Chapitre 35 : Seigi no Tekken

Okinawa…

Endou regarda le ballon enflammé qui venait de fondre sur lui.

_ Gouenji ?

Il n'eut pas de réponse, et ne vit personne, mais il ne connaissait qu'une seule personne pouvant tirer ainsi.

_ Gouenji ! Gouenji ! Je sais que c'est toi ! Je sais que tu es là ! Montre-toi, je t'en pris ! Gouenji ! Je… Je veux te revoir…

Le jeune homme trébucha et tomba sur le sentier caillouteux. Des larmes roulèrent sur ses joues sans qu'il ne puisse rien faire pour les retenir.

_ Gouenji… tu me manques…

Il serra contre lui le ballon qui avait connu des jours meilleurs. Il savait que Gouenji l'avait tiré, et en voyant son état, il était clair qu'il s'en était souvent servit. Nul doute qu'il s'était entrainé avec acharnement.

_ Tu ne peux pas te montrer, c'est ça ? Gouenji… j'ai comprit, j'arrête de déprimer.

Il se redressa et essuya ses joues. Il déposa ses lèvres contre le ballon et le posa au pied du phare.

_ Je t'aime, Gouenji…

_oOo_

Le jeune home en capuche orange attendit qu'Endou soit redescendu vers la plage pour s'approcher du phare et récupérer le ballon qu'il avait tiré. Il pressa ses lèvres contre, les yeux clos.

_ Moi aussi, Endou, je t'aime…

_oOo_

Le lendemain…

Otonashi rejoignit Kidou au bord de la mer et fronça les sourcils.

_ Je croyais que l'on n'avait pas le droit de se baigner ?

_ C'est le cas.

_ Alors que font Endou et Tsunami dans l'eau ?

Kidou soupira et resserra la sangle de ses lunettes.

_ Du surf. Endou cherche un moyen de maitriser son équilibre pour Seigi no Tekken et Tsunami pense que le surf l'aidera. Et moi, ils m'ont demandé de rester planté là et de surveiller l'apparition d'éventuels tourbillons.

La jeune fille se retint de rire devant la lassitude de son frère. Nul doute qu'il était là depuis un bon moment ! Et avec la nuit agitée qu'ils avaient tous passée à cause d'un cauchemar de Fubuki, dont il refusait de parler, il aurait sans doute préféré imiter les joueurs d'Oumihara et faire une sieste à l'ombre d'un palmier.

_ Oh ! Il est tombé !

_ C'est jamais que la quarante-troisième fois depuis qu'ils ont commencé.

_ Il y a quelque chose qui te tracasse, grand frère ?

_ Depuis l'apparition de l'Aliea Gakuen, beaucoup. Et si je te disais que je pense qu'ils sont humains, tu dirais quoi ?

_ Des humains venus d'une autre planète ?

_ Non, des humains bien de chez nous. Plus j'y réfléchis et plus je me dis que c'est l'explication la plus logique.

Otonashi réfléchit, prenant au sérieux la question de son frère. Le jeune homme passa sa main sur ses cheveux avec affection et lui sourit.

_ Oublies ça, ce ne sont que des hypothèses.

_ Fudou était très fort…

Kidou fronça les sourcils sans comprendre pourquoi ce nom ressortait, et encore moins pourquoi son cœur avait fait une embardée. Mais l'expression de sa sœur indiquait qu'elle réfléchissait à toute vitesse et avait sans doute trouvé un semblant de piste. Il resta silencieux le temps qu'elle ordonne ses idées et les lui expose.

_ Fudou est un joueur très fort, et l'Aliea Gakuen a approché Kageyama alors qu'il était sous sa coupe. Si ton hypothèse est exacte, que ce ne sont pas des aliens mais des humains, alors ils recrutent leurs joueurs sans doute parmi les meilleurs. Fudou, par exemple… mais peut-être ont-ils cherchés à avoir un autre joueur très fort…

_ Comme Gouenji ! Ce qui expliquerait pourquoi il est parti, il devait chercher à leur échapper. Peut-être même faisaient-ils pression sur lui… Haruna, tu es géniale !

