BÉNÉVOLENTS - Partie I ÉMISSAIRES
3 Sabotages
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Le sifflement strident qui annonçait une communication importante résonna dans tous les recoins du vaisseau. Chacun des membres de l'équipage mit son activité en pause, l'équipe de nuit se réveilla pour écouter. La plupart des personnes était dans les mess, à prendre son petit déjeuner.
«Ici l'officier en second Spock qui requiert votre attention… »
Pourquoi le Commandant Spock et non pas le Capitaine? Était-il arrivé quelque chose de grave à Kirk?
«...Comme vous le savez toutes et tous, un phénomène paranormal inexpliqué composé d'énergie électro-magnétique atypique a traversé l'Enterprise de part en part, hier, à 14.42.21 Celui-ci a eu un effet inattendu sur l'organisme de notre Capitaine…»
Chacun·e retint son souffle avec anxiété, espérant que ce ne soit rien de dramatique. Spock poursuivait de sa voix calme et impassible:
«... le Capitaine a désormais l'apparence d'une femme…»
Sur tous les ponts, dans toutes les cabines, le silence devint palpable. Nombreuxses furent celleux qui retinrent leur souffle. Illes échangèrent des regards aussi incrédules qu'atterrés. LE Capitaine Kirk ?! UNE femme ?!
«...Le Docteur McCoy a procédé à un bilan complet de ses capacités psycho-physiques et intellectuelles, notre Capitaine n'a rien perdu de ses compétences. Cette métamorphose ne provoquera donc aucune modification du fonctionnement hiérarchique du vaisseau…»
L'Enterprise avait traversé un bon nombre d'épreuves et d'aventures, mais jamais rien d'aussi surréaliste. Les membres de l'équipage retrouvèrent leur langue et s'interrogèrent. LE Capitaine Kirk, à la virilité si éclatante, transformé en… femme !? en l'espace d'une nuit? Comment cela pouvait-il être possible? Ce ne pouvait être qu'un mirage, une hallucination! Le Commandant Spock et le médecin-Chef McCoy devenaient-ils fous?
« Ici le Capitaine Kirk qui vous parle…»
Une voix de femme!
Et pourtant, ce qui stupéfia le plus l'équipage était que toustes identifiaient cette voix féminine comme étant celle du Capitaine, sans la moindre hésitation.
«... j'invite toutes les personnes ayant subi une transformation comparable à la mienne à se présenter dès ce matin à l'infirmerie. Par ailleurs, je veux que chacune et chacun de vous vérifie dans les moindres détails si tout fonctionne correctement sur son poste de travail, afin de s'assurer que ce phénomène électro-magnétique n'ait pas eu d'autre effets imprévisibles. Kirk out»
Pas de doute possible. C'était bien là leur Capitaine, sa façon de parler, de commander... mêmes inflexions dans les modulations de sa voix, même phrasé, même autorité, même volonté implacable et communicative.
Passé le premier choc, nombreuxse furent celleux à penser qu'il n'y avait vraiment qu'à lui qu'arrivaient de telles choses bizarres... (tout en se demandant quel pouvait bien être sa nouvelle apparence physique)
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Il y avait plus de monde que d'ordinaire dans les couloirs qui reliaient la cabine de Kirk au turbolift, et à la passerelle. Il s'efforça de faire comme s'il ne voyait pas les regards discrets mais abasourdis, qui se posaient sur lui, lui rappelant de façon pesante que ce corps n'était pas celui d'un homme.
McCoy s'était rendu directement à l'infirmerie, en bougonnant : l'infirmière Chapel l'avait informé d'un flux inhabituel de patient·es. Aucun cas grave, rien de comparable avec ce que Jim avait subi, mais sa présence était requise. Il n'allait pas pouvoir garder un œil sur Jim, et camouflait son inquiétude avec un comportement irascible. Sa seule consolation était de savoir que le Lutin au sang vert* ne le quitterait probablement pas d'une semelle.
Droit et imperturbable, comme à son habitude, Spock marchait à côté de son Capitaine. Son attitude était strictement identique à celle des jours précédents. La présence immuable, indéfectible, de Spock, son ami, son T'hai'la (ce mot réchauffa l'âme de Jim), tel un roc inaltérable, un centre de gravité, était profondément réconfortante. Kirk fit donc comme si tout était parfaitement normal.
