Note de la traductrice : me voici donc de retour avec une nouvelle traduction, celle d'une histoire multi-chapitres (32) intitulée Because Of A Boy, de la formidable cutestkidsmom.
Les personnages de la saga Twilight appartiennent à Stephenie Meyer, et je traduis cette histoire avec l'aimable autorisation de l'auteure.
Bonne lecture.
Résumé : Edward est le fils d'un père autiste. Bella est la mère d'un garçon autiste. Qu'arrive-t-il lorsque leurs chemins se croisent ? Peuvent-ils trouver la paix et l'amour dans le chaos ?
À cause d'un garçon
Chapitre Un : Des chemins qui se croisent
Je suis en train de me hâter au centre-ville pour aller rencontrer un client lorsque je renverse accidentellement du café sur ma chemise d'une blancheur éclatante. Bien sûr je pourrais envoyer ma sœur Alice, qui est aussi mon assistante personnelle, m'en chercher une autre, mais ça transformerait une tâche de dix petites minutes en défilé de mode d'une heure.
« Dépose-moi au bord du trottoir, Felix. Je vais entrer prendre une chemise et je serai de retour dans une minute. »
« Très bien, Monsieur, » dit mon chauffeur en se garant devant Bergdorf Goodman.
Je ne prête guère attention à mon environnement étant donné que je n'arrête pas de recevoir des messages texte toutes les minutes, de mon père ou de Tanya, mon associée. J'aurais dû être plus vigilant. Mais si je l'avais été, ma vie n'aurait jamais changé comme elle l'a fait.
« AÏE ! » Ne puis-je m'empêcher de hurler alors que quelque chose fonce sur ma jambe.
« Oh mince, je suis désolé Monsieur, je ne voulais pas frapper votre muscle gastrocnémien. » Une petite voix polissonne remplie de regrets et de connaissances stupéfiantes attire mon attention.
Je me retourne et me retrouve face à face avec un garçon qui ne peut pas avoir plus de six ans. Il a des cheveux bruns parfaitement coiffés, de grands yeux bleus perçants, et il porte un costume qui s'apparente au mien.
« Y a pas de mal. » Je jette un regard à la ronde et ne vois aucun adulte avec lui. « Est-ce que tu es seul ? »
Il secoue la tête. « Comment pourrais-je être seul alors que je vous parle ? » Demande-t-il comme si c'était l'évidence même. Mais il a raison.
« D'accord, petit malin, je voulais dire es-tu venu ici tout seul ? »
Cela semble s'enregistrer comme une question logique. « Je suis ici avec ma mère, elle est là-bas. » Il se retourne et je regarde dans la direction qu'il m'indique.
« Il y a une bonne quinzaine de dames là-bas, laquelle est à toi ? » J'entends ses gloussements. « Qu'est-ce qui est si drôle ? »
« Aucune d'elles n'est À MOI. Les personnes ne m'appartiennent pas. L'esclavage a été aboli en 1865. » Il secoue la tête et je sens une intense familiarité dans la situation.
« Je m'appelle Edward, et toi ? » Je lui tends ma main en guise de salutation.
Il me toise avec méfiance. « Comment puis-je savoir que vous êtes qui vous prétendez être ? »
Je hausse les épaules. « On appelle ça la confiance. »
« Maman m'a dit de ne jamais faire confiance aux étrangers. » Il recule d'un pas et enfonce ses mains dans ses poches.
« Ta maman est une femme très intelligente. J'aimerais bien la rencontrer et lui dire qu'elle élève un jeune homme des plus brillants. »
Cela le fait sourire. « Elle est juste… »
Il s'apprête à pointer de nouveau dans sa direction quand j'entends les cris stridents d'une femme paniquée. « SÉBASTIEN ! OÙ ES-TU ? SÉBASTIEN ! »
Je regarde le petit garçon habillé comme un juriste à côté de moi et je vois une légère rougeur apparaître sur ses joues. « C'est toi Sébastien ? » Je murmure. Il hoche la tête.
Je vois sa mère éreintée se précipiter à travers les étalages de vêtements. « Sébastien Charles Swan ! » Elle s'arrête juste devant lui et s'agenouille. Elle ferme les yeux et respire profondément, et lorsqu'elle commence à parler, elle est calme.
