PROLOGUE
Un mangemort au parlement sorcier
C'est avec stupeur que le monde sorcier britannique se réveille en ce matin de juin. Les sondages de sortie des urnes avaient donc vu juste : un fils de mangemort est arrivé en tête de sa circonscription, raflant plus de 70% des voix. Le clan conservateur y voit un plébiscite, l'opposition un hold-up. La campagne électorale menée par Drago Malefoy avait pourtant mal débuté, avec l'affrontement entre suprémacistes et nés-moldus qui était venu ternir un meeting à Brighton. Le candidat a pourtant su redresser la barre, et défendre avec un charisme indiscutable son programme conservateur. De nombreuses voix s'élèvent suite à l'accession au pouvoir du jeune Malefoy qui, s'il a été blanchi au sortir de la guerre qui a ravagé le monde magique notamment grâce aux témoignages du Trio d'Or, reste un hériter de l'ancien monde qui compte bien promouvoir des valeurs jugées rétrogrades. La personnalité trouble et son rôle pour le moins obscur dans l'affrontement laissent subsister un doute quant à la sincérité de son engagement politique. Un membre de l'alliance progressiste, qui a souhaité réagir en off, évoque « un inquiétant retour des Sang-purs qui, à défaut d'avoir réussi leur coup d'État par la force, essayent à présent de prendre le pouvoir en manipulant les électeurs ». Notre source ajoute qu'elle espère que « les sorciers britanniques réagissent dans la rue, en manifestant leur mécontentement avec force ». A l'heure où la Gazette publie ces lignes, le nouveau député n'a pas souhaité réagir.
Hermione Granger secoua la tête, dépitée, et replia le journal d'un geste vif. Elle n'avait aucun doute quant à l'identité de cette source anonyme au sein de son camp : cet imbécile de Dean Thomas n'avait pas été fichu de tenir sa langue. Drago Malefoy avait été jugé innocent, nul besoin de raviver de vieilles querelles. Il avait probablement déclenché une réaction populaire qui n'arrangerait les affaires de personne. Surtout dans un climat politique aussi tendu.
Comme pour lui donner raison, elle reçut une dépêche par hibou annonçant des échauffourées dans le centre du Londres sorcier, où une émeute n'avait pu être contenue que grâce à l'intervention des aurors.
« Incompétent ! siffla Hermione en empoignant sa plume, bien décidée à rappeler à l'ordre Dean Thomas dans la minute. »
Elle résista à l'envie de lui envoyer une beuglante bien sentie, et lui expliqua sa façon de penser le plus diplomatiquement possible. Cet abruti allait ruiner tous leurs efforts d'apaisement et de reconstruction d'après-guerre. Toutes ces réformes, ces nouveaux systèmes de gouvernance, tellement d'efforts réduits à néant par un petit individualiste vindicatif !
La réforme du système politique sorcier, qui n'était plus à présent entre les mains de quelques personnes, reposait sur un tout nouveau parlement. Quatre-vingt députés siégeaient au sein d'une assemblée, et préparaient ensemble de nouvelles lois. Hermione avait été élue au sortir de la guerre, et travaillait depuis d'arrache-pied pour améliorer l'équité entre les sorciers britanniques. C'était éreintant. Et ce maudit Thomas...
« Hermione ? s'enquit Astoria Greengrass en passant la tête par la porte du bureau de la jeune femme. »
Cette dernière lui fit signe d'entrer tout en parafant sèchement sa missive.
« Karacter... Je veux dire, le président du parlement, va donner une conférence de presse improvisée devant le ministère de la Magie dans 10 minutes, l'informa la sorcière. J'espère qu'il va calmer les tensions, sans quoi on s'expose à un bordel sans nom.
- À qui le dis tu ! Quelle idée de contester le résultat d'une élection démocratique ! Il insulte ses électeurs...
- Il ? Tu penses que c'est encore Thomas ?
- Qui d'autre ! Je me demande pourquoi on s'est donné la peine de se réunir pour convenir d'une stratégie commune. On savait que Malefoy serait élu. Thomas ne peut pas plaider la réaction de surprise !
- Il n'a jamais vraiment fait preuve d'une grande intelligence situationnelle, glissa Astoria en déposant un dossier sur le bureau d'Hermione. Tiens, le rapport sur l'accès à l'instruction et aux soins à Azkhaban. C'est édifiant. »
Hermione se passa une main sur le visage, lasse.
« Je sais pas comment je ferais sans toi.
- C'est mon boulot, je suis ta cheffe de cabinet, sourit Astoria. En plus je vais devoir partir plus tôt ce soir, Molly nous a invités à manger et si j'annule une énième fois, elle va déshériter son fils. Non pas que la somme perdue serait colossale, mais bon, gloussa la jeune femme. »
Hermione avait fini par s'habituer à l'humour particulier des Serpentards. Il lui arrivait même d'apprécier les blagues de Blaise Zabini, bien qu'il soit un député de l'opposition.
« Bien sur, tu peux partir tout de suite. Je vais juste étudier ce rapport et rentrer chez moi dans la foulée.
- Tu ne sors pas fêter ta victoire ? Avec tout ça, on oublie un peu vite que toi aussi, tu as gagné. Alors certes c'est une réélection et on ne peut pas dire qu'il y ait eu beaucoup de suspens, mais tout de même...
- On aura quelque chose à fêter quand la loi sur l'équité aura été votée ! D'ici là... maugréa Hermione en ouvrant le dossier avec autant d'entrain que le lui permettait son état de fatigue.
- Tu vas envoyer un message de félicitations à Drago ? glissa Astoria en penchant la tête d'un air taquin.
- C'est un ancien de notre promotion à Poudlard, et on sait toutes les deux quel rôle il a joué dans la chute de Voldemort. Bien sûr que je vais le féliciter, c'est d'usage...
- ...
- ... et ensuite on le pulvérisera dans les règles de l'art dans l'hémicycle ! »
Astoria éclata de rire et frappa dans la main levée d'Hermione. Aucun doute là-dessus, ça allait être la guerre. Mais à la loyale.
Hermione passa donc l'heure qui suivit à lire le rapport détaillé d'Astoria, rédigea une note rapide, répondit à quelques lettres de collègues députés plongés dans l'expectative par l'élection de Malefoy, commanda un plat de nouilles chinoises, prépara son prochain discours, et réalisa qu'il était deux heures du matin. Elle se leva, repoussa sa chaise, enfila son manteau, et... se rappela brutalement qu'elle avait oublié de féliciter Malefoy.
Prise d'une soudaine inspiration, elle transplanna aussi sec devant le QG de campagne de son ancien camarade de Poudlard. À cette heure ci, il ne devait rester dans les locaux que son équipe réduite, et la presse devait avoir plié bagage depuis longtemps. Elle comptait ne rester qu'une minute.
Bien mal lui en prit ! Elle fut surprise de se retrouver au beau milieu d'une foule vociférante, armée de pancartes, et hurlant des slogans pour le moins agressifs. C'était littéralement la cohue ! Elle repéra une femme qui brandissait un écriteau « Sang-pur, c'est ton sang qu'on fera couler », et vit rouge. Si Dean Thomas avait été à portée de mains, elle l'aurait probablement étranglé sur place.
Mais comme il était terré quelque part, elle changea d'option, et fendit tant bien que mal la foule en direction de la femme à la pancarte. Puis elle interrompit ses hurlements et lui tapotant l'épaule, attendant qu'elle pivote et la reconnaisse. Non seulement Hermione était une héroïne de guerre, mais elle était la figure emblématique du mouvement progressiste. Personne n'ignorait son identité.
« OH ! GRANGER ! AVEC NOUS ! Granger, avec nous ! scanda la fille en levant le poing en rythme, tentant de haranguer la foule autour d'elle. »
Hermione leva la main et l'arrêta tout net, étouffant dans l'œuf le début de happening qui se profilait. Elle n'était pas venue faire un coup de comm sur le dos d'un adversaire politique. Et encore moins pour cautionner ce déchaînement de violence.
« Rangez-ça. C'est un appel à la haine et au meurtre. Vous n'avez donc rien retenu ? Non seulement vous êtes passible de poursuites judiciaires, et ce devant témoins, mais en plus vous reproduisez le comportement déloyal de ceux que vous croyez critiquer. »
La fille se décomposa, et abaissa sa pancarte, rouge comme une pivoine. Le silence s'était fait autour d'elles sans qu'Hermione ne s'en aperçoive, et elle comprit rapidement qu'un individu malfaisant était en train de filmer toute la scène avec son téléphone. Les sorciers avaient adopté des technologies moldues en partie grâce à son action, et à présent elle s'en mordait les doigts.
Elle s'apprêtait à aller demander au vidéaste amateur de supprimer la vidéo, mais croisa le regard métallique de Drago Malefoy. Il était sorti de son QG, et se tenait droit dans son costume de créateurs, jaugeant la foule d'un regard quelque peu hautain.
Hermione songea que le conseiller en communication du jeune homme devait s'arracher les cheveux ; comment rendre sympathique aux yeux du public quelqu'un d'aussi arrogant et colérique ?
« Dispersez-vous ou je lâche immédiatement mon service d'ordre sur vous. »
Sa voix glaciale fendit l'air et frappa de plein fouet les protestataires. Il eut un instant de flottement, pendant lequel Hermione nota dans sa tête d'ajouter « autoritaire et violent » à la liste des défauts de Malefoy, et la foule recula dans le calme.
Puis Drago lui fit signe de le rejoindre et fit demi-tour à l'intérieur sans même vérifier si elle le suivait.
« Quel toupet ! pesta Hermione en lui emboîtant le pas malgré tout. »
Elle pénétra à sa suite dans le local de campagne, et constata avec effroi qu'il était totalement vide.
« Mais Malefoy, ton service d'ordre... commença la jeune femme.
- Rentré chez lui depuis une bonne heure, la coupa le Serpentard en haussant dédaigneusement les épaules.
- C'était incroyablement dangereux ce que tu as fait là-dehors... provoquer une foule en colère ! Sans renforts ! s'offusqua Hermione.
- Ça s'appelle un coup de bluff. Le tout c'est pas de dire la vérité, mais de mentir avec suffisamment de conviction pour être pris au sérieux. »
Estomaquée par la répartie du blond, Hermione ne trouva rien à répondre et songea que si c'était là sa façon de faire de la politique, les séances a l'assemblée promettaient d'être mouvementées.
Hello ! Voilà donc le prologue de cette nouvelle fiction. J'avoue que je suis un peu stressée de me lancer dans une nouvelle fiction après Les serpentards à Mykonos, mais l'idée me trottait dans la tête depuis un moment et j'avais hâte de commencer à écrire. Il y a peu d'infos dans ce prologue, c'est juste un petit avant-goût. J'espère que cet univers vous plaira ! En tout cas, le monde politique est propice aux coups bas et aux petits manigances (toute ressemblance avec la réalité est purement fortuite), ce qui fait que Drago devrait être parfaitement à l'aise. J'attends vos impressions avec impatience ! A bientôt xx
