BÉNÉVOLENTS - Partie I ÉMISSAIRES

11 Irrésistible

─ o ─

Le trio reprit la route. Savína leur avait clairement indiqué les chemins à suivre.
Après une demi-journée de chevauchée, ils arrivèrent en vue d'une cité édifiée au bord du fleuve Amnisos : Knossos, capitale de la province de Krétê. La ville était fortifiée par une haute palissade en rondins de bois. On ne pouvait y pénétrer que par le port ou par l'une des portes situées aux points cardinaux.

Ils firent comme les autres personnes autour d'eux. Spock et McCoy descendirent de leur cheval mais Kirk, en tant que femme, resta juché sur le sien. L'époux tint la bride de la monture de son épouse, affichant ainsi aux yeux de tous les autres hommes que cette femme était sa propriété. Spock eut des difficultés à contenir un vif sentiment de satisfaction, parfaitement irrationnel, à pouvoir ainsi afficher sa possessivité en toute légitimité.
Cette exultation se mua rapidement en agacement : un trop grand nombre de regards étaient irrespectueux, pour ne pas dire libidineux. Le corps de Jim correspondaient semble-t-il en tout point au canons de beauté de cette culture. La blondeur lumineuse de ses cheveux, ses prunelles d'ambre et de miel, les traits fins de son visage, ses lèvres bien dessinées, les délicates rondeurs de son corps... le malaise grandissant qu'il percevait de Jim empirait ses propres affects.

Kirk salua les plantons qui gardaient la porte principale et leur adressa son sourire charmeur avec un naturel désarmant. Les soldats rougirent, détournèrent les yeux de cette femme ensorcelante qui dégageait tant d'assurance. Ils les laissèrent passer sans leur demander de justifications à leur présence.

La ville était principalement constituée de maisons blanches, carrées avec une terrasse-jardin sur le toit, alignées de façon à peu près rectiligne.
Les rues étaient relativement larges. Leurs sols grossièrement pavés dégageaient par endroit une impression de saleté. La foule des bandeaux s'amassait par endroit autour d'échoppes aux stores multicolores. Celles-ci étaient regroupées en îlots bruyants de "centres commerciaux", et étaient ouvertes sur la rue.
Chaque commerçant vantait à grands cris l'exceptionnelle qualité de sa marchandise. On y vendait du poisson séché ou pêché au cours de la nuit ; un peu de volailles caquetant dans leurs cages d'osier, qualifiées de pondeuses exceptionnelles ; du gibier à poil ou à plume ; une grande variété de fromages natures ou parfumés aux herbes aromatiques ; des œufs garantis extra-frais de la veille ; des légumes, des fruits appétissants, des graminées et des épices ; du vin dans des amphores, si bon qu'il feraient le bonheur de Nobles Bénévolents ; toutes sorte de galettes de céréale ; des tissus chatoyants et des scandales ; des ouvrages en osier tressé destinés à différents usages... certains estaminets ressemblaient à des restaurants de rue et dégageaient d'appétissantes odeurs de cuisine...

De nombreux esclaves mâles s'affairaient partout, certains accompagnaient leur maîtresse et portaient leurs courses. Ils étaient reconnaissables à leurs cheveux coupés à ras et à leur exomide, sorte de chiton attaché sur une seule épaule, parfois si court que leur pagne cache-sexe était visible lorsqu'ils se penchaient. McCoy réprima des grimaces de désapprobation. Il regarda Spock et s'étonna à lire de la réprobation sur son visage pourtant parfaitement impassible.

─ Heureusement que vous avez les cheveux longs. Murmura Kyriakê. Sinon on vous aurait pris pour mes esclaves.

─ Finalement, le tour de passe-passe de Kirkê nous a rendu service. Commenta Leóntios.

Kirk croisa quelques regards déshabilleurs qui se posaient sur lui. Ils n'étaient pas si nombreux que cela, mais suffisants pour provoquer en lui un profond malaise. Il se raidit. Leur Kash-naf bouillonnant lui indiqua que Spock avait lui aussi remarqué ces attitudes inconvenantes.
Il savait à quel point son apparence était désirable pour un homme hétérosexuel. Il se souvint des expressions ahuries de certains membres de l'équipage, il se crispa imperceptiblement à ce souvenir.