« Tu ne peux pas t'éclipser comme ça. Je t'ai expliqué maintes fois les dangers d'aller errer tout seul. Tu effraies maman quand tu fais ça. Tu es mon garçon spécial et je t'adore. Si les gens savaient combien tu es merveilleux, ils te déroberaient à moi. » Elle embrasse sa joue et l'étreint avec tout son corps.
Je vois le garçon se crisper au début, mais quand sa mère le serre plus fort il se détend visiblement.
« Madame ? » J'interromps leur étreinte, voulant simplement m'assurer que tout va bien avant de m'en aller.
Elle me regarde avec de grands yeux brun foncé. C'est une femme forte, on peut le dire rien qu'à regarder ses yeux de combattante. « Oh, je suis désolée, je ne vous avais pas vu. » Elle se relève et brosse son pantalon.
« Voici Edward. Il m'a dit de lui faire confiance, mais tu m'as dit que je ne devais pas, alors je ne l'ai pas fait. » Les mots de Sébastien sont presque robotiques. Ses yeux bougent comme s'il lisait et répétait.
« C'est exact, Bébé, et j'en suis heureuse. » Elle embrasse le sommet de son crâne et se tourne vers moi. « Merci de ne pas avoir kidnappé mon fils, Edward. Sébastien a tendance à errer. Ce n'est pas intentionnel, mais il ne peut pas s'en empêcher. Il va où son esprit le mène. » Elle sourit avec fierté. Elle n'a plus rien à voir avec la maman stressée que j'ai vue quelques minutes plus tôt.
« Y a pas de souci. » Mon téléphone vibre et je prends l'appel. « J'arrive, Tanya. Attends-moi et contente-toi de les charmer jusqu'à ce que je sois là… Bon, comme tu veux… Ok… Bye. » Je roule des yeux.
« Vous avez la même tronche que ma mère a quand mon père l'appelle, » dit Sébastien en toute innocence. « Vous ne devez pas l'aimer beaucoup, cette Tanya. Ma mère déteste mon père. »
« Je ne le déteste pas, Seb, tu le sais ça. » Elle me lance un regard contrit. « Je ne le déteste pas, c'est juste que lui et moi ça ne fonctionne pas, vous savez ? »
Je souris. Bien sûr que je sais. Qui n'a pas déjà été dans une relation amoureuse qui a échoué ou qui est en déroute ? « Bien sûr. »
« Je suis Bella, en passant, et vous connaissez Sébastien. » À cette présentation, il lève sa petite main et je la serre.
« Voilà, maintenant nous avons été officiellement présentés par ma mère, et par conséquent nous ne sommes plus des étrangers et nous pouvons converser régulièrement et nous tutoyer. » Mes yeux s'agrandissent à ses mots. J'entends Bella émettre un petit rire.
« Ok, mon petit garçon spécial, allons-y. Nous avons assez monopolisé cet homme. » Elle agite la main et s'éloigne. Ce garçon me rappelle quelqu'un. J'essaye de résoudre cette énigme longtemps après avoir quitté le grand magasin.
ooo
« Nom de Dieu, Edward, tu as près de quinze minutes de retard ! » Gronde Tanya quand j'arrive au bureau.
« Ne me parle pas sur ce ton, Tanya ! » Je pointe un doigt dans sa direction, et d'enragée qu'elle était, son expression devient sensuelle.
« Je suis désolée, mon lapin, tu m'a mis les nerfs en pelote. D'ailleurs, où étais-tu ? » Elle fait danser ses doigts sur ma cravate.
« Chez Bergdorf, je te l'ai dit au téléphone. » Je recule.
« Eh bien, nous devons nous dépêcher. Notre client est ici, mais ça te dirait d'aller dîner après ? » Elle bat des cils d'une manière aguichante que je trouve seulement grotesque.
« Non. Maintenant allons-y. »
Je suis sorti avec Tanya pendant quelques années. Je pensais que c'était le grand amour jusqu'à ce que je la surprenne dans MON bureau en train de se faire baiser par MON ancien client Alistair Holmes. Inutile de dire que depuis, sa simple vue me donne la nausée, sauf qu'elle refuse de me laisser racheter ses parts de l'entreprise, alors je suis coincé avec elle pour le moment.
« Tu dis toujours non, ça fait une éternité, quand vas-tu me pardonner et me donner une autre chance ? » Roucoule-t-elle.