Toutes les têtes se tournèrent vers eux lorsqu'ils pénétrèrent sur la passerelle. L'ambiance était bourdonnante comme une ruche. Là encore, il y avait plus de personnel que d'ordinaire. Mais ce n'était pas par voyeurisme : illes étaient là pour aider à la vérification du bon fonctionnement de chacun des postes de travail, comme le Capitaine l'avait ordonné le matin même.
Leur entrée provoqua un silence épais.
Kirk se raidit et essuya de plein fouet leur stupéfaction , comme une gifle. Illes avaient pourtant été informé·es de cette métamorphose! Il croisa les yeux d'un jeune enseigne qui détourna rapidement le regard en rougissant. Il se souvint des mots maladroits de Bones et il comprit. Aucun·e d'elleux ne s'était attendu à ce que son apparence soit aussi féminine, à ce que ce corps et ce visage soient aussi beaux. Il avait toujours attiré les regards. Jusqu'à présent, cela ne l'avait jamais dérangé, bien au contraire. Il contint une bouffée de contrariété et de douleur mêlées.
Spock parvint à rester impassible malgré la violente souffrance de Jim qui vrilla leur Kash-naf. Avant qu'il n'ait le temps de fustiger l'équipage pour ces attitudes inadaptées et inacceptables, Kirk prit la parole.
— Bien. Prenez le temps de me dévisager une bonne fois pour toute des pieds à la tête, puis que chacun se concentre ensuite sur son travail! Déclara-t-il d'une voix plus rude qu'il ne l'avait voulue.
Il crut percevoir l'approbation de Spock sur son visage indéchiffrable. Il vit aussi le malaise de certain·es.
─ NE VOUS DÉTOURNEZ SURTOUT PAS ! Gronda le Capitaine avec une implacable autorité. Ne baissez pas les yeux ! ASSUMEZ votre curiosité !
Il se tint bien droit et tourna sur lui-même, les bras à demi tendus. Chacun devait pouvoir dévisager à son aise ce maudit corps de femme. Ses prunelles noisette, assombries par sa colère froide, se posèrent sur chaque membre de l'équipage présent sur la passerelle, un à un, et aucun ne parvint à soutenir son regard sévère. Tout dans son attitude glaciale et digne les mettait au défi de lui faire une remarque.
Illes constatèrent que leur Capitaine n'avait rien perdu de son charisme et de son autorité... et pourtant, au fond de lui, Kirk était loin de posséder l'assurance qu'il affichait.
— Pas de doute. Plaisanta Uhura en s'adressant à l'enseigne qui l'assistait. Notre Capitaine n'a pas changé, il reste fidèle à lui-même!
Elle avait parlé à mi-voix. Mais le silence était tel que tout le monde l'entendit. Elle rougit. Kirk nota l'emploi du masculin dans sa phrase. Puis il vit nettement une vague de regards complices et approbateurs parcourir la passerelle, accompagnée de murmures du style «...ça oui, pas de doute...».
Il éprouva de la reconnaissance envers Uhura et lui adressa un sourire involontairement charmeur auquel elle répondit en souriant à son tour. Ces échanges décoincèrent l'atmosphère. Homme ou femme, Kirk restait Kirk, et chacun·e se focalisa sur son activité en s'efforçant de s'accoutumer à l'apparence dérangeante du Capitaine.
Kirk se plongea lui-aussi dans son travail alors que les enseignes lui présentaient tout à tour les pads à superviser.
— Capitaine?
Kirk leva la tête de son pad.
— Oui, lieutenant Sulu.
— Nous avons terminé les vérifications, Chekov et moi: nous avons réajusté de légers décalages ponctuels, les systèmes algorithmiques de pilotage et de guidage de la navigation sont à présent totalement opérationnels.
Kirk fronça légèrement les sourcils mais ne fit aucun commentaire.
— Bien, merci à vous deux. Et de votre côté, lieutenant Uhura?
— Il me reste encore quelques détails à vérifier, mais tous les paramètres des systèmes de communication semblent fonctionner correctement pour le moment, Capitaine. J'ai juste eu à corriger des bugs mineurs. Je continue à rester vigilante.
Ce poste aussi ? Songea Kirk
— Parfait, merci Lieutenante.
Kirk se tourna vers Spock
— Les déflecteurs ne présentent aucune déficience notable, Capitaine. J'ai vérifié 69.968% des algorigrammes duotroniques. Mis à part de légers dysfonctionnements sans gravités, pour lesquels j'ai lancé un programme auto-correctif, je n'ai détecté aucune faille dans leurs systèmes de calcul.
— Bien, c'est déjà ça. Merci à tous et toutes pour votre travail.
