Chapitre 3

Salle de chant, Glee Club, McKinley High School, Lima :

Depuis qu'elle avait trouvé le courage d'avouer à Brittany ce qu'elle ressentait, Santana se sentait beaucoup plus légère, comme si un poids invisible s'était enfin délogé de ses épaules frêles et fragiles. Son esprit, bien plus serein, avait trouvé le sommeil beaucoup plus rapidement que ces derniers jours, voire même, que ce dernier mois tout entier et jamais, au grand jamais, l'hispanique n'avait eu l'impression d'être aussi reposée. Peut-être que l'honnêteté avait du bon, finalement.

La tension qui avait régné dans toutes les pièces où elles s'étaient trouvées durant ses deux premiers jours de la semaine était considérablement redescendue et, à en juger par l'attitude bien plus décontractée de tous leurs camarades, ceux-ci devaient également le ressentir. Rien n'était encore totalement rentré dans l'ordre et plusieurs chaises les séparaient encore l'une de l'autre, mais Santana était soulagée de pouvoir dire qu'elles avaient fait un pas en avant.

Le mercredi était une journée particulière. Si en temps normal, toutes les réunions du Glee Club avaient lieu durant un temps extra-scolaire, chaque mercredi, la première heure de cours était consacrée aux différents clubs de l'établissement. Il s'agissait donc réellement du seul moment dans la semaine où les différents élèves étaient particulièrement frais. Et en général, c'était également ce jour-là que chacun d'entre eux faisait quelque chose de, soit totalement stupide, soit totalement fou. Et au plus grand damne de Santana, ce mercredi-là ne semblait pas déroger à la règle.

Pour la première fois dans l'histoire du Glee Club, Mr Schuester était en retard de plusieurs minutes. Mais aucun d'eux ne s'en plaignait, non. C'était le parfait moyen pour ceux qui avait du sommeil à rattraper de somnoler sans se faire remonter les bretelles.

En détaillant tour à tour l'ensemble de ses camarades avec intérêt, le regard de Santana s'arrêtait quelques secondes de trop sur le crâne à la chevelure blonde et généreuse de Brittany, assise un peu plus à sa gauche, sur la rangée intermédiaire de leur estrade. L'adolescente avait dû sentir ce regard sur elle puisque, presque qu'aussitôt, elle s'était retournée et ses prunelles avaient rencontrées celles, foncées et pétillantes, de Santana. Alors, un véritable sourire avait étiré les lèvres de la cheerleader et, avant même qu'elle ne puisse penser à détourner le regard, l'hispanique lui avait rendu un sourire tendre, témoin de son amour désormais dévoilé. Et sûrement seraient-elles restées ainsi, à s'observer avec autant de convoitise que de tendresse si Mr Schuester n'avait décidé de choisir ce moment pour faire son entrée, attirant ainsi le regard de Brittany et de la plupart d'entre eux sur lui.

- Bonjour les jeunes, désolé du retard.

- Je rêve ou je viens de te voir sourire à Brittany ? S'enquit Quinn dans un murmure, à l'oreille de sa meilleure-amie. Est-ce que ça veux dire que vous avez enfin fait la paix ?

Peu intéressée par les excuses de leur enseignant, l'attention de Santana se laissait happée par la question de la blonde à ses côtés.

- Non, répondit l'hispanique dans un haussement d'épaules désinvolte. Je lui en veux encore si c'est ta question.

- Mais... ? Insista Quinn avec un petit sourire en coin.

La co-capitaine des cheerleaders n'était pas bête, elle avait bien remarqué que sa nouvelle colocataire semblait beaucoup moins tiraillée que ces derniers jours. Le matin-même, Santana s'était permise une réflexion désobligeante sur sa façon de se coiffer et, bien que la jeune Fabray n'avait pas manqué de lui répondre, elle avait été heureuse de constater que la brune redevenait fidèle à elle-même. Et maintenant qu'elle avait surpris cet échange de sourire, Quinn était intimement persuadé que ce soudain revirement de comportement venait de là. Elle ne comptait donc pas lâcher le morceau avant de tout savoir.

