- Je ne suis pas vraiment convaincue, dis-je en penchant ma tête pour mieux observer. C'est un peu trop bouffant pour toi. Tu devrais peut-être essayer quelque chose de plus ceinturé.
- Tu as sûrement raison, répondit Daphné en se regardant dans le miroir. Tu ne veux rien essayer toi ?
- Certainement pas, tu sais bien que j'ai horreur de faire du shopping, m'écriais-je.
- Comme tu veux Astoria, dit ma sœur en haussant les épaules.
Nous étions toutes les deux chez Mme Guipure pour trouver une nouvelle robe à Daphné. Ce soir, nous avons une réception chez les Nott et il était impératif pour Mère que nous soyons habillées de manière correcte. Une Greengrass n'est jamais débraillée avait-elle dit avant de nous pousser vers la porte. Pour ma part, j'ai un nombre incroyable de robes de soirées que je n'ai jamais eu l'occasion de porter qui m'attendent dans mon placard et qui me dispense, ainsi, de jouer la poupée.
Alors que les vacances d'été touchent à leur fin, j'ai le bonheur de m'être réconciliée avec Daphné. Nous avons passé un été entier dans la demeure secondaire de la famille en Nouvelle Zélande avec interdiction de communiquer avec l'extérieur, ce qui nous a permis de renouer des liens.
Daphné a beaucoup changé pendant cet été. Elle est devenue beaucoup plus vraie et a réussi à mettre de côté les souvenirs douloureux des trois dernières années. Elle a pris des couleurs, pris un peu de poids également et a pris beaucoup de temps pour elle, pour réfléchir à ce qu'elle veut. En effet, cette année va être un peu particulière pour elle, car elle sera fiancée, Père et Mère en ont décidé ainsi. Au début, Daphné a tempêté puis elle a rendu les armes. Chez les Sang-Purs, nous devons nous fiancer dès nos 16 ans et nous marier à nos 17 ans. C'est une tradition qui existe depuis des millénaires et, bien que la guerre soit passée par là, cela ne change rien. Ce soir est le dernier soir de liberté de ma sœur car demain, Père lui dévoilera le nom de son futur époux.
J'ai confiance en Père. Je sais qu'il choisira un homme bon pour Daphné, un homme qui la respectera.
Comme je le disais, nous avons vécu la guerre. Une guerre terrible qui a mené à la perte de nombre de nos amis et proches. Les trois dernières années sont des années dont je ne veux pas me rappeler. L'horreur des combats à Poudlard, le désespoir des élèves et des adultes face au massacre est un traumatisme qui m'a empêché de dormir pendant longtemps et qui me crée, encore maintenant, de longues insomnies.
J'ai eu une chance immense. La chance d'être une Sang-Pur et d'avoir pu retourner à Poudlard pour ma cinquième année tandis que les Nés Moldus et les Sangs Mêlés fuyaient les Forces du Mal. Cependant, bien que Père ait décidé de rester neutre, je n'ai pu me résoudre à voir des innocents se faire torturer par les Carrow dans le seul but de nous montrer à utiliser des sortilèges impardonnables. Je revois encore sous mes yeux des premières années, sortant de l'enfance, se tordre de douleur et hurler à s'en arracher les cordes vocales. J'ai essayé à ma petite échelle de les aider, de les soutenir au détour d'un couloir pour ne pas être surprise par les Carrow. Au lieu de ces derniers, j'ai par contre été surprise par Ginny Weasley qui m'a permi de m'enrôler dans la Résistance et apporter mon aide et mon soutien. Je ne prétends pas que mes actions ont sauvé le monde sorcier mais, en tout cas, je me suis battue dans le bon camp, prouvant ainsi aux autres que tous les Sang-Pur n'ont pas été de fidèles partisans du Mage Noir. Père et Mère ont d'ailleurs renforcé cette idée en venant se battre aux côtés de l'Ordre lors de la Bataille Finale.
A la fin de la guerre, tandis qu'Harry Potter était célébré en tant qu'Héros, nombre de familles de Sang-Pur ont vu un ou plusieurs de leurs membres envoyés à Azkaban pour des durées plus ou moins déterminées. Ça a été le cas du Père de Théodore et Maia qui, après un long procès, a été reconnu comme coupable. Cependant, il n'a été incarcéré que quelques mois, son avocat ayant plaidé la menace faite à Mr Nott de s'en prendre à sa famille s'il ne devenait pas un Mangemort. Les Parkinson, de leur côté, n'ont pas été inquiétés. Mr Parkinson et sa famille sont partis en France peu après le début de la guerre pour se mettre à l'abri. Zabini quant à lui, est revenu avec moi à Poudlard pour sa septième année et s'est démarqué lors de la Bataille de Poudlard. D'après ce qu'il m'a expliqué quelques temps après, son père biologique est mort lors de la Première Guerre pour avoir tenté de résister au Seigneur des Ténèbres. En tant que parfait Serpentard, il a su cacher son ressentiment envers la magie noir et ses adeptes et pardonner son meilleur ami, ancien Mangemort.
