Cinq mois et demi plus tôt. Ce qu'il restait de résistants, après avoir plié bagages, s'était mis en route, sans regarder derrière eux. S'ils n'avaient pas quitté cet endroit au plus vite, ils seraient tous morts car, et c'était sûr, WICKED serait revenu d'un jour à l'autre pour achever ce qu'ils avaient commencé. Alors ils avaient tout chargé dans les voitures et les camions, et avaient mis les voiles deux jours après l'attaque. Quatre jours plus tard, ils avaient atteint la mer et, par chance, un vieux navire de l'armée se trouvait là, échoué. Vince avait décidé de le retaper, avec l'aide de quelques membres du Bras Droit. L'installation s'était faite rapidement, et peu à peu, grâce aux objets trouvés sur le navire, leur nouveau camp s'était agrandi. Deux semaines avaient été suffisantes.

Un jour de la troisième semaine qui suivit l'attaque du WICKED, les jeunes aidaient Vince et quelques autres hommes à retaper l'avant du bateau, Mélanie discutait avec Thomas et Fry. Newt et Blake se trouvaient un peu plus loin, mais écoutaient quand même la conversation, sans pour autant y participer.

- Tu sais, ce que je veux dire, c'est qu'il faudrait songer à chercher de la bouffe digne de ce nom. J'en reviens presque à regretter celle que nous avions au Bloc ! rouspéta Fry en dévissant des boulons rouillés.

- Samantha, à la Zone, cuisinait tellement bien les steaks que j'aurais pu en manger des tonnes d'une fois, continua Mélanie. Mais vois-tu, nous ne sommes plus dans les griffes du WICKED, et je préfère encore mourir de faim, que de recevoir une quelconque aide de cette bande de tocards.

- Ouais... T'as raison. Oubliez ce que je viens de dire ! soupira le cuisinier.

- Tu nous feras quoi de bon alors ce soir, Fry ? demanda Thomas.

- Tu verras ! Tu boufferas ce que tu auras dans ton assiette et tu t'en contentera. J'en ai toujours eu marre de cuisiner pour une trentaine de gars au Bloc, et je me retrouve à faire de même pour un groupe trois fois plus grand, râla le noir en y allant si fort avec le boulon qu'il s'écorcha le doigt.

Les autres rirent quand il cria des injures, et même Blake, d'habitude impassible, sourit. Le jeune garçon, si distant depuis le début de leur aventure, s'était un peu ouvert à eux après que sa mémoire lui soit partiellement revenue. En discutant avec lui, Mélanie avait appris qu'il subissait lui aussi des moments où la mémoire lui revenait. Quand elle lui demanda pourquoi personne ne l'avait jamais vu perdre connaissance, il lui avait répondu qu'il ne s'évanouissait pas comme elle. Mélanie ne comprenait pas pourquoi. Elle devait se préparer à chaque instant à une chute, et Vince lui avait interdit de monter sur une échelle ou sur quoi que ce soit en hauteur. Après des minutes entières de contre-argumentation de la part de la concernée, elle avait fini par céder. Donc, elle ne s'occupait que de choses auxquelles elle pouvait accéder en restant au sol. De fait, parfois, elle se retrouvait seule pendant que ses amis grimpaient sur échelles, escabeaux, caisses en bois empilées et autres hauteurs. En ce moment, elle avait de la chance. Ils étaient presque tous autour d'elle. Harriet seule manquait, occupée dans le camp à l'organisation.

- Dis nous Fry, si quelqu'un arrive encore en retard, est-ce que tu nous piqueras des crises comme au Bloc ? demanda soudain Mélanie.

Tout le monde autour d'elle se tourna vers Mélanie. Elle ne le remarqua pas directement, seulement quand elle se rendit compte qu'il n'y avait plus de bruit de ferrailles qui s'entrechoquent. Elle regarda Thomas, juste à côté d'elle, qui était le seul à ne pas la fixer bizarrement.

- Bah quoi ? Qu'est-ce que j'ai dis de mal ?

- Tu te souviens de mes crises de nerfs ?

- Et bien... Elles sont floues, mais je me souviens de l'une d'elle lorsque je construisais une cabane avec Gally et Roos parce qu'il y avait de plus en plus de Blocards. Nous n'avions pas vu l'heure et... Et... Oh non, les gars, j'ai la tête qui me tourne là...

À peine sa phrase terminée, qu'elle s'effondra de la caisse où elle était assise, rattrapée de justesse avant que sa tête ne frappe violement le sol.