- Mais on a discuté et j'ai décidé de passer outre ma colère pour voir où ça va nous mener.

- Ça ressemble plutôt à un début de pardon, approuva la blonde dans un hochement de tête. Est-ce que ça veux dire que tu as trouvé ce que tu allais lui chanter ?

- Je ne suis pas encore sûre, avoua Santana en frottant ses mains moites sur son jean.

Quinn hocha la tête en signe d'approbation, sans se départir de son sourire en coin. Elle était réellement contente de savoir que son amie hispanique avait réussi à mettre ses différends de côté vis-à-vis de Brittany car, même si elle n'en avait pas parlé aux deux concernées, elle vivait assez mal cette situation. Santana était sa meilleure-amie, pour ne pas dire sa sœur étant donné les circonstances, mais Brittany était tout aussi importante pour la blonde. Etre ainsi partagée entre les deux la mettait constamment en porte à faux et s'il y a bien une chose qu'elle ne voulait pas, c'était que l'une puisse penser qu'elle prenait le parti de l'autre. Quinn tenait à rester aussi neutre que la Suisse dans cette petite guerre amicale... ou amoureuse.

- Santana ? Sam ? Vous êtes les seuls à ne pas être encore passés, est-ce que l'un de vous à une chanson à nous interpréter ?

L'énonciation de son prénom avait fait sursauter l'adolescente hispanique. D'un geste vif, son regard s'était ancré dans celui du professeur Schuester qui l'observait, prise en flagrant délit d'inattention. En réalité, la jeune femme savait exactement ce qu'elle voulait chanter pour cette leçon de la semaine, mais elle ne souhaitait pas le faire tout de suite, d'une manière si simple que celle qui lui était proposé. Santana Lopez avait bien trop de classe pour faire les choses comme tout le monde. Et tandis qu'elle ouvrait la bouche dans une initiative de se dérober, Sam, lui, se levait de sa chaise avec un sourire charmeur.

- Oui, moi je suis prêt, Mr Schuester, annonça-t-il en récupérant le micro posé sur le piano au centre de la pièce.

- Alors on t'écoutes.

Sans plus de cérémonie, l'enseignant avait rejoint l'une des chaises au premier rang et s'y était installé pendant que l'adolescent blond indiquait aux musiciens quelle chanson jouer.

- C'est une chanson un peu spéciale mais étant donné que j'ai une demande à faire, je pense qu'elle est pertinente.

Mr Schuester hochait la tête à cette explication, comme il en avait l'habitude, alors que quelques murmures se faisaient entendre dans l'audience. Les premières notes de The Truth, initialement interprétée par James Blunt, s'élevaient aussitôt dans les airs et le cœur de Santana se retourna dans sa poitrine. Pourquoi fallait-il que toute leur chorale se mette à reprendre des chansons qu'elle appréciait et qui éveillaient en elle des sentiments bien trop forts ? Il lui suffisait de regarder avec un peu d'insistance son camarade pour qu'un haut-le-cœur ne la prenne tandis qu'elle le voyait s'adresser directement à sa prétendante à travers les paroles.

Jamais, Santana n'avait vécu trois petites minutes avec autant de ressentiment et de dégoût que ce jour-là. Son organe palpitant lui faisait mal, au même titre que son estomac noué et l'ensemble de sa raison lui criait de sauter de sa chaise pour arrêter cette prestation qu'elle jugeait déplacée, mais pourtant, elle était restée assise-là, sur le dernier rang de chaises, les muscles figés et le visage crispé.

Puis, exactement comme elle s'y était attendue, Sam avait terminé sa chanson et s'était approchée un peu plus près de sa belle cheerleader avec un sourire assuré. Et au fond, le plus dur pour Santana n'avait pas été ce qui avait suivi, non, mais de constater la confiance et le courage que Sam avait de faire cette chose qu'elle aurait tant aimé faire mais qu'elle jugeait bien trop folle.