Kirk ne montra pas le malaise grandissant qui enflait en lui, mais il sentit le regard perçant de Spock sur lui. Il se pencha sur le communicateur de son fauteuil :
— Capitaine Kirk appelle l'infirmerie.
— Ici McCoy. Je suppose que vous me contactez pour savoir si tout va bien. Répondit le médecin avec sa voix des mauvais jours
— Vous avez lu dans mes pensées, Docteur. Rien de grave donc. Commenta Kirk
Il connaissait bien Bones et ses crises d'acariâtreté. Il ne parvenait pas pour autant à se sentir soulagé, bien au contraire. Il eut la sensation de percevoir une forme d'interrogation muette en provenance de Spock, transmise par leur Kash-naf.
— On peut dire cela. Ronchonna McCoy, déjà excédé. Ils se sont tous passé le mot pour se casser un ongle ou avoir des vapeurs! .
On entendit au loin les protestations indignées de l'infirmière Chapel. Cela n'arrêta pas le médecin :
─ Et l'enseigne Mattiew s'est encore coupé trois doigts!
— Les mêmes que la dernière fois?
— Ceux de la main gauche, cette fois-ci. Bougonna le médecin. Les joies de l'ambidextrie! Bon sang! Depuis le temps que je lui dit de choisir une main!
— La routine, donc. Conclut le Capitaine. Kirk appelle la salle des machines.
— Scotty au rapport, Capitaine.
La voix du chef-ingénieur conforta les alertes de son sixième sens : il y avait un problème!
Spock était à l'écoute de leur Kash-naf depuis le matin. Il percevait et analysait les émotions de son T'hai'la de façon relativement nette. La transmission des affects était beaucoup plus efficace depuis que ce lien avait été dévoilé. C'était donc cela, ce que les Humains nommaient «intuition». Fascinant.
— Quel est le soucis, Scotty?
— Le mieux serait que vous veniez voir cela avec Monsieur Spock. Vous avez bien fait de nous faire passer en vitesse infra-luminique!
Un frisson d'inquiétude parcourut la passerelle. Mais chacun·e conserva son calme.
— Nous arrivons. Sulu vous prenez le commandement !
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— Nous vous écoutons, Scotty. Dit Kirk en entrant en salle des machines.
Scotty dut fournir un effort considérable pour détourner les yeux des nouvelles formes, délicieusement féminines, de Kirk. Il répondit :
— C'est l'enseigne Mattiew qui nous permis de découvrir le problème. Il est maladroit, mais il a des yeux de lynx, ce garçon! Suivez-moi dans la chambre intermix.
En quelques clics sur le panneau de contrôle, les échanges matières-antimatière furent mis en pause. Le casier qui contenait le cristal de dilithium fut décontaminée puis désencastré de son emplacement.
─ Regardez: là.
Les deux hommes scrutèrent avec attention le cristal de dilithium. Kirk ne vit rien.
— Le cristal présente un fendillement. Constata Spock, imperturbable.
Kirk localisa l'infime fissure à son tour, comme si son T'hai'la lui avait mentalement montré où regarder.
— Il est de petite taille. Constata-t-il
— Il mesure environ 0.312 centimètres. Précisa Spock. Cette fissure constitue cependant un danger, car cela signifie que le cristal présente une fragilité à cet endroit.
— Elle peut s'agrandir, et le cristal se rompre, provoquant une brutale une interruption de la régulation des flux de plasma... et tout faire exploser. Comprit Kirk. Il serait prudent de le changer rapidement.
— Nous avons donné notre cristal de rechange au vaisseau USS Marie-Curie NX-047* il y a 2,4 jours. Rappela Spock. La base la plus proche de Starfleet ne recevra notre demande d'un exemplaire de remplacement que dans 24.13 heures, et il leur faudra approximativement 75 heures pour nous rejoindre.
— Nous devons donc tenir quatre jours. Nous n'avions pas le choix pour le Marie-Curie. Rétorqua Kirk, comme pour se convaincre lui-même. Leur cristal était dysfonctionnel et leur EPS donnait des signes de faiblesse. La vie de l'équipage de ce vaisseau était en danger.
— Vous avez agi conformément à la vingtième Directive*, Capitaine. Ajouta Spock. De plus, leur équipe scientifique doit achever sa mission d'analyse de la planète Gamma Canum VII, dont les sous-sols semblent contenir de nombreuses ressources en métaux rares.
─ Dont du dilithium?
─ Non, Capitaine. La compositions chimique de Gamma Canum VII n'est pas favorable à l'apparition de ce minerai.
