Chers lecteurs,
Cette fois, pas de Drago. Chapitre suivant un peu triste, donc un truc plus léger là.
Continuez à me followiter, me favoriter, me reviewiter, j'adore. J'ai l'impression d'être une rock-star mégalo qui répond à ses fans (et je ne parle pas de ventilateurs, vous m'avez bien compris).
Merci comme toujours à Nictocris, mon agent.
Portez-vous bien, dégustez des escargots au beurre persillé, à bientôt,
Al
« Ah tiens, ça faisait longtemps que je t'avais pas vu, toi. Tu tombes à pic, je viens de fermer. »
Archimède s'ébroua, mécontent de l'accueil trop chaleureux dont il était victime. Harry ignora le mauvais caractère du grand-duc et passa dans l'arrière-boutique pour lire le parchemin accroché à la patte du hibou.
Potter,
J'espère que personne n'a été mordu par un de tes reptiles venimeux. Prépare-toi à affronter d'autres serpents et habille-toi correctement. Rdv 20h au Manoir.
D. M.
Harry eut un ricanement. Le ton sec et grincheux de Drago transparaissait même dans ses lettres. Ils en étaient à un mois de relation amoureuse ou, plutôt, un mois d'échanges de baisers, de mots doux, de caresses innocentes, comme des collégiens, comme s'ils rattrapaient leur adolescence en se montrant polis et courtois l'un envers l'autre. Ils s'engueulaient assez régulièrement, mais dans l'ensemble, ils se portaient tous deux à merveille. Drago avait supporté les crises de légère panique d'Harry à l'idée d'ouvrir son nouveau magasin au nom fort ironique, Au Nagini, en face de l'école Albus Dumbledore, dans les locaux que Zabini lui avait trouvés. Ses enfants avaient été aussi d'un grand secours, surtout Lily qui avait donné des noms à toutes les bêtes du magasin.
Et maintenant qu'Harry faisait l'ouverture, tout se passait comme sur des roulettes : les clients étaient enthousiasmés, les enfants adoraient aller titiller les reptiles et autres amphibiens dans leurs terrariums, les grenouilles et autres crapauds enchantés accueillaient tous les nouveaux arrivants en coassant une petite comptine. Tout s'était passé pour le mieux.
La lettre de Drago ne pouvait qu'être bien reçue à la fin d'une inauguration réussie.
Harry prit une plume et écrivit au verso :
Cher Drago,
Aucun de mes serpents n'a été agressé buccalement, tout va bien. Dois-je passer par dehors ou par cheminette ?
Arquebuse a les pattes couvertes de paprika. Est-ce normal ? Aurait-il agressé le boursouflet de ton fils ?
H.
Il renvoya Archimède et se prépara à fermer.
Il s'adressa à chaque reptile de chaque terrarium en passant. Les caïmans nains soulevèrent une paupière nonchalante avant de retourner à leur sieste : les crocodiles et autres alligators trop gros pour l'étang du magasin étaient logés à Poudlard et Hagrid s'en occupait. Les marécages de Poudlard avaient été soumis à un charme de tropicalisation pour faciliter le logement des grandes bêtes. Deux tortues quêtèrent une caresse de bonne nuit et un bout de feuille à grignoter : Harry les flatta gentiment en faisant attention à ne pas se faire mordre. Les lézards, les iguanes et les geckos de l'étage, accrochés aux branches d'un arbre qu'Harry avait eu du mal à installer, tressaillirent quand il enclencha le distributeur magique de nourriture.
« Allez, les gars, je vous laisse. J'ai rancard. »
Il finit dans l'entresol, son endroit préféré. Ici, les serpents étaient en liberté dans un immense terrarium. Les clients n'avaient pas le droit d'y entrer mais ils avaient été impressionnés quand Harry y était allé chercher un orvet pour une dame au chapeau fantasmagorique. Harry s'y sentait à l'aise : les serpents passaient leur temps à discuter de choses et d'autres. Contre toute attente, ils philosophaient parfois. Le terrarium du sous-sol était, quant à lui, peuplé d'animaux non destinés à la vente : Harry prévoyait de leur prélever des écailles, du venin, des crochets pour les vendre en tant qu'ingrédients pour potions. Il y mettait aussi les animaux dont il aurait besoin pour la B.A.S.I.L.I.C.