Kirk constata aussi qu'il circulait peu de femmes, qu'elles soient "libres" ou esclaves. La plupart portaient un voile sur les cheveux et étaient accompagnées d'un homme, parfois d'enfants. Kirk tiqua en reconnaissant ce signe visible de soumission, auquel ce corps le rendait plus sensible que jamais.
Il avait toujours considéré la femme comme une égale. C'était pour lui un fait établi, logique, naturel. Il n'avait jamais vraiment pris conscience du chemin qui avait été parcouru et du temps que cela avait demandé pour que les Terriens modernes ne parviennent à rendre cette égalité effective dans les faits et les mentalités de toustes.
Il est plus difficile de percevoir certaines injustices lorsqu'on n'est pas directement entravées par celles-ci. Surtout quand on appartient au groupe de ceux pour qui ces inégalités constituent tout un ensemble de privilèges sociétaux considérés comme légitimes aux yeux de toustes. Y compris des victimes qui ont intériorisé celles-ci comme un "ordre naturel".
Kirk respira profondément afin de chasser ces sombres pensées, il se redressa fièrement sur la monture, les cheveux certes attachés, mais à l'air libre. La mission confiée par les Bénévolents lui devenait aussi essentielle, vitale, que de trouver le cristal de Dilithium.

Des gardes les accostèrent. Jim répondit à leurs salutations en leur esquissant son plus beau sourire. Décontenancés par cette si belle Dame, ils en oublièrent eux-aussi de procéder à leur contrôle d'identité. La scène se reproduisit de façon systématique.
Kirk dut respirer profondément afin de contenir son inconfort moral. Être emprisonné dans de corps désirable lui était extrêmement désagréable, cependant...

─ Il faut reconnaître qu'il y a un aspect pratique à être dans un tel corps. Ces hommes deviennent vraiment... ridiculement stupides dès qu'une belle femme leur adresse la parole et leur sourit. Reconnut Kyriakê, après qu'ils eurent croisés un troisième duo de soldat rougissants.

─ Parfois je me pose la question. Reprit-il d'un ton songeur. M'est-il arrivé de me comporter de façon aussi stupide face à une belle femme? Certaines sont-elles parvenues à endormir ma méfiance ainsi?

─ C'est difficile à dire. Répondit Spêlios. Dans tous les cas, vous avez toujours su réagir de façon appropriée lorsque la situation l'exigeait.

─ La réponse est donc une sorte de : «oui, mais...». Railla Kyriakê en ravalant son amertume.

Il le reconnut pour lui-même : il avait toujours eu ce désir irrépressible de séduire toutes les belles femmes qu'il avait croisées. Aucune ne s'en était plainte, pas même celles qui lui avaient répondu par un refus. Il n'avait jamais été de ceux qui insistent et harcèlent.

─ La recherche d'une femelle conforme à ses appétences fait partie des instincts de reproduction des Humains mâles, car leur libido est toujours en éveil. Expliqua froidement Spêlios, avec le plus grand sérieux.

Kirk ne put se retenir un rire, alors que McCoy levait les yeux au ciel, blasé. Le sérieux scientifique de Spock était parfois involontairement si génialement... drôle.

Le médecin soupira :
─ Tous les hommes n'ont pas forcément les mêmes goûts en matière de femme, et certains préfèrent les hommes. Peut-être que les Bénévolents nous donnent un petit coup de pouce, pour faciliter notre déplacement au au sein de cette ville, en te rendant littéralement irrésistible.

─ J'espère que tu as raison, car c'est limite... effrayant. Là, j'ai l'impression d'être à la fois irrésistible et une proie.

Jim percevait nettement la crispation croissante de Spock, pourtant en apparence parfaitement impavide. Il en devinait la violence meurtrière. L'équilibre mental de son T'Hy'la était altéré par cette situation sur laquelle aucun d'eux n'avait de prise. C'était très déstabilisant. D'ordinaire, Spock ne perdait jamais son sang froid. Mais justement, rien n'était ordinaire dans cette mission.