— Oui, bien sur. Cela aurait été trop simple... Évaluation des risques, Scotty ?
Scotty n'avait cessé de contempler Kirk alors qu'il discutait avec Spock. Il croisa le regard attentif du Capitaine, ces yeux noisette ombragés de longs cils, ces lèvres si bien dessinées, ce visage harmonieux. Il acheva de perdre tout contenance et balbutia d'un air idiot:
— … et bien…
Scotty avait toujours été très sensible à la beauté féminine. Il y avait pourtant de belles femmes dans son équipe, mais au bout de quelques heures de travail avec elles, il finissait toujours par les considérer simplement comme des collègues, au même titre que les membres masculins de son équipe.
Le problème était que Kirk n'était pas seulement belle, il était d'une beauté telle qu'il n'en avait jamais vue auparavant.
C'était comme si tout le charme, le charisme, la sensualité inconsciente de l'homme-Kirk avaient été transposées au féminin et accrues de façon exponentielle. Kirk avait des yeux aux reflets de miel, quasi-hypnotiques en raison de la volonté qui s'en dégageait… ses lèvres étaient pulpeuses… et ce corps de déesse inaccessible… et cette expression autoritaire qui lui allait si bien (Scotty avait toujours adoré, et respecté, les femmes à poigne)
— Lieutenant-Commandant Scott! Le reprit Spock d'une voix glaciale. Le Capitaine vous a posé une question.
Les Humains mâles ne savaient-ils donc pas contrôler leur libido lorsque celle-ci se manifestait de façon inappropriée?
Kirk vit Scotty rougir: l'ingénieur n'avait pas entendu un mot de sa question, trop occupé à le contempler de façon ahurie, à s'extasier bêtement de sa beauté féminine. Une profonde douleur lui vrilla à nouveau les entrailles : il-n'était-PAS-une-femme !
Spock se rapprocha imperceptiblement de lui, si proche qu'il perçut la chaleur émanant de son corps Vulcain, étonnement réconfortante.
Scotty déglutit avec difficulté et bafouilla, conscient d'avoir commis une bévue :
—... euh? hem, oui oui, les risques...
Le regard de Kirk, à la fois blessé et furieux, fit honte à Scotty. Le Capitaine était un homme coincé dans un corps de femme, ça l'ingénieur l'avait bien compris. Un homme hétérosexuel, fier et sûr de sa virilité (Kirk était à l'aise dans sa virilité, il n'avait jamais éprouvé de problème dans le fait qu'un homme puisse essayer de le séduire, et avait toujours su l'éconduire avec gentillesse).
Mais surtout, Kirk était le Capitaine. Scotty se rendit compte que son attitude était désobligeante, et inexcusable.
— Pardonnez-moi, Capitaine, je suis un homme idiot. Dit-il d'un air contrit. Je vais me reprendre.
Un homme…
Avec un peu de recul et d'empathie, Kirk pouvait comprendre sa réaction. Les gens accordaient encore tellement d'importance aux apparences !
Il allait certainement avoir à faire face à d'autres comportements de ce genre de la part de certains hommes, ou femmes… voire du harcèlement. Celui-ci était puni très sévèrement, mais cela n'arrêtait pas certains butors qui se croyaient au-dessus des lois.
Scotty n'était pas un mufle mais un homme bon et généreux, toujours respectueux avec les femmes, bien que parfois empoté avec elles. Son dévouement et sa loyauté n'étaient plus à prouver.
Kirk se devait d'être indulgent. Il prit une grande respiration pour calmer son profond agacement. Il eut la sensation que Spock l'aida en lui transmettant un peu de son énergie psychique via leur Kash-naf.
— Le cristal risque-t-il de se briser? Demanda Kirk presque tranquillement. Et si cela arrive, que risquons-nous?
Spock contemplait Kirk en silence. Sa souffrance psychique l'atteignait via leur kash-naf. Il parvenait, pour le moment, à contenir son agacement grandissant face à l'accumulation de ces comportement inadaptés. Son Capitaine faisait d'ailleurs preuve d'une impressionnante maîtrise de soi.
Scotty lui adressa un regard reconnaissant. Il se recentra sur son travail, et la question posée.
— À vrai dire, je vous avoue être incapable de vous dire si ou quand le cristal va se fendre en deux! Se désola-t-il. Vous me connaissez, j'ai moi-même vérifié l'intégrité de ce cristal avant de l'installer avant que nous quittions Vulcain, il était parfait. Il est tout neuf. Le simple fait qu'il puisse se fendiller est déjà tellement improbable !