« Oh voilà l'humain !
- L'humain que nous aimons !
- L'humain du Maître des Serpents. Il est si beau !
- Le Maître a bon goût. »
Contre toute attente, quand Harry avait présenté Silencio aux autres reptiles, le boa constrictor avait fait forte impression sur ses congénères. Tous les serpents respectaient Silencio, ce qui laissait Harry perplexe. Outre que l'animal de compagnie d'Harry risquait de prendre la grosse tête, Salsifi avait asticoté tous les reptiles pour qu'ils l'appellent comme elle. Le Maître des Serpents était maintenant affublé d'un culte de la personnalité par tous les animaux du magasin d'Harry. Harry prévoyait carrément des affiches.
« La journée est finie, les enfants. Je vais y aller.
- L'humain a rendez-vous !
- Ah bon ?
- Mais bien sûr que oui. Regardez comme l'humain se tient droit. Il est gêné. Il détourne la tête. Il est pressé. Il veut vite s'en aller. Il va retrouver son autre humain.
- L'humain devrait mettre une cravate.
- Pas du tout. Un nœud papillon serait préférable.
- Saucisson, voyons, nous connaissons votre intérêt pour les insectes. Mais la mode et le style n'ont rien à voir avec les chenilles.
- Les papillons et les chenilles, ma chère Sucrette, ne sont pas la même chose : comme la poule et l'œuf, l'un précède l'autre. On voit bien que vous êtes à peine sortie de votre œuf.
- Au moins, Monsieur, moi, j'ai bon goût. »
Harry ne comprenait pas comment les serpents pouvaient avoir un avis en mode vestimentaire. Néanmoins, ils avaient passé la journée à voir passer des gens bien habillés qui voulaient rencontrer le Sauveur du monde sorcier : ils étaient peut-être mieux formés que ce qu'il aurait cru.
« L'humain aussi. Et ce qu'il nous donne à manger aussi. Peut-être que l'humain veut manger l'autre humain.
- Voyons, les humains ne se mangent pas, Salsepareille. Les humains ne sont pas des mantes, quand ils copulent ils ne se dévorent pas.
- Pourtant nous le sentons. Notre humain a faim.
- Si notre humain a faim, il doit venir bien habillé, sinon il ne mangera pas.»
Harry se sentit rougir. Comment les serpents faisaient-ils pour renifler toutes ses émotions?s
« L'humain doit aller voir son autre humain comme il le veut. »
Ce sage conseil venait de Sarabande, un très vieux serpent python qui, quand il s'exprimait, avait un ton de vieux sage bouddhiste. Tous les serpents savaient qu'il avait le dernier mot. Harry l'aimait beaucoup et hésitait à le faire passer au terrarium du sous-sol, pour que personne ne l'achète (voire à carrément l'installer chez lui, mais il n'était pas sûr que Drago apprécierait un nouvel animal tout de suite dans son voisinage).
« Merci Sarabande, pour ce sage conseil.
- Sarabande est sage !, sifflèrent tous les serpents en chœur avec la même dévotion qu'ils avaient envers Silencio. Sarabande est grand ! Sarabande est un python serpent !
- Je sais. Je vous laisse. Le repas du soir sera livré dans deux heures par votre trappe magique. On se retrouve demain.
- Les souris de l'humain seront-elles agrémentées d'une épice quelconque ?
- Caramel beurre salé, comme demandé. À demain. »
C'était Socrate, une couleuvre adepte de caramel beurre salé, qui s'inquiétait toujours du menu du soir. Harry avait bien compris que chaque reptile avait ses propres lubies alimentaires : Silencio adorait le curry, Salsifi ne jurait que par la crème fraîche et Salomon refusait tout plat qui ne contenait pas un peu de pesto. Harry était content que le livre de recettes de Ron lui permette d'écouler autrement qu'en nourriture pour serpents le stock d'épices qui s'accumulait dans ses placards.
Il ferma la porte du magasin et remonta l'impasse du Mi-grenier pour rejoindre le Chemin de Traverse. Les gens le saluèrent avec toujours la même déférence depuis plus de quinze ans : il espéra que ce serait bientôt de l'histoire ancienne et qu'il deviendrait à leurs yeux un simple commerçant. Néanmoins, le fait qu'il tienne la seule animalerie spécialisée en reptiles du monde sorcier européen allait sûrement contribuer à sa renommée, encore une fois.