Spock serrait inconsciemment les mâchoires. Que des hommes regardent Jim et le/la trouve beau/belle ne lui posait pas de problème. Jim avait toujours été d'une grande beauté à ses yeux.
C'était cette façon avec laquelle certains le dévisageaient qui le hérissait : sans aucune pudeur, et certains avec envie. Ces comportement irrespectueux réveillaient ses atavismes possessifs de mâle primitif Vulcain. Il réprimait à grand peine son envie de les frapper pour avoir insulté Jim en agissant ainsi.
Spock était parfaitement conscient de l'inutilité, et de la dangerosité de tels affect. De leur aspect totalement irrationnel. Ces Humains ne faisaient que regarder Jim. Nul n'allait le toucher, nul n'allait le lui voler. Et malgré leurs liens affectifs et psychiques, Jim ne lui appartenait pas. -du moins, pas encore- Il se promit d'accomplir une longue méditation afin de purger son esprit de ces honteuses émotions archaïques.

McCoy avait lui aussi remarqué ces attitudes déplacées. Le métal tranchant de ses prunelles d'argent foudroya tous ceux qui croisèrent son regard. Ils détournèrent tous les yeux, rouges de honte.
─ Oui, le pourcentage de crétins au mètre carré est assez élevé dans cette foutue ville ! Grommela-t-il, mécontent

─ Tu l'as remarqué toi aussi ?

─ Il faudrait être aveugle pour ne pas le voir. Gronda-t-il d'un ton indigné

Jim le vit faire baisser les yeux d'un inconvenant. Il décida de faire de même, et tant pis si aucune femme de ce monde n'agissait ainsi.

Spock contraignit son esprit à se focaliser sur le chemin qu'ils avaient à parcourir. Savína lui avait montré un plan de la ville, qu'il avait parfaitement mémorisé. Il n'eut aucune difficulté à trouver la demeure de l'ami de Kirkê, joaillier et tailleur de pierre précieuse. Ils se présentèrent chez lui. L'esclave, reconnaissable à ses cheveux coupés très courts, les laissa pénétrer dans l'entrée le temps de prévenir son maître. On pouvait entendre les bruits d'une réception: voix, rires, musique.

─ Si vous voulez bien me suivre, Ioústos, mon maître, va vous recevoir. Il vous attendait avec impatience.

─ Kirkê a dû le faire prévenir de notre arrivée bien avant notre départ. Déduisit Kyriakê.

Ioústos le lapidaire était un très vieil homme. Son corps maigre flottait dans son chiton de lin blanc. Il était de petite taille, et un peu tremblant. Il semblait encore bien vigoureux. Les rides qui parcouraient son visage lui donnait les traits d'un sage vénérable. Ses yeux bleus étaient aussi malicieux que ceux d'un enfant. Il se leva difficilement à l'entrée du trio, visiblement ravi et tout sourire.

─ Venez, venez, entrez ! Soyez les bienvenus en ma demeure, amis de ma chère amie Kirkê. Dit-il d'une voix joyeuse. Elle m'avait envoyé un messager pour m'avertir de votre venue. Je vous en prie, prenez place.

Le trio s'assit sur les méridiennes. La pièce était lumineuse, et dégageait une sensation d'intimité. L'un des mur était recouvert d'une fresque aux couleurs chatoyantes. Elle représentait le Bénévolents Athênâ et Ny'One. Illes étaient face à face et souriants, à demi allongé sur des banquettes recouvertes de coussins, au milieu de buissons en fleurs. Illes levaient leurs verres vers les observateurs, en un geste de bénédiction bienveillante.

L'esprit de Spock s'apaisa. Le regard du vieil homme était doux et sans arrière pensée lubrique, contrairement à tous ces mâle irrespectueux qui avaient souillé Jim de leur désirs obscènes !
Spock refoula avec une étonnante facilité la sourde colère qui avait enflée en lui, en dépits de tous ses efforts pour l'endiguer. Il se sermonna : il s'était laissé allé à des émotions irrationnellement inadmissibles !
Il prit soudain conscience que ses nahp-fo-dan avaient provisoirement été fragilisés, comme volontairement affaiblis par une influence extérieure. Il pensa immédiatement à Ny'One. Pour quelle raison aurait-il agi ainsi ? Il n'avait pas besoin de cette manipulation mentale pour se rendre compte du traitement inégalitaire qui était réservé aux femmes de ce pays !