─ Nous ne remettons pas en cause la qualité de votre travail, Scotty. Tempéra Kirk.
─ Les risques de survenue d'un tel fendillement sur un cristal de dilithium neuf sont infinitésimaux, de l'ordre d'approximativement 0.000012%. Ajouta Spock
Une telle chose n'arrivait jamais et... Il regarda à nouveau le Capitaine.
— La lumière chantante! C'est ça qui a provoqué ça!
─ Votre déduction est pertinente. Confirma Spock. Suite à cet événement électro-magnétique atypique, nous avons eu à déplorer de nombreux dysfonctionnements mineurs sur la passerelle.
— Bordel! S'exclama Kirk sous le coup d'une inspiration subite. Il y a donc des risques pour que d'autres éléments dans la salle des machines et dans le moteur à avoir été endommagés !
─ C'est en effet une probabilité logique à ne pas négliger. Approuva Spock.
─ Il va falloir vérifier chaque boulon, chaque bout de tuyau et chaque ligne du programme de contrôle informatique!
— Nous ne serons pas assez nombreux. Répondit Scotty. Je vais rappeler immédiatement toutes celles et ceux qui sont en repos!
— Spock et moi allons rester à vous aider, nous ne serons pas de trop. Commandant, vous procéderez à la vérification des codages informatiques. Il y a peut-être les mêmes genres de bug que sur votre console.
— Bien Capitaine. Acquiesça Spock avec une imperceptible approbation.
— Et nous, Scotty, par où commençons-nous? C'est votre domaine ici, c'est à vous de diriger les opérations.
Scotty battit brièvement des paupières, une fois de plus distrait par la stupéfiante beauté du Capitaine. Cette façon humble et naturelle qu'il avait de proposer ses services et de se mettre sous ses ordres ! Quel formidable Capitaine illes avaient là!
— Si vous le voulez bien, Capitaine, nous allons attendre que tout le monde soit là.
— Je vais immédiatement commencer les vérifications des lignes de codes. Dit Spock en prenant place à l'une des consoles.
Kirk vint se placer à côté de lui, pour l'assister de son mieux. L'équipe de Scotty fut rapidement au complet. «Toujours prêt» était leur devise.
Nombreuxses furent celleux qui eurent du mal à décrocher leurs yeux du nouveau corps du Capitaine, si délicieusement féminin dans son uniforme jaune de Capitaine.
Spock remarqua leur attitude qu'il jugea déplacée. Une vague d'agacement le parcourut brièvement, il ne parvint pas à totalement l'inhiber. Il fixa ces inconvenant·es par-dessus l'épaule de Kirk. L'espace d'une fraction de seconde, son regard fut absolument glacial, presque menaçant et sembla les prévenir: «Sachez vous comporter correctement, ou bien c'est moi qui vous forcerai à le faire!» Certain·es en eurent presque des frissons. Le Commandant Spock laissant percevoir son exaspération était encore plus impressionnant que lorsqu'il affichait son masque impassible.
Kirk se tourna vers elleux et illes surent se contenir. D'ailleurs, l'attitude même du Capitaine contenait une mise en garde.
Scotty distribua les taches. Illes allaient devoir arpenter tous les labyrinthes des multiples conduits, pour les inspecter minutieusement, centimètre par centimètre, un tricorder à la main, et vérifier tous les éléments du moteur, pièce par pièce. Il eut la prévenance de mettre Kirk en binôme avec une femme. La féminité lumineuse du Capitaine attirait trop les regards des hommes hétérosexuels. Et surtout, illes allaient devoir arpenter à quatre pattes les étroits couloirs des tubes de Jeffrerie.
Kirk débusqua la première fissure, heureusement bégnine. Maëi Firri contint son malaise à devoir expliquer au Capitaine, elle simple enseigne, comment il fallait procéder. Il la rassura d'une voix bienveillante : «Ici, c'est votre domaine, pas le mien. Donc, je vous écoute». Il confirma ses dires en écoutant attentivement ses instructions, et en les mettant en pratique. Illes formèrent rapidement un duo efficace. Tout d'abord intimidée, celle-ci se laissa apprivoiser par la simplicité de son attitude. Maëi osa même le reprendre lorsqu'il se trompait. Le Capitaine ne s'offensa pas et suivit tous ses conseils de la jeune enseigne. Illes œuvrèrent avec diligence.
