Hello ! Me revoilà, avec un peu d'avance même, pour le tome 4 des aventures d'Elisabeth Bishop ! J'espère que si vous lisez ceci, c'est que vous êtes devenu accro x)
Je sais qu'un peu de temps a passé depuis la publication du tome 3, alors voici un bref résumé ! Elisabeth Bishop (surnommée Elisa ou Magister) a deux ans et demi de plus qu'Harry, et est née dans l'univers de JKR avec tous les souvenirs de ses lectures de la saga. Elle a été répartie à Poufsouffle et a décidé de changer le monde. Elle n'a pas changé grand chose dans le tome 1, il faut l'admettre. Mais dans le tome 2, c'est elle qui se fait posséder par le journal de Tom, puis c'est Drago Malefoy. Dans le tome 3, elle parvient à capturer Pettigrew et donc à mener à l'ouverture du'n procès pour Sirius Black (l'issue du procès sera déterminée dans les prochains chapitres !).
Hum. Quoi d'autre. Percy est moins coincé, tout le pays sait que Voldemort est en réalité un Sang-Mêlé (et tout le monde pense que c'est Lucius qui a vendu la mèche, poussant ce dernier à se retirer de la scène publique), Narcissa et Lucius ont divorcés et c'est Narcissa qui a tout eu, y compris la garde de son fils... Hum... Harry n'a plus de cerf pour Patronus... Elisa a créé un Club d'Education Moldue et un trafic de livres... Il y a un club de duel illégal nommé le Challenge... Lupin a été viré en disgrâce après que le harcèlement des Maraudeurs ait été révélé de façon assez négative (McGonagall s'est sentie trahie et a également renoncé à son poste de directrice de Gryffondor)... Dumbledore et Elisa ne sont plus à couteaux tirés, mais ils n'ont pas non plus une très bonne relation...
Bref, j'imagine que ça va vous revenir en lisant x)
Sur ce... Bonne lecture !
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Prologue
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– N'oublie pas de vérifier l'avenir de façon périodique, rappela Isabelle Bishop à sa fille d'un air pensif. Tu approches de ta majorité et ton Troisième Œil devrait commencer à se stabiliser. Même sans être une Oracle, tu vas sans doute commencer à obtenir des visions de l'avenir plus nettes et plus larges.
Elisabeth Bishop jeta un coup d'œil critique vers ses runes divinatoires, sagement rangées dans leur boîte sur un coin de la table. La divination était souvent approximative, mais si on combinait ça avec sa connaissance du futur, Elisa obtenait des résultats assez satisfaisants. Cependant, jusque-là, elle n'avait rien obtenu qui lui permette de déjouer les plans de Voldemort pour cette année.
Et elle se voyait mal demander à sa mère de lire les étoiles pour savoir ce qui traversait la tête du Seigneur des Ténèbres, merci bien.
Elisa reporta donc son attention sur son miroir communicant, dans lequel s'affichait le reflet de sa mère. Alors qu'Elisa se trouvait dans la salle à manger du Cottage des Erables, Isabelle était quelque part au milieu des montagnes mexicaines, apparemment, sous un soleil éblouissant qui donnait aux rochers des teintes rougeoyantes. Normalement, sa fille aurait dû partir en voyage avec elle, mais…
– Je m'en occupe, ne t'inquiète pas, assura-t-elle sa mère. J'ai commencé à apprendre le tarot à Harry pour le distraire. Il va beaucoup mieux, au fait. Il est toujours fiévreux, et je lui ai dit de rester coucher, mais il a arrêté de vomir et de frissonner. Tu avais raison, c'était juste une insolation.
Oui, car Harry Potter, le célèbre Survivant, héros de la précédente guerre, et orphelin tragique qui avait passé toute son enfance dissimulé aux yeux du monde sorcier par le puissant Dumbledore… Harry Potter, que tout le pays pensait en vacances chez sa famille Moldue, était actuellement en train de roupiller dans la chambre d'amis de la famille Bishop.
Ce n'était même pas exceptionnel. En effet, depuis qu'elle l'avait rencontré à Poudlard (c'est-à-dire depuis désormais quatre ans), Elisa invitait chez elle Harry Potter tous les étés. D'abord, elle avait agi ainsi pour mettre dans sa poche le Survivant, grand protagoniste de la guerre qui se profilait à l'horizon. Et puis… Elle s'était attendrie. Elle était une Poufsouffle, et une sentimentale. Alors, pour elle, avant d'être une figure de proue ou un pion sur l'échiquier de Dumbledore, Harry Potter c'était ce gamin maigre à l'air négligé et terrifié qu'elle avait croisé à King's Cross. Et elle se sentait responsable de lui.