La main de Jim se posa sur la sienne, ses doigts d'infiltrèrent entre les siens. Spock perçut le soulagement de son T'Hy'la de ne plus être exposé aux yeux de ces hommes. Il ne repoussa pas ce contact. Leur Kash-naf vibra doucement de contentement.

─ Nous vous remercions pour votre accueil. Dit Leóntios avec chaleur.

─ Je suis toujours content de recevoir des amis de ma très chère Kirkê. Vite, vite, Tovias, amène-nous des rafraîchissements. Ordonna Ioústos avec gentillesse.

─ Tout de suite, mon Maître. Répondit l'esclave en souriant avec une affection indulgente.

Il attendit que Tovias soit sorti pour dire avec émerveillement :
─ Je n'aurais jamais pensé qu'un jour je rencontrerai des personnes venues d'un autre monde que le mien! Le messager de Kirkê m'a tout raconté. Vous êtes Kyriakê, et votre époux est Spêlios, présentement assis à vos côtés. Et vous Leóntios, vous êtes un grand guérisseur.

Tovias regarda brièvement les mains entremêlées des épouxses, il sourit avec tendresse.

─ Pas tant que cela. Bougonna Leóntios.

─ Simplement le meilleur de toute la flotte. Trancha Spêlios impassiblement.
Quand McCoy allait-il cesser de se sous-estimer de la sorte ?

Comme à chaque fois que Spock tenait de tels propos, McCoy devint rouge-tomate et Jim sourit avec une approbation malicieuse.

─ Combien de personnes sont-elles au courant de notre venue? Demanda Kyriakê.

─ La farouche Reine Anthiópê et son entourage, les gens de Kirkê et moi. Répondit Ioústos. Votre secret est bien gardé.

─ Me voici rassuré. Plaisanta Kyriakê.

Tovias revint, accompagné d'une servante. Les domestiques servirent les boissons puis illes sortirent.

─ Montez-moi l'échantillon de cette pierre que vous êtes venus chercher sur notre belle planète. Proposa Ioústos sans cacher sa curiosité

Kirk lâcha à regret la main de Spock. Il se leva en la plongeant dans sa sacoche.

─ Dans notre monde, nous donnons à ce minéral le nom de Dilithium. Précisa-t-il

Il tendit le petit cristal à Ioústos qui s'en saisit, l'observa longuement dans la lumière du soleil, le tourna dans tous les sens.

─ Oui... je me souviens avoir taillé un jour une pierre qui ressemble beaucoup à celle-ci, il y a si longtemps. Je m'en souviens comme si c'était hier. Je n'avais jamais rien vu de tel. Et je n'en ai jamais revu aucune depuis. Expliqua Ioústos en contemplant le cristal avec envie. Cette pierre est si belle, ses reflets roses sont si doux et si purs!

─ Cet aspect cristallin s'obtient après le que la roche brute ait été raffinée. Précisa Spêlios. À l'état naturel, elle est de couleur gris terne, proche du quartz fumé*.

─ Fascinant! S'exclama Ioústos

Il ne comprit pas la raison du sourire complice entre Kyriakê et Leóntios, mais ne s'en offusqua pas. Il rendit le cristal.

─ Savez-vous où se trouve le cristal actuellement? Demanda Kyriakê en le remettant dans son sac.

─ Dans labyrinthe de Daídalos, dans lequel le Roi Minoas a fait enfermer le Minôtauros.

─ Le Minôtauros? S'étonna Kyriakê

─ Oui, l'enfant que son épouse, la Reine Pasipháê a conçu avec le Grand Taureau blanc Sacré. Expliqua le vieil homme sur le ton de l'évidence.