Il passa par le Chaudron baveur, salua Tom d'un bref signe de tête et atterrit dans le monde moldu.
Il souffla un bon coup : sa première journée avait été un franc succès. Beaucoup de monde, quelques journalistes dûment sélectionnés (il avait demandé les conseils de Luna et évincé d'office tous ceux qui travaillaient pour Kevin Laplume). Théodore Nott était même passé ! Il travaillait chez un apothicaire et il avait suggéré à Harry de proposer une carte bien faite des ingrédients qu'il pourrait vendre. Il pouvait même créer un service de livraison et de la vente par correspondance !
Bon, avouons-le, tout ça le dépassait un peu. Il songea qu'il aurait le temps de s'y habituer.
Quand il parvint chez lui, il trouva Archimède perché sur sa boîte aux lettres moldues ,attirant tous les regards des passants du Square Grimmaurd.
« Par moi-même ! Drago exagère. »
Il prit l'oiseau sur l'épaule sous les regards curieux des voisins et rentra chez lui en expliquant à sa vieille dame de voisine :
« Ne vous inquiétez pas, je suis soigneur animalier. »
Ce qui n'était pas un mensonge, en soi. Mais se faire passer pour fauconnier, c'était tout de même se faire remarquer par ses voisins moldus : ce n'était pas un métier très courant, de ce qu'Harry avait pu en voir.
Il ferma la porte et souffla de nouveau bruyamment, enfin à l'abri.
Il n'avait pas ses enfants cette semaine-là : il les récupérerait le dimanche soir. En revanche, ses trois bambins plus l'âme damnée d'Albus étaient passés le voir à la sortie d'école. Il avait vu arriver une flopée d'écoliers se jeter contre les vitrines. Ses quatre enfants avaient été bombés de fierté quand il leur avait donné un badge Accueil & conseil : Scorpius avait failli s'évanouir d'émotion. Molly était venue les chercher tous les quatre au magasin et elle avait chaudement félicité Harry pour son travail.
Harry déplia la lettre de Drago :
Harry,
Me tends-tu la perche pour d'autres agressions buccales ? Tu peux passer par où tu veux. Sois juste à l'heure, certains n'aiment pas attendre.
D.
Harry rougit : vraiment, Drago n'avait aucune limite ! Tout ce qu'il disait était à double sens. Il allait falloir faire attention à ce qu'il disait (ou arrêter de rougir à la moindre allusion). Il monta dans sa chambre pour se changer. Il passerait par l'extérieur : ça lui permettrait de se dégourdir les jambes après sa première journée de travail avant de rencontrer plusieurs Serpentard. Il aurait le temps de souffler et ne tendrait pas immédiatement la verge pour se faire battre. Quand bien même Zabini était au courant pour leurs cheminées reliées, peut-être que les autres amis de Drago l'ignoraient ou désiraient ne pas le savoir.
Il prit une douche. Alors qu'il se séchait, il remarqua une boîte en carton, posée près des toilettes, remplie de paprika et de piment d'espelette : ainsi, Gérard, le boursouflet de Scorpius, venait prendre des bains de poudre dans la salle de bain des Potter. Drago avait raison de croire que c'était la faute d'Harry ! Peut-être que les boursouflets se shootaient aux épices… Harry devrait poser la question à George.
Il s'habilla, descendit à la cave des Black pour y trouver une bonne bouteille. Les étiquettes étaient moisies : il en choisit une au hasard, en espérant vraiment que personne ne lui reprocherait son manque de goût.
Archimède sommeillait sur le dossier d'une chaise. Harry ouvrit la fenêtre pour que le hibou puisse s'en aller à la fin de sa sieste sans émouvoir tous les Moldus du quartier. Puis il quitta son vestibule et repartit dans le Londres moldu.
Après vingt minutes de Magicobus, Harry se félicita de ne pas avoir choisi un champagne ou des Biéraubeurres : les bouteilles lui auraient explosé entre les doigts tant le trajet avait été mouvementé.
Il arriva devant le portail monumental du manoir Malefoy. De l'extérieur, on devinait les fenêtres allumées. Harry réunit tout son courage d'ex Gryffondor et sonna.