_ Je ne suis pas ta sœur pour rien. On devrait peut-être en parler à Endou, non ?

_ Non, pas pour l'instant. Il est suffisamment fragile comme ça, je ne veux pas lui donner de l'espoir et le lui enlever juste après. Gouenji est dans le coin, c'est une certitude, alors nous allons attendre qu'il se montre avant d'agir.

Otonashi hocha la tête avec vigueur avant de regarder Endou surfer maladroitement et tomber une énième fois dans l'eau.

_oOo_

Endou sorti de l'eau et remit son bandeau orange, qu'il avait confié à Kidou.

_ Je sais que tu y tiens, à ton bandeau, mais franchement, il est moche. C'est normal qu'il y ait du sang sur le revers ?

_ Oui, c'est le Triangle Z des triplés Mukata. Ma mère n'a pas réussi à le ravoir complètement. Mais ça ne me dérange pas…

_ Tu m'étonnes, ça te fait un souvenir de ce jour-là !

Kidou sourit d'un air entendu. Ce jour-là, Endou et Gouenji s'était avoués leurs sentiments, et c'était sans doute ça que son ami avait retenu de cette journée, et non sa défaite monumentale face aux anciens coéquipiers de Gouenji venus tout droit de Kidokawa Seishuu pour le provoquer.

Tsunami rejoignit les deux amis, sa planche de surf sous le bras.

_ Tu te débrouilles bien, Endou, même si tu passes plus de temps dans l'eau que sur la planche… On se retrouve à Oumihara cet après-midi !

Le jeune surfeur s'éloigna en agitant la main.

_oOo_

Hijikata posa une glacière sur une table installée devant l'Inazuma Caravane. Endou se précipita vers lui en souriant largement.

_ Hijikata ! Qu'est-ce que tu fais ici ?

_ Je vous apporte des limonades ! J'ai vu votre match contre Oumihara, c'est impressionnant ! Je suppose que vous vous entrainez beaucoup, et par cette chaleur, je me suis dit que ça vous plairez, à ton équipe et toi !

Les joueurs, se pressèrent autour de la glacière, ravis.

Endou prit un verre sans se faire prier et s'assit à l'ombre d'un arbre.

Hijikata le rejoignit et s'adossa contre le tronc.

_ Tu as trouvés celui que vous êtes venu chercher à Okinawa ?

_ Je sais qu'il est ici. Il reviendra lorsqu'il le pourra, et moi je l'attendrais… Oui, je l'attendrais ici jusqu'à ce qu'il me revienne.

Le visage du jeune capitaine exprimait une certitude sans faille et une détermination farouche.

Hijikata hocha la tête avec un sourire étrange.

Il se pencha soudainement vers Endou en lui serrant l'épaule.

_ Patience… lui aussi ne désire rien de plus que de te rejoindre…

Il sourit un peu plus avant de s'éloigner, interpelé par Kabeyama qui voulait voir sa technique Super Shikofumi en action.

Endou resta interloqué avant de sourire.

Kidou s'approcha alors de son meilleur ami, les mains dans les poches.

_ Je me doutais qu'il connaissait Gouenji.

_ Ah bon ?

_ Quand on l'a rencontré, il a regardé ton bracelet comme s'il l'avait déjà vu quelque part, et comme Gouenji porte le même… Tu ne repartiras pas d'ici sans lui, n'est-ce pas ?

_ Non.

_ Alors je resterais aussi.

Endou le remercia d'un signe de tête.

_oOo_

Endou laissa son équipe s'entrainer sans lui pour aller jusqu'à Oumihara, comme le lui avait demandé Tsunami après leur entrainement du matin.

Il avançait mécaniquement, sa concentration seulement portée sur la présence de Gouenji sur cette île.

Kidou lui avait déconseillé de harceler Hijikata de question, ou même de le suivre. Endou soupira.

Et s'il se trompait ? Si le ballon n'avait été que le fruit de son imagination, si ce qu'avait dit Hijikata n'avait que pour but de le réconforter ?