Surtout qu'elle connaissait son destin, grâce à sa connaissance du futur, et qu'elle savait à quel point sa vie allait être pourrie. Alors elle faisait tout ce qu'elle pouvait pour le protéger, et ça commençait par le protéger de sa famille moldue. A l'insu de Dumbledore, du Ministère et même des Weasley, Elisa s'assurait donc que le Survivant ne retourne jamais chez les Dursley.
– Tant mieux, sourit Isabelle avec soulagement. N'oublie pas qu'il doit s'hydrater régulièrement. Et fais-lui porter un chapeau ou une casquette !
Le soleil de juillet avait été inhabituellement brûlant, cet été, tapant sur le crâne des habitants du Sud de l'Angleterre comme un marteau d'acier. Harry et Elisa passaient généralement leurs journées à l'extérieur. Mais, alors qu'Elisa s'échappait régulièrement à l'ombre de son atelier pour bricoler, Harry ne se mettait jamais à l'abri, comme s'il craignait de perdre cette liberté nouvelle d'un instant à un autre. A la fin du mois de juillet, donc, il avait choppé une insolation, et avait été très malade. Les Bishop étaient supposées partir au Mexique à ce moment-là, laissant le Survivant entre les mains des Weasley. Mais Elisa était bien trop préoccupée par l'état du jeune Gryffondor pour pouvoir partir en vacances… Enfin bref. Du coup, Harry avait écrit une courte missive à Molly Weasley pour repousser sa date d'arrivée de quelques jours, Isabelle était partie seule, et Elisa était restée là pour se ronger les ongles et couver le Gryffondor brûlant de fièvre.
Certains parents auraient refusé de laisser leur fille de seize ans (et demi !) seule pendant plusieurs semaines pour veiller sur un adolescent malade. Mais les Bishop avaient toujours été singuliers. Et Elisabeth Bishop, surtout, avait toujours été… particulièrement autonome.
– Je m'en occupe, répondit-elle à sa mère. Je le surveille comme du lait sur le feu.
– Tu as le temps ? s'inquiéta sa mère d'un air soucieux. Je sais que tu avais plusieurs trucs en cours…
– Je gère, protesta Elisa. J'ai écrit à mes amis pour leur dire que je révisais le programme de sixième année de Sortilèges, alors ils me laissent en paix. Et puis, je m'occupe. Je planche toujours sur le projet de cristal à impulsion pour que les Cracmols activent les objets magiques.
– J'imagine, sourit Isabelle avec affection.
Oui, Elisabeth Bishop avait toujours été particulièrement autonome. Mais était-ce si étonnant ? Même si c'était un secret qu'elle n'avait jamais révélé à personne, Elisa était née seize ans plus tôt avec l'esprit d'une jeune adulte. Une jeune adulte avec les souvenirs très complets d'une vie entière, et de ses multiples lectures d'une certaine saga racontant les aventures d'Harry Potter.
Autant dire que ça avait été un sacré choc, de réaliser qu'elle avait été réincarnée dans un univers de fiction.
Elisa avait hésité entre fuir le chaos qui allait s'abattre sur ce monde, ou tenter de faire dérailler le destin. Et finalement, c'était cette décision qu'elle avait prise. Depuis le moment où elle avait mis les pieds à Poudlard, elle avait bataillé bec et ongles pour changer le canon. Répartie à Poufsouffle, elle avait commencé par améliorer les relations inter-Maisons en instaurant une certaine unité entre les membres de sa promotion. Puis tout s'était enchaîné : elle avait monté un club d'Education Moldue qui avait entraîné la création de six autres clubs inter-Maisons, et elle avait inventé un tas d'objets (allant de la plume rechargeable au MagicoGlisseur, une sorte de skateboard volant) qui se vendaient comme des petits pains et qui lui avaient permis de devenir plus ou moins riche…
Et, lorsqu'Harry Potter avait fait sa rentrée, les choses s'étaient accélérées. Elle avait pris le Survivant sous son aile, lui apprenant plusieurs sorts de duel, mais surtout à demander de l'aide quand il se trouvait en difficulté. A la fin de cette année scolaire, d'ailleurs, elle avait révélé à toute l'école que Dumbledore utilisait la Pierre philosophale comme appât à mage noir au cœur de Poudlard… Ce qui avait aussi entraîné une grosse perte de confiance des élèves envers le directeur.