« Voyons voir. » Je jette un bref coup d'œil à mon calendrier. « Oh, d'accord, j'ai une petite place pour toi dans mon horaire dans la semaine des quatre jeudis. » Je souris et me précipite vers la salle de réunion. J'entends Tanya souffler bruyamment et faire claquer ses talons derrière moi.
Tout au long de la réunion, je n'arrête pas de recevoir des textos de mon père :
Savais-tu qu'un escargot peut dormir durant trois ans ? - Papa
Je secoue la tête, rigole et lui réponds. Super cool - Edward
N'est-ce pas ? Je me demande néanmoins s'il rêve. Je vais approfondir mes recherches et je te tiendrai au courant - Papa
Bonne idée - Edward
La réunion s'avère inutile puisque le client est parfaitement heureux de la trajectoire empruntée par notre entreprise pour promouvoir son produit. Ils voulaient simplement nous faire savoir qu'ils nous surveillent. C'est une tactique tellement stupide.
ooo
Je suis en train de préparer le dîner quand mon téléphone sonne. Je regarde l'heure. « 18h pile, » je marmonne en répondant. « Hey, papa. »
« Bonsoir Edward, comment était ta journée ? »
« Excellente, et la tienne ? »
« Décevante. »
« Oh ? Pourquoi ? »
« Il n'y a pas moyen de savoir si un escargot fait des rêves. » Il soupire.
« Je suis désolé, papa. Peut-être que c'est un truc sur lequel tu peux travailler ? »
« Peut-être, mais peu probable. Je suis beaucoup trop occupé avec d'autres projets. »
« Comme quoi ? »
« Savais-tu qu'il existe plus d'une vingtaine de variétés de poissons rouges ? » Il s'est clairement laissé distraire par quelque chose. Ça ne sert à rien de le lui rappeler. Il est comme ça.
« Je le sais maintenant, » je réponds avec amusement.
« J'ai aussi regardé un documentaire à 16h15 aujourd'hui, et j'ai appris que les chevaux ne peuvent pas vomir. Je ne le savais pas. Le savais-tu, Edward ? »
« Non, je ne le savais pas. Tu m'as encore appris quelque chose de nouveau. »
« Oh, il faut que j'y aille, fiston, le dîner est prêt et il est 18h20. Je dois te laisser. » Il parle avec précipitation. C'est la même chose tous les soirs.
« Ok, je t'aime papa. On se reparlera plus tard. »
« Je t'aime Edward, au revoir. »
Et il raccroche.
ooo
À 21h mon téléphone sonne de nouveau.
« Oui allô, » je dis, sachant très bien qui est à l'autre bout du fil.
« Bonsoir Edward, comment était ton dîner ? »
« Délicieux, papa, j'ai mangé un steak avec des pommes de terre et des carottes. Et toi ? »
« Ta mère a fait un rôti braisé. C'était succulent. Mais pas de pommes de terre, je n'aime pas ça. »
« Ouais, je m'en souviens. Alors, dis-moi un truc, papa ? »
Il glousse. « En 1983, un artiste japonais a fait une copie de la Joconde sur des toasts. »
« C'est pas vrai ? » C'est vraiment cool.
« Je ne mens pas, Edward, tu le sais bien, » dit-il avec sérieux.
« Je sais, désolé. Quoi d'autre ? »
« La noix de muscade est toxique si elle est injectée par intraveineuse. »
« C'est bon à savoir, papa. »
« Oui, en effet. »
« Un de plus, papa. »
« Hum, voyons voir. J'AI TROUVÉ ! Il y a une ville à Terre-Neuve au Canada qui s'appelle Dildo*. »
J'éclate de rire. « C'est hilarant. Je veux y aller maintenant. »
« C'est un nom amusant, mais nous ne pouvons pas y aller pour le moment. Mon émission de télé est sur le point de commencer et je suis occupé demain. »
« D'accord, eh bien une autre fois alors, papa. »
« Oui, toutefois nous allons devoir planifier. » Sa voix est lacée de mise en garde. Il n'irait jamais en voyage à moins que ce ne soit parfaitement organisé.
« Bien entendu. Ok papa, il est temps que j'y aille. Je te parlerai demain matin. Je t'aime. »
« Oui, demain matin à 7h. Bonne nuit fiston, je t'aime. »
Et il raccroche.
ooo
Je ne prends jamais la peine de régler l'alarme de mon radio réveil. Mon père est mon réveille-matin. À 7h, mon téléphone sonne.