- Brittany, l'avait-il interpellée bien qu'elle l'observait déjà avec un sourire qui aurait pu illuminer le monde entier, veux-tu m'accompagner au bal, vendredi ?

Le cœur de Santana s'était arrêté de battre. A cet instant, si on lui avait offert la possibilité de faire ce qu'elle souhaitait, elle était convaincue qu'elle aurait remonté le temps pour changer tout ce qui n'allait plus dans sa vie. Sûrement n'aurait-elle pas repoussé Brittany un mois plus tôt. Probablement n'aurait-elle pas fait son coming-out auprès de ses parents. Et très certainement se serait-elle assurée que la blonde l'accompagne, elle, au bal plutôt que qui que ce soit d'autre. Mais la dureté de la réalité la rattrapait alors que le sourire de Brittany ne se ternissait pas et qu'elle comprenait que celle qu'elle aimait était sur le point d'accepter cette proposition.

Par chance, comme si l'univers avait voulu la sauver du pétrin dans lequel elle était fourrée, la sonnerie du lycée s'était mise à retentir dans les salles de classe. Dans un éclair de précipitation, sans même réfléchir à l'impression que tout cela allait donner, Santana s'était levée de sa chaise et avait pris la poudre d'escampette, sous les regards surpris de chacun des élèves présents dans la salle de chant.

Une seconde de plus à voir Sam et Brittany ainsi et la brune était intimement persuadée qu'elle aurait rendu l'entièreté de son déjeuner. Courant à perdre haleine dans le couloir principal, toutes les émotions qu'elle ressentait se mélangeaient, lui donnant à la fois la terrible envie de fondre en larmes et de hurler sa colère. Mais ses poumons manquaient d'air, si bien qu'elle se sentait suffoquer et, avant qu'elle ne comprenne réellement ce qui lui arrivait, elle était assise dans la cour, les jambes repliées en position fœtale contre sa poitrine, au détour d'un mur. Pourquoi l'amour faisait-il si mal ?

oOoOoOo

Cours d'Espagnol, Salle 100, McKinley High School, Lima :

- Je crois que je ne t'avais jamais vue courir si vite, murmura Quinn avec un brin d'humour. Santana Lopez qui prends la fuite, ça va faire la Une du journal du lycée.

- Je ne me suis pas enfuie, nia avec mauvaise fois la brune en levant les yeux au ciel. J'avais envie de vomir. Il fallait que je sorte.

Le visage de la jeune Fabray s'égayait un peu à cette réplique. Santana était un véritable phénomène. Chaque fois que Quinn pensait tenir le bon bout, la brune trouvait la bonne répartie pour continuer à la faire tourner en bourrique et, si elle devait se montrer totalement honnête, la blonde appréciait ce petit jeu du chat et de la souris qui s'était installé entre elles. Et loin d'elle l'idée de rester connectée au cours d'espagnol dispensé par Mr Schuester qui avait commencé depuis un bon quart d'heure désormais.

- Oui, rétorqua-t-elle sur le ton de l'évidence, tu avais envie de vomir car tu es jalouse.

- Je suis dégoûtée, rectifia Santana en levant les yeux au ciel. Je suis sortie avec Bouche de Mérou.

Quinn retint de justesse le rire qui menaçait de quitter ses lèvres. De toutes les excuses que la cheerleader aurait pu trouver, celle-ci était définitivement la plus amusante. Et pour cause, Santana n'avait jamais eu aucun sentiment envers le blond dont elle s'était servie dans le simple but d'embêter sa meilleure-amie. D'ailleurs, cette histoire avait longtemps jeté un froid entre elle et Quinn, mais la blonde avait finalement pardonné à la brune de s'être comportée ainsi car Santana avait de bonnes raisons de le faire.

- Oh arrêtes, pouffa la co-capitaine, tu n'en as jamais rien eu à faire de Sam. Ce qui te dégoûte c'est l'idée que Brittany puisse sortir avec quelqu'un d'autre que toi.

- Tais-toi.