Dumbledore, d'ailleurs, la tenait désormais à l'œil depuis trois ans. Soit parce qu'elle était devenu un pilier de la vie d'Harry, soit parce qu'elle avait assez violemment fait savoir qu'elle désapprouvait ses méthodes : impossible à dire. Elisa était toujours un peu mortifiée en pensant aux choses qu'elle avait dites à Dumbledore sur le coup de la colère, mais elle avait aussi l'impression que ça avait rendu le vieux sorcier beaucoup plus réceptif. Il la tenait à l'œil, mais il l'écoutait. Et il lui donnait aussi des conseils, comme s'il voulait l'aider. Comme s'il voulait être un mentor… Et Elisa ne savait pas vraiment quoi en penser. Dumbledore serait un allié précieux dans sa quête, et elle savait qu'il avait de bonnes intentions : mais l'idée de devenir une pièce sur son échiquier lui foutait vraiment les jetons. Mais bon, comme il faisait des efforts pour être à l'écoute, elle en faisait aussi. L'année dernière, elle lui avait donc donné des indices sur les Horcruxes. Et elle ne savait toujours pas si ça avait été une bonne idée…
Mais bref. Vous pensez que le talent d'Elisa pour créer le chaos s'arrête là ? Oh, quelle erreur.
Deux ans plus tôt, elle avait aussi volé pour elle-même le journal de Jedusor. Elle essayait généralement de ne pas penser à ces quatre mois. Elle n'avait deviné à aucun moment que Tom l'influençait, mais après coup, elle avait réalisé qu'elle avait changé. Elle était devenue plus impitoyable, plus colérique, plus agressive et plus arrogante. Avoir le journal de Tom avait été comme une drogue, qui l'enivrait de puissance mais qui détériorait son esprit. Elle se sentait juste tellement ivre de succès ! Pour la première fois, elle avait un égal intellectuel à qui parler, avec qui inventer des objets, avec qui échafauder des théories sur le Fourchelang ou la combinaison de plusieurs Sortilèges. Elle était meilleure en duel, plus agile, plus adroite, plus capable en tout. Elle était incapable de s'arrêter.
Heureusement qu'elle avait perdu l'Horcruxe. Si elle l'avait gardé plus longtemps, elle ne s'en serait peut-être jamais remise…
Dumbledore affirmait même qu'elle ne s'en remettrait sans doute jamais. Elisa faisait la sourde oreille. Elle avait bien conscience d'être différente, d'avoir les nerfs davantage à vif. Quand les Détraqueurs étaient proches, elle entendait la voix de Tom. Alors oui, bien sûr qu'elle porterait toujours l'empreinte de ce qui s'était passé. Mais par un agrément tacite, ses amis et sa famille n'en parlaient jamais, et elle trouvait que c'était bien mieux comme ça.
Mais passons. Elisa avait sauvé Ginny, mais lorsqu'elle avait perdu l'Horcruxe, elle avait condamné un autre innocent à se faire voler son esprit par Tom Jedusor. Ironiquement, c'était Drago Malefoy qui avait été victime du journal. Il avait ouvert la Chambre des Secrets, pétrifié plusieurs élèves, puis été kidnappé… Ce qui avait mené à la fureur de Narcissa, au divorce des Malefoy, et à une source anonyme révélant à tout le pays que Voldemort était un Sang-Mêlé nommé Jedusor. Quoique, Elisa était derrière cette histoire-là aussi. Elle s'était juste arrangée pour que tout le monde accuse Lucius Malefoy. Voir le Puriste tomber de son piédestal, abandonné par ses pairs et sa propre famille, était sombrement jouissif.
Les aventures d'Elisa avaient continué l'année suivante. Elle avait obtenu la Carte du Maraudeurs, appris le Patronus aux trois quarts des élèves de Poudlard, mis en place une réforme pour parrainer les élèves de première année, commencé à diffuser l'idée que les elfes de maison devaient être mieux traité, sauvé la vie d'Hagrid, et permis l'arrestation de Pettigrew !
Pourtant, elle ne se sentait pas aussi triomphante qu'elle aurait dû l'être. Son succès avait eu un prix, et il avait été lourd. Elle avait enquêté sur Sirius Black afin de donner le change sur ses véritables actions, et… Parmi ses trouvailles s'étaient retrouvé le témoignage hargneux d'un Serpentard qui peignait les Maraudeurs comme de sales petites brutes cruelles. Oh, elle l'avait caché. Mais ce témoignage avait été dérobé dans ses affaires, puis dévoilé au public.