« Bonjour papa, » je grogne d'un ton endormi.
« Tu n'es pas encore levé, Edward ? » Demande-t-il.
« Je me suis mis au lit très tard hier, papa, j'avais beaucoup de travail. »
« Oh, Edward, c'est inacceptable ! Le sommeil est important. Tu ne vas pas conduire ce matin, n'est-ce pas ? Il est scientifiquement prouvé que chaque année 1.9 million de gens ont un accident relié à la fatigue. »
« Ne t'inquiète pas, Felix va me reconduire au bureau. Je vais bien, papa, tu n'as pas à te faire tant de souci. »
Il soupire. « Je sais que tu es un adulte. Je ne devrais pas intervenir dans la façon dont tu mènes ta vie. Ta mère me le dit et je le sais, mais quelque chose en mon for intérieur ne peut l'accepter. Ça me cause un malaise. »
« Tu es mon père, il est naturel que tu sois protecteur envers moi, et je t'aime pour ça, sérieusement. »
« Très bien, je l'accepte Edward, merci. Maintenant va boire une tasse de café, et mange quelque chose contenant beaucoup de vitamine C. Le temps se rafraîchit et je ne veux pas que tu attrapes un rhume. »
« Merci papa, on se reparle plus tard. Je t'aime. »
« Je t'aime aussi, Edward. Au revoir. »
Et il raccroche.
ooo
« Bonjour Edward, » ronronne Tanya lorsque j'entre dans le bureau.
« Arrête ton numéro, j'ai besoin de café avant de me taper tes minauderies, » je râle en me rendant à la cuisine pour me verser une tasse.
« Tu as veillé tard ? » S'enquiert Tanya en entrant dans la cuisine avec sa tasse vide, qu'elle met à côté de la mienne.
« Quelque chose comme ça. » Je remplis nos deux tasses.
« Un rancard ou un truc du genre ? » Son ton fouineur me fait rouler des yeux.
« Non, et ça ne te regarderait pas si j'étais sorti avec quelqu'un. » Je m'empresse de mettre du sucre et un peu de lait dans mon café.
« Dans ce cas tu étais probablement au téléphone avec ton père jusqu'aux petites heures du matin. Je détestais ça quand je dormais chez toi, tous ces appels. » Elle pousse un énorme soupir. « Je ne sais pas comment tu fais ça. »
« Heureusement, c'est un problème auquel tu n'auras plus jamais à faire face. » Je lui adresse un sourire sarcastique alors que je quitte la pièce.
Avant que je ne tourne le coin de la porte, elle me lance une pique. « Ce n'est pas ta faute si ton père est retardé, Edward. C'est à ta mère de s'occuper de lui. Tu dois vivre ta vie et lui dire de rester à l'écart. »
Je me retourne tellement vite que la moitié de mon café brûlant déborde de ma tasse et se répand sur ma chemise… encore une fois. Je ne le sens pas, tout ce que je ressens, c'est la rage. Tanya a dépassé les bornes. Je marche jusqu'à elle et la foudroie du regard.
« Tu ne parles pas de mon père. Tu ne parles pas de qui que ce soit que je connais. Ça n'allait jamais marcher toi et moi, Tanya, parce que ton cœur est en putréfaction. Mon père n'est pas retardé, il est spécial, il est AUTISTE. » Je crache les mots à sa figure. « Tu ferais bien de fermer ton clapet. Tu parles de choses que tu ne connais pas, de choses que tu ne comprends pas et que tu n'as aucune envie d'essayer de comprendre. Alors tant que je serai obligé de travailler avec toi tous les jours, je te suggère de faire de ton mieux pour NE PAS me parler, parce que je le jure devant Dieu, Tanya, même si tu es une femme, je vais te frapper. »
Je dépose violemment ma tasse dans l'évier, fracassant la porcelaine, et je me précipite hors de la cuisine, directement vers les ascenseurs, et hors du building. Je prends une grande respiration. La brise automnale envoie une rafale de soulagement dans mes poumons et un frisson sur ma peau.
Je ris en songeant à mon père ce matin et à son avertissement au sujet du temps plus froid.
Felix sort de la voiture et vient ouvrir ma portière. « Où allons-nous, patron ? »
Je regarde ma chemise, puis Felix. « Bergdorf, » je dis en riant. Il sourit et je monte dans le véhicule.
ooo
Mon père m'envoie quelques faits par texto pendant que je fais l'achat d'une nouvelle chemise. Je décide d'en prendre plus d'une et de simplement les stocker dans mon bureau. Il est clair que je suis empoté.