La dureté qui avait habité ses deux petits mots avaient fait frissonner Quinn. D'un simple regard appuyé de la part de Santana, le sang de la blonde s'était glacé dans ses veines. Si la brune avait l'habitude de faire des menaces à tout va, ce qui n'effrayait plus personne, cette fois, c'était différent. Toute la loquacité qui accompagnait ses paroles meurtrières avait disparue et, à cet instant plus qu'à n'importe quel autre, Quinn savait qu'il valait mieux qu'elle n'ouvre plus la bouche. Alors, peut-être que si la situation avait été différente, la blonde aurait quand même pris le risque de créer un conflit mais elle ne pouvait décemment pas le faire en sachant que son amie n'avait plus personne pour la soutenir hormis les Fabray.

Un long silence s'était alors abattu entre elles et après un dernier échange de regard, leurs attentions s'étaient recentrées sur le cours de langue étrangère qu'elles étaient censées suivre. Mais à vrai dire, elles n'étaient jamais très assidues durant ces leçons. Quinn avait de très bons résultats scolaires mais n'aimait pas spécialement la matière, alors que Santana, elle, avait l'avantage d'être bilingue et de parler aussi bien l'espagnol que l'anglais.

Pourtant, pendant tout ce temps, la brune avait distraitement été pendue aux lèvres de son professeur dont elle ne comprenait pas l'accent tant il était mauvais. Puis, dans cette atmosphère tendue, Santana avait d'abord remonté son stylo jusque sa bouche pour le mordiller avec anxiété avant de le reposer délicatement sur son cahier. C'était toute la durée qu'il lui avait fallut pour enfin se décider à faire quelque chose qu'elle regretterait sans aucun doute quelques secondes plus tard, mais dont elle avait irrémédiablement besoin pour se sentir mieux. Et ce, même si ça allait contre toutes les convictions qu'elle avait et contre tout ce qu'elle s'était efforcée à faire jusque là pour garder son secret privé.

- Est-ce qu'elle a accepté ?

Ne s'attendant pas à cette question murmurée à demi-mots, presque inaudible, Quinn avait froncé les sourcils. Dans un mouvement aussi long que le silence précédemment établi, la blonde avait alors reporté son regard sur le visage aux traits tirés de sa meilleure-amie, qui évitait avec précaution d'établir un contact visuel. Et pendant un instant, Quinn avait était persuadée avoir rêvé tant Santana était restée immobile, à fixer leur enseignant comme s'il était porteur de paroles d'évangile. Ce n'est que lorsque la brune avait osé lui lancé une œillade incertaine que la blonde avait compris que non, elle n'avait pas inventé les paroles qu'elle avait entendu.

- Je ne sais pas, avoua Quinn avec un sourire désolé. J'étais trop occupée à te courir après pour attendre sa réponse.

Tout aussi imperceptiblement que l'avait été sa question, Santana avait hoché la tête avec un air plus triste et, aussitôt, le cœur de la blonde se serrait dans sa poitrine. Sans réfléchir plus longtemps, la jeune Fabray avait spontanément déposé sa main sur celle de son amie, posée à plat sur leur table dans un geste de soutien et de réconfort qui attira le regard peiné de la brune dans le sien. Quinn ne savait pas vraiment ce qui venait de se passer dans l'esprit de Santana pour que celle-ci ne décide de lui laisser entrevoir une part de la vérité cachée du problème qui l'habitait, mais elle était heureuse que celle-ci ait eu le cran de le faire.

- Si tu veux le savoir, il va falloir que tu lui demandes toi-même, annonça-t-elle avec douceur en serrant la main de Santana dans la sienne. Mais je suis sûre que si tu lui laissais le choix, ce n'est pas avec Sam qu'elle irai au bal.

Un petit sourire crispé étira les lèvres de l'hispanique alors qu'elle se soustrayait doucement au contact de la main de Quinn sur la sienne, par malaise.

- Ouais, soupira-t-elle en piteusement baissant la tête, avant de faire preuve d'énormément de sincérité. Mais je ne peux juste pas le lui offrir. Je ne suis pas prête pour ça.