Les conséquences de cette révélation avait été catastrophiques. Harry avait vécu cela comme une trahison ignoble de la part de son père. Il était bien plus atteint qu'il ne l'avait été dans le canon après avoir vu le pire souvenir de Rogue dans la Pensine : il était dévasté, et complètement furieux. McGonagall aussi avait mal vécu ces révélations. Elle avait démissionné de son poste de directrice de Gryffondor, considérant qu'elle avait gravement failli à ses devoirs. Même si Elisa était secrètement d'accord, elle ne pouvait s'empêcher de se sentir vraiment mal pour la Sous-directrice… Et pour tous les Gryffondor, qui vivaient ça comme un abandon. Dumbledore aussi avait l'air d'avoir pris un sacré coup. En fait, beaucoup de gens étaient horrifiés de voir leurs certitudes ainsi bousculées. Mais la plus grande victime du carnage avait été Remus Lupin. Sa lycanthropie et ses vieilles frasques étant exposées à la vue de tous, il avait été renvoyé en disgrâce, et la presse l'avait tellement incendié qu'il n'osait plus sortir en public.
Personnellement, Elisa n'avait pas d'affection pour les Maraudeurs : mais les faire chuter de leur piédestal avait fait souffrir beaucoup de gens, et même si ce n'était pas elle qui avait causé la fuite, elle ne pouvait s'empêcher de ressentir de la culpabilité. C'était son interférence qui était à la source de tout ça…
– Pas de visites sur le Chemin de Traverse ? fit mine de s'étonner Isabelle. Ça te changerait les idées. Tu pourrais voir Trisha.
Elisa sourit en pensant à sa meilleure amie Trisha Buttermere, puis secoua la tête avec regret :
– Avec le procès de Pettigrew dans trois jours ? Pas question. Je ne veux pas me faire prendre en embuscade par la foule.
La Gazette du Sorcier de la semaine dernière trainait toujours sur la table, et l'imminence du procès faisait la Une. Enfin, ça, et un article sur la mort d'une sorcière (Hestia Quelque Chose… Le nom ne lui était pas familier) d'une surdose de potion de Sommeil Sans Rêves. Bref, que des histoires déprimantes.
Elisa faisait partie du groupe d'élèves qui avait attrapé Pettigrew et l'avait forcé à se révéler au grand jour par accident. Enfin, pour le reste du monde, c'était un accident, mais Elisa était plutôt fière d'avoir réussi à orchestrée toute cette affaire. Bien sûr, au final, c'était Harry, Ron et Percy qui avaient récolté l'essentiel de la gloire, car ils avaient ensuite combattu en duel le Mangemort. Elisa, quant à elle, était restée sur place pour stopper l'hémorragie d'Hagrid, gravement blessé par Pettigrew. En y repensant, Elisa se sentait toujours malade. Tout ce sang par terre… Oh, elle était contente que son plan ait marché. Mais penser aux dommages collatéraux lui serrait toujours la gorge.
Elle se croyait prête à faire n'importe quoi pour changer le cours du destin, mais… Peut-être que finalement, elle n'était pas si forte que ça. Elle n'était pas une Gryffondor ou une Serpentard, elle n'arrivait pas à être aussi impitoyable. Le fait qu'il y ait des dommages collatéraux lui semblait toujours inacceptable, comme si c'était une faute personnelle.
– Mais tu devrais quand même sortir un peu, insista sa mère. Tu ne comptes toujours pas aller au procès ?
– Non.
– Peut-être que tu te sentirais mieux si tu y allais, tenta Isabelle. La boucle serait bouclée, tu verrais la justice être faite…
– Non, répéta Elisa avec plus de fermeté. Ce n'est pas… Ce n'est pas comme avec Lockhart. Même si je vois Pettigrew être condamné, ça… Ça ne changera rien.
Ce n'était pas la faute de Pettigrew si Harry refusait d'évoquer le nom de James Potter, et jetait les lettres envoyées par Sirius (toujours en détention à St Mangouste) sans les lire. Et ce n'était pas uniquement de la faute de Pettigrew si Hagrid avait failli se vider de son sang sur le sol de sa cabane. Voir le Mangemort condamné ne permettrait pas d'oublier cette scène…
– Tu ne vas même pas rendre visite à Gwendolyn ? tenta sa mère.