Kirk se surprit à trouver ces tâches répétitives étonnement relaxantes. Trouver les failles requérait une attention soutenue, et bienvenue pour occuper son esprit douloureux. Maëi était charmante, compétente... et rien dans son attitude ne venait lui rappeler la maudite apparence de son corps. Il percevait dans un recoin de sa psyché la présence discrète de son T'hai'la, toujours concentré sur les programmations orditroniques du moteur. C'était agréablement apaisant.
Kirk ne put retenir des grommellements de ronchonnements exaspérés : il avait glissé le long d'un tuyau. Il ne s'était pas fait mal, mais cette chute avait provoqué un insupportable ballotement de cette maudite poitrine.
─ Moi, pour éviter ce souci, je porte une brassière de sport. Dit Maëi le plus naturellement du monde. Ça les maintient bien et ils ne bougent plus du tout.
Elle craignit un moment avoir commis un impair en voyant le Capitaine se figer comme s'il venait de recevoir un soufflet.
─ Je suis désolée, Capitaine, je ne voulais pas...
─ Non, non. Vous n'avez rien fait de mal.
Kirk prit une profonde respiration. Les propos de cette enseigne étaient bienveillants, il n'avait aucune raison de se sentir offensé. Qu'il le veuille ou non, il avait des seins, comme elle. Et son conseil était par conséquent avisé. Il parvint à esquisser un sourire involontairement triste :
─ Je vous remercie pour votre suggestion pertinente, Maëi.
Elle hocha la tête, et détourna opportunément la conversation :
─ Là, Capitaine! une autre fissure !
Penché sur la console de contrôle, Spock ne consacrait que 80% de son attention à son travail. Les 20% restant étaient tournés vers Jim. Certes, celui-ci était un homme adulte et responsable, il n'avait pas besoin d'être chaperonné. Cependant la situation était particulière et avait provoqué en lui un évènement psychique tout à fait singulier : sa Krus-Komihn et sa Krus-Vuhlkansu n'étaient pas en conflit.
Sa part Humaine s'inquiétait pour Jim, se préoccupait de son bien-être. Elle désirait le protéger de la souffrance, le soutenir.
Sa part Vulcaine ne tentait pas de bâillonner cet élan émotionnel de sa consœur : il était de son devoir de Commandant de veiller sur son Capitaine, son devoir de T'hai'la de veiller sur son ami. Par conséquence, il était parfaitement logique de surveiller les fluctuations émotionnelles de Jim via leur Kash-naf k't'hai'la afin de pouvoir intervenir en cas de problème.
Il n'y en eut aucun. Spock remarqua même une momentanée diminution de sa souffrance psychique. Il apprécia cette accalmie à sa juste mesure.
McCoy aurait donné n'importe quoi pour être aux côtés de Jim, à le soutenir. Mais voilà. Il était coincé dans cette bon sang l'infirmerie, à faire face à un soudain afflux de bon sang de petits bobos divers et variés. S'étaient-illes toustes passés le mot pour lui pourrir sa journée ? Il était d'une humeur massacrante. Nul ne lui en tint rigueur, toustes savaient la puissante amitié qui le liait au Capitaine, et au Commandant, et le médecin était toujours aussi efficace et attentif.
McCoy finit par s'accorder quelques minutes de pause sans son bureau. À sa demande, l'ordinateur localisa le Capitaine Kirk. Il se trouvait dans le tube de Jefferies JT632, en compagnie de l'enseigne Maëi Firri. La raison : détection et réparation de dégradations mineures dans les conduits EPS 632JT-5
McCoy reconnaissait bien là son ami. Incapable de rester observateur. Compte tenu de la situation, ce comportement était une bonne chose car il permettait à Jim d'occuper son esprit et de l'empêcher de ruminer. Rassuré, le médecin fit entrer le patient suivant, tout en interrogeant régulièrement l'ordi afin de garder un œil sur Jim.
L'équipe de Scotty avait toujours respecté le Capitaine. Mais de le voir travailler humblement parmi elleux força leur respect et leur admiration. Quant au travail du Commandant Spock, il fut parfait, comme toujours.
La totalité de la journée fut occupée à ces vérifications et réparations. Toustes en oublièrent de déjeuner. Même Kirk, dont la gourmandise était proverbiale.
— Nous pouvons être fiers de nous! Conclut Scotty. Les moteurs sont comme neufs! Attendez-moi une seconde. Enseigne Hewett, vous venez avec moi
Ils s'absentèrent quelques minutes. Ils revirent avec deux bouteilles de vieux scotch écossais et deux grands plateaux de grignotages sucrés et salés, provoquant une vague d'approbation générale parmi les membres de l'équipe. Chacun·e en but un verre, même Spock…
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— Quelle journée! Soupira Kirk alors qu'il regagnait sa cabine en compagnie de Spock. J'ai les genoux et dos en miette!