Le jeune homme lâcha le ballon de football qu'il tenait sous son bras et se mit à courir en dribblant, préférant concentrer son esprit sur la seule chose encore en mesure de le calmer plutôt que de se focaliser sur Gouenji. Il finirait par s'écrouler pour de bon, sinon.

Il ne vit que trop tard deux pieds entrer dans son champ de vision et percuta l'inconnu avec une impression de déjà-vu.

Il chuta au sol avec un cri de surprise se mêlant à celui de la personne dans laquelle il venait de rentrer.

Il se retourna et vit un jeune homme en sweat orange tirer sa capuche sur son visage.

Brièvement, il croisa le regard se dissimulant dessous. De magnifiques yeux noirs remplis de tristesse dans lesquels il aurait juré avoir vu briller des larmes. Le garçon en capuche orange s'enfuit sans lui laisser le temps de parler, un éclat argenté dansant dans son sillage un bref instant avant de tomber au sol avec un son métallique.

Endou s'en approcha et ramassa un petit objet qu'il connaissait bien. Un pendentif en argent en forme de chaussure de foot.

_ Gouenji…

C'était Yuuka, la petite sœur de Gouenji qui avait offert ce pendentif à son frère, juste avant d'avoir un accident la plongeant dans le coma. Un accident provoqué par les manigances de Kageyama.

Endou le passa autour de son cou et le glissa sous son maillot, attendant le jour où il pourrait le rendre à son propriétaire.

Il reprit le chemin du collège Oumihara, un peu plus léger.

_oOo_

Collège Oumihara…

Tsunami attendait Endou à l'entrée du collège, sa planche de surf sous le bras. Il sourit largement quand le jeune homme au bandeau orange s'arrêta devant lui, un peu essoufflé.

_ Et bien, ce n'était pas la peine de courir, tu sais ! Je t'aurais attendu !

_ J'étais pressé de reprendre l'entrainement ! Et…

Un vacarme assourdissant couvrit le reste de sa phrase, bientôt suivit par des hurlements.

Tsunami fronça les sourcils et longea la plage sur quelques mètres pour avoir une vue dégagée de l'océan, Endou sur ses talons.

Ils découvrirent un tourbillon sinistre déchirant les flots, tournant à une vitesse folle.

_ Il est drôlement près du collège, c'est la première fois.

Alerté par le vacarme, les Raimon Eleven rejoignirent leur capitaine quelques minutes plus tard. Comme s'il avait attendu qu'ils soient tous là, un rire s'éleva dans les airs, semblant provenir du terrain de football du collège.

Ils s'y dirigèrent avec prudence et découvrirent un ballon noir enfoncé en plein milieu du terrain. Il diffusa sans prévenir une lumière aveuglante.

Lorsqu'elle disparu, une équipe se tenait face aux Raimon.

_ Epsilon !

Desarm ricana à nouveau, ses yeux était devenu d'un rouge encore plus intense, presque lumineux, comme ceux de ses coéquipiers. Il tendit un doigt vers Endou, fermement campé sur ses pieds.

_ Nous sommes venus prendre notre revanche ! Cette fois, nous allons vous écraser, vous massacrer, vous réduire en miette ! Telle est la volonté de père !

Kidou fronça les sourcils, interloqué. Les joueurs d'Epsilon lui paraissait étrange, plus que les fois précédente du moins. Leurs yeux surtout l'intriguaient. En passant outre leur couleur peu naturelle, il avait l'impression que ces yeux ne voyaient pas vraiment. Ils n'étaient pas aveugles, mais… il n'arrivait pas à trouver comment décrire cette impression.

Endou s'avança d'un pas.

_ C'est d'accord !

Tsunami serra les poings et se tourna vers le jeune homme aux cheveux bruns.

_ Endou, laisse-moi rejoindre votre équipe. S'ils attaquent mon collège, il faut que je me batte pour le défendre !

D'un simple signe de tête, Hitomiko donna son accord.

Touko profita du délai qu'accorda Epsilon pour permettre à ceux qui le voulait de prendre place dans les gradins pour s'éloigner. Elle prit son téléphone et attendit, nerveuse, que son interlocuteur décroche.