La jeune fille secoua la tête :
– On se parle par miroir presque tous les jours. Mais j'irai faire du shopping avec Cédric d'ici quelques jours, quand le procès sera fini et que l'agitation sera retombée. Je ne vais pas rester enfermée tout l'été.
Elisa adorait aller sur le Chemin de Traverse, en temps normal. C'était là qu'habitait sa meilleure amie Trisha, mais c'était aussi là que se trouvait Bishop & Bowman (ou B&B pour les initiés), la boutique gérée par son amie Gwendolyn Bowman, qui vendait ses inventions. La boutique offrait une gamme de produits allant de la plume rechargeable aux miroirs communicants, et avait un certain succès. Elle esquissa un sourire un peu rêveur en y pensant. C'était tout de même grisant d'avoir monté un business avant même d'avoir dix-sept ans. Bon, ça n'allait pas aider son arrogance (Elisa avait bien conscience que c'était son plus gros défaut), mais elle ne se voilait pas la face : c'était tout de même vachement cool.
Elle secoua la tête, amusée, puis reporta son regard sur le visage de sa mère qui s'affichait sur son miroir :
–Allez, je dois y aller. Je vais apporter sa soupe à Harry. Et je crois que Chappy a prévu de la tajine pour moi.
L'elfe de maison des Bishop était un excellent cuisinier, et elle sentait l'odeur délicieuse du mouton et de la sauce sucrée envahir doucement le rez-de-chaussée. Isabelle sourit avec amusement :
– Je te laisse alors. Bon appétit ! Et à demain !
– A demain, Maman.
L'appel se déconnecta, et le miroir communicant n'afficha plus que le reflet du visage d'Elisa. Elle referma le poudrier métallique, et le rangea dans sa poche en se levant de sa table, avant de se diriger vers la cuisine. Chappy, l'elfe de sa mère, était en train de remuer la sauce de la tajine qui chauffait paisiblement sur la vieille gazinière. Le repas d'Harry était déjà prêt, posé sur un plateau près de l'entrée. Elisa le souleva des deux mains, puis se dirigea vers l'escalier, ignorant le regard désapprobateur de Chappy. L'elfe de maison aurait pu apporter son déjeuner à Harry lui-même, mais Elisa saisissait le moindre prétexte pour aller vérifier comment allait le Gryffondor.
La porte de sa chambre était fermée, mais Elisa se concentra et fit tourner la poignée en utilisant la Force. Elle s'entraînait à utiliser sa magie pour pousser, attirer ou déplacer des objets sans baguette depuis qu'elle avait découvert qu'elle était une sorcière, alors ouvrir une porte était un jeu d'enfant.
La pièce était plongée dans une demi-pénombre, les rideaux étant tirés mais les volets restés ouverts, et Elisa distingua la silhouette d'Harry, enfoui sous sa couette. Elle posa doucement le plateau sur sa table de chevet, et le jeune garçon grogna et remua, se redressant un peu.
– Il est déjà midi ?
Il avait toujours le regard un peu fiévreux, et frissonnait. Elisa hocha la tête, et s'assit sur le rebord du lit :
– C'est un bol Thermos, la soupe restera chaude si tu veux la boire plus tard. Comment tu te sens ?
Harry se frotta les yeux en s'asseyant dans le lit, gardant la couette drapée autour de lui :
– Je n'ai plus envie de vomir et j'ai arrêté de grelotter, donc c'est un progrès. Mais je me sens toujours mal. J'ai l'impression que c'est pire que la dernière fois que j'ai eu un coup de chaud comme ça.
– Tu as déjà eu une insolation ? s'étonna Elisa.
– Quand j'avais six ou sept ans, grommela Harry. Ma tante m'a obligée à retourner à l'école quand même. C'était horrible. Je me suis évanoui deux fois. La deuxième fois, un des profs m'a vu et m'a emmené à l'infirmerie. Ils ont appelé les Dursley, et ils étaient furieux. Après ça, tante Pétunia m'a fait porter un chapeau quand je désherbais le jardin.
Il avait choppé son insolation en faisant des corvées dans leur jardin à l'âge de six ans. Elisa réprima un grondement furieux. Parfois, elle avait envie de faire payer les Dursley. La seule chose qui l'en empêchait, c'était que cela risquer d'alerter Dumbledore quant au fait qu'elle avait kidnappé Harry depuis maintenant trois étés. Le directeur forcerait alors le Survivant à retourner chez son oncle et sa tante… Et c'était quelque chose qu'Elisa voulait éviter à tous prix. Soustraire Harry à la maltraitance des Dursley était une de ses priorités.