« Bonjour Edward, c'est bon de te revoir. » Je me retourne et je trouve Sébastien qui me regarde avec des yeux brillants et une main tendue.
Je tends pudiquement la main et serre la sienne tout en jetant des regards à la ronde pour trouver sa mère.
« Il est impoli de ne pas regarder une personne dans les yeux quand elle vous parle. » Il soupire. « As-tu des difficultés avec ça toi aussi ? » Demande-t-il timidement. Je regarde immédiatement dans ses yeux innocents.
« Je suis désolé, Sébastien. Tu as raison, c'est impoli. Je cherchais juste ta mère. »
Il hausse les épaules. « Je suis encore parti faire un tour, mais je la retrouverai, ne t'inquiète pas. Elle elle s'inquiète. »
Je dévisage ce garçon familier, et une impression d'être en territoire connu étreint mon cœur quand je lui parle.
« D'accord, Sébastien, nous allons trouver ta maman, et tu peux me parler de toi pendant que nous la cherchons. Est-ce que ça te va ? » Il réfléchit pendant une minute puis il hoche la tête pour montrer que ça lui convient.
Je cherche le département pour homme aussi méticuleusement que possible en tenant la main de Sébastien. Sa poigne est robuste et ferme.
« Je m'appelle Sébastien Charles Swan, j'ai six ans mais j'en aurai sept le 31 octobre. Je suis né le jour de l'Halloween. Savais-tu que l'Halloween est également connu sous le nom de All Hallows' Eve, ou Veille de la Toussaint? »
En fait je le sais grâce à mon père. « Oui j'le sais. »
Il me sourit, impressionné. « Tu dois être très intelligent, Edward. Il ne t'arrive jamais de te balader sans but ? »
Je hausse les épaules. « Non, ce n'est pas dans mes habitudes, mais mon père est notoirement connu pour vagabonder. »
Il acquiesce. « C'est embêtant, et j'aimerais bien pouvoir m'en empêcher. Ma mère n'est jamais trop fâchée contre moi. Je pense qu'elle a juste peur que je me fasse enlever parce que je suis spécial. »
Je glousse. « Tu es spécial, et est-ce que tu as des super pouvoirs ? » Je demande, espérant alléger l'atmosphère. Il semble si chagriné tout à coup de s'être perdu.
« C'est absurde, Edward. Les super pouvoirs, c'est dans les comic books qu'on les retrouve. Nous sommes dans la vraie vie. » Il arrête de marcher mais me fait signe de me pencher à son niveau. Je le fais et il murmure, « Mais ma mère me dit que mon esprit est comme un puzzle et que seulement les personnes les plus extraordinaires peuvent le comprendre. Elle dit aussi que mon cœur doit être protégé des gens méchants. C'est pour ça que je vais à une école où on me comprend. » Il me fait un clin d'œil comme s'il venait de me révéler le plus grand secret du monde.
Qui est ce garçon ? Il est incroyable ! Après avoir fait le tour du magasin pendant une demi-heure, j'aperçois Bella au comptoir du service à la clientèle. Sa tête est dans ses mains et elle pleure dans son téléphone.
« Oh, papa, je savais qu'un de ces jours quelqu'un allait me le prendre. » Elle est dévastée.
« Va retrouver ta mère, Sébastien, » je lui dis, mais il ne veut pas lâcher ma main.
« Viens avec moi, Edward ? » M'implore-t-il, et je ne peux pas dire non.
Je tape légèrement Bella sur l'épaule mais elle sursaute malgré tout. Elle me regarde et halète en voyant Sébastien tenir ma main. « Je l'ai, papa, » dit-elle au téléphone, puis elle le fourre dans son sac.
« OH MON DIEU, MERCI ! » Elle le soulève et ses bras l'engloutissent. Ses sanglots s'apaisent après un certain temps. Je vois Sébastien gentiment tapoter son dos et essayer de la calmer.