_ Smith, c'est le moment. Le plan dont nous avons parlé au téléphone quand j'étais à Osaka, il faut le mettre à exécution !

Elle attendit l'assentiment de son garde du corps à l'autre bout du fil pour raccrocher et rejoindre ses coéquipiers.

Tsunami portait maintenant le maillot jaune et bleu de Raimon et rajustait une paire de lunettes de plongée ovale dans ses épais cheveux rose.

_oOo_

Le jeune homme à capuche orange resta à l'ombre des gradins, les poings serrés si fort que ses ongles s'incrustaient dans ses paumes hâlées.

Il fit un pas en avant mais se rappela au dernier moment des visages patibulaires d'hommes en noirs. S'il se montrait sur le terrain…

_ Ça va aller, tu as bien le droit de regarder un match ! Ils ne s'en prendront pas à ta sœur juste pour ça !

Le jeune homme leva les yeux et dévisagea Hijikata, debout à côté de lui, avant de hocher la tête.

_ Tu ne veux pas venir dans les gradins ? Mes frères et sœurs y sont déjà !

_ Non…

Hijikata inclina la tête sans insister et s'éloigna.

_oOo_

Les deux équipes se faisaient face dans un silence de plomb. Chacun attendait le coup d'envoi avec une sourde angoisse.

Endou se concentra, sentant sur lui un regard qu'il avait déjà ressenti. Gouenji était là, quelque part aux alentours du terrain, et le regardait, il en avait la certitude.

Le capitaine des Raimon frappa ses joues pour se concentrer et testa le plancher sous ses crampons, y prenant solidement appuis.

Enfin, l'arbitre siffla le coup d'envoi, libérant d'un seul coup toute la tension qui s'était accumulée au fil des secondes. Fubuki bondit en avant, agressif. Et cette fois, les Raimon Eleven savaient ce que cela signifiait. Atsuya avait prit le contrôle.

La vitesse de l'alien Zel les surprit tous. Il s'empara du ballon avec un rictus rendu terrifiant par ses yeux fixes. Il fonça sans laisser les joueurs de Raimon le ralentir. Sur ses talons, Maquia et Metron avançaient à une vitesse qu'ils n'avaient pas lors du précédent match.

Ils frappèrent à trois le ballon qui s'entourait de morceaux de roches.

_ Gaia Break !

Endou serra les dents en voyant le tir fondre sur lui. Il se rappelait la séance de surf du matin, la façon de Tsunami lui avait montré comment utiliser ses hanches pour conserver son équilibre.

Etait-ce vraiment le surf ou bien la présence de Gouenji quelque part qui déclencha ce qui lui manquait ? Il ne chercha pas à la savoir.

Il leva la jambe gauche aussi haut que possible, la gardant bien droite tout en restant en équilibre sur la pointe de son pied droit. Ses poings se fermèrent hermétiquement. Il laissa retomber sa jambe et frappa le sol avec violence, projetant son poing droit d'une vive torsion de hanches.

Un poing de lumière dorée s'élança vers l'avant en tournant sur lui-même.

_ Seigi no Tekken !

Le ballon heurta le poing qui le renvoya au loin sans effort.

Kidou inclina la tête avec un sourire. Son ami avait réussi à maitriser sa technique en plein match, quoi de plus surprenant ? C'était sa marque de fabrique ! Le jeune homme ne comptait plus le nombre de fois où cela était arrivé. Lors de leur premier match, il avait maitrisé ainsi God Hand. Lors du match contre Zeus, il avait renouvelé l'exploit avec Majin the Hand, et ce n'était que des exemples !

Puisque Endou semblait en mesure d'arrêter les tirs adverses, le stratège allait pouvoir se concentrer sur l'attaque. Et pour passer Desarm et la terrible Drill Smasher qu'il avait dévoilée lors du match précédent, il sentait qu'il n'était pas au bout de ses peines.

Il rejeta sa cape en arrière d'un souple mouvement de main et esquissa un sourire déterminé.