Mélanie se voyait face à Janson, mais plus jeune. Elle était énervée.

- Mais quel plaisir prenez-vous à nous faire cela ? Pourquoi ?

- Pourquoi ci, pourquoi ça... Tu es une gamine énervante, Mélanie. Même quand tu aidais à construire ces labyrinthes, tu étais énervante. Si nous faisons cela, ce n'est pas par plaisir mais par nécessité. Tu as toujours été en sécurité avec nous, et tu nous as trahi. Mais ce n'est pas grave. Maintenant, tu continueras à nous aider, inconsciemment. Prépare-toi, Blake et toi allez bientôt mettre un pied dans les Labyrinthes.


La journée s'annonçait une nouvelle fois fructueuse. La Boîte venait de monter leur apporter les vivres de la semaines et Mélanie aidait à tout transporter. Newt à ses côtés, ils discutaient joyeusement. Les rares fois où Mélanie se trouvait au Bloc, tranquille avec seulement Newt autour d'elle, ils finissaient par être interrompu par l'un ou l'autre Blocard.

Mais cette fois-ci, ils s'étaient arrangés pour se retrouver vraiment seuls. Lorsque tout le monde était descendu chercher les provisions, leurs regards s'étaient croisés. D'un commun accord, ils avaient attraper les deux seules caisses qui devaient être rangée à l'autre bout du Bloc. Lorsque Newt et Mélanie arrivèrent à l'endroit du rangement, après avoir déposer les caisses, ils restèrent un instant à se regarder.

- Je n'en peux plus ! s'exclama soudain Newt en se redressant.

Avant que Mélanie ne puisse dire quoi que ce soit, le garçon avait fondu sur elle et plaqué ses lèvres contre les siennes. Il l'embrassait. L'information mit quelques secondes à arriver au cerveau de la Blocarde qui finit pas passer ses bras dans le cou du garçon pour approfondir le baiser. Depuis le temps qu'elle attendait ça. Ses doigts se perdirent dans les cheveux blond-roux de Newt. Ses cheveux qu'elle prenait un malin plaisir à tordre et à tirer entre ses doigts. Elle se perdait dans ce baiser. Enfin...


Mélanie se réveilla en sursaut. Elle sortit immédiatement de son lit et stoppa tout mouvements quelques instants, le temps de reprendre ses esprits. Elle avait eu plein de souvenirs. Tellement qu'elle était persuadée d'une chose. Elle se souvenait de tout ce qu'elle avait vécu au Bloc. Absolument tout. Lorsqu'elle n'eut plus la tête qui tournait, elle se précipita dehors et chercha celui qui avait hanté une bonne partie de ses "rêves". Elle demanda à ceux qu'elle croisait s'ils ne l'avaient pas vu, et tous lui indiquèrent le navire en réparation. Elle s'y précipita et le trouva, de dos, discutant avec Thomas et Frypan. Inspirant, la rousse s'approcha d'eux, attrapa l'épaule de son ami, le retourna face à elle et plaqua ses lèvres sur celle de celui qu'elle aimait. Surpris, Newt mit un moment avant de réaliser, faisant penser à Mélanie à leur premier baiser, puis il passa ses bras dans son dos et la serra contre lui. Contre son cœur. Après cela, Newt et elle se décollèrent et le jeune homme prit son visage entre ses mains.

- Pourquoi ?

- J'ai retrouvé tous mes souvenirs du Bloc. Tous. De notre rencontre à notre premier baiser et aux trois semaines qui ont suivit. Pourquoi ne m'as-tu pas dit que nous étions ensemble ?

- Par peur. Par peur que tu ne sois plus amoureuse de moi. Et puis, toi et Aris...

- Aris est mon meilleur ami, rien de plus. Depuis quelques semaines, Newt, depuis que je t'ai revu, j'ai un étrange sentiment. Je ne le comprenais pas, surtout que je n'avais pas cette sensation avec les autres. Mais toi... C'est différent, car beaucoup de choses se sont passées depuis notre dernière discussion au Bloc, mais on est encore nous. Malgré ma mémoire effacée, je retombais à nouveau amoureuse de toi. Et je t'aime, Newt.