Elle s'efforça de sourire, et prit un ton léger :
– Tu te sentiras mieux bientôt, t'inquiète. Désolée que ton anniversaire ait été aussi pourri.
L'anniversaire d'Harry Potter avait eu lieu la veille, quand le jeune Gryffondor était malade comme un chien. Il n'avait même pas encore déballé ses cadeaux, qui étaient actuellement empilés au pied de son lit. Le Survivant fit la grimace :
– Bah, même en étant malade, ça reste un meilleur anniversaire que chez les Dursley.
– Mmmh, fit Elisa sans insister. Tu as décidé si tu voulais aller au procès de Pettigrew, finalement ? C'est quand même dans trois jours.
Harry se mordit la lèvre, hésitant.
– Je n'ai pas encore décidé, avoua-t-il. Je veux le voir condamné, mais… Je ne veux pas voir Sirius Black. Ni personne, en fait. Et il y aura forcément des journalistes, des curieux, tout ça.
Après le choc des révélations sur les Maraudeurs, Harry ne voulait vraiment pas parler aux amis de son père. C'était d'ailleurs pour ça qu'il refusait d'ouvrir toute lettre de Sirius. Et bien sûr, il avait encore moins envie de voir des journalistes fouiller dans le passé de sa famille, ou dans ses sentiments par rapport à ce bazar…
– Le frère de Gwendolyn y sera, tenta Elisa. Et Gwendolyn a proposé de lui fabriquer un miroir communicant de petite taille qu'il pourra utiliser pour nous faire regarder toute l'audience. On pourra tout regarder en direct.
Harry hocha la tête avec reconnaissance :
– Ça serait bien, oui.
Il y eut un court moment de silence, où Harry prit son bol de soupe et en but avec hésitation deux gorgées. Puis il coula un regard en biais en direction de son amie Poufsouffle :
– Et toi, tu n'y vas pas ?
– Je ne vois pas l'intérêt, grimaça la jeune fille. Que j'y sois ou pas, Pettigrew va avoir droit à un aller simple pour Azkaban. Tout le monde sait qu'il est coupable, et le Ministère s'est déjà trouvé un bouc émissaire tout désigné avec Croupton.
Croupton Sr était mort dans des circonstances mystérieuses peu avant le début de l'été. A ce moment-là, Pettigrew avait déjà été capturé (l'affaire était donc impossible à cacher) et Fudge avait donc décidé de faire peser tout le blâme sur Croupton, le juge qui avait condamné Sirius Black à Azkaban sans procès. Après tout, le directeur du Département de la Coopération Magique Internationale n'avait pas très bonne réputation, depuis l'incarcération de son fils avec les Lestranges. Mais bref, l'essentiel, c'était que Croupton avait été assigné à résidence surveillée, puis avait ensuite été retrouvé mort par empoisonnement quelques temps plus tard. Le Ministère s'était hâté de conclure au suicide et de clore l'affaire, non sans insister sur la lâcheté de cet acte qui valait presque un aveu.
Elisa était plutôt de l'avis que Croupton Jr avait profité du trouble qui agitait son père pour se faire la malle, éliminant son géniteur à l'occasion. Mais évidemment, elle n'avait aucune preuve, et ne pouvait en parler à personne. Elle devait donc garder ça pour elle, et s'angoisser toute seule à ce sujet. Barty Croupton Jr était un Mangemort dangereux, et il était dans la nature. Ça ne pouvait que mal finir.
– Ils ont toujours Black en détention, contra Harry. Ils ne sont peut-être pas si sûrs que ça.
Elisa agita la main avec désinvolture :
– Black est en détention à St Mangouste, pas au Ministère. Il y est plus pour prendre soin de sa santé que pour autre chose. Après douze ans à Azkaban, son organisme a dû en prendre un coup.
Le jeune Gryffondor émit un grognement dubitatif. Après avoir lu la lettre de Willis Crawford l'année dernière, Harry rejetait assez violemment ses liens avec son père. Il voyait Sirius comme une sorte de rappel que les Maraudeurs avaient été des brutes et des idiots, et c'était un obstacle qu'il lui faudrait surmonter avant que toute discussion puisse être possible.
