Chers lecteurs,
J'ai bien discuté avec Nictocris ce ouikende et j'ai finalement choisi d'écrire une nouvelle fic légère. Vous connaissez Nictocris, ce sera un Drarry. J'espère que ça vous plaira. Je ne sais pas si elle sera longue ou pas mais je pense poster plutôt régulièrement.
Portez-vous bien, calez-vous dans des fauteuils moelleux, à bientôt,
Al
« Scorpius quoi ?
- Ma-le-foy, répéta gentiment Albus en prenant la même voix détachée que sa grand-mère quand elle voulait lui faire comprendre un nouveau mot. Scorpius Malefoy. C'est mon meilleur copain. »
Harry cligna des yeux.
« Tu sais, ton meilleur copain ton meilleur copain, tu le connais depuis une semaine, ça peut changer…
- Tonton Ron, il a toujours dit que lui et toi vous étiez meilleurs copains en un trajet de train. Scorpius, c'est mon meilleur copain, je le sais, assura Albus en croquant dans sa tartine.
- Et Rose ?
- Ben, ch'est ma meilleure copine !
- Papaaaaa ! Je peux avoir du jus de citrouille ? »
Harry se tourna vers sa fille, un peu perdu.
« Euh ma chérie, je suis désolé, j'ai oublié d'en acheter…
- À la maison, y en a toujours !
- Tu sais bien que c'est maman qui fait mieux les courses, ronchonna James dans son coin.
- James…
- Quoi, papa, c'est vrai ou c'est pas vrai ?
- Scorpius, son père, il fait jamais les courses, c'est son elfe qui s'en charge !
- On s'en fout de ton ami !
- James, on dit pas on s'en fout, s'offusqua Harry, qui sentait clairement que la situation commençait à lui échapper. Et sois gentil avec ton frère !
- Ça ne nous intéresse pas, elle a dit qu'il fallait dire, mamie !, compléta Lily en bonne fille de sa mère.
- Même que d'abord je suis allé goûter chez lui mardi dernier et que chez lui y a du jus de citrouille ! » rétorqua Albus.
Le niveau sonore commençait sérieusement à dégénérer, et pas dans le bon sens. Harry tenta sa tête de père sévère – malheureusement, il n'avait jamais été doué en la matière, même si Molly avait essayé maintes fois de le lui apprendre.
« Tu veux pas autre chose, ma puce ?
- D'accord, répondit Lily, comme si elle faisait un sacrifice énorme. Je veux bien un chocolat chaud.
- Ah mer… lin, je n'ai plus non plus. Une grenadine ? »
Lily leva les yeux au ciel dans une parfaite imitation de sa mère.
« Ouiiiiiiii papa chériiiii !
- De toute façon, les Malefoy c'est trop des snobs, coupa James pour jeter de l'huile dans la potion.
- Papa ! Ça veut dire quoi, snob ? »
Harry maudit ce caractère de James, qui écoutait toutes les conversations des adultes et retenait tout le vocabulaire qu'il entendait. À neuf ans, il avait un lexique encyclopédique.
« Demande à ton frère. » répondit-il à Albus, très heureux d'éviter le problème (et pas très sûr d'avoir la définition exacte).
Il ignora la suite de la conversation et se concentra sur ses placards pour trouver la bouteille de sirop qu'il avait achetée trois semaines auparavant, quand ses enfants étaient venus la dernière fois.
Depuis son divorce, qui datait d'il y a trois mois, il avait peu à peu repris ses marques au Square Grimmaurd. Il avait fait les travaux de rénovation avec Ron et Hermione avant leur départ au Mexique chez Neville et Luna. La maison était beaucoup plus habitable qu'à l'époque de l'Ordre : l'affreux tableau de Mrs Black avait été repeint, directement sur la toile, et immédiatement la maison avait été plus agréable à vivre.