─ Non mais, réfléchissez un peu! S'indigna aussitôt Leóntios, avec une véhémence qui fit sursauter le vieil homme. Comment pouvez-vous croire en de telles fadaises? Comment pouvez-vous imaginer un seul instant qu'une telle chose soit humainement possible? Nul ne peut avoir de relation sexuelle avec un animal de cette taille sans en avoir les entrailles déchirées à mort! En plus humains et animaux ne sont pas compatibles, ils ne peuvent pas se reproduire entre eux.

─ Alors comment expliquez-vous la naissance de cet enfant à tête de taureau ? Demanda Ioústos, décontenancé.

─ Si Dame Kirkê a été capable de nous changer Spêlios et moi en animal, il est parfaitement possible qu'une personne malveillante ait pu jeter un sort à ce pauvre Petit!

─ Votre raisonnement est tout à fait logique. Approuva Spêlios. Seuls des Humanoïdes compatibles entre eux peuvent concevoir une descendance.

─ Des... Humanoïdes? Il existerait donc différentes espèces d'Humains?

─ Une infinité de par le monde. Répondit Leóntios, évasif. Seul un sortilège peut expliquer ce qui est arrivé à cet enfant. Lancé par une personne qui voulait faire du mal à la maman, ou au roi, pour une raison ou une autre.

─ Ouiiii, c'est aussi ce que Kirkê me disait! S'exclama Ioústos. Elle a essayé d'annuler le sort sans y parvenir. Même si elle a des dons d'enchanteresse, elle ne s'y connait pas trop en sortilèges maléfiques. Elle m'a fait poser cette pierre dans le labyrinthe en me disant que cela sauverait la vie de cet enfant.

─ Vous a-t-elle expliqué de quelle façon ce cristal allait sauver l'enfant? Demanda Kyriakê

─ Hélas non, et ce n'est pas faute de lui avoir posé la question. Elle n'a jamais voulu me répondre. C'est qu'elle est drôlement têtue!

─ Est-il exact que le roi Minoas exige le versement d'un tribut de sept jeunes filles et de sept jeunes gens? Interrogea Spêlios, qui se souvenait de la légende Terrienne.

─ Oui. Il a conquis les sept cités aux alentours, et chacune doit livrer deux jeunes par an. Aucun n'est jamais ressorti vivant du labyrinthe.

─ Et cet enfant, présentait-il des signes de comportements violents? Questionna Leóntios.

─ Kirkê était l'amie de la Reine. Elle m'a toujours dit que l'enfant était très doux, très affectueux. Pasipháê s'était entourée de petits esclaves du même âge que son fils pour lui tenir compagnie, trois garçons et trois filles, et ils s'entendaient tous très bien. Kirkê me racontait que la prison de Pasipaháê était emplie de rires et de jeux. Elle s'était attachée à chacun d'entre eux, et les traitaient tous comme s'ils étaient ses enfants. Ils avaient à peine sept ans quand Minoas les enlevés à leur mère pour l'enfermer dans le labyrinthe.

─ Quelle horreur! Murmura Kyriakê

─ On raconte que les enfants hurlaient de terreur et que Pasipháê est devenue folle de chagrin. Elle aimait profondément tous ses enfants.

─ Pauvres gamins! S'insurgea Leóntios. Pauvres gamins innocents!

─ Le fait que ces enfants ou ces jeunes gens ne soient jamais ressortis du labyrinthe, ne constitue pas une preuve de leurs morts. Dit Spêlios tranquillement.

─ Je n'avais jamais vu les choses sous cet angle. Si seulement vous pouviez avoir raison! Soupira Ioústos.

─ Qu'est devenue la mère? S'inquiéta Leóntios.

─ Le Roi l'a faite enfermée dans l'une des pièces du palais et a interdit toute visite. Nul ne l'a jamais revue, mais je sais qu'elle y vit encore, en recluse. Kirkê a essayé d'intercéder auprès du Roi pour venir la voir, pour qu'il la répudie et la libère, mais il a toujours refusé.

─ Est-elle bien traitée ? demanda Leóntios

─ Il semblerait que oui.

Il y eut un moment de silence.

─ Je sais que vous êtes à présent les porteurs du Krýstallo zoís [cristal de vie] des Vénérables Bénévolents. Voudriez-vous me le montrer?

Kirk et Spock échangèrent un regard.