Mais le procès qui a soulevé la communauté sorcière entière a été celui des Malefoy. Le comportement de Narcissa Malefoy à un moment décisif, de même que le comportement de Drago ont permis de sauver du déshonneur la famille complète. Lucius Malefoy a été envoyé à Azkaban à perpétuité mais sa femme et son fils sont restés libres, n'ayant que pour punition une amende astronomique qu'ils ont payé directement. D'après Blaise, cette somme d'argent n'a en aucun cas entaché leur fortune familiale.
Alors que je suis plongée dans ces souvenirs, le tintement de la porte me tire de mes pensées noires.
- Les sœurs Greengrass, mais quelle surprise, clame une voix que je reconnaitrais entre mille.
- Blaise, Pansy, salue Daphné en souriant.
Je me tourne d'un coup. Zabini se tient bien droit, ses mains dans les poches et son éternel sourire moqueur en coin. Pour sa part, Pansy est méconnaissable. Ses cheveux ont beaucoup poussé pendant l'année mettant ainsi son visage en valeur. Ses yeux bleus ne portent plus cette lueur méchante qu'elle arborait continuellement et elle a perdu du poids. Au lieu de ses affreuses tenues qu'elle portait auparavant, elle a décidé aujourd'hui de mettre une jupe sage avec un chemisier le tout recouvert d'une robe de sorcière légère.
- Tu peux fermer la bouche Astoria, me lance-t-elle d'un ton un peu sec.
Au moins son caractère n'a pas changé me soufflais-je presque soulagée. Aussitôt, je m'adresse une gifle mentalement. Comment puis-je dire des choses pareilles ? Lorsque nous sommes rentrées de notre retraite, nous avons appris que la mère de Pansy était décédée aux Etats-Unis suite à une explosion moldue. Daphné s'est précipitée au Manoir Parkinson pour prendre des nouvelles de Pansy qui, comme je l'ai appris plus tard, a profondément mal vécu ce deuil. Pourtant, au lieu de se morfondre et de renforcer son caractère de peste, elle a su évoluer et en venir à s'excuser auprès de sa demi-sœur pour toutes les crasses qu'elle lui a faites dans le passé. Eris m'avait effectivement dit que Pansy avait changé, mais je n'avais pas compris qu'elle avait également changé physiquement. En tout cas, je la trouve bien courageuse. Je ne sais pas si j'aurais été capable de supporter la mort de Mère de manière aussi forte après les horreurs de la guerre. Surmonter deux tragédie, l'une aussi près de l'autre est une souffrance que je ne souhaite à personne.
- Tu es venue essayer de trouver une tenue pour ce soir ? Demande Daphné à sa meilleure amie.
- Oui, répond la brune. Mais ma belle-mère est absente et Eris traîne je ne sais où, j'ai donc demandé à Blaise de m'accompagner, même si je ne suis pas sûre que ça soit la meilleure idée que j'ai eu, dit-elle en faisant les gros yeux au principal concerné.
- C'est là que tu te trompes ma chère Pansy, rétorque ce dernier en s'asseyant à côté de moi. Je te rappelle que du sang italien coule dans mes veines. Je suis donc un expert question mode, bien que les Greengrass, étant à moitié française, peuvent se permettre de revendiquer la première place en tant que stylistes. Enfin, je parle de Daphné, se reprit Blaise en riant. Si on devait compter sur Mini Greengrass pour la mode, on serait très mal.
- Je ne te permets pas, répondis-je en lui donnant des coups avec le livre que je tiens dans la main tandis que Daphné et Pansy rient de bon cœur.
Je me replace correctement en lançant un regard noir au métisse et me replonge dans mon livre.
- Tu sais que même si c'est Daphné qui suscitera de nombreux ragots à cause de ses fiançailles imminentes, tu seras très observée ce soir, me souffle Zabini.
- Et pourquoi, demandais-je en levant mon sourcil.
- Parce qu'une fois que Daphné sera casée, ce sera à ton tour. Et tu es un très beau parti Little Greengrass.
-Bien que j'ai maintenant 16 ans, je ne suis nullement prioritaire, répondis-je d'un ton sec. Daphné va se fiancer puis se marier, j'ai donc encore un peu de temps devant moi. Tu devrais plutôt t'inquiéter pour toi, je te rappelle que tu es très convoité de même que Malefoy et Nott.