Le garçon sourit en entendant la déclaration de son amie. Il la prit à nouveau dans ses bras, déposant un baiser dans ses cheveux. Elle sentait et entendait le cœur de Newt battre contre son oreille. Ses bras autour de son torse, elle se surprit à penser que c'était très guimauve et se détacha, toussotant, les joues rouges de gêne devant tout les autres, dont Vince. Celui-ci s'avança, demandant ce qu'il se passait.

- Mes souvenirs de lorsque je me trouvais dans le Labyrinthe A. Je me souviens de tout. Absolument tout. C'est un peu comme si... Comme si j'avais récupéré une partie de moi-même.

- Je comprends maintenant pourquoi ce fut si long... murmura le chef.

- Si long ? s'étonna Mélanie en regardant Newt, puis Thomas et Fry, à tour de rôle.

- Deux jours, Mélanie. En ne comptant pas la fin de celui où tu as perdu connaissance, et le début de celui-ci. Presque quatre. D'après ce qu'avait dit Aris, tu n'as jamais eu une crise aussi longue.

- Non. Celle du jour où nous sommes arrivé au camp avait été la plus longue. Vous pensez que cela est un bon ou un mauvais signe ?

- Je ne saurais le dire. Mélanie, il va falloir faire attention à toi, maintenant. Si tu as récupéré tout tes souvenirs du Bloc, tu vas bientôt récupérer ceux d'avant. Et c'est ceux-là qui te ferons le plus de mal...

- Je sais. Je m'y prépare. Je n'ai pas peur de mes souvenirs, j'ai simplement peur du moment où je les récupère. Imaginez-vous, si nous sommes à nouveau attaqués par WICKED, ou encore par les Fondus ? C'est dans ce cas-là que j'ai peur de retrouver mes souvenirs, parce qu'alors, je sais que je serais un danger pour vous tous. C'est pourquoi je veux que vous me fassiez une promesse : si jamais je m'évanoui pendant une attaque, ne vous occupez surtout pas de moi. Ignorez moi, et sauvez votre peau. Pas la mienne.

- Tu rigoles ? Tu ne crois quand même pas que nous allons t'abandonner ?

- Non, c'est pour ça que je prends les devants en vous demandant de le faire. Je VEUX que vous fassiez tout pour vous protéger vous, non moi.

S'en suivit une véritable bataille verbale pour savoir qui aurait le dernier mot. Newt refusait catégoriquement de faire une telle promesse, car il ne souhaitait pas abandonner celle qu'il aimait. Mélanie s'était énervée sur ses amis, leur disant que si jamais une situation pareille arrivaient et qu'ils parvenaient à la sauver, elle préférait mourir que d'être responsable de la mort de ses amis. Elle ne chercha même pas à discuter plus longtemps et quitta le bateau d'un pas lourd.

Le soir même, l'heure du repas venu, personne ne la vit arriver. Newt se dépêcha de finir son assiette qui, de toute façon, n'était pas bien fournie faute de moyen, et s'en alla en direction de la tente que la jeune fille partageait avec Harriet et Brenda. Il écarta un pant de tissus qui servait de porte et vit son amie allongée sur son lit, lisant un livre. Il s'approcha d'elle sans vraiment faire attention à être silencieux ou non. Mais visiblement, Mélanie ne l'avait ni vu, ni entendu, car elle sursauta en le voyant s'asseoir sur la chaise à côté d'elle. La jeune fille le regarda un instant avant de replonger dans sa lecture. Soit, Newt ne s'en formalisa pas, si bien qu'il décida de rester là, attendant le bon vouloir de son amie. Amie qui, au bout de quelques minutes, abaissa son livre, énervée, et le regarda.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

- Je suis venu discuter, calmement. Et aussi t'apporter de quoi manger.

- Merci, mais je n'ai pas faim, Newt.

- Mel, si tu pouvais ne pas être froide, ce serait gentil. Ce matin tu viens m'embrasser à pleine bouche et maintenant, tu es distante, voir méchante.

- Newt, sache que je ne suis pas méchante. Je ne supporte simplement pas l'idée que tu puisses risquer ta vie pour moi !

- Si ce n'est pour ma petite amie, pour qui le ferais-je alors ?

Mélanie beugua à la qualification que lui avait donné Newt. Elle le regarda un moment, rouge, et s'assit sur son lit. Elle lui demanda si tout pouvait redevenir comme à l'époque du Bloc entre eux, et pour confirmer, Newt se leva, se pencha sur Mélanie et l'embrassa en passant sa main sur sa joue. Puis il la fit se recoucher, suivant le mouvement en ne décollant pas leurs lèvres.