─ Il ne vous faudra en aucun cas le toucher. Le prévint Spêlios

─ Quand ils ont pris ce Krýstallo zoís dans leurs mains, j'ai bien cru qu'ils allaient disparaître tant ils sont devenus transparents comme des fantômes. Expliqua Leóntios dans un frisson d'horreur.

Spock sortit le cristal de sa sacoche, Kirk écarta doucement le tissu dans lequel elle était enveloppée. Elle diffusa une douce lumière irisée.

─ ...ooh, quelle beauté! S'émerveilla Ioútos. Quelle merveilleuse beauté divine!

Il se tourna vers la fresque sur le mur. Il posa ses mains paume contre paume et fit une prière muette.

─ Rien de que de voir ce Cristal des Dieux, j'ai la sensation d'avoir été touché par leurs esprits Bienveillants. Puis-je revoir à nouveau le cristal de dilithium?

Ioústos avait un regard d'enfant, et Kirk n'eut pas le cœur à lui refuser cette nouvelle requête.

─ Lorsque nous aurons trouvé le cristal que nous recherchons, il nous faudra repasser par cette ville pour rentrer. Nous ferons un détour par chez vous et je vous donnerai ce cristal. Promit Kyriakê

─ Vraiment? Oh, cela me ferait tant plaisir!

Tovias entra après avoir frappé à la porte.

─ Avez-vous faim, mon Maître?

─ Tovias, tu penses à tout, tu es un ange! Oui, je meurs de faim et nos amis aussi.

L'esclave se pencha sur son maître et le souleva dans ses bras pour le porter avec délicatesse jusqu'à une autre salle où une table avait été dressée... Le repas fut frugal et agréable. Il venait à peine de s'achever que Tovias revint en trombe:

─ Maître, le roi Minoas s'est invité à la réception de votre fils, Maître Ilías, il exige à présent de vous voir.

─ Bien, qu'il vienne. Soupira le vieil homme.

Dans les cinq minutes qui suivirent, une confortable méridienne fut apportée et le roi fit son entrée, accompagné de ses courtisans. L'homme avait une cinquantaine d'année, il était revêtu d'un chiton brodé d'or et de pierres précieuses.

Ioústos se leva péniblement :
─ Votre majesté, quel honneur vous me faites !

Mais le Roi ne daigna pas lui répondre. À peine avait-il posé un pied dans la pièce que son regard s'était posé sur la déesse aux cheveux d'or, qui était debout à côté de l'homme étrange aux cheveux noirs. Il se dirigea à grands pas vers cette femme au charmes irresistibles.

─ Oh ma beauté divine, donnez-moi votre nom! S'exclama-t-il avec emphase.

─ Je me nomme Kyriakê, je suis l'épouse de Spêlios.

Minoas n'accorda aucun regard à l'époux officiel, il se pencha pour s'emparer de main de la si belle Dame.
Kirk savait qu'il ne pouvait se permettre de refuser, il camoufla comme il put sa répulsion instinctive. Il vit du coin de l'œil le visage de Spock se figer en un masque dur. Il perçut sa fureur via leur kash-naf.

Le Vulcain serra les poings. Il ressentait le profond dégoût éprouvé par Jim. Il maîtrisa à grand peine sa puissante envie d'écraser contre le mur le visage de cet Humain qui avait l'outrecuidance de toucher son T'hy'la sans son consentement ! Il prit une grande respiration afin de mieux contrôler ses émotions de violence, si indignes d'un Vulcain...

─ Jamais je n'ai vu de beauté aussi resplendissante ! S'extasia le roi en amenant cette main à sa bouche pour embrasser les doigts fins et délicats

Jim contint son envie de lui enfoncer son poing dans le nez. Il lui retira sa main d'un geste vif. Elle alla rejoindre sa consœur dans son dos.
─ N'exagérons rien, altesse. Cette ville est emplie de femmes toutes plus belles les unes que les autres.

─ Rien de comparable avec vous! Venez dîner à ma table ce soir! Ordonna Minoas.

─ Je ne puis me permettre de venir seule sans mon époux et mon frère. Rétorqua Kyriakê dans l'espoir de détourner ce roi de cette subite lubie.