Car Elisa avait la ferme intention d'obliger Sirius et Harry à discuter. Plus particulièrement, à discuter du transfert de la garde du Survivant à son parrain. Pour l'instant, elle protégeait Harry des Dursley en magouillant dans le dos du Ministère et de Dumbledore : mais si un moyen légal se présentait pour qu'Harry quitte définitivement les griffes de ces affreux Moldus, la jeune Poufsouffle allait bondir sur l'occasion.
– Et puis, c'est déjà assez barbant que je doive aller faire des courbettes devant des culs-pincés durant tout l'été ! poursuivit Elisa d'un ton léger sans laisser transparaitre ses ruminations mentales. Je ne vais pas en plus me coltiner les charognards avides de scoops qui seront au procès.
Pris par surprise, Harry s'étrangla avec sa soupe, puis se mit à rigoler. Elisa ne put s'empêcher de sourire, plus amusée par la réaction du Survivant que par l'évocation desdits culs-pincés.
Bon, elle exagérait. Cet été, Elisa avait été invitée à une soirée mondaine et à un festival sorcier, par des gens de bonne famille qui la considéraient comme un élément digne de faire partie de leur réseau. C'était flatteur (et Elisa était très fière d'avoir un tel succès à seize ans à peine), mais la jeune fille avait absolument horreur de ce genre d'évènement ! Se donner en spectacle l'angoissait autant qu'un examen. Du coup, durant la soirée des Bulstrode, elle avait passé son temps collée aux adolescents qu'elle connaissait (notamment Adrian Pucey). Et au festival de Nephtys, à la mi-juillet, elle avait retrouvé sa meilleure amie Trisha Buttermere et avait passé toute la journée avec elle, saluant aimablement les gens qui voulaient la rencontrer, mais se cachant derrière son amie dès qu'un aristocrate pompeux abordait un sujet glissant : la politique, sa future carrière, etc.
– Et tu as toujours une soirée de prévue, non ? fit innocemment Harry.
Elisa grinça des dents, mais hocha la tête :
– Celle de Narcissa Black, à la mi-août. Apparemment, ça sera très privé. Je ne sais pas à quoi m'attendre, sur ce coup-là.
– Sans doute rien de trop terrible, sourit Harry. Tu as sauvé la vie de Malefoy, après tout.
Et Drago était devenu beaucoup plus supportable, après ça. Oh, il était toujours arrogant et raciste, mais il faisait attention à ce qu'il disait quand certaines personnes étaient à portée de voix, maintenant. Il était plus prudent, et plus mature, bien que toujours horripilant. Sa rivalité avec Harry s'était éteinte, chaque adolescent ayant des considérations plus pressantes. Et l'héritier Malefoy essayait de s'abstenir d'asticoter les amis d'Elisa de manière générale.
C'était d'ailleurs une bonne chose. Elisa avait suffisamment de trucs de prévus pour l'année scolaire qui approchait sans avoir besoin d'y rajouter les geignements d'un sale mioche Puriste.
Car, en juin prochain, Voldemort allait revenir à la vie.
Enfin, ça, c'était le pire des scénarios possible. Elisa avait d'ailleurs la ferme intention de l'éviter. Mais le (possible) retour du Seigneur des Ténèbres n'était pas la seule chose qui lui pesait sur l'esprit. Oh que non ! En effet, le Tournoi des Trois Sorciers allait avoir lieu à Poudlard, et… Etant donné que cet évènement allait entraîner (du moins, selon l'histoire canon) tout un tas de catastrophes, la jeune fille organisait presque depuis sa naissance des plans pour faire dérailler cette histoire.
Elle avait des plans pour protéger Cédric Diggory : pour l'empêcher de devenir champion de Poudlard, pour l'empêcher d'être enlevé par la Coupe durant la troisième tâche, pour l'empêcher d'être abattu comme un agneau pris par surprise. Elle avait des plans pour empêcher Harry de participer au Tournoi, mais aussi des plans pour réduire le chaos si jamais il était sélectionné : en apaisant la presse, en apaisant les directeurs de Durmstrang et Beauxbâtons, en répandant des rumeurs sur un complot de Mangemorts, etc. Elle avait prévu des plans pour coacher l'éventuel champion de Poudlard, qu'il s'agisse de Cédric, ou de quelqu'un d'autre. Elle avait prévu des plans pour devenir elle-même championne, parce que si jamais quelqu'un devait risquer sa vie pour protéger Harry Potter, elle n'allait certainement pas laisser un innocent prendre ce risque. Elle avait prévu des plans pour affronter un dragon, des plans pour nager au fond du lac, et des plans pour combattre des Acromentules et des sphinx dans le labyrinthe de la troisième tâche. Elle avait prévu différents moyens d'alerter les secours si un élève se faisait enlever, elle avait étudié les Portoloins… Bref, elle préparait les évènements de cette année avec plus de détermination qu'un examen de Sortilèges.