- Oh le mariage ce n'est pas pour moi, dit Blaise en s'enfonçant dans son fauteuil. Etant un garçon, je peux avoir quelques années de sursis.
- J'avais oublié que notre société est un brin misogyne, soufflais-je exaspérée.
- Que veux-tu, nous vivons avec des lois écrites il y a plus de 1000 ans. A cette époque les femmes étaient à leur véritable place, répond ce dernier en plaisantant.
- Tu deviens désagréable Zabini, dis-je blasée.
- J'espère que ta compagnie sera un peu plus chaleureuse ce soir. Surtout que Drago sera là !
- Et donc ? Répondis-je.
- Rien du tout, dit Blaise avec un sourire en coin. Je disais ça pour t'informer.
- J'ai l'air concernée ? Demandais-je d'un ton froid.
- Attention Little Greengrass, c'est toi qui deviens désagréable, conclut Blaise avec un clin d'œil.
Notre discussion s'arrête là, Daphné ayant finalement choisie sa robe, aidée de Pansy. Nous saluons nos amis puis retournons au Manoir.
Ai-je besoin de signaler que Daphné n'est plus amoureuse de Malefoy depuis longtemps ? J'en ai été la première surprise tant le béguin qu'elle avait pour lui était fort. Pourtant il n'existe plus.
Je n'ai pas reparlé à Malefoy depuis la fin de ma quatrième année. Non pas que je ne souhaite pas lui parler, mais nous ne sommes pas réellement croisés. Lors de la Bataille Finale, il m'a à un moment aidé en s'occupant du Mangemort qui essayait de m'attaquer par derrière, mais il s'est volatilisé avant que je puisse le remercier.
Je n'en veux pas à Drago. Je n'ai pas fait de croix sur son comportement passé mais je pense que tout le monde mérite une seconde chance. L'enfer qu'il a vécu auprès de Voldemort est une punition suffisamment cruelle pour ne pas que j'en rajoute avec mes préjugés. Harry Potter lui-même a défendu Malefoy et je crois que ce geste les a rapprochés puisque j'ai lu récemment un article disant que Harry et Drago avaient été vus ensemble en train de boire un verre. Surprenant mais pas impossible.
-Astoria ! Hurle une petite voix en me courant dans les bras.
- Coucou mon ange, dis-je en embrassant le sommet du crâne de mon petit frère.
Naos Greengrass. La fierté de nos parents. Ce bout de chou âgé de 3 ans est celui qui m'a permis de m'en sortir suite à la dépression que j'ai vécu au sortir de la guerre. Naos est un enfant incroyable. Ses grands yeux bleus reflètent son intelligence et l'amour immense qu'il nous porte à nous, sa famille. Déjà bébé il était calme, préférant jouer sagement dans son coin ou observer les scènes qui se passaient sous ses yeux. Il ne pleurait pratiquement jamais, préférant sourire et gazouiller sagement dans son berceau.
Sa naissance a apporté une seconde jeunesse à mes parents. Les instincts maternels de Mère se sont réveillés de nouveau tandis que Père a sombré dans la joie immense d'avoir un garçon. Je peux le dire : Père que j'ai toujours connu noble et droit est devenu un papa gaga de son bébé. Bien entendu, cela dans l'intimité de la demeure et en présence seule de Naos.
Naos signifie Navire et est l'une des étoiles les plus petites de la Voie Lactée. Les petits Naos sont des êtres solides, rares et précieux, ce qui définit parfaitement mon petit frère. Ainsi Naos a été le navire qui nous a permis de survivre dans la tempête qu'a été la guerre.
-Astoria, gémit mon petit frère en levant vers moi ses yeux innocents. Est-ce que je peux venir aussi ce soir ?
- Je suis désolée mon ange mais c'est une soirée pour les grands, répondis-je.
- Mais j'ai bientôt 4 ans, grogne Naos.
- Quand tu auras 16 ans tu pourras venir avec nous, pour l'instant c'est l'heure d'aller au bain, dis-je en le poussant vers les escaliers.
- D'accord, bougonne une dernière fois le petit garçon avant de se précipiter dans les bras d'un de nos elfes de maison.
- Gypsie, je te laisse t'occuper de Naos.
- Bien maîtresse, répondit celui-ci en s'inclinant.
Mais je n'ai pas le temps de m'avancer que Daphné me lance :
- Je t'ai laissé tranquille pour la robe mais je ne te lâche plus, déclare-t-elle avec un sourire calculateur. Je m'occupe de toi ce soir !
Oh non par Merlin ! Je sens que la soirée va être longue...