— Souhaitez-vous reporter notre partie d'échec?
— Pour rien au monde! Je fais un brin de toilette, je me change, et je vous rejoins.
Normalement, c'était au tour de Kirk d'accueillir leur partie dans sa cabine. Mais Spock n'émit aucune objection.
Kirk ne perdit pas de temps. Il se doucha, se changea et suivit les conseils de l'enseigne Maëi. Il constata avec un grand soulagement l'efficacité de la contention de ce sous-vêtement. En plus, cela diminuait un peu le volume de sa poitrine.
En moins d'une demi-heure, il avait retrouvé la chaleur rassurante des quartiers de Spock.
— Je peux vous demander une tasse de votre délicieux theris-masu?
— Bien sûr, Jim.
Jim posa ses coudes sur le bureau et son menton dans ses paumes. Il contempla son ami préparer le thé. Ses gestes lents, calmes, précis, étaient comme un rituel… si harmonieux, si délaçant… Jim prit une grande respiration tranquille. Il avait la sensation que ses nerfs se dénouaient les uns après les autres. Une douce sensation de bien-être s'écoulait paisiblement dans ses veines. Spock était son ami, son T'hai'la, il pouvait se permettre de se laisser aller un peu en sa présence… et leur kash-naf était une agréable présence dans son esprit douloureux, un baume mental sur ses blessures à vif.
Spock leva les yeux sur Jim, et réprima son étonnement. Son T'hai'la s'était endormi, la tête sur ses bras, posés sur la table!
Jim devait réellement être épuisé, c'était parfaitement compréhensible. Mais qu'allait-il faire de lui?
Le réveiller? Non, cela risquait de perturber son cycle de sommeil, et Jim avait impérativement besoin de ce repos.
Le prendre dans ses bras pour le ramener à sa cabine? Ils courraient le risque d'être vus. Spock ne voulait pas qu'on surprenne le Capitaine dans la position d'une femme qu'un homme porte dans ses bras, «comme une princesse» aurait précisé McCoy.
Doucement, Spock déplaça Jim, qui ne se réveilla pas. Il le souleva, il était étonnement léger. Il le posa sur sa propre couchette. Il lui ôta les chaussures, le couvrit d'un drap. Jim émit un gros soupir, et Spock eut la sensation qu'il s'enfonçait plus profondément encore dans le sommeil.
Il contempla son T'hai'la. On devinait les traits de l'hommes derrière ceux de la femme…
Grace à leur Kash-naf, Spock avait eu un aperçu de la douleur psychique constante que son ami avait endurée tout au long de la journée… ce profond mal-être et cette souffrance avaient été constantes, et avaient été régulièrement aggravées par la maladresse de certain·e membres de l'équipage. Il y avait bien eu quelques accalmies, mais elles avaient été insuffisantes pour apaiser Jim.
Jim était si courageux, si volontaire! Et il l'aiderai autant que possible à porter cette épreuve, tel était le rôle d'un T'hai'la.
Spock fit sa toilette, enfila un cafetan léger et posa une couverture sur le sol. Il procéda à sa méditation journalière.
Il tourna son esprit vers leur Kash-naf. Jim dormait profondément, calmement. Spock diminua la lumière à 30%, s'allongea sur ce futon improvisé et s'endormit à son tour. Jim était tout près de lui. Rien de mal ne pouvait lui arriver.
Le sommeil de Jim fut sain. Profond et réparateur. Il s'éveilla doucement, au petit matin, affamé. Il remarqua que son matelas était plus ferme que d'ordinaire. Où était-il? Il portait encore sa tenue de capitaine! Il se souvint de sa partie d'échec de la veille… de sa non-partie en fait, et... bordel! de ce corps incongru. Il ouvrit les yeux et reconnut la cabine de Spock.
— Avez-vous bien dormi, Jim? Demanda la voix douce et calme de Spock.
Comme si tout était parfaitement normal et cohérent.
— Ne me dites pas que vous avez dormi par terre? Répondit Jim en s'asseyant.
Il se crispa. La masse anormale de ses cheveux, la lourdeur de sa poitrine contenue par la brassière et ce vide entre ses jambes blessèrent à nouveau son esprit. Ces perceptions physiques semblaient... hurler en lui, pour bien insister sur le fait que ce corps n'était plus celui d'un homme. Mais il n'était pas une femme, et ne le serait jamais! Se répéta-t-il avec colère. Il prit une grande respiration.