- Je sais, acquiesça la blonde avec une tolérance que Santana n'avait pas espérée. Je sais, San.

oOoOoOo

Salle de chant, Glee Club, McKinley High School, Lima :

De retour dans la salle de chant du Glee Club, Santana avait le cœur aussi gros que lorsqu'elle l'avait quitté en courant, ce matin-là. Sa petite conversation avec Quinn l'avait retournée plus qu'elle n'avait eu pour effet de la soulager et, finalement, l'hispanique aurait préféré qu'elle n'ait pas lieu. Désormais, sa co-capitaine était au courant de son secret, quand bien même tout le monde l'avait déjà deviné, et en plus de cela, elle n'avait pas réussi à avoir la réponse à la chose qui la tourmentait le plus.

Toutefois, son esprit lui rappellait aussitôt qu'elle n'avait pas tout perdu lorsque son regard se posait sur la tête blonde de Brittany qui l'attendait, accoudée au piano de la pièce en mordillant un crayon de couleur. Face à cette scène attendrissante, les pensées négatives de Santana la quittaient pour un sentiment plus positif et un sourire amusé. La brune n'avait jamais compris pourquoi son amie s'évertuait à écrire au crayon de couleur comme le faisait les enfants alors qu'elle était déjà âgée de dix-sept ans, mais elle était incapable de trouver ça stupide comme la plupart de ses camarades. Au contraire, la seule chose que lui évoquait ce trait juvénile était de l'émerveillement, car Brittany était définitivement la personne la plus incroyable qu'elle n'avait jamais rencontré.

Le grincement de l'ouverture de la porte de la salle de chant avait attiré l'attention de la blonde et avait fait naître un sourire sur ses lèvres à peine ses yeux furent-ils posés sur le visage au teint basané de son ancienne meilleure-amie, et amante, aussi court cela fût-il.

- Tu penses qu'on peut vraiment organiser le bal dans le cimetière de Lima ? S'enquit cette dernière avec tellement de sérieux que le sourire de Santana se fit plus grand encore.

- Non, s'en amusa-t-elle en s'accoudant à son tour au piano, face à la blonde, je ne suis pas sûre que Mr Figgins approuve cette idée.

Brittany lâchait un soupir déçu à cette annonce. Elle aimait vraiment bien cette possibilité, pourtant.

- Mais ça aurait un bon côté, souleva Santana en haussant les épaules avec nonchalance. Je pourrais tuer tout ceux que je n'aime pas, à commencer par cet idiot de Bouche de Mérou et enterrer tous les cadavres à leurs places. Franchement, ça faciliterait considérablement le boulot des croques-morts.

Contrairement à ce qu'elle avait espéré en prononçant ces dernières paroles sur un ton un peu plus humoristique, bien qu'elle le pensait réellement, Brittany ne trouvait visiblement pas ça très drôle. La blonde s'était empressée de secouer la tête avec un air véritablement horrifié tandis que son crayon de couleur quittait sa bouche et l'hostilité des dents qui le mordillait.

- Oh non, tu ne peux pas faire ça, Santana, assura-t-elle avec gravité. Tu iras en enfer sinon et on pourras jamais être ensemble au paradis.

- Tu sais que selon la Bible, on ira toutes les deux en enfer, de toute manière ? Demanda l'hispanique en levant un sourcil dubitatif. C'est ce qui arrive aux personnes homosexuelles si on en croit la religion.

Cette information, qu'elle n'était pas sûre de comprendre, fit se froncer les sourcils de Brittany. Pourquoi Santana lui disait quelque chose de si horrible ? Elle n'avait pourtant jamais entendu nulle part qu'aimer quelqu'un était mal. Et puis, pourquoi ne pourrait-elle pas aimer une autre fille alors que les garçons en avait le droit, eux ? C'était particulièrement injuste, pensait-elle.

- Mais Dieu aime tout le monde, contra-t-elle avec incompréhension. C'est Lord Tubbington qui me l'a dit. Alors il doit forcément être d'accord pour que l'on s'aime aussi.