Il recula et glissa sa main autour du bras de son époux. Ce simple contact physique apaisa partiellement leurs colères mutuelles.

Aucune «honnête» femme de cette ville n'aurait réagi ni répondu autrement, Minoas acquiesça. Il était mal vu qu'une jeune femme sorte de sa demeure sans être accompagnée d'un père, frère ou époux, ou au pire d'une ou plusieurs autres femmes.

─ Alors qu'ils viennent aussi.

Il sembla se souvenir de la raison de sa venue. Il fit signe à l'un de ses serviteurs, lequel tendit à Ioústos un gros cristal.

─ Que pensez-vous de cette émeraude? On me l'a offerte ce matin.

─ Je pense qu'il s'agit plutôt d'un diamant vert, votre Altesse. C'est une pierre précieuse extrêmement rare.

─ Je veux que vous la tailliez pour moi. Ordonna Minoas en se dirigeant vers la sortie. J'enverrai des gens vous chercher pour ce soir, Belle Kyriakê, vous et ceux qui vous accompagnent.

Le roi et sa cour disparurent aussi rapidement qu'ils étaient arrivés, les laissant avec une sorte vertige nauséeux.

─ Je n'aime pas du tout cet homme. Ronchonna Leóntios.

─ Je suis au regret de vous avouer que je partage votre jugement. Dit Spêlios d'une voix glaciale

─ C'est encore pire! Bougonna Leóntios

─ Notre roi n'est pas un mauvais homme, c'est de Phôtios, son conseiller, dont il faut se méfier.

─ A-t-il des dons psionique? Demanda Spêlios

─ Des quoi?

─ Le don de lire la vérité comme Dame Orithye de Thémiscyre, de voir l'avenir comme Dame Savína, ou de changer des gens en animaux comme Dame Kirkê, des trucs comme cela. Expliqua Leóntios.

─ Pas que je sache, mais on raconte qu'il pratique la magie noire grâce à une pierre magique.

─ Formidable! J'ai tapé dans l'œil d'un royal idiot capricieux dont le conseiller est un homme malfaisant... Et si nous tentions de partir en douce? Proposa Kyriakê

─ Le roi serait furieux après moi et ma famille. S'inquiéta Ioústos.

─ Alors, nous essaierons de prendre la tangente une fois arrivés au palais. Décréta Kyriakê.

─ Dites-moi, le roi vient-il souvent vous faire une visite surprise comme celle-ci? Demanda Leóntios à brûle-pourpoint.

─ Non, jamais. Il se fait toujours annoncer avant.

─ Il est tout de même bizarre qu'il passe comme cela sur un coup de tête, et comme par hasard, pile-poil au moment où nous sommes là. Bougonna Leóntios. Et surtout qu'il s'entiche de Kyriakê au premier regard.

Que Kyriakê ait éveillé l'intérêt du roi ne parut pas vraiment étonnant à Ioústos. Elle était réellement d'une extrème beauté.
─ Le roi est très capricieux, et il aime les belles femmes. Rationalisa-t-il

─ ..humpfff... Persiffla Kyriakê avec un profond mépris. Il faut être totalement stupide pour s'amouracher à la simple vue d'un joli visage.

─ Justement, c'est bizarre. Persista Leóntios

─ Que sous-entends-tu? Demanda Kyriakê

─ Je ne sais pas moi-même. C'est... comme une sorte d'intuition.

─ D'habitude, c'est moi qui ai des intuitions. Protesta Kyriakê avec un peu d'amertume
Il éprouvait le besoin pressant de laver cette main que ce crétin libidineux avait embrassée.

─ Je reconnais que je trouve moi aussi cette coïncidence troublante. Intervint Spêlios
Il glissa sa main dans celle de Jim, qui se referma sur lui.

─ C'est flippant quand vous approuvez mes raisonnements illogiques.

─ Il n'y a rien d'illogique dans l'énonciation d'un fait inhabituel...