Au long de sa scolarité, elle avait préparé des tas de plans ou de manigances pour faire dérailler le destin. Stopper Quirrell, arrêter Pettigrew, ou sauver Ginny du journal. A chaque fois, elle avait eu plus ou moins de succès. Mais à chaque fois, il y avait eu une sorte de marge d'erreur possible.
Pas cette fois. Cette fois, si elle échouait, Voldemort reviendrait et tout le monde allait mourir. Tous ses amis, tous les gamins sur qui elle veillait : ils allaient tous mourir. Parce qu'un an plus tôt, le passé de Tom Jedusor avait été révélé au grand jour, et que Voldemort serait tellement fou de rage que sa première action serai de massacrer tous ceux qui avaient supporté cette histoire. La liste était longue, mais surtout, elle comprenait absolument toutes les personnes qu'Elisa connaissait.
Empêcher le retour de Voldemort n'était pas seulement un acte d'altruisme effectué pour sauver le monde. Sur ce coup, Elisa sauvait aussi sa peau et celle de tous ses proches. Alors vraiment, elle n'avait pas droit à l'erreur.
Et elle n'avait pas droit aux distractions.
– J'espère, soupira-t-elle. N'empêche, plus tôt ça sera fini, et mieux ce sera. Je ne sais pas qui y sera, mais je sais qu'aucun de mes amis de Serpentard n'est invité et c'est largement assez pour me faire flipper. Franchement, j'y vais juste pour voir la nouvelle maison de Drago.
Et lui voler le médaillon de Serpentard, accessoirement. L'Horcruxe devait toujours se trouver à Square Grimmauld, où Narcissa et son fils habitaient désormais. D'ailleurs, Elisa se demandait s'ils avaient l'elfe Dobby avec eux, et si elle pouvait profiter de l'occasion pour s'enquérir de son sort…
Elle poussa un profond soupir. Jongler avec le destin et ses propres projets était décidément bien compliqué. Et encore, pour l'instant, ils étaient encore en période de paix, et Elisa avait donc une grande liberté d'action…
– Parlons d'autre chose, finit-elle par déclarer fermement. Tu as fini tes devoirs de vacances ?
Harry poussa un grognement de désespoir feint, mais accepta de bon cœur de parler de sortilèges. Et, tandis que le Survivant se plaignait de ses devoirs tout en buvant à petites gorgées sa soupe, Elisa sourit, et prit quelques secondes pour apprécier l'instant.
Il y avait des tas de choses qui n'allaient pas dans le monde. Des choses qu'elles n'avaient pas pu changer, qu'elle n'avait pas encore le pouvoir de changer, et des choses qu'elle avait peur de ne pas être capable de changer. Mais l'univers, cet univers-là, qu'elle avait influencé à sa mesure depuis seize ans… Cet univers n'était pas si mal. Il y avait plus d'ouverture et de tolérance, moins d'enfants malheureux. Certaines personnes avaient subi un sort terrible, comme Lockhart qui purgeait sa peine à Azkaban, ou Mr Croupton qui avait apparemment été assassiné par son fils. Mais il y avait de l'espoir. Poudlard était mieux organisé, Sirius Black allait être libéré, Narcissa Black-Malefoy avait renoué avec sa sœur Andromeda, une école pour Cracmols allait ouvrir !
Je vais rendre ce monde meilleur, avait promis Elisa au Choixpeau des années plus tôt. Et oh, bien sûr, il y avait eu des ratés, des erreurs, des dérapages. Mais globalement, elle avait fait quelque chose de bien. Même si elle n'avançait qu'à petits pas, elle avait déjà tant fait. Et elle ferait encore davantage, elle se l'était juré.
Alors pour ça, elle ne pouvait pas se permettre d'échouer cette année. Quoi qu'il se passe, quoi qu'il en coûte, elle ne pouvait pas se permettre que tout cela ait été en vain.
Elle ne pouvait pas laisser Voldemort revenir.
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Et voilà ! J'espère que ça vous a mis l'eau à la bouche. A la semaine prochaine pour la suite !
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