Un nouveau sourire attendri étirait les lèvres de Santana tandis qu'elle entendait les paroles de celle qu'elle aimait. Le monde dans lequel la blonde vivait était merveilleux. L'hispanique aurait aimé pouvoir y vivre, elle aussi, et ne plus être confrontée ainsi à la cruauté de celui qui les entouraient. Mais il fallait bien que quelqu'un protège Brittany de sa dureté lorsqu'elle quittait son univers de douceur et d'amour permanent.

Puis, alors qu'elle observait simplement les traits de nouveau concentrés sur l'organisation de leur bal de la blonde, Santana se souvenait de ce qui l'avait tourmentée jusqu'à ce qu'elle arrive dans cette salle. Le visage de Sam s'insufflait dans son esprit, parasitant subitement le bonheur et l'amour qui gonflait son cœur pour le ternir de douleur. Les paroles de Quinn firent alors écho dans son esprit et un soupir empli de déception quittait ses lèvres. Le moment était venu pour la brune de savoir si son amie était soudainement devenue chasse gardée ou non.

- Je ne pensais pas que Bouche de Mérou possédait un côté si théâtral, amorça-t-elle sur un ton qu'elle voulait désinvolte mais qui ne l'était pas, en réalité. Tu vas l'accompagner au bal ?

Sans relever son attention de la feuille posée devant elle, un petit sourire en coin naquît sur les lèvres de Brittany. Pendant un instant, elle avait cru que Santana n'aurait pas le courage de le lui demander, mais elle était plus qu'heureuse que celle-ci l'ait fait.

- Non. Mais tu l'aurais su si tu étais restée.

- Tu as refusé ? S'étonna l'adolescente en fronçant les sourcils. Mais pourquoi ?

Le silence retombait dans la pièce tandis que le sourire de Brittany s'agrandissait sincèrement. La blonde remontait alors son visage pour rencontrer les pupilles brunâtres et profondes de son amie et eût un instant d'hésitation avant d'oser se saisir de la main de Santana, posée sur le piano. Instantanément, les muscles de la brune se crispaient et une lueur d'incertitude prenait possession de ses iris sombres. Néanmoins, elle ne soustrayait pas à la poigne tendre, mais ferme, de la blonde, pour la plus grande satisfaction de cette dernière.

- Parce qu'il n'y a qu'une personne avec qui je veux y aller, avoua Brittany avec énormément d'évidence. Toi.

La tension qui habitait toutes les atomes de Santana se fit plus importante alors que son regard déviait du visage de sa belle pour se poser sur leurs mains liées. Quelques secondes passèrent ainsi, durant lesquelles, prise d'audace, la blonde avait entreprit de caresser tendrement le dos de la main de la brune avec son pouce, faisant naître un important frisson le long des leurs deux échines.

- S'il te plaît, Santana, dis oui.

La concernée relevait aussitôt la tête et s'autorisait à retrouver le contact visuel qu'elle avait rompu, laissant à son interlocutrice tout le loisir de déceler la peur et la tristesse qui régnait dans ses prunelles brunes. Brittany n'avait pas besoin d'entendre la réponse de celle qui faisait battre son cœur pour la connaître, toutefois, une pointe d'un espoir vain résidait toujours dans son cœur.

- Je ne peux pas, Brit, déclara sans surprise la brune. Je suis désolée.

Brittany poussait un soupir et baissait piteusement la tête tandis que, le cœur gros, Santana osait à son tour serrer la main de la cheerleader dans la sienne.

- Je t'aime, Brittany. Sincèrement. Mais j'ai encore besoin de temps et si je suis ta cavalière pour le bal, tout le lycée sera au courant.

Sans se départir de son air triste, la blond avait eu le courage de redresser le visage pour offrir à l'hispanique un sourire teinté de compréhension. Mais malgré tout, Santana ne fût pas soulagée. Elle se sentait juste un peu plus coupable tandis que la blonde venait sécher une larme coulant le long de sa joue à l'aide de sa main libre, et s'atteler à repousser toutes celles qui brillaient dans ses beaux yeux bleus.