Spock perçut cette douleur, mais rien ne transparut sur ses traits impassibles.
— Nous avons eu des couchages bien pires lors de certaines missions, Jim. Rationalisa-t-il tranquillement
— Certes, mais quand même …
— Auriez-vous préféré que je vous ramène dans vos quartiers?
— Avec le risque que l'on me surprenne en état de faiblesse, porté comme une Belle au bois dormant ? Non non, Spock, vous avez pris la bonne décision. Mais vous auriez aussi bien pu m'installer à votre place.
— Ce serait contraire aux lois de l'hospitalité Vulcaine. Rétorqua Spock avec fermeté. Et cette couchette est trop petite pour deux.
«Ce serait»... et non pas «cela aurait été»... Jim comprit parfaitement le sous-entendu : Spock envisageait donc que cette situation se reproduise. Il éprouva un bref mais puissant désir de dormir à nouveau ici dès la prochaine nuit. Il y avait quelque-chose qui le rejetait dans sa propre cabine. Tout lui donnait l'impression de l'exclure, tout lui rappelait la perte de son ancien corps… alors que dans les quartiers de Spock, il se sentait le bienvenu, à sa place… mais il ne pouvait se permettre d'imposer cela à Spock. Il se devait d'être plus fort que ces angoisses irrationnelles !
—… je vois. Merci Spock. Il serait plus sage pour moi d'aller me changer dans mes quartiers, et que nous allions ensuite manger au mess.
— En effet, Jim.
Kirk se leva. Spock avait cette façon discrète et pudique de balayer les doutes qui l'assaillaient depuis cette métamorphose. Il lui sourit. Juste avant de sortir, il se retourna vers son ami :
─ Spock ?
─ Oui, Jim ?
─ Dan-klem-bosh [je te suis reconnaissant] Dit-il simplement.
Cette formulation impliquait un aspect hautement émotionnel, Jim avait sciemment choisi ces mots. Spock le savait. Le Vulcain ne s'en formalisa pas. Il avait simplement accompli son devoir de T'hai'la. Mais Jim était un Humain parfois très sentimental
─ Veling [«bien sûr», sous-entendu : «j'ai fait ce qui était logique»]
Jim sourit, la porte se referma derrière lui, laissant Spock seul, aux prises avec une étrange chaleur dans le cœur.
— o —
à suivre...
Kirk...remarqua que de nombreuses femmes de l'équipage avaient troqué leurs minirobes pour un ensemble tunique courte et pantalon, comme lui. Cette marque de solidarité le toucha.
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Christine
Merci pour ton commentaire.
Oui, la situation est très douloureuse pour Jim. J'espère que ce chapitre ne t'a pas déçue
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Lutin au sang vert
Dans la série TOS, McCoy qualifie parfois Spock de «pointed-eared hobgoblin» ou de «Green blooded hobgoblin»
Google traduction traduit hobgobelin par Lutin ou Croque-Mitaine
soit «Croque-Mitaine/Lutin aux oreilles pointues», ou «Croque-Mitaine/Lutin au sang vert»
(en plus, contrairement à Spock, un Gobelin, c'est très laid, surtout ceux des films «le Seigneur des anneaux» ^^)
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Nommer un vaisseau
fr·wikipedia·org/wiki/Dénomination_des_vaisseaux_de_Star_Trek
[Entité politique] [nom du vaisseau] [Code type du vaisseau]-[Numéro de série]
Les codes types des vaisseaux :
• NAR - Federation, non-Starfleet, Recherche
• NCC - Federation, Starfleet, Service actif → USS Enterprise NCC-1701
• NDT - Federation, non-Starfleet, Transport
• NFT - Fédération
• NGL - Federation, non-Starfleet, Cargo
• NX - Federation, Starfleet, Expérimental → USS Marie-Curie NX-047, vaisseau de recherches scientifiques
• NSP - Federation, Vulcain, Science
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Directive 20
memory-alpha·fandom·com/fr/wiki/Première_Directive#Les_Directives_II_·C3·A0_XXIV
XX - Les vaisseaux de la Fédération doivent porter secours et aide à tout vaisseau privé ou commercial enregistré auprès de la Fédération Unie des Planètes, et ils ont la permission d'engager des actions disciplinaires ou offensives contre tout vaisseau agissant illégalement ou posant des actes hostiles au sein du territoire de la Fédération.
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