J'ai déjà vécu cette situation avant. Il y a cinq ans, mon père était à la foire avec ma mère, ma sœur et moi, et il est parti seul de son côté. Nous ne pouvions pas le trouver, nous l'avons cherché pendant des heures. Ma mère a pleuré toutes les larmes de son corps et appelé la police. Ce n'est qu'après qu'un pompier nous ait escortés jusqu'à la grande roue que nous avons trouvé mon père en train de réparer celle-ci. Il nous a regardé en rayonnant, impressionné d'avoir réussi à comprendre le mécanisme. Ma mère l'a serré dans ses bras avec férocité et a sangloté contre sa poitrine. Il l'a cajolée jusqu'à ce qu'elle s'arrête.
« Bella ? » Je l'interromps.
Elle me regarde et essuie ses yeux. « Merci encore, Edward. Je suis désolée s'il vous a embêté. »
Je secoue la tête. « Non, pas du tout. Il me rappelle tellement mon père. D'une certaine façon c'est très sympa. »
Elle sourit avec gentillesse. « Il est tout mon univers. Je ne pourrais pas imaginer le perdre. »
Je comprends ce qu'elle veut dire. « Je vous comprends parfaitement. »
Elle plisse les yeux et pince les lèvres. Je peux dire qu'elle me jauge. « Je pense que c'est fort possible, Edward. »
Je regarde Sébastien, puis à nouveau Bella. Puis je décide de me ranger de son côté. « Savais-tu qu'un cheval ne peut pas vomir ? »
Il écarquille les yeux et hoche la tête. « Je l'ai vu dans un documentaire l'autre jour. Ma mère m'a laissé le regarder ! »
Je savais que ce garçon m'était familier, il est juste une version plus petite d'un homme que j'ai connu toute ma vie.
« C'était hier après-midi à 16h15, n'est-ce pas ? »
Son sourire est radieux. « OUI, TU L'AS VU TOI AUSSI ? » Crie-t-il avec enthousiasme.
Je secoue la tête. « Non, c'est mon père qui a regardé ce reportage. Il m'a téléphoné hier soir pour m'en parler. »
« Je veux rencontrer ton père. Il a l'air d'être intelligent comme toi, Edward. »
Bella émet un petit rire. « Ok, Sébastien, il est près de midi et nous devons aller manger, pas vrai ? »
Il regarde sa montre et je le vois paniquer. « Maman, nous avons dix minutes. Nous n'attraperons pas de taxi pour aller manger quelque part à temps. »
Bella prend une respiration chancelante. L'horaire ne peut pas dévier, ce serait la débâcle totale.
« Dans ce cas c'est une bonne chose que j'aie une voiture privée et un chauffeur qui peut nous emmener quelque part à temps, n'est-ce pas ? » Mes paroles sont récompensées par deux sourires soulagés.
« Oh Edward, êtes-vous… es-tu sûr ? » Demande Bella.
« Oui, mais nous ferions mieux de nous dépêcher. » Je regarde Sébastien. « Tu veux faire un tour sur mon dos ? »
Il acquiesce et je le ramasse et me tourne vers Bella. « Allez la maman, nous avons un horaire à respecter, » je dis en plaisantant.
Elle nous suit sans peine, et quand nous parvenons à la voiture, je demande à Felix de nous conduire au restaurant convenable le plus proche aussi vite que possible.
Nous arrivons deux minutes avant qu'il ne soit midi.
*dildo veut dire godemiché en français.
Note de l'auteure : je suis la mère d'un fils autiste. Je m'occupe de familles au sein desquelles l'autisme est présent et je suis témoin des luttes auxquelles elles sont confrontées. Cette histoire raconte le destin de deux personnes avec quelqu'un d'autiste dans leur vie. L'un est un fils et l'autre est une mère. Leurs chemins se croisent, et ensemble ils apprennent comment, avec l'amour, on peut trouver la paix au milieu du chaos.
J'espère que cette histoire vous plaira.
Note de la traductrice : suite à une série de messages anonymes des plus ignobles (entendez par là, odieux, haineux, injurieux), l'auteure cutestkidsmom a retiré toutes ses histoires du site l'an dernier, mais si vous voulez les lire en anglais, elles existent en pdf. Vous n'avez qu'à communiquer avec moi par pm pour vous les procurer. Elles sont aussi disponibles en faisant une recherche sur l'Internet.
Aussi, cutestkidsmom s'engageait à updater son histoire une fois par semaine, et je vais essayer d'en faire autant, mais je ne fais pas de promesse, car ma fille va commencer la saison des compétitions de danse très bientôt et je risque d'être très prise par la vraie vie…
Je vous souhaite une excellente année 2015.
À bientôt.
Milk