- Est-ce qu'on peut... au moins redevenir amies ? S'enquit-elle avec trémolo. Notre insoutenable trinité me manque.

Face à tant d'honnêteté et de sincérité, un petit sourire se dessinait sur les lèvres de Santana. Et dans un geste spontané et totalement irréfléchi, la brune avait contourné le piano et avait attiré son amie dans une étreinte qui se voulait amicale, mais qui ne l'était pas réellement au vu des sentiments forts qui les habitaient, faisant battre leurs cœurs beaucoup plus rapidement que la normale.

- On sera toujours amies, Brit. Toujours.

oOoOoOo

Cafétéria, McKinley High School, Lima :

La réunion d'organisation du bal terminée, Santana et Brittany s'étaient dépêchées de rejoindre Quinn au réfectoire afin d'avoir une table bien placée dans leur minuscule cantine. L'atmosphère légère, deux sourires ornant leurs lèvres, la jeune Fabray s'était étonnée de les voir arriver ainsi, au même titre que chacun des membres du lycée McKinley. Toutefois, dès lors que les deux adolescentes prirent place aux côtés de leur amie commune, tout l'étonnement qui avait saisi celle-ci se transformait en gaieté. Deux jours et demi. Seulement deux jours et une matinée et voilà que Santana et Brittany avait déjà enterré la hâche de guerre. Ce qui paraissait rapide pour la plupart avait semblé interminable pour les membres du Glee Club et, heureusement, ils n'auraient désormais plus à se soucier de la petite querelle entre les deux cheerleaders.

- Ça fait plaisir de vous revoir assise l'une en face de l'autre pour déjeuner, leur lança Quinn avec sincérité. Nos moments ensemble m'avaient manqués.

Brittany hocha furtivement la tête et se pencha vers l'avant pour récupérer une tomate dans la salade de Santana. La blonde avait toujours eu l'habitude de piocher dans l'assiette de sa voisine et elle était bien la seule personne que la brune laissait faire. Cette scène, qu'elle avait presque oubliée, fit sourire Quinn autant que Santana qui ne parvenait pas à détacher son regard de l'adolescente face à elle.

- Les tomates ont toujours eu un goût bizarre ici, releva Brittany en fronçant les sourcils.

- Alors pourquoi est-ce que tu les mangent ? S'enquit Santana avec un amusement non dissimulé.

- Parce qu'elles sont dans ton assiette et que tu ne les aiment pas, déclara la blonde sur le ton de l'évidence.

Le sourire de Santana s'agrandissait, un peu plus attendri qu'il ne l'était déjà.

Soudain, alors qu'elle s'apprêtait à répondre, un raclement de gorge près d'elle attirait l'attention des trois membres des Cheerios. Refermant la bouche, légèrement irritée d'être ainsi interrompue dans son élan, Santana tournait la tête vers la gauche et découvrait le jeune importun qui la dérangeait.

Le dos droit, un sourire charmeur sur le visage, David Karofski, l'un des garçons les plus populaires du lycée, la regardait avec une lueur de convoitise dans le regard. Haussant un sourcil, Santana détaillait le jeune homme du regard, en silence. Elle ne savait pas pourquoi il était là, quoi qu'elle en avait bien une petite idée tout de même, mais sa simple présence la révulsait. Sans qu'elle ne puisse s'en empêcher, son nez se retroussait sous le dégoût dès qu'il ouvrait la bouche et laissait sa voix rauque fendre l'air.

- Salut, Santana, l'interpella-t-il avec une assurance surjouée. Je me demandais si tu voulais bien m'accompagner au bal, vendredi soir. Je sais que tu n'as pas encore de cavalier.

- Attends... quoi ? S'étonna-t-elle. Qu'est-ce que tu viens de dire ?

- Est-ce que tu veux m'accompagner au bal, vendredi soir ?

En premier lieu, l'hispanique avait cru qu'il plaisantait. Vraiment. Mais il lui suffisait de rester silencieuse quelques secondes et de jeter un coup d'œil à toutes les personnes qui les avoisinaient pour se rendre compte que David était plus que sérieux. Un long silence s'était installé dans la cafétéria tandis que toutes les têtes alentours les épiaient, avides de connaître la réponse qu'allait donner Santana à son apollon.

