémentaire de me tromper ? Pour que je n'abandonne pas ? Je ne savais pas, mais ça m'a donné un coup de fouet supplémentaire. Il y avait sa défaite et Voldemort dans la même phrase. Même si je pouvais plus y croire, je le devais.

J'ai patiemment écouté le récit de Kreattur et ça m'a glacé le sang. Le pauvre : il a vu son Maître se faire tuer par des inféri. J'ai hâtivement chassé l'image de Greg qui avait lui aussi été changé en l'un d'entre eux tandis que l'elfe allait me chercher le médaillon.

Il s'agissait d'un objet en or massif avec un serpent en émeraude sertit dessus. La marque de Salazar Serpentard. Il pulsait la magie noire. Ca ressemblait aux Horcruxes déjà détruits. Je n'allais pas prendre de risque : j'allais le jeter dans le Feudeymon qui n'avait toujours pas cessé de ravager Londres. Mais avant de partir de Square Grimmaurd, je me suis agenouillée devant Kreattur et j'ai posé délicatement ma main sur son épaule en le fixant droit dans les yeux. Les siens se sont écarquillés avec ce qui ressemblait presque la frayeur au fond.

- Merci Kreattur. Tu viens de m'aider plus que tu ne peux l'imaginer. Tu peux considérer que tu as accompli les ordres donnés par Regulus : je vais jeter le médaillon dans le Feudeymon. C'est l'une des seules choses qui peut détruire un Horcruxe.

Il s'est mis à sangloter en me remerciant et ne semblait pas vouloir arrêter. Mal à l'aise, même s'il s'agissait de sanglots de joie et non de tristesse, je suis sortie du Manoir. Je n'allais pas tenter de transplaner vu l'état dans lequel je m'étais trouvée plus tôt, mais il n'était pas bien difficile de se diriger vers le Feudeymon à pied. Et j'avais besoin de marcher. Ca me faisait du bien. J'avais l'impression qu'à chaque pas, le feu de mon âme était alimenté par la chaleur du Feudeymon qui se faisait de plus en plus forte. Je ne pouvais pas mourir. Je ne pouvais pas abandonner. J'allais buter Voldemort. J'allais le buter et danser sur son cadavre, puis j'irais accomplir ma vengeance. J'irais tuer ce salopard de Vadim Kniasev.

Après.

Après je pourrais disparaître de ce monde maudit.

Enfin.


A suivre...