Il retrouva la bouteille de sirop. Quand il se retourna vers la table, ses trois enfants avaient disparu. En entendant les bruits à l'étage, Harry en conclut qu'ils avaient rejoint leurs chambres.
Il soupira et se laissa tomber sur le banc.
Il était toujours très content de récupérer ses enfants durant les semaines paires, mais qu'est-ce que c'était fatigant d'être père célibataire ! Avec Ginny, il pouvait toujours se reposer sur elle. Elle gérait bien mieux les agaceries de James, les babillages de Lily et les questions existentielles d'Albus. Elle gérait aussi les bains, les papiers pour l'école et les cartables. Harry se sentait toujours dépassé. La première semaine où il les avait eus chez lui, il avait gardé ses horaires de boulot normaux. Lorsqu'il était rentré chez lui, c'était un tel bazar qu'il avait cru qu'il ne tiendrait jamais la semaine. Depuis, il avait demandé un mi-temps les semaines paires : ainsi, il commençait plus tard, terminait plus tôt et avait son mercredi les semaines où il avait ses enfants à la maison. Cet arrangement le freinait pour son avancement, mais très franchement, entre prendre des responsabilités et retrouver ses enfants en un seul morceau, le choix était vite fait.
« Paapaaaa ! »
Au vu de l'hystérie de la voix, ce devait être Lily.
« J'arriiiiive ! » cria Harry en retour, perdant tout caractère adulte en un seul instant.
Il donna un coup de baguette : la vaisselle sale s'entassa dans l'évier. Il n'osa pas lancer de sort ménager pour qu'elle se fasse toute seule : il la ferait à la main. La dernière fois, il avait pris vingt minutes à réparer toutes les assiettes à coups de Reparo bien placés.
OoO
Harry détestait récupérer les enfants à l'école. C'était la première fois qu'il le faisait seul, certes, mais il savait déjà qu'il détestait ça. D'habitude, c'était Molly ou Ginny qui s'y collait. Non, reconnaissons-le, d'habitude il était au bar d'en face avec Ron à prendre un chocolat viennois. Mais depuis que ses meilleurs amis étaient partis, il n'avait plus personne à emmener au café Chez Dédé.
L'impasse du Mi-grenier était à une intersection du Chemin de Traverse, ce qui permettait aux parents sorciers de faire leurs courses du soir en sortant du boulot après avoir récupéré leurs enfants. Au fond de l'impasse, on tombait sur un grand portail bleu roi. L'école Dumbledore, nommée ainsi en mémoire du directeur de Poudlard qui avait beaucoup aidé à vaincre Voldemort, avait vu le jour trois ans après la guerre. Depuis, son succès ne s'était jamais démenti. Albus était très fier de porter le même prénom que son école.
« Mr Potter ! Comment allez-vous ? »
Harry échangea quelques mots avec une dame qui devait être la mère de Johanna, la meilleure copine de Lily (sa tête lui disait vaguement quelque chose, il avait dû la voir à l'anniversaire de sa fille).
Il était entouré de mères de famille. Il se sentait seul ! Il jeta un coup d'œil à la vieille montre de Fabian Prewett : bientôt la sonnerie.
Il se mit sur la pointe des pieds, conscient du ridicule de sa situation, pour voir si ses enfants arrivaient plus vite.
Bon, apparemment les cinq minutes qui restaient à attendre seraient beaucoup trop longues pour sa patience. Il avait peut-être le temps d'aller chez Dédé prendre un viennois avec beaucoup de chantilly à emporter.
Allez, ça se fait.
Il fit demi-tour, traversa la rue et le vit : Drago Malefoy.
Adossé au mur près de chez Dédé, lisant un livre qui paraissait tout droit sorti des rayons magie noire de Marabouquin, la librairie de l'Allée des Embrumes.
Bien sûr. Malefoy venait chercher son fils, meilleur copain d'Albus. Harry se décida à aller lui parler.
« Salut. »
Franchement, Harry était fier de lui. Un salut sobre, propre, pas agressif. De quoi lancer de bonnes bases de relations inter-parentales. Connaissant Al, il allait se débrouiller pour inviter l'engeance malefoyenne chez lui : autant être en bons termes avec le père.
Malefoy leva les yeux vers Harry :
« Potter, répondit-il de la même voix traînante qu'à Poudlard. J'ai toujours les mêmes principes, je parle toujours pas à la racaille. Va te faire voir chez les Scroutts. »
Il se replongea dans son livre. Harry fulmina : alors qu'il était poli, prêt à créer une relation cordiale avec son ennemi d'école pour le bien de son fils, voilà que l'autre l'envoyait bouler ?
« Toujours aussi aimable, à ce que je vois. Ta mère t'a jamais appris la politesse. »
Cette réflexion sur sa mère interpella Malefoy.
« Potter, reprit-il d'un ton patient et légèrement énervé, laisse ma mère en dehors de ça ou j'insulte la tienne.
- M'en fous, elle est morte. »
Harry lui tourna le dos, fier de lui : il était tellement content de narguer Malefoy !
Le temps qu'il avait perdu avec Malefoy avait permis aux écoliers de sortir. Le portail était ouvert et une meute d'enfants braillards s'égayait de partout. Harry se rapprocha. Il repéra la tignasse rousse de Lily, le gros sac de James et Albus, qui avançait à côté d'un petit garçon blond au nez et au menton pointus. Le vrai portrait craché de Malefoy quand il l'avait rencontré chez Mrs Guipure.
« Allez, les enfants, on y va. On passe chez George et Lee, j'ai une commande à récupérer.
- Ouais ! »
S'il y avait bien un truc qui ralliait tous les enfants d'Angleterre, c'était le magasin Farces pour sorciers facétieux. Les camarades de ses enfants les regardèrent jalousement.
« On peut pas plutôt passer chez Fleury et Bott ?, demanda James.
- Si tu veux. »
Le visage de James s'illumina et Harry se sentit fier que son fils le regarde comme ça. Hermione était la seule adulte valable aux yeux de son fils aîné. Si Harry souffrait de l'absence de sa meilleure amie, James était en deuil de sa tante préférée. Harry avait tendance à lui passer plus de caprices livresques depuis qu'Hermione était partie. En trois mois, il avait acheté trois fois plus de livres qu'en trois ans.
Albus et Scorpius se lâchèrent après avoir fait des gestes obscurs composés de tapements de mains, de bras levés, de doigts qui zig-zaguent, que Lily, grande dame, appela check pour son père. On avait l'impression que les deux enfants n'allaient jamais se revoir. Harry, qui se sentait coupable (sans aucune raison) de la séparation créée entre Rose et Albus, les laissa prendre leur temps d'au revoir. Puis, un peu lassé :
« Vous vous voyez demain, hein, rassurez-vous. »
Il fut étonné de voir qu'Albus n'avait pas les larmes aux yeux en quittant son nouveau meilleur ami tant leur séparation avait été longue et fastidieuse. Alors que Scorpius se précipitait derrière eux, pour rejoindre Malefoy le Mal élevé, Harry prit la main de son cadet et de sa fille pour remonter le chemin du Mi-grenier.
Alors qu'il s'engageait dans le Chemin de Traverse, il fut bloqué par le visage furibard de Malefoy. Harry eut un mouvement de recul surpris. D'un autre côté, ça faisait quinze ans qu'il bossait au bureau des Aurors, c'était pas Malefoy qui allait lui faire peur.
« Oui ?
- Ton fils…
- Ton fils va s'encanailler, Malefoy, le coupa Harry. C'est dû à ton éducation. Moi, j'ai jamais interdit au mien de fréquenter les aristos, mais toi, apparemment, t'as oublié de lui apprendre à fuir le bas peuple. Je l'invite bientôt chez les Scroutts. »
Sans attendre de réponse, il reprit sa route après avoir contourné la silhouette figée de Drago Malefoy.