La brune savait exactement ce qu'elle allait répondre au footballeur, pourtant, avant de dire quoi que ce soit, elle avait osé jeter un coup d'œil vers Brittany qui s'était subitement arrêtée de mâcher la tomate qu'elle venait d'engloutir. Un air triste sur le visage, la blonde s'était figée sur la scène qui se déroulait devant elle, si bien qu'elle avait toujours son bras en l'air et une autre petite tomate entre deux de ses doigts.

En voyant cela, le cœur de Santana se serrait douloureusement au creux de sa poitrine. Cela faisait deux fois en une heure que Brittany souffrait de son incapacité à assumer ce qu'elle était et, pour ça, l'hispanique se sentait incroyablement coupable. Et en colère. Jamais la blonde n'aurait dû connaître cette peine alors qu'elle était toujours si bonne et si gentille avec tout le monde. Il était inconcevable pour elle de blesser davantage la femme qu'elle aimait, peu importe les circonstances. Et c'est la raison pour laquelle, le cœur à vif, Santana avait serré les poings sur la table devant elle et avait pincé les lèvres avec contrariété avant de laisser exploser toute la colère qui l'habitait.

- Je n'irai jamais au bal avec toi, déclara-t-elle avec une condescendance dont elle seule connaissait le secret, non mais tu t'es regardé ? J'ai un corps de rêve et toi... toi tu es aussi gros qu'un hippopotame. Je savais qu'il fallait être baraqué pour rentrer dans l'équipe de foot mais là, c'est pas des muscles qui te composent, c'est juste un gros tas de graisse.

Santana marquait une pause dans le simple but de reprendre sa respiration, sous les regards à la fois surpris et choqués des autres adolescents présents dans la pièce.

- Franchement, je dis ça pour toi mais tu devrais arrêter les chips au petit déj. T'auras qu'à revenir me poser la question quand t'auras perdu, je ne sais pas... vingt kilos ?

Dédaigneuse, la brune s'était retournée pour reporter son attention sur son plateau repas et, aussitôt, Brittany s'était lentement remise à mâcher sa tomate tandis que Quinn, elle, s'était retenue de pouffer de rire. Ce qui n'avait pas été le cas de beaucoup d'étudiants dans le réfectoire qui ne s'était pas fait prier pour se mettre à rire de la méchanceté de Santana. Mais contre toutes les attentes, David Karofski n'avait pas fait demi-tour en baissant piteusement la tête comme il le faisait tous en général. Bien au contraire.

Les poings serrés le long de sa taille, la mâchoire crispée, le jeune homme était resté un instant immobile à observer celle qui avait osé le recaler de la sorte. Comment avait-elle pu ? Il était l'un des plus prometteurs joueurs de l'équipe. Tout le monde voulait l'accompagner au bal. Alors pourquoi Santana ne le voulait-elle pas ?

Après quelques secondes passées ainsi, à se questionner sur la raison pour laquelle celle qu'il convoitait depuis quelques mois ne voulait pas de lui, il avait fini par comprendre. Ses poings s'étaient serrés un peu plus sous la colère naissante dans son abdomen tandis qu'il captait un timide échange de sourire entre les deux cheerleaders qu'il observait, puis un regard désolé et chargé d'une lueur puissante et éclatante qui ne trompait personne.

- Hey, Santana ? Interpella-t-il de nouveau en obligeant la brune à se retourner à contre-cœur. Tu n'aurais jamais dû refuser ma proposition. Je te promets que tu va le regretter pour le restant de tes jours.

Instantanément, un rire s'échappait de la bouche de la jeune Lopez. D'un coup d'œil plein de jugement sur l'entièreté de sa personne, l'adolescente haussait un sourcil dubitatif.

- Bien sûr, approuva-t-elle faussement en provoquant de nouveaux rires parmi ses camarades, c'est évident.