─ Parlez-nous de l'épouse du roi. Dit Kyriakê pris d'une soudaine inspiration

Il se sentait mieux. Il voulut retirer sa main, mais celle se Spock se resserra possessivement, l'emprisonnant de son étreinte. Jim en ressentit une sorte de satisfaction.

─ Mínoas était très épris d'elle. Pasipháê était une jeune femme belle et intelligente, très joyeuse. Elle rêvait d'avoir beaucoup d'enfants. Le Roi écoutait volontiers ses conseils. Sous son impulsion, il avait commencé à accorder des droits aux femmes et aux esclaves. Et puis, il y a eu cet enfant et tout est redevenu comme avant.

─ Comme par hasard! Remarqua Kyriakê. Quoi de mieux pour décrédibiliser une femme que lui inventer un adultère avec un animal !

─ Le messager de Kirkê... Murmura Ioústos comme s'il ne s'en souvenait que maintenant. Il m'a dit que les Vénérables Bénévolents vous avaient donné pour mission de rendre égaux tous les hommes et toutes les femmes.

─ Ce que cette femme avait semble-t-il commencé à faire. Précisa Spêlios

─ Par les Saintes Divinité! Dame Pasipháê était l'Instrument Sacré de la Volonté des Bénévolents! Comprit Ioústos en palissant. Et moi qui lui ai manqué de respect en croyant si longtemps à cette absurdité!...

Sa peine était visible sur chacun de ses traits

─ Vous n'avez commis aucune faute envers elle. Rétorqua tranquillement Spêlios. Parlez-nous de Phôtios, le conseiller du roi.

─ Il était contre ce mariage. C'est un traditionaliste. Pour lui, les femmes éduquées comme l'est Dame Pasipháê sont dangereuses pour l'équilibre de la société, car elles risquent de vouloir faire comme le peuple de Thémiscyre.

─ N'importe quoi! Grommela Leóntios. Une femme éduquée ne devient pas une Amazonídes coupeuse de... hum... têtes.

Excepté Spock, ils ne purent se retenir d'échanger un regard amusé à la pensée du sous-entendu.

─ Je le sais bien, ma défunte épouse était très intelligente. Nous avons vécu heureux ensemble.

─ Allez savoir, peut-être qu'ils veulent que nous libérions Dame Pasipháê. Supposa Kyriakê.

─ Nous n'avons aucun moyen de le vérifier. Objecta Spêlios

─ Rien ne nous empêche d'essayer. Riposta Leóntios.

─ Donc nous essaierons. Décréta Kyriakê.

─ Nous essaierons. Répéta Leóntios.

─ Spêlios? Demanda Kyriakê en pressant doucement sa main dans la sienne

─ Je ne vois aucune raison de m'y opposer.

─ o ─

à suivre

Lorsque les hommes du roi vinrent pour l'emmener, Jim était beaucoup moins enthousiaste. Quatre soldats et deux esclaves puissamment musclé qui tenaient une méridienne à porteur. Celle-ci était recouverte de draps de soies et de coussins brodés d'or
─ Va-t-il falloir que je monte là-dessus? S'étrangla-t-il

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Un petit commentaire ?

Christine
Oh que non, "mon" Athênâ n'a aucun point commun avec celle des Chevaliers du Zodiaque... Ici, c'est une Bénévolente au fort caractère, et amoureuse de Ny'One.

Affinage du cristal de dilithium
startreksansfrontiere·org/pages/aides-jeu/scientifique/dilithium·html.

« ...Minerai cristallin, le dilithium est un élément crucial des systèmes de propulsion par distorsion, à bord des vaisseaux spatiaux. Il régule les réactions matière/antimatière qui fournissent l'énergie nécessaire à la distorsion spatiale et aux voyages supraluminiques.
A l'état naturel, ce cristal gris d'aspect terne ressemble à du quartz fumé. Son apparence prosaïque dément sa valeur technologique. Ses propriétés miraculeuses consistant à moissonner et à concentrer l'énergie transparaissent uniquement lorsque, sous son état raffiné, il devient un catalyseur. Cela étant, même à l'état naturel, il émet des radiations distinctes à basse fréquence de nature parfaitement inoffensive. On peut donc manipuler le dilithium à l'état brut sans craindre quoi que ce